Intervention de Éric Dupond-Moretti

Réunion du 6 avril 2023 à 14h45
Loi de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements — Rejet d'une proposition de loi constitutionnelle

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur pour avis, monsieur le sénateur Kerrouche, mesdames, messieurs les sénateurs, je m'efforcerai d'être bref, afin que tous les orateurs inscrits aient le temps de s'exprimer.

Voilà maintenant quarante ans, avec la promulgation de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, que le mouvement décentralisateur a été engagé dans notre pays, dont on sait combien l'histoire politique est ancrée dans une tradition jacobine.

Mardi dernier, la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République soufflait ses vingt bougies. Voilà donc vingt ans que notre Constitution proclame que l'organisation de la République est décentralisée.

Je sais ce que cette proclamation signifie pour votre assemblée, dont nul n'ignore combien elle est attachée à la démocratie locale et à la représentation des territoires.

Ainsi, sur l'initiative du président Larcher, le Sénat a formé un nouveau groupe de travail sur la décentralisation, représentatif de tous les groupes politiques de cet hémicycle. Je veux rendre hommage à cette initiative.

Déjà, les sujets de préoccupation apparaissent. Le président Larcher les a d'ailleurs évoqués publiquement : il s'agit, en particulier, des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales et de l'approfondissement de la différenciation territoriale. Le Gouvernement est particulièrement à l'écoute des réflexions sur ces sujets.

Sur l'initiative du Président de la République, plusieurs réunions de travail ont été organisées avec les associations d'élus locaux, afin d'échanger sur les enjeux d'une réforme institutionnelle, notamment en vue d'un renforcement de la décentralisation et de l'autonomie financière des collectivités.

Ces questions sont délicates et sensibles, mais les attentes sont claires : plus de clarté dans les compétences exercées, plus de proximité dans l'élaboration des solutions et plus de responsabilités aux collectivités, à la condition, bien sûr, que celles-ci disposent des moyens juridiques et financiers associés aux compétences transférées.

Les auteurs de cette proposition de loi constitutionnelle, tout comme Mme Agnès Canayer dans son rapport, exposent parfaitement les enjeux auxquels les collectivités sont actuellement confrontées, me semble-t-il.

Si le ratio d'autonomie financière des collectivités territoriales est aujourd'hui historiquement élevé – aux alentours de 70 % pour les communes, départements et régions –, certaines voix d'élus locaux s'élèvent pour demander davantage de visibilité sur leurs ressources financières. D'autres vont plus loin et appellent à une réforme des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales.

Par ailleurs, alors que l'article 72-2 de la Constitution prévoit que « tout transfert de compétences entre l'État et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice », certaines collectivités peuvent être confrontées à une forte augmentation de la charge que représente un transfert de compétences.

En réponse à ce problème, la proposition de loi constitutionnelle de M. le sénateur Éric Kerrouche a pour objet de créer une loi de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements, ainsi que de garantir la compensation financière des transferts de compétences, en instaurant un réexamen régulier des ressources transférées.

La création d'une loi de financement des collectivités territoriales a été proposée dans le rapport de MM. Lambert et Malvy d'avril 2014, ainsi que dans trois rapports de la Cour des comptes.

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