Intervention de Gabriel Attal

Réunion du 3 mai 2023 à 21h45
Programme de stabilité et orientation des finances publiques — Débat organisé à la demande de la commission des finances

Gabriel Attal, ministre délégué :

Je crois que nous avons eu raison de nous montrer volontaristes dans nos précédentes prévisions.

L'été dernier, lorsque nous prévoyions un taux de croissance de 2, 5 % en 2022, l'on nous a dit que nous étions démesurément optimistes. Or nous avons eu raison d'être volontaristes, la croissance s'étant élevée à 2, 6 % cette même année !

De la même manière, à l'automne dernier, alors que plusieurs prévisionnistes prévoyaient une récession dans la zone euro et une croissance atone, voire nulle en France, on nous a accusés d'être optimistes, car nous affichions une prévision de croissance de 1 % pour l'année 2023.

Nous avons assumé cette posture volontariste et je pense que nous avons eu raison de le faire. En effet, depuis le mois de janvier, les prévisionnistes revoient leurs prévisions à la hausse. Elles se rapprochent les unes après les autres de la prévision de croissance de 1 % retenue par le Gouvernement pour 2023 : celle du FMI s'élève à 0, 7 % et celle de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) à 0, 8 %. Ces prévisions sont beaucoup plus proches des nôtres que celles qui avaient été établies à l'automne dernier. Là aussi, nous avons eu raison d'être volontaristes.

En ce qui concerne la croissance potentielle, le Haut Conseil des finances publiques tablait, dans ses travaux de l'automne dernier, sur une fourchette comprise entre 0, 9 % et 1, 3 %, en mettant en avant une incertitude relative à certaines réformes. Avec 1, 35 % par an, nous sommes très proches du haut de cette fourchette.

Je rappelle que notre évaluation est également très proche de celles du FMI – 1, 3 % – et de la Commission européenne – 1, 4 % sur le court terme, c'est-à-dire pour 2022-2023.

Je veux rappeler ensuite qu'un certain nombre de prévisionnistes n'ont pas tenu compte, pour évaluer la croissance potentielle sur les années à venir, de l'ensemble des réformes qui figuraient dans notre programme. D'ailleurs, une partie des prévisions faites ces derniers mois ne tenaient pas encore compte de l'impact de la réforme des retraites et encore moins de celle à venir du RSA.

De notre côté, nous tenons évidemment compte, dans les sous-jacents de nos prévisions sur la croissance potentielle, du programme de réformes sur lequel nous nous sommes engagés et qui vise à atteindre la société du plein emploi.

Jusqu'à présent, nous avons montré que nous tenions nos engagements : nous avons fait la réforme de l'assurance chômage comme celle des retraites. Nous ferons celles du RSA et du lycée professionnel, qui auront naturellement un impact sur l'activité économique et l'emploi, donc sur la croissance potentielle.

Un point rapide – nous pourrions en parler longuement… – sur la question du déflateur du PIB, évoquée notamment par M. le rapporteur général de la commission des finances.

En 2022, le déflateur du PIB a été nettement moins dynamique que prévu. Il a aussi été nettement moins dynamique que l'évolution des prix à la consommation du fait des conséquences du conflit en Ukraine sur les termes des échanges : du côté de la demande, les prix d'importation ont été nettement plus dynamiques que les prix d'exportation, ce qui a fortement contribué de manière négative à la balance du commerce extérieur ; du côté de l'offre, la valeur ajoutée a été comprimée par le délai de transmission de la hausse des prix des entrants aux prix de vente.

En 2023, le déflateur est révisé à la hausse pour résorber cet écart. Il est ensuite cohérent avec l'inflation au sens de l'indice des prix à la consommation.

Donc, là où le précédent programme de stabilité tablait sur une convergence lente du déflateur du PIB et de l'inflation au fil du quinquennat, il est désormais fait l'hypothèse d'une convergence rapide sur 2023-2024, ce qui est cohérent au regard des dernières observations macro-économiques.

J'en viens à la question de Mme la rapporteure générale de la commission des affaires sociales sur l'impact que pourrait avoir, sur nos conditions d'emprunt, la dégradation de la note de la France par l'agence Fitch.

