Je vais plaider pour la suppression d'une entité nommée « collège » dont ni la commission ni le Gouvernement ne veulent plus. Mais, comme je m'étais simultanément émue de l'autorité de régulation, ce que je dirai vaudra également pour celle-ci.
Collège ou autorité, je considère que nous portons atteinte aux compétences du législateur et qu'il n'est pas bon de conférer à cette entité le pouvoir de décider des conditions d'exercice du droit à la copie privée et, par conséquent, du droit d'usage des oeuvres. Cette « autorité-collège », permettez-moi de l'appeler ainsi, apparaît à la fois comme un régulateur et comme un arbitre des litiges, sans les garanties offertes par la justice.
En matière de propriété intellectuelle, littéraire et artistique, compte tenu du climat passionnel et des conflits d'intérêts qui prévalent dans ce secteur, les lobbys jouent pleinement leur rôle, comme nous avons pu le vérifier à l'occasion de la préparation de ce projet de loi.
Oui, une médiation est nécessaire quand l'enjeu est aussi important. La copie privée, élément majeur de la démocratisation culturelle, c'est l'accès du plus grand nombre au savoir !
Oui, le développement des technologies, la nécessité de procéder à des expertises, la diversité des intérêts en présence peuvent inciter à créer une instance qui ait un rôle de conciliation, de proposition, d'avis en direction du Gouvernement et du Parlement ! Pourquoi pas ? Mais nous ne pouvons accepter que cette instance édicte la norme et, en même temps, l'applique.
Quelles seront donc les compétences techniques des membres de cette autorité ou collège ? C'est un immense point d'interrogation ! On ne voit pas très bien comment quelques membres ou deux magistrats deviendraient opérationnels rapidement sur un sujet aussi complexe. En revanche, une composition pluraliste amènera la compétence.
Mais là, nous avons connu le choc de ces égoïsmes et de ces compétences. Depuis des mois, nous sommes cernés. Souvenez-vous de ce qui est arrivé aux députés : l'Assemblée nationale a été entourée de zélés démonstrateurs équipés de systèmes numériques !
Devons-nous, monsieur le ministre, vous montrer nos boîtes aux lettres, courriel et papier, ou vous faire écouter les répondeurs de nos téléphones ? Je pense que ce n'est pas utile, les vôtres ont dû subir le même sort !
Pour ces personnes qui auront à arbitrer, les zélés pédagogues seront ceux-là mêmes qui sont mus par tel ou tel intérêt.
Dans ce texte, au coeur tout de même non de l'intérêt public - que nous essayons tous de promouvoir -, mais du choc des égoïsmes, je ne crois pas que le législateur puisse prendre le risque de livrer à tous les lobbies, à toutes les pressions, une petite entité qui n'ait pas la force du Parlement.