Intervention de Fabien Gay

Réunion du 9 mai 2023 à 14h30
Influenceurs sur les réseaux sociaux — Discussion en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Fabien GayFabien Gay :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les métiers de l’influence sont l’exemple type d’une activité qui s’est développée à vitesse grand V sans que le pouvoir politique s’en saisisse : il n’a ni vu venir son émergence ni mesuré son importance.

Vous me direz qu’il est difficile de réguler une activité qui vient d’apparaître : c’est vrai. Mais aujourd’hui, étant donné l’ampleur du phénomène – notre pays compte désormais plus de 150 000 influenceurs, qui agissent sur tous les réseaux sociaux et regroupent des agents économiques de différents ordres –, il est temps de mettre fin au Far West.

Lorsqu’une nouvelle activité économique apparaît, beaucoup s’y livrent évidemment en toute honnêteté, mais des abus, voire des escroqueries, se font également jour.

Pour empêcher ces dérives, il ne servirait à rien d’interdire les partenariats rémunérés aux influenceurs. Ce serait une aberration et, même en le voulant, on ne le pourrait pas. La réponse ne relève pas de la morale. Elle ne saurait suivre une logique d’interdiction. Elle suppose un effort de régulation et d’encadrement.

Cette proposition de loi va dans le bon sens en posant un certain nombre de règles. Les agents économiques dont il s’agit s’adressent principalement à un public jeune, âgé de 15 ans à 25 ans, et, de ce fait, très influençable. Parfois, les influenceurs façonnent toute une vision du monde. En les suivant, certains construisent la vision de leur propre corps ou nourrissent l’espoir de devenir riches en quelques clics.

Certains influenceurs sont drôles, d’autres cuisinent, d’autres encore jouent aux jeux vidéo. Certains sont payés pour placer des produits ou des voyages.

Nous regardons des publicités sur tous les écrans, et ce n’est pas interdit. Pour autant, nous ne saurions renoncer à dénoncer la société de consommation, qui ne peut être le seul horizon offert à la jeunesse.

Il faut bien sûr pouvoir avertir le follower que ce qu’il regarde est une publicité. Mais l’affaire se corse lorsque l’influenceur parle de cryptomonnaies ou de copy trading ; lorsqu’il incite à parier ; lorsqu’il vend des produits de beauté frelatés ou fait la promotion d’aliments trop gras, trop sucrés ou trop salés.

Il en va de même de l’incitation à la chirurgie esthétique. À l’adolescence, les complexes sont nombreux : l’espoir de ressembler aux standards de beauté que nous voyons partout et qui s’imposent comme un modèle peut avoir des conséquences très graves.

Oui, dans un certain nombre de domaines, il faut interdire l’exposition de nos adolescents, voire préadolescents, à des produits qui peuvent les isoler socialement, les mettre mal dans leur peau, les ruiner ou menacer leur santé.

Contrairement à la publicité, les contenus proposés par les influenceurs impliquent un lien amical. Le jeune veut ressembler à l’influenceur qu’il suit. Il cherche à l’imiter : les torts qu’il peut subir dépassent largement ceux auxquels nous exposait la publicité, quand – je parle pour ma génération – nous regardions le Club Dorothée.

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