Madame la présidente, mesdames, messieurs les présidents de commission, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur l'ambassadeur, tous les orateurs l'ont dit, l'agression russe en Ukraine a des conséquences terribles, épouvantables, sur les enfants. Leurs droits sont massivement violés et leur futur risque d'être brisé.
La Russie a sciemment bombardé des lieux dans lesquels nul ne peut ignorer que se trouvaient des enfants : des hôpitaux, des maternités, des écoles. Elle est responsable de meurtres, de blessures, de déportations, de violences sexuelles contre des enfants.
Permettez-moi, tout d'abord, de vous assurer que nous œuvrons sans relâche pour que les enfants ukrainiens déportés par la Russie retrouvent sans délai leur foyer et les proches auxquels ils ont été arrachés avant d'être confiés à des inconnus.
Monsieur le sénateurGuiol, vous avez raison, la Russie a recours à une propagande cynique au travers de l'affichage public de ces transferts forcés et de fausses explications. Plus récemment, la Russie a déversé ses mensonges lors de sa présidence, le mois dernier, du Conseil de sécurité des Nations unies.
Le Gouvernement s'est emparé très tôt de ce sujet, que la ministre de l'Europe et des affaires étrangères a abordé publiquement, bien sûr, mais aussi en privé, notamment aux Nations unies un an après le début de l'agression russe en Ukraine, et au Conseil des droits de l'homme, à Genève.
Comme vous l'avez souligné, le premier enjeu est la documentation des déportations d'enfants en Ukraine. Dès le 4 mars 2022, la France a soutenu la création par le Conseil des droits de l'homme d'une commission d'enquête internationale indépendante pour faire toute la lumière sur les violations graves des droits de l'homme, dont ceux des enfants.
Les conclusions de cette commission sont claires. Des enfants ukrainiens ont été transférés de force vers les territoires temporairement occupés, ou déportés vers la Russie et placés dans des familles russes.
Vous l'avez dit, monsieur le vice-président Laurent, madame la sénatrice Mélot, monsieur le sénateur Buis, ces faits sont des crimes de guerre. Quarante-cinq États participants de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), dont la France, ont donné mandat, via le mécanisme de Moscou de l'OSCE, à une mission d'experts indépendants pour établir un rapport sur les transferts forcés d'enfants, qui sera présenté aujourd'hui au Conseil permanent de l'OSCE.
Vous avez été nombreux à le dire, cette documentation est nécessaire à la justice et, à ce stade, les différents mécanismes d'enquête n'ont permis d'estimer avec précision l'ampleur de ce phénomène, car la Russie empêche l'accès des experts indépendants.
C'est pourquoi, monsieur le sénateur Le Nay, un registre des dommages fait actuellement l'objet d'un travail au sein du Conseil de l'Europe, que nous soutenons. Et la semaine dernière, nous avons organisé en lien avec l'Ukraine et nos partenaires une réunion ouverte du Conseil de sécurité des Nations unies sur les enlèvements et déplacements forcés d'enfants lors de conflits armés pour continuer, toujours et sans relâche, d'alerter sur les violations de leurs droits, notamment en Ukraine. Nous ne devons jamais faire baisser la pression sur la Russie !
Nombre d'entre vous, et notamment M. le sénateur Leconte et Mme la vice-présidente Gruny, ont également souligné que les crimes commis contre les enfants ne devaient pas rester impunis.
La lutte contre l'impunité des auteurs des crimes commis en Ukraine, en particulier ceux dont sont victimes les enfants, est notre priorité.
En mars dernier, la Cour pénale internationale, estimant qu'il existait suffisamment d'éléments pour établir leur implication dans la déportation et le transfert d'enfants ukrainiens, a émis des mandats d'arrêt contre Vladimir Poutine et Maria Lvova-Belova, qui a le titre de commissaire russe pour les droits de l'enfant – un titre « ironique », comme vous l'avez indiqué, monsieur le sénateur Leconte. Il s'agit d'un signal très fort.
Les faits commis contre les enfants, que nos partenaires et nous-mêmes dénonçons, sont d'une extrême gravité. Nul ne peut échapper à la justice ou se soustraire à ses responsabilités. C'est pourquoi nous continuerons d'apporter tout notre soutien à la CPI pour qu'elle puisse mener à bien son enquête et pour que justice soit rendue aux victimes de ces atrocités, comme l'a rappelé la ministre Catherine Colonna au président et au procureur de la CPI le 12 avril dernier, à La Haye.
Je vous rappelle que nous avons en Ukraine des magistrats, un laboratoire d'ADN, des policiers dont la mission est de documenter tous les crimes et exactions commis par la Russie dans ce pays. Nous continuerons d'apporter notre appui au travail des juridictions ukrainiennes, lesquelles bénéficient donc de l'expertise criminalistique, logistique et technologique française.
J'en viens à la protection des droits des enfants.
Nous avons augmenté en 2023 notre soutien financier à l'Unicef, avec qui nous avons engagé une campagne internationale pour l'universalisation des Principes et engagements de Paris relatifs aux enfants associés aux forces armées ou aux groupes armés, une campagne désormais soutenue par cent quatorze États.
Messieurs Buis et Leconte, madame Gruny, je puis vous dire que nous œuvrons pour que l'Unicef puisse agir dans cet univers d'agression épouvantable.
Madame Gruny, vous avez évoqué le sujet d'une conférence multilatérale. Nous travaillons avec la Commission européenne en vue d'organiser une conférence sur le rapatriement des enfants ukrainiens déportés, comme l'a annoncé le 23 mars dernier Ursula von der Leyen, présidente de la Commission.
J'ai bien entendu la demande que vous avez formulée, ainsi que plusieurs de vos collègues, de participation à un haut niveau ; je crois que c'est effectivement essentiel.
Pour ce qui concerne le sujet du nucléaire, monsieur le sénateur Gontard, la France veille au strict respect de l'ensemble des sanctions européennes adoptées contre la Russie. À ce stade, l'Union européenne n'a pas adopté de sanctions visant le nucléaire, mais nous dialoguons avec nos partenaires européens et avec les autorités ukrainiennes en vue de prévoir des sanctions ciblées dans ce domaine.
En conclusion, je vous remercie personnellement, monsieur le sénateur Gattolin, de votre engagement important, et même crucial, sur ce sujet. Nous ne devons jamais oublier cette question. Nous devons sans cesse la rappeler afin qu'elle soit toujours d'actualité.
Je me réjouis que la proposition de résolution européenne que vous avez déposée ait été adoptée.