Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les sécheresses et les canicules de ces dernières années l’ont prouvé : le temps de l’abondance et de l’insouciance hydrique est révolu. Face à la raréfaction de la ressource, nous savons que nous devons désormais changer de modèle de gestion de l’eau. Nul besoin d’être docteur en mathématiques pour poser l’équation, tant elle est simple : faire mieux avec moins !
La nouvelle donne hydrique nous impose de repenser notre modèle de gestion durable de l’eau, d’accroître la sobriété de nos consommations et de nos prélèvements, de trouver les moyens de prévenir et d’apaiser les conflits d’usage, mais également d’anticiper les conséquences d’étés plus secs pour ne pas les subir. Angle mort des réflexions d’un pays que l’on a souvent comparé à un château d’eau, la ressource en eau peut devenir, dans la France de 2023 et des années à venir, un facteur de tensions, voire de conflits. Ne pas s’y préparer serait suicidaire.
Les assises de l’eau et le Varenne agricole de l’eau ont préparé le terrain, mais également les esprits. Le plan Eau conclut cette séquence de réflexion et de concertation par une série de mesures que les élus, les acteurs et les citoyens attendaient depuis longtemps. On pourrait regretter que la cible de 10 % d’économies d’eau prélevée dans tous les secteurs ne soit qu’indicative. Certes, toute politique est perfectible, mais je préfère l’action à l’immobilisme.
Je salue l’annonce d’un plan de 180 millions d’euros par an pour lutter contre les canalisations fuyardes des collectivités dont le rendement des réseaux est inférieur à 50 %, ainsi que je l’avais appelé de mes vœux au mois de novembre dernier dans une tribune largement cosignée par des parlementaires et des élus locaux.
J’ai cependant quelques inquiétudes concernant la conditionnalité des aides : il ne faudrait pas que les collectivités les plus fragiles soient pénalisées par des exigences hors de leur portée. Les élus locaux doivent être accompagnés et non stigmatisés. Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous me rassurer et nous en dire plus sur la manière dont les aides seront attribuées et évaluées ?
Ces dernières semaines, des articles de presse ont ravivé les préoccupations relatives à la qualité de l’eau destinée à la consommation humaine. De nouvelles molécules chimiques mises sur le marché, dont les effets à long terme sont encore mal connus, finissent par se retrouver dans les milieux aquatiques et les aquifères, donc dans l’eau distribuée aux usagers. Madame la secrétaire d’État, quelles actions comptez-vous mettre en œuvre pour rassurer sur la potabilité de l’eau du robinet et son innocuité pour la santé à long terme ?
En matière d’action publique, l’État doit être exemplaire et s’appliquer à lui-même les efforts qu’il demande aux collectivités, aux entreprises et aux citoyens. Comment comptez-vous mettre en place, dans les administrations publiques, une gestion de l’eau irréprochable et en finir avec les gaspillages ? Le parc immobilier de l’État comprend plus de 190 000 bâtiments, pour une surface d’environ 94 millions de mètres carrés… Un rapide calcul conduit à un montant vertigineux. Il ne s’agit pourtant que d’une mesure parmi les 53 qui ont été annoncées. Comment comptez-vous la financer et communiquer autour de cette exemplarité ?
Sans moyens financiers adéquats, la parole publique et les programmes d’action restent lettre morte. Madame la secrétaire d’État, vous augmentez le plafond mordant des agences de l’eau, mais, dans le même temps, vous fléchez une grande partie de ces augmentations vers des mesures que vous avez identifiées par ailleurs. Même si les montants annoncés par le Président de la République paraissent importants, les besoins annuels identifiés pour le petit et le grand cycle de l’eau se chiffrent en milliards d’euros.
Madame la secrétaire d’État, ma question est toute simple : que comptez-vous faire pour que le plan Eau ne soit pas un plan qui prenne l’eau ?