Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « J'ai pleuré toutes les larmes de mon corps pendant trois jours. » ; « J'étais haineuse, je détestais la planète entière. » ; « En sortant de chez le docteur, tout d'un coup, je me suis effondrée. » ; « Je vois toutes les copines, elles ont des bébés, tout va bien, qu'est-ce que j'ai fait de mal ? »
Ce sont là les témoignages de femmes qui ont vécu des fausses couches et qui se sont confiées à une équipe de chercheurs et de chercheuses autour de Natalène Séjourné.
Parfois, une fausse couche peut être extrêmement traumatisante pour la femme, du fait de la perte, certes, mais aussi parce qu'elle reste un non-dit et donc, de fait, un tabou.
Pourtant, les fausses couches existent bel et bien. En France, chaque année, 200 000 femmes en vivent une. Un quart des grossesses sont ainsi interrompues.
Quand, malgré ce tabou, on parle de ces fausses couches, elles sont présentées comme des échecs, des défauts. Dès lors, il est peu surprenant que seul un petit nombre de femmes osent en parler, même à leur famille, même à leurs amies les plus proches. Ce tabou étouffe les femmes qui ont fait une fausse couche et qui en souffrent. Il faut améliorer l'accompagnement de ces femmes et de leur partenaire qui en ont besoin.
C'est pourquoi cette proposition de loi est une étape importante. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires en est reconnaissant à la députée Sandrine Josso.
Monsieur le rapporteur, merci pour votre travail, qui améliore le texte à plusieurs égards. Nous apprécions que vous systématisiez l'expression « interruption spontanée de grossesse » et que vous souteniez le versement immédiat des indemnités journalières.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires soutient évidemment cette proposition de loi et ne doute pas qu'elle trouvera un large soutien transpartisan.
Mélanie Vogel, à qui je prête ma voix le temps qu'elle retrouve la sienne, a suivi cette proposition de loi et souhaitait poser une question. Pourquoi ne permettons-nous pas à un couple de se reposer après une fausse couche, qui peut être traumatisante ? Pourquoi ne libérons-nous pas du temps pour que le couple engage un travail du deuil ?
Imaginez que vous ayez projeté d'avoir un enfant, et puis soudainement, rien. Les couples qui le souhaitent doivent avoir le temps de se poser et de se reposer.
D'autres pays reconnaissent déjà ce besoin : un congé spécial de trois jours après une fausse couche existe en Nouvelle-Zélande ; aux Philippines, les femmes bénéficient d'indemnités de maternité jusqu'à soixante jours en cas de fausse couche ; jusqu'à six semaines en Inde.
En France, la loi ne prévoit rien. Mais cela commence à changer : depuis quelques semaines, les salariées de la convention collective Syntec peuvent demander un congé spécial après une fausse couche.
À nous d'inscrire ce congé dans le droit du travail et de l'ouvrir à l'ensemble des salariées. À nous de permettre aux couples qui en ont besoin de se reposer quelques jours après une interruption spontanée de grossesse.
C'est pourquoi notre groupe demande la création d'un congé spécial de trois jours au bénéfice des couples. Il me semble que ce n'est pas trop demander.
Un tel congé serait bien évidemment non pas une obligation, mais une possibilité : il appartiendrait à la femme et à sa ou à son partenaire de décider de le prendre ou non. Il doit être ouvert au couple, je le précise, pour éviter tout risque de stigmatisation.
Pourquoi un tel congé ? Parce que le travail est une charge quand on est en deuil après une fausse couche, mais aussi parce que cette mesure serait une aide concrète après une fausse couche. Les autres mesures de ce texte n'en seront que plus efficaces.
Enfin, il est juste que le Gouvernement ait enfin accepté de verser les indemnités journalières dès le premier jour pour les femmes en incapacité de travailler après une fausse couche : nous l'en remercions.
Saisissons cette occasion pour faire reculer le tabou – grâce notamment au congé spécial – et permettre aux femmes de bénéficier d'une grande avancée.
Nous soutenons bien évidemment ce texte, mais nous vous proposons d'aller plus loin. C'est possible et nécessaire. §