Comme l'a dit aujourd'hui Bruno Le Maire lors des questions d'actualité au Gouvernement, on peut qualifier cet impact de « limité ». Nous avions avec l'Allemagne un écart de taux, un spread, de 57 points de base vendredi, juste avant l'annonce de Fitch. Cet après-midi, nous sommes montés à 59 et ce soir, nous sommes redescendus à 58. L'impact est donc mineur.

J'ajoute, monsieur Sautarel, que l'agence Moody's a décidé, la semaine dernière, de maintenir la notation de notre pays. La décision prise par Fitch n'est donc pas la première à intervenir en la matière.

Quelques mots maintenant sur les choix politiques et budgétaires qui sous-tendent ce programme de stabilité.

Le premier choix que nous faisons, c'est celui de l'emploi et du travail – je remercie les sénatrices Paoli-Gagin et Duranton d'avoir insisté sur ce point. Cela passe par des baisses de fiscalité que nous assumons pleinement.

Lors du précédent quinquennat, nous avons ainsi décidé de ramener la pression fiscale sur les entreprises et l'activité économique à un niveau proche de celui de nos partenaires européens afin de libérer l'emploi.

Je pourrais éventuellement comprendre les critiques qui nous sont faites sur ce point si les décisions que nous avons prises n'avaient pas eu d'impact en matière d'emploi.

Mais la réalité est là : nous avons créé plus de 1, 5 million d'emplois en net ; le taux de chômage est au plus bas depuis quinze ans ; celui des jeunes est au plus bas depuis quarante ans. §On peut donc bien parler d'un impact des politiques que nous avons menées.

Les allègements de cotisations sociales – le sénateur Joly a évoqué cette question – sont également favorables à la création d'emplois et la gauche le sait fort bien, puisque ces allègements ont doublé sous le gouvernement de Lionel Jospin et de la gauche plurielle, ce qui a profité à l'époque à l'emploi.

Si l'on baisse le coût du travail, on permet mécaniquement aux entreprises, quelle que soit leur taille, d'embaucher. C'est donc ce choix que nous avons fait et nous l'assumons.

J'ajoute – c'est un débat que nous avons régulièrement – que de telles baisses de fiscalité apportent finalement des recettes publiques supplémentaires : par exemple, alors même que nous avons baissé le taux de l'impôt sur les sociétés de 33 % à 25 %, nous collectons davantage de recettes sur cet impôt !

En ce qui concerne les baisses d'impôts sur les ménages, plusieurs intervenants, par exemple M. Breuiller ou Mme Lubin, ont parlé de baisses d'impôts pour les plus riches – certes, vous n'avez pas parlé de nantis… Oui, nous avons décidé de supprimer la taxe d'habitation et la redevance télé, ce qui représente un gain moyen de 1 000 euros par an pour tous les Français.

Croyez-vous sincèrement que les Français qui ont bénéficié de ces décisions, ceux que vous croisez dans vos départements, par exemple à Saint-Maur, Alfortville ou Fontenay-sous-Bois, monsieur Breuiller, sont des nantis ou des très riches ?

C'est la classe moyenne, celle qui travaille, celle justement qui a souvent le sentiment qu'elle ne perçoit jamais les dividendes de notre modèle social ou des baisses de fiscalité, qui a très majoritairement bénéficié, en volume, des réductions d'impôts que nous avons consenties envers les particuliers.

Avec la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance télé, la classe moyenne de notre pays a bien compris que nous la soutenions.

Après l'emploi et le travail, le second choix que nous faisons est celui de l'investissement dans nos services publics. Et là, monsieur Savoldelli, on ne peut vraiment pas parler d'austérité ou de désertion – je vais en donner plusieurs exemples.

Le budget de l'hôpital public dépasse dorénavant les 100 milliards d'euros. Nous dégageons cette année 4, 7 milliards d'euros supplémentaires pour l'éducation nationale. Souvenons-nous que François Hollande annonçait en 2012, juste après son élection, un grand plan de réinvestissement dans l'éducation nationale de 1, 5 milliard pour 2013. Nous, c'est 4, 7 milliards sur l'année 2023 avec des revalorisations salariales inédites depuis le début des années 1990 pour nos enseignants.

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