Je serai d’accord avec M. le ministre sur un point et il faut nommer les choses : cet article, dans un texte relatif à l’agriculture, est un cavalier social. On se demande d’ailleurs si l’intention de ses auteurs n’est pas plutôt de prendre de court le Gouvernement, en anticipant sur le prochain projet de loi relatif au plein emploi pour s’arroger la paternité de cette mesure antisociale.
Il est question d’orientation « active ». Je n’ai vu nulle part ce que recouvre cet adjectif ; de fait, une orientation active des demandeurs d’emploi vers les métiers en tension, c’est bien ce qui est déjà mis en pratique à Pôle emploi. Et si le Gouvernement ne communique guère sur les directives que reçoivent les conseillers de Pôle emploi – pour ma part, j’en ai vu certaines –, c’est bien parce que cette politique ne résorbe absolument pas la crise de main-d’œuvre que connaissent les secteurs en tension.
Les métiers saisonniers concernent particulièrement l’agriculture : selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail, un quart des saisonniers travaillent dans ce secteur.
Or les réformes successives de l’assurance chômage ont été pénalisantes pour ces métiers. En effet, comme ces contrats ont en moyenne une durée de 73 jours dans l’agriculture, certains saisonniers agricoles ne remplissent plus, depuis la dernière réforme de l’assurance chômage, les conditions d’accès à l’aide au retour à l’emploi ; l’attractivité de ces emplois a donc chuté.
Il est illusoire de continuer de croire qu’il suffira de contraindre les demandeurs d’emploi à combler les emplois vacants, sans se demander pourquoi ceux-ci sont vacants. En effet, les problèmes d’appariement sont plus complexes qu’on le croit : ils sont dus non seulement aux conditions de travail, mais aussi au sens des emplois proposés.