Les articles 11 à 15 instaurent un régime de sanctions visant les internautes qui téléchargent illégalement, mais aussi ceux qui contournent les mesures techniques de protection et, enfin, les éditeurs de logiciels, très inquiets par les mesures pénales et civiles prévues par les articles 12 bis et 14 quater.
Sur ce sujet, le Gouvernement a beaucoup évolué : il est passé d'un dispositif extrêmement répressif assimilant tout acte de téléchargement au délit de contrefaçon, donc punissable de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende, à une amende de 38 euros aujourd'hui !
Entre-temps, un système de réponse graduée a été proposé au mois de décembre dernier, puis abandonné en cours de route par l'Assemblée nationale. Si nous pouvons nous féliciter d'avoir gagné entre ces différents projets une graduation des sanctions, je m'interroge tout de même sur le message envoyé à nos concitoyens.
Que vont-ils retenir de ces différentes annonces de sanctions ? Je ne sais pas si tout cela est très clair ! Encore aujourd'hui, nous ne savons toujours pas si la contravention de 38 euros se comprend par acte de téléchargement ou par titre téléchargé.
La directive nous invite à adopter des sanctions proportionnées, dissuasives et efficaces. Les sanctions seront-elles applicables ? Seront-elles dissuasives ? Nous en doutons, car nous savons bien qu'il ne sera pas possible de poursuivre l'ensemble des internautes adeptes du peer to peer, faute de moyens. Le dispositif mis en place ne revient-il pas à « vider la mer avec une petite cuillère » ?
L'exemple des pays européens qui se sont déjà dotés d'un système de sanctions pour poursuivre les internautes téléchargeant illégalement est instructif : malgré des sanctions souvent plus lourdes que celles qui sont prévues par le présent projet de loi, ils ne voient pas le nombre de téléchargements diminuer. Au contraire, il augmente.
Comme je l'ai rappelé lors de la discussion générale, si nous avons des doutes sur le caractère efficace et dissuasif des sanctions, nous ne sommes pas opposés au principe des sanctions en tant que tel, que nous pensons utiles pour fixer un cadre. Mais il est vrai que nous aurions aimé que, en plus de la répression, des mesures de prévention et de pédagogie soient envisagées.
Je redis ici mon regret que soient abandonnés le dispositif préventif du système de la réponse graduée et les messages d'avertissement personnalisés aux internautes, qui pouvaient avoir un effet dissuasif.
J'en profite pour répondre à M. le ministre, qui, lors de la discussion générale, a assimilé cette prise de position à la dénonciation de la « police de l'Internet » par François Bayrou, au mois de décembre dernier.
Cet argument est, selon moi, intellectuellement irrecevable. Vous savez en effet que, en parlant de « police de l'Internet », François Bayrou visait le dispositif que tendait à créer un amendement de sept pages, déposé la veille du débat à l'Assemblée nationale, et qui tendait à confier à des agents assermentés par les sociétés de perception des droits le contrôle des ordinateurs personnels des internautes. En revanche, je ne pense pas que François Bayrou ait jamais contesté le dispositif préventif, dans l'hypothèse où le contrôle serait effectué par des officiers de police judiciaire.
Par ailleurs, et ce sera ma dernière remarque sur le système des sanctions, certaines dispositions ont un caractère imprécis. Nous proposerons donc des amendements tendant à les préciser.
Enfin, certains amendements nous inquiètent. Il s'agit, outre des amendements dits « Vivendi », sur lesquels nous reviendrons, des amendements n° 23 et 24 rectifié de la commission, portant respectivement sur les articles 13 et 14. Ils tendent en effet à supprimer systématiquement les références aux actes réalisés à des fins d'interopérabilité, qui n'étaient pas concernés par les sanctions prévues par ces articles dans la « petite loi » transmise par l'Assemblée nationale.