La séance, suspen d ue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Pascale Gruny.
I. – Le I de l’article 73 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 est ainsi modifié :
a) À la fin du a, le montant : « 27 000 € » est remplacé par le montant : « 29 500 € » ;
b) Au b, les deux occurrences du montant : « 27 000 € » sont remplacées par le montant : « 29 500 € » et le taux : « 30 % » est remplacé par le taux : « 40 % » ;
c) Au c, le montant : « 33 900 € » est remplacé par le montant : « 37 700 € », le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % » et les deux occurrences du montant : « 50 000 € » sont remplacées par le montant : « 75 000 € » ;
d) Au d, le montant : « 38 900 € » est remplacé par le montant : « 48 890 € », le taux : « 10 % » est remplacé par le taux : « 20 % » et les deux occurrences du montant : « 75 000 € » sont remplacées par le montant : « 100 000 € » ;
e) Au e, le montant : « 41 400 € » est remplacé par le montant : « 59 112 € » ;
2° Aux 1° et 2° du 2, le montant : « 150 000 € » est remplacé par le montant : « 200 000 € ».
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 33 rectifié est présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mme Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 94 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 33 rectifié.
L’article 6 prévoit d’augmenter l’ensemble des plafonds applicables à la déduction pour épargne de précaution (DEP).
Nous estimons que cette augmentation se fera surtout au bénéfice des exploitants ayant la capacité d’épargner fortement. Or, pour les sénateurs socialistes, la priorité doit être de soutenir les agriculteurs les plus en difficulté, c’est-à-dire ceux qui peinent aujourd’hui à tirer un revenu décent de leur activité et pour lesquels l’idée d’épargner n’est pas du tout d’actualité.
Par ailleurs, comme cela a été dit lors de l’examen de l’article 5, il faudrait toujours garder en tête le coût de ces allégements fiscaux pour les finances publiques.
Les sénateurs socialistes souhaitent toutefois rappeler qu’ils sont favorables au maintien du dispositif actuel de déduction pour épargne de précaution. Cet outil peut être intéressant pour faire face à la volatilité des revenus et à la multiplication des aléas.
En revanche, en l’absence d’étude d’impact sérieuse, nous démontons l’argument selon lequel son augmentation, dans les proportions envisagées à l’article 6, viendrait répondre à une réelle demande du monde agricole dans sa diversité.
Nous considérons que les éléments ne sont pas réunis pour que nous votions cet article.
En proposant de supprimer l’article 6, notre groupe souhaite dénoncer une nouvelle fois l’iniquité qu’il avait signalée lors des débats sur la réforme de l’assurance récolte en 2022.
L’augmentation de l’ensemble des plafonds applicables à la déduction pour épargne de précaution ne pourra profiter qu’aux exploitants ayant la capacité d’épargner fortement.
En effet, ce système bénéficie seulement à un nombre très réduit d’exploitations. Il semble davantage être un outil d’optimisation fiscale et sociale que de gestion des aléas.
Ainsi, comme l’a précisé la commission des finances du Sénat dans son rapport général sur le projet de loi de finances pour 2020, seules les exploitations agricoles les plus profitables, avec les plus hauts revenus, bénéficient de la mesure. En effet, le rapporteur général souligne que « la situation rarement ou médiocrement bénéficiaire d’une proportion élevée d’exploitations agricoles exclura une grande majorité des exploitations du bénéfice de la nouvelle disposition ».
La hausse des plafonds de l’épargne de précaution n’est pas la solution qui permettra d’encourager la compétitivité de l’agriculture française. L’effort devrait au contraire être à destination des agriculteurs qui peinent aujourd’hui à tirer un revenu décent de leur activité.
De plus, le mécanisme de l’épargne de précaution permet de réduire le bénéfice agricole imposable de l’année, et donc de diminuer le montant de l’impôt sur le revenu et des cotisations sociales dues aux caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA).
Le levier choisi pour permettre à l’agriculture de faire face aux aléas conduira donc à un nouvel appauvrissement de la protection sociale. Il aura notamment des conséquences sur le montant des retraites agricoles, extrêmement faibles.
Pour toutes ces raisons, notre groupe estime qu’il est nécessaire d’évaluer un tel dispositif, au regard des critères du nombre d’exploitations bénéficiaires, de son efficacité pour faire face aux aléas, et du coût qu’il engendre pour la Mutualité sociale agricole.
Nous jugeons donc que la hausse des plafonds proposée n’est pas pertinente. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
Ces deux amendements de suppression reçoivent naturellement un avis défavorable, étant contraires à la position de la commission. Leurs auteurs considèrent que le rehaussement des plafonds de la dotation pour épargne de précaution n’est pas opportun. J’ai également entendu le propos de notre collègue qui souhaite même la remettre en cause.
Pourtant, toutes les auditions ont souligné à quel point elle est un outil essentiel dans la gestion pluriannuelle des aléas climatiques. Elle vient en complément des dispositifs d’assurance récolte qui ont été mis en place l’année dernière.
Les agriculteurs ne s’y trompent pas, puisqu’ils sont de plus en plus nombreux à se saisir de ce dispositif. Selon les chiffres communiqués par l’une des banques qui s’occupent bien des agriculteurs, plus de 53 300 comptes ont été ouverts dans ses établissements en 2022, c’est-à-dire trois ans après l’instauration du dispositif.
Monsieur le sénateur, j’aimerais bien que nous comptions quelque 53 300 agriculteurs extrêmement aisés, possédant de grosses exploitations, mais ce n’est pas le cas ! Aussi, je considère que ce dispositif touche nombre d’exploitations.
Les plafonds n’ont pas augmenté depuis l’instauration de la DEP en 2019. Or, depuis lors, l’inflation est passée par là. À l’occasion de l’examen du texte en commission, j’ai souhaité modérer la hausse initialement prévue, pour trouver un juste équilibre.
Une plus grande résilience de nos agriculteurs face à la multiplication des aléas est essentielle. Selon nous, la déduction pour épargne de précaution est l’un des dispositifs qui permettent d’accroître cette résilience. Nous y sommes donc très attachés.
D’ailleurs, le dispositif a été prolongé de trois ans par la loi de finances pour 2023. En outre, un mécanisme d’actualisation du plafond de déduction, qui tient compte de l’inflation, a été mis en œuvre. Tout cela nous conduit à penser que le dispositif en vigueur est bon.
L’avis est donc favorable sur ces deux amendements.
Oui, le dispositif de déduction pour épargne de précaution est bon et nous le soutenons, comme le Sénat, mais dans sa version actuelle. À notre sens, je le répète, il n’est pas nécessaire d’y revenir.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L ’ article 6 est adopté.
À titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter de la promulgation du décret prévu au dernier alinéa du présent article, une déduction supplémentaire à celle prévue au I de l’article 73 du code général des impôts est ouