Dans le développement des énergies marines renouvelables, RTE est maître d'ouvrage pour l'ensemble des raccordements des parcs éoliens en mer français, qu'ils soient posés ou flottants. D'une manière générale, il est co-maître d'ouvrage avec les pouvoirs publics pendant les phases de débat public, d'identification des zones d'implantation des parcs, puis de dialogue concurrentiel, période pendant laquelle un développeur pour le parc est choisi. Il est ensuite co-maître d'ouvrage avec le lauréat, avec lequel il se coordonne pour que les ouvrages de raccordement arrivent au bon moment par rapport à l'installation du parc d'éoliennes lui-même.
Opérateur industriel maritime, RTE a par ailleurs un rôle d'éclaireur des pouvoirs publics sur l'évolution du système électrique vers la neutralité carbone. Dans l'étude prospective Futurs énergétiques 2050, plusieurs scénarios ont été identifiés en termes de développement de l'éolien en mer. Si l'on s'en tient à l'objectif fixé par le président de la République de 40 gigawatts de capacité d'éolien en mer en service à l'horizon 2050, il faudra qu'environ 50 % de cette capacité de production soit posée et 50 % flottante, d'où l'importance pour la filière flottante de se développer et d'arriver à maturité industrielle.
Un point de repère a déjà été évoqué pour l'installation des éoliennes : la profondeur de 50 mètres, en-dessous de laquelle on installe du posé, et au-delà de laquelle on bascule sur du flottant, avec une zone grise entre les deux.
Il y a un deuxième chiffre à avoir en tête, 100 mètres, qui concerne la technologie de raccordement. On peut raccorder des parcs flottants avec une plateforme électrique en mer posée jusqu'à environ 100 mètres de profondeur, ce qui permet d'aller plus loin que pour les éoliennes posées elles-mêmes. Les projets Sud Bretagne, Provence-Alpes-Côte d'Azur et Occitanie sont les trois premiers appels d'offres de parcs éoliens flottants commerciaux, avec un raccordement posé.
Mais si l'on veut atteindre les 40 gigawatts d'éolien en mer, dont la moitié issus d'éoliennes flottantes, on devra recourir aux technologies de raccordement flottant. Il s'agit de postes à forte puissance, comme sur l'image d'illustration que vous voyez, prêtée par les Chantiers de l'Atlantique.
Pour atteindre cet objectif de développement industriel, il faut avoir en tête deux tendances. La première est la propension à l'augmentation de la puissance des parcs pour des raisons d'optimum technico-économique. Cela conduit, en termes de raccordement, à basculer sur des technologies en courant continu. Celles-ci nécessitent de prévoir, dans les postes électriques en mer, des stations de conversion du courant alternatif vers le courant continu assez massives et sensibles. À terre, le courant est à nouveau transformé en alternatif. La deuxième tendance est celle de l'éloignement des côtes, qui implique de basculer sur un raccordement flottant.
Un certain nombre de difficultés devront être surmontées, car si l'on sait aujourd'hui faire un poste flottant pour le courant alternatif, on ne sait pas si on pourra le faire - ni comment - pour un courant continu de forte puissance, 1 000 mégawatts voire davantage.
Nous avons trois défis technologiques principaux : le premier est de parvenir à concevoir une station de conversion de courant continu en courant alternatif dans un environnement d'oscillation vibratoire, avec de la houle et des vagues. Il concerne les industriels.
Le deuxième a trait au câble dynamique de forte puissance. Le raccordement flottant implique en effet l'existence d'un câble, enfoui sous les fonds marins sur une certaine distance, joint à son extrémité à un câble souple, dynamique, qui accompagne les mouvements de la plateforme flottante. On sait aujourd'hui fabriquer des câbles dynamiques à des niveaux de tension intermédiaires de l'ordre de 66 000 volts. Des recherches sont en cours pour un courant alternatif de 225 000 volts. Si l'on bascule en courant continu, il faudra prévoir des câbles dynamiques de plus forte puissance, de 320 000, voire 525 000 volts.
Le dernier défi, moindre que les deux précédents, est de parvenir à installer des transformateurs électriques sur ces plateformes. On ne sait pas encore très bien comment se comporte un transformateur électrique lorsqu'il est soumis à un ballottement d'huile dans sa cuve. Il faut examiner les conditions de résistance, de résilience, d'usure éventuellement accélérée d'un certain nombre de composants placés sur ces postes électriques en mer.
Tout ceci constitue un véritable écosystème rassemblant des organismes de recherche et des industriels, puisqu'on allie les compétences électriques et les compétences mécaniques, notamment avec nos partenaires des Chantiers de l'Atlantique. Notre feuille de route R&D vise la mise en service industrielle d'un premier poste électrique flottant de forte puissance autour de 2040 : cela implique que toutes ces difficultés aient été surmontées autour de 2030.