Intervention de Annie David

Réunion du 10 mai 2006 à 22h00
Droit d'auteur et droits voisins dans la société de l'information — Article 14 quater, amendements 26 336 1

Photo de Annie DavidAnnie David :

Par ce sous-amendement, nous proposons la suppression de l'article 14 quater, malgré la nouvelle rédaction proposée par M. le rapporteur.

La première partie de l'amendement n° 26 rectifié, qui vise à créer un article L. 336-1 du code de la propriété intellectuelle concernant le registre public, est très positif, puisqu'il promeut la liberté d'accès aux informations des oeuvres.

En revanche, la seconde partie, qui tend à créer un article L. 336-2, reprend les dispositions de l'article 14 quater initialement proposé par l'Assemblée nationale, article que nous souhaitons supprimer, comme vient de l'indiquer M. Renar.

Tout d'abord, monsieur le rapporteur, permettez-moi de m'étonner de la transformation de votre amendement de suppression en un amendement visant à réintroduire la disposition que vous proposiez précédemment de faire disparaître !

N'avez-vous pas écrit, monsieur le rapporteur, que « les dispositions du présent article risquent de susciter, du fait de leur imprécision, une incertitude juridique qui peut être préjudiciable au développement de l'Internet, et contre laquelle la très grande majorité des acteurs de l'économie numérique [vous] ont vivement mis en garde » ?

Ces considérations vous avaient conduit à recommander la suppression du présent article, et voilà maintenant que vous nous proposez de le réintroduire, sous une forme plus dangereuse encore !

C'est toute l'industrie du logiciel français, et notamment l'industrie du logiciel libre, que vous menacez.

Par ailleurs, nous craignons que votre proposition tendant à permettre aux juges d'imposer aux éditeurs de logiciels d'aller vérifier à chaque téléchargement que l'oeuvre téléchargée n'est pas une contrefaçon ne soit bien peu réaliste techniquement. Avez-vous la moindre idée de l'infrastructure technique qu'il faudrait mettre en oeuvre pour vérifier en temps réel les fichiers téléchargés par des millions d'internautes ?

Qui plus est, au-delà du fait qu'elle ne fonctionnera sans doute jamais, une ligne Maginot numérique fait peser un risque majeur à nos entreprises innovantes, notamment aux plus petites, lesquelles ne pourront pas « absorber » l'insécurité juridique que créerait une telle disposition, si celle-ci avait un jour force de loi.

Selon nous, l'alinéa 1er de l'article 809 du nouveau code de procédure civile garantit déjà, de manière largement suffisante au regard de l'article 8.3 de la directive 2001/29 que nous transposons, la possibilité pour un titulaire de droit de demander une ordonnance sur requête à l'encontre des éditeurs de logiciels, pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.

Nous rejetons la logique de la présomption de culpabilité, qui ne fera que favoriser le développement de réseaux d'échanges chiffrés et anonymes.

Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous vous invitons à supprimer le texte proposé par l'amendement n° 26 rectifié pour l'article L. 336-2 du code de la propriété intellectuelle.

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