Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, qui ne connaît pas au moins une femme ayant été confrontée à une fausse couche dans son entourage plus ou moins proche ? Pour cause, cet événement touche environ 200 000 femmes par an en France et concerne une grossesse sur quatre. Les interruptions spontanées de grossesse (ISG) sont donc des événements fréquents. Mais ce n’est pas parce qu’un événement est fréquent qu’il est banal pour la personne qui le vit.
Je tiens avant tout à saluer la qualité des échanges qui se sont tenus en commission sur un sujet aussi délicat. Comme cela a été rappelé au cours de l’examen du texte, une interruption spontanée de grossesse n’est pas nécessairement vécue comme un traumatisme ou une souffrance. C’est un point important qu’il est nécessaire de rappeler, ne serait-ce que pour éviter aux femmes qui ne le vivent pas comme un drame de se penser insensibles.
Certaines femmes vivent néanmoins un tel événement comme un choc, un traumatisme, voire comme la véritable perte d’un enfant dans lequel elles s’étaient projetées. Et quand il s’agit non pas d’une interruption spontanée de grossesse isolée, mais de la troisième ou de la quatrième, elle peut être vécue de façon particulièrement difficile.
Chaque femme vit donc cet événement différemment et d’une manière qui lui est propre. Il ne doit être ni banalisé ni dramatisé. Il doit simplement faire l’objet d’un accompagnement spécifique, adapté à la façon dont la femme qui y est confrontée le vit. C’est ce que tend à prévoir le présent texte, qui vise à permettre aux couples qui le vivraient comme un traumatisme d’être mieux accompagnés sur le plan psychologique, voire accompagnés tout court. Car s’il est un point commun à tous les différents vécus à la suite d’une ISG, c’est le tabou dont ils sont l’objet.
Combien de femmes font une fausse couche le lundi soir et retournent travailler le mardi matin, comme si de rien n’était ? Combien, parmi celles qui le vivent comme un drame, en parlent ensuite avec un psychologue ?
La mise en place d’un « parcours interruption spontanée de grossesse » par chaque ARS, telle que le prévoit le texte, constitue une première étape indispensable pour améliorer l’accompagnement des femmes sur ce sujet. Développer la coordination et la formation des médecins, des sages-femmes et des psychologues, ainsi que la bonne information des femmes sur ce sujet, est en effet primordial.
Le texte prévoit également la possibilité pour les sages-femmes d’adresser leurs patientes victimes d’une ISG, ainsi que leur partenaire, à un psychologue dans le cadre du dispositif MonParcoursPsy. Les sages-femmes réalisent, pas toujours dans les meilleures conditions, un travail formidable, et sont au plus près des patientes. Cette mesure est une juste reconnaissance de leur rôle fondamental.
En commission s’est aussi posée la question de la création d’un congé spécial à la suite d’une ISG. Nous n’y sommes pas favorables, car il risquerait de conduire à la stigmatisation des femmes en entreprise. Nous pensons que la suppression du délai de carence dans le cadre d’un arrêt maladie faisant suite à une ISG, comme le prévoit le texte, représente déjà une avancée satisfaisante.
Enfin, n’oublions pas que l’essentiel de ce texte repose sur le dispositif MonParcoursPsy, dont l’efficacité est discutable, en raison du manque de professionnels volontaires. Il est donc essentiel de renforcer la participation des psychologues pour que ce dispositif soit efficace. Plus largement, c’est sur la santé mentale en général dans notre pays qu’il est urgent d’avancer.
Avant de conclure, j’insisterai sur le rôle que peuvent jouer, d’une part, l’éducation en milieu scolaire, notamment en matière sexuelle, laquelle n’est pas encore assez développée pour aider vraiment la jeunesse à se construire, et, d’autre part, la sensibilisation à la prévention – cette remarque est valable dans de nombreux domaines.
Notre groupe votera ce texte.