Intervention de Vincent Capo-Canellas

Réunion du 3 mai 2023 à 21h45
Programme de stabilité et orientation des finances publiques — Débat organisé à la demande de la commission des finances

Photo de Vincent Capo-CanellasVincent Capo-Canellas :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je commencerai par une remarque de méthode. La question n’est plus de faire le procès de tel ou tel gouvernement : nous n’avons plus le temps. Nous n’avons plus les moyens de tergiverser, faute de marges de manœuvre.

Vous avez compris qu’il fallait très vite recaler le discours et la pratique, monsieur le ministre. Vous avez commencé avec le discours, il vous reste la pratique. Pour autant, la question de savoir si ce que fait le Gouvernement est suffisant est pleinement légitime ; elle est même salutaire, puisque nous subissons cette fois la pression des taux et des marchés. Ce n’est pas tant que les marchés délaissent notre dette, mais plutôt qu’ils craignent que les annonces faites aujourd’hui ne soient pas suivies d’effet demain.

Ce débat sur le programme de stabilité est l’occasion de rappeler l’attachement de notre groupe à la maîtrise des comptes publics. Le cap fixé par le Gouvernement aurait dû être plus volontariste. Nous saluons la volonté de rétablissement des finances publiques annoncée dans ce programme. En revanche, nous regrettons le manque de précisions quant au modus operandi.

La dépense publique n’est pas mauvaise en soi, lorsqu’elle est utilisée à bon escient – les récentes crises nous l’ont montré. L’argent magique n’existe pas et les fonds déployés devront être remboursés. La condition de notre souveraineté tient en deux mots : sérieux budgétaire.

Force est de constater que certains points d’alarme se manifestent, comme l’a rappelé le Haut Conseil des finances publiques.

Les prévisions de croissance optimistes pour 2023 et le relèvement de la prévision de croissance effective, reposant sur une hausse de la consommation des ménages nettement supérieure à celle enregistrée avant la crise de la covid, posent quelques questions.

Vous avez décidé de fonder vos prévisions sur des hypothèses avantageuses, notamment une croissance potentielle de 1, 35 % par an jusqu’en 2027, alors même que le scénario de la Commission européenne envisagé dans le cadre de la réforme de la gouvernance européenne des finances publiques est beaucoup moins favorable.

L’incertitude autour de votre scénario demeure donc élevée, dans un contexte international plus mouvant que jamais. L’évolution des cours internationaux des matières premières et de l’énergie, le niveau des taux d’intérêt et la fragilité des marchés financiers constituent des aléas majeurs.

Comme l’a dit notre collègue Bernard Delcros, la volonté de contenir les dépenses ne doit pas conduire à des coups de rabot uniformes. Ce serait injuste et inefficace. La France doit se doter d’une vraie stratégie d’évaluation et de hiérarchisation des dépenses, à laquelle le Parlement doit être pleinement associé, comme l’ont bien rappelé le président de la commission des finances et son rapporteur général.

D’un côté, vous assurez tout mettre en œuvre pour maîtriser le budget ; de l’autre, les crédits des ministères augmentent de 24 milliards d’euros et la charge de la dette tutoie les 60 milliards d’euros en 2023. Une fois neutralisée la baisse des dépenses exceptionnelles engagées en réponse aux crises, il est bien prévu que la dépense publique augmente en volume.

Les objectifs annoncés dans le programme de stabilité ne sauraient se substituer à une loi de programmation, qui fait actuellement défaut. Cette loi doit être adoptée au plus tôt, ce qui sera rassurant pour tout le monde. Elle devra afficher une trajectoire crédible de réduction de la dette publique, reposant sur des hypothèses macroéconomiques réalistes et une stratégie claire et documentée de maîtrise de la dépense publique.

Il n’en reste pas moins que des points de satisfaction existent aux yeux du groupe Union Centriste. Le Gouvernement a enfin pris la mesure de l’urgence pour la France de se désendetter en révisant ses objectifs à l’horizon 2027. La signature de notre pays sur les marchés doit demeurer crédible. Cette crédibilité n’est pas indéfectible. L’abaissement d’un cran de la note de la France par l’agence Fitch est un premier signal d’alerte. Afin de préserver notre crédibilité, nous devons intensifier nos efforts, et vite.

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