Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, monsieur l'ambassadeur, mes chers collègues, Poutine tente de faire disparaître l'Ukraine. Il a affirmé qu'elle n'était ni un pays ni un État. Le dictateur russe a d'abord grignoté le territoire ukrainien – la Crimée, le Donbass –, avant de tenter une invasion totale.
Cette initiative est, pour l'heure, un échec sanglant. L'offensive s'enlise, mais elle se poursuit. Elle a fait périr des milliers de personnes et en a déplacé des millions d'autres. Malgré l'aide internationale, le sort de l'Ukraine demeure encore incertain.
Dans sa guerre d'agression qui dure depuis plus d'un an maintenant, Poutine vise délibérément les populations civiles. Il a concentré ses tirs sur les installations énergétiques civiles avant l'hiver, les quartiers d'habitation et même les maternités.
On ne compte plus les exactions commises par les criminels du groupe Wagner ou des Kadyrovites. Les atrocités de Boutcha témoignent de la haine que le Kremlin nourrit contre le peuple ukrainien.
Le rapport des Nations unies publié le 15 mars dernier souligne l'ampleur des exécutions sommaires, la cruauté des actes de tortures et des violences sexuelles commises par les troupes russes contre la population civile ukrainienne.
Malgré la tragédie, grâce au courage ukrainien et au soutien international, l'Ukraine résiste à l'envahisseur. Si Poutine a pour l'instant échoué à prendre le contrôle du pays, il poursuit néanmoins son travail d'effacement en niant la culture ukrainienne, en refusant à la nation ukrainienne le droit de disposer d'elle-même et d'avoir un avenir.
Dans ce contexte, plus de 16 000 enfants ukrainiens auraient été transférés de force des territoires occupés vers les terres russes. Les enfants de l'Ukraine sont son avenir, et la Russie de Poutine cherche à s'en emparer.
Des « camps » et autres « lieux aménagés » auraient été installés sur le territoire russe, certains en Sibérie. Les enfants de tout âge y seraient rééduqués pour devenir prorusses.
Les déportations de jeunes ukrainiens sont également devenues le maillon stratégique d'un système d'adoption mis en place par l'État et géré par la commissaire aux droits de l'enfant en Russie depuis 2021, alors que l'adoption d'enfants étrangers sans le consentement du pays d'origine est interdite en Russie.
Ces transferts forcés d'enfants et leur prétendue rééducation constituent une atteinte, non seulement aux familles concernées, mais également à la nation ukrainienne tout entière. Ces actes sont constitutifs du crime de génocide. Ils visent à effacer dans l'esprit de ces jeunes ukrainiens l'idée même de leur patrie. Nous ne pouvons pas l'accepter.
En adoptant la proposition de résolution européenne portée par notre collègue André Gattolin, que je salue, le Sénat a eu l'occasion d'affirmer son opposition à ces transferts contraires au droit international.
Aujourd'hui encore, nous voulons dire à quel point nous condamnons l'agression de Poutine et les actes commis contre la population ukrainienne. Il faut aussi trouver le moyen de remédier à cette situation. C'est tout l'objet du débat qui nous occupe.
Comme les auteurs de la proposition de résolution européenne l'ont indiqué, il est essentiel de faire toute la lumière sur ces événements. Il faut pour cela mener des investigations poussées sur ces transferts.
Identifier les filières existantes permettra de connaître le mode opératoire et les personnes concourant à ces transferts. Ces individus sont complices d'un crime contre l'humanité et doivent être traités comme tels. Justice doit être rendue.
Ces investigations doivent, en outre, permettre de retrouver les traces d'enfants déjà transférés. Il est indispensable que ces milliers d'enfants soient rendus à leurs familles et retrouvent leur patrie au plus tôt.
Nous l'avons rappelé, les transferts forcés d'enfants sont constitutifs d'un crime contre l'humanité. Tous les acteurs de la communauté internationale, tant les États et les institutions internationales que les ONG, doivent contribuer à faire cesser ces crimes.
La guerre déclenchée par Poutine pèsera durablement sur les relations internationales et la sécurité de notre continent.
Avant le début de ce conflit, la France a œuvré pour la paix. Elle est aujourd'hui engagée aux côtés de la résistance ukrainienne. En plus de fournir à Kiev les moyens de résister, nous devons œuvrer du mieux possible pour faire cesser les crimes de Poutine.
Nous l'avons fait en envoyant des équipes sur les sites de massacres, comme à Boutcha, pour élucider les crimes passés. Nous devons à présent faire tout notre possible pour préserver l'avenir de l'Ukraine, en commençant par celui de ses enfants. C'est absolument essentiel !