Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons tous et toutes été profondément touchés par le suicide du jeune Lucas, qui subissait quotidiennement harcèlement et moqueries sur son orientation sexuelle. Depuis ce drame, quelles mesures avez-vous prises pour mettre fin aux brimades quotidiennes subies par une partie de nos enfants ?
Votre volonté d’éradiquer le fléau du harcèlement scolaire se vérifiera par vos actions sur deux leviers essentiels : renforcement des moyens humains à l’école et changement de la culture scolaire qui prévaut dans notre pays.
Chacun le sait, la meilleure façon de lutter contre le harcèlement scolaire est de renforcer les effectifs d’encadrement des élèves. Toutes les recherches démontrent que plus on réduit le nombre d’élèves dans les établissements et dans les classes, plus le harcèlement diminue.
Or la France a les classes les plus chargées de l’Union européenne. Au collège, l’effectif moyen approche vingt-six élèves, soit très au-dessus de la moyenne européenne située sous la barre des vingt et un. Plus d’une classe sur dix dépasse désormais les trente élèves, soit deux fois plus qu’il y a dix ans.
Depuis son arrivée au pouvoir, Emmanuel Macron n’a fait qu’aggraver cette situation dramatique. Depuis 2018, le second degré a perdu 9 322 enseignants ; la saignée continue, puisque votre ministère annonce de nouvelles suppressions de postes pour la rentrée 2023.
À ce terrible bilan s’ajoute l’abandon de la médecine scolaire, évoqué par mes collègues. La France compte à l’heure actuelle un psychologue de l’éducation nationale pour 1 500 élèves et un médecin scolaire pour 16 686 élèves, très loin de la préconisation de votre ministère d’un médecin pour 5 000 enfants. Comment prétendre lutter contre le harcèlement scolaire quand on réduit à ce point les moyens de l’école ?
Par ailleurs, la manière dont on conçoit et organise l’école peut favoriser le harcèlement ou permettre de s’y opposer. On a trop tendance à prendre le problème sous l’angle de la discipline avec une approche purement punitive et à déléguer la lutte contre le harcèlement aux conseillers principaux d’éducation (CPE) plutôt que de développer une approche collective.
C’est en amont, dans notre culture et organisation scolaires, qu’il faut aller chercher les ressources pour lutter contre le harcèlement. Face à une école de la concurrence entre individus, une école du classement et de la distinction, qui crée des rivalités, défendons, contre la pression des notes et le stress des examens, un modèle qui promeut des valeurs de solidarité, de coopération, de bienveillance, de tolérance et d’inclusion.
Défendons aussi un modèle où la santé mentale n’est plus un tabou, un modèle scolaire qui place la mixité en son cœur pour développer une approche positive de l’autre, où l’altérité et la différence ne constituent pas un danger, mais une chance.
Pour aller dans ce sens, vous nous aviez justement promis, dans cet hémicycle même, monsieur le ministre, des annonces sur la mixité scolaire pour le 20 mars dernier. Nous les attendons toujours : où en est-on ?