Je souligne le risque d’inconstitutionnalité de la mesure. En effet, dans son étude du 19 décembre 2013, qui fait autorité, le Conseil d’État reconnaît que la loi et la jurisprudence n’ont pas identifié, outre les agents et les usagers, une troisième catégorie, celle de collaborateurs ou participants, qui serait soumise en tant que telle à l’exigence de neutralité religieuse ; les parents accompagnateurs ne sont pas considérés comme des agents auxiliaires du service public et ne sont donc pas soumis à ce principe. Autrement dit, une femme qui porte le voile peut accompagner une classe en sortie à condition qu’elle ne se livre pas à de la propagande ou à du prosélytisme, ce qui vaut pour toutes les religions.
Même s’ils peuvent parfois, pour des raisons pratiques liées aux assurances et parce qu’ils sont bénévoles, être appelés « collaborateurs occasionnels du service public », les parents n’exercent pas une mission de service public de l’éducation : celle-ci ne peut être exercée que par l’enseignant. Un parent accompagnateur de sortie scolaire aide à la logistique et non, par exemple, à commenter un tableau dans un musée lors d’une visite. Il reste un usager du service public et n’est donc pas soumis au principe de neutralité comme le sont les agents publics et tous ceux qui exercent une mission de service public. La charte de la laïcité dans les services publics exclut l’application du devoir de réserve et du principe de neutralité aux usagers.
Ce type de propositions peut avoir un effet d’engrenage : l’organisation des sorties scolaires risque d’être rendue plus difficile dans certains établissements. On affaiblit ainsi l’école en créant des obstacles à l’apprentissage et à l’ouverture au monde. On réduit l’égalité des chances. Jusqu’où irez-vous ? Imposerez-vous aussi ce principe de neutralité au conseil d’administration de l’école ? aux fêtes d’école ?
La dérive est totale…