Intervention de André Gattolin

Réunion du 4 mai 2023 à 10h30
Comment rendre possible le retour en ukraine des enfants déportés en fédération de russie — Conclusion du débat

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

À mon tour, je tiens tous à vous remercier, car ce travail est devenu collectif. Face à cette situation aberrante, absurde et violente, nous avons un sentiment d'impuissance. En même temps, que de chemin parcouru !

Quand j'ai été interpellé pour la première fois sur cette question, à la fin de l'année dernière, par un collectif de cent trente chercheurs et universitaires qui s'appelle Pour l'Ukraine, pour leur liberté et la nôtre ! – certains de ses membres sont présents dans nos tribunes –, personne n'y croyait. Quand ils ont déposé leur excellent mémorandum, rédigé avec l'aide de grands juristes français et internationaux spécialistes du sujet, dont maître Emmanuel Daoud, tout le monde était dubitatif sur la mobilisation de la CPI. On nous disait qu'il fallait créer un tribunal spécial, que jamais les instances existantes ne bougeraient... Or elles ont bougé.

Quand j'ai déposé la première version de ma proposition de résolution, le 10 février dernier, je demandais à la CPI de faire quelque chose... Entretemps, début mars, le procureur s'est déplacé, a pris des décisions. Puis deux mandats d'arrêt internationaux ont été émis, contre Vladimir Poutine et Maria Lvova-Belova. C'est un début !

Surtout, le sujet est désormais sur la place publique internationale, et je crois que c'est important. D'aucuns disent qu'il s'agit de name and shame, expression que je traduis par « nommer et mettre au ban ». Mettre au ban, cela veut dire bannir, mais aussi, demain, traduire devant la justice... Car c'est ce que nous devons faire, en réunissant les preuves, en aidant nos amis ukrainiens, ces familles qui souffrent, à documenter les faits. Il faut le faire vite, il est urgent d'aller plus avant : une partie des preuves a déjà été éliminée !

Contrairement à ce que je croyais savoir, la première chambre parlementaire à avoir adopté une proposition de résolution est non pas le Sénat – chez nous, le processus est un peu plus long –, mais le parlement polonais, dont le texte adopté le 30 mars dernier est extrêmement dur, et même violent, puisqu'il évoque des crimes de trafic humain concernant les enfants ukrainiens.

Je suis ravi que l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) ait voté à l'unanimité la semaine dernière une proposition de résolution.

En janvier dernier, lorsque je suis intervenu devant Mme Oleksandra Matviïtchouk, directrice du Centre pour les libertés civiles ukrainien, ce sujet n'était pas encore d'actualité.

Aujourd'hui, il se passe quelque chose dans l'opinion.

Quand j'apprends que les gouvernants d'Afrique du Sud, comme l'a rappelé Jean-Yves Leconte, mettent la pression sur Vladimir Poutine pour qu'il ne se rende pas à la prochaine réunion des BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud –, à laquelle il est logiquement invité, parce qu'ils savent qu'ils seront dans l'obligation de l'arrêter, je me dis que la répercussion de notre action est forte.

J'entends aussi le président Zelensky interpeller le président Xi Jinping et le pape François en tant qu'autorités internationales et morales afin qu'ils fassent quelque chose pour les enfants ukrainiens, en leur disant que c'est à leur tour d'agir. Si nos pays européens et les pays occidentaux prennent leur part de ce problème, c'est peut-être parce que nous formons un seul et même peuple. Mais tout le monde doit s'investir !

Ce qui a été engagé est extrêmement important. Je voudrais tous vous remercier, mais ce serait trop long...

Je remercie, en particulier, Pascale Gruny, pour cette très belle citation d'Alexandre Soljenitsyne, qui lie la violence comme moyen d'action au mensonge comme règle. Il est terrible de constater, alors que le XXIe siècle est déjà bien avancé, que nous sommes toujours confrontés à des méthodes qui nous inquiètent et nous font peur.

Madame la secrétaire d'État, plus que d'autres pays peut-être, la France a beaucoup à dire et à faire sur ce sujet.

Pour ce qui concerne l'Unicef, qui a été très critiquée, les autorités ukrainiennes m'ont dit qu'elle était très présente sur le terrain pour soulager les grandes souffrances psychologiques des enfants qui subissent, sur le territoire ukrainien, la guerre et les bombardements.

Si l'Unicef ne s'estime pas en mesure d'agir sur le territoire de la Fédération de Russie, ses moyens d'intervention sur le territoire ukrainien devraient pour le moins être doublés.

Il faut « sauver les corps », disait Albert Camus. Sauvons les corps, les âmes et le devenir de ces enfants ! §

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion