Intervention de Pascal Savoldelli

Réunion du 3 mai 2023 à 15h00
Accessibilité et inclusion bancaires — Adoption d'une proposition de loi modifiée

Photo de Pascal SavoldelliPascal Savoldelli :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, accéder à la monnaie fiduciaire, autrement dit aux espèces, est-il un droit que la loi doit consacrer ?

Outre cette première question, les parlementaires que nous sommes doivent déterminer si La Poste devrait garantir cette mission, dont la nature de service public est reconnue, via l’installation et la maintenance de distributeurs automatiques de billets au plus proche de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

Permettez-moi de faire remarquer qu’en dépit d’une faible présence de ses membres aujourd’hui, la droite a tout de même érigé un barrage pour mettre en échec la garantie d’un nouveau droit, sa consécration et sa mise en œuvre concrète par la promotion de l’égalité territoriale.

Nous remercions nos collègues socialistes de cette proposition de loi.

La droite sénatoriale entend se livrer, si je puis dire, monsieur le rapporteur, à une petite opération de démantèlement ! Elle se cache derrière une statistique pour motiver son refus : 99, 2 % de nos concitoyennes et de nos concitoyens peuvent accéder à un distributeur en moins de quinze minutes. Derrière cette statistique, qui se veut implacable, se cachent des réalités territoriales très variées qui semblent échapper à ceux qui prétendent représenter les territoires. Sans aller jusqu’à rappeler la différence entre une moyenne et une médiane, je veux faire remarquer que 3, 6 % de la population habite dans l’une des 12 013 communes très peu denses que compte le territoire national. C’est à eux que s’adresse cette proposition de loi, à ceux qui doivent faire trente minutes de route, voire plus, si leur distributeur est en panne. Près d’un quart d’entre eux, 542 000 personnes, ne jouissent pas du pouvoir de choisir leur moyen de paiement, faute de trouver un distributeur dans leur aire de vie immédiate.

Opportunément, les auteurs de cette proposition de loi proposent de mettre à contribution les bénéfices des banques, au travers d’une taxe sur les distributeurs qui ferment.

« Encore un impôt ! » a-t-on entendu s’offusquer, de manière feutrée, mais réelle, certains à droite qui semblent avoir d’autres idées que l’impôt pour financer des services publics. Peut-être les découvrirons-nous un jour ! Attention, nous disent-ils ; les banques vont retirer leurs distributeurs avant l’adoption de la loi ; ainsi, on sera privé des recettes potentiellement dévolues à La Poste pour l’installation de distributeurs de billets. Autant d’arguments idéologiques, et faux pour certains d’entre eux, qui créent des problèmes imaginaires à défaut de trouver des solutions à ceux, bien réels, de nos compatriotes.

Si 4 598 distributeurs de billets, soit 8, 77 % d’entre eux, ont tout bonnement disparu, il ne faudrait pas y voir un phénomène structurel, témoignant de l’action du système bancaire pour faire disparaître les espèces.

Non sans une certaine ironie, on invite nos concitoyens à se rassurer : il existerait de nombreuses solutions alternatives aux distributeurs de billets que chacune et chacun fréquente.

Peut-être connaissez-vous le dispositif Allô facteur, service de livraison d’espèces à la demande par un postier, signe que l’argent physique serait voué à disparaître, à l’instar du courrier, car les Françaises et les Français s’en seraient détournés. C’est faux ! La numérisation des services publics a conduit à délaisser le courrier, à perdre l’habitude de l’usage de l’écrit pour interagir avec l’administration, tout comme il est devenu impossible de payer autrement qu’en ligne pour effectuer nombre d’achats.

Un autre dispositif encouragé par la droite, le cash-in-shop, permet à des commerçants de délivrer des espèces contre un paiement par carte supérieur au prix d’achat d’un produit. La généralisation de cette pratique à tous les commerçants, au-delà des clients d’un même réseau bancaire, représente une fuite en avant. Par ailleurs, la livraison de colis dans des points relais a-t-elle accru la fréquentation des commerces qui la pratiquent ? Nous avons tous pu le constater : non ! Les gens viennent, récupèrent leur paquet et s’en vont ! Le magasin de vêtement de centre-ville concurrencé par la vente en ligne connaîtra-t-il un élargissement considérable de sa clientèle grâce à ce nouveau service ? Bien sûr que non ! Pire, ces commerçants exposeront leur sécurité en détenant une quantité importante d’espèces, alors que les distributeurs automatiques, à part quelques cas de voiture bélier ou de fraudes à la carte bleue, ne comportent pas de risque majeur pour l’intégrité des personnes physiques.

Sur le volet de ce texte consacré à l’inclusion bancaire, nous avons déposé des amendements qui expriment une triple volonté : empêcher les banques de se rémunérer sur les clients financièrement en difficulté ; sortir certaines opérations d’un objectif de rentabilité ; garantir des offres de justice sociale.

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