Intervention de Sylvie Vermeillet

Réunion du 3 mai 2023 à 15h00
Accessibilité et inclusion bancaires — Adoption d'une proposition de loi modifiée

Photo de Sylvie VermeilletSylvie Vermeillet :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au nom du groupe Union Centriste, je salue l’initiative de Rémi Féraud et des membres de son groupe ; avec cette proposition de loi, ils nous permettent un nouveau débat sur l’accessibilité bancaire dans notre pays.

Rémi Féraud a raison de relever quelques points qui ont déjà fait débat dans notre assemblée et ne paraissent toujours pas réglés. Face à la diminution du nombre de distributeurs automatiques de billets et à leur inégale répartition, il propose notamment la création d’un fonds de garantie de la présence bancaire territoriale.

Je me permets de rappeler qu’au mois de novembre 2018, nous avions examiné une proposition de loi de notre collègue Éric Gold sur le sujet. Puisque j’en avais été désignée rapporteure, je pense utile de rappeler quelques conclusions que j’avais alors déjà exprimées.

Je faisais état en 2018 de l’existence de 56 000 distributeurs automatiques de billets. Selon notre rapporteur Stéphane Sautarel, il y en avait 47 853 en 2021. Ce sont donc plus de 8 000 distributeurs qui ont disparu en cinq ans, soit près de 15 % d’entre eux ! Je trouve ce chiffre bien trop élevé, voire inquiétant.

Il serait plus intéressant encore de connaître l’exacte répartition de ces distributeurs. En 2018, nous n’ignorions pas le coût d’investissement et de fonctionnement des DAB. Aussi, nous avions souhaité connaître la cartographie de l’emplacement de ces appareils. À cet effet, un groupe de travail mandaté par la Banque de France avait été créé, afin de recenser précisément l’offre d’accès aux espèces, tous canaux confondus, et de définir les scenarii d’organisation pour garantir l’accès aux espèces. Cette cartographie devait nous être présentée au mois de janvier 2019.

Le 27 mars 2019, notre commission des finances s’est réunie sur le thème de la dématérialisation des moyens de paiement ; elle a notamment procédé à l’audition de M. Erick Lacourrège, alors directeur général des services à l’économie et du réseau de la Banque de France, qui a tenu les propos suivants : « En ce qui concerne la cartographie, je suis désolé de vous décevoir, mais elle n’est pas terminée. Il ne s’agit pas d’une volonté de rétention d’information. Nous avons recueilli beaucoup de statistiques auprès de l’ensemble des réseaux bancaires. Nous pourrons vous donner un état des lieux extrêmement précis d’ici à la fin du printemps. » M. Lacourrège n’a, il est vrai, pas précisé du printemps de quelle année il entendait parler… Toujours est-il, mes chers collègues, que nous n’avons jamais reçu cette carte !

Je le dis avec force : c’est inadmissible ! Comment débattre valablement aujourd’hui de la présence bancaire et de son évolution sans cet outil indispensable ? C’est un préalable que nous devons exiger, et je souhaite que notre commission des finances en soit enfin destinataire.

Au mois de janvier 2019, M. le gouverneur de la Banque de France déclarait à notre commission des finances : « La Banque de France n’abandonnera jamais les espèces. Nous sommes, au titre de nos missions monétaires, garants de la liberté de choix des Français dans leurs moyens de paiement. Nous n’avons pas à favoriser les espèces plutôt que la carte ou le paiement par mobile, mais nous devons faire en sorte que chacun de ces moyens de paiement soit également accessible, d’égale qualité et d’égale sécurité. »

Aussi, il serait heureux que le Parlement et en particulier la commission des finances du Sénat, qui le demande, disposent des éléments nécessaires à l’appréciation du nombre et de l’emplacement des distributeurs automatiques de billets. Il sera alors plus aisé de remédier aux besoins territoriaux.

C’est pourquoi, en l’absence de documents précis, le groupe Union Centriste partage l’avis de notre rapporteur, qui demande la suppression des articles 1 et 2 de cette proposition de loi. S’il doit, un jour, y avoir un fonds et une péréquation, ce ne peut être qu’à la condition de disposer d’une cartographie en temps réel.

Cependant, nous mettons en garde contre un engrenage qui pourrait se révéler dangereux : celui de rendre un tel fonds pérenne et indispensable. Dès lors, les établissements bancaires conditionneraient l’ouverture d’un distributeur de billets au recours à ce fonds, ce qui créerait d’autres complications : quel montant pour le fonds ? Comment le répartir en respectant la libre concurrence entre les différentes banques ? C’est un sujet que nous n’avons pas abordé et qui mériterait des réponses claires.

Nous soutiendrons les améliorations pertinentes proposées par notre rapporteur aux articles 3 à 6. En effet, en matière d’information, dans un objectif d’efficience, la qualité doit aujourd’hui primer sur la quantité. De même, nous approuvons la proposition du rapporteur de supprimer l’article 7, car nous pensons que l’ACPR doit rester souveraine dans ses décisions. Elle les rend d’ailleurs déjà publiques, ce qui contribue sans doute davantage à leur caractère pénalisant que leur simple montant.

Notre groupe votera donc cette proposition de loi telle qu’amendée par notre assemblée sur l’initiative de notre rapporteur, dont je salue le travail.

J’espère qu’à l’occasion de futures réunions de la commission des finances, nous pourrons enfin disposer de tous les éléments nécessaires à une véritable appréciation de la présence bancaire en France.

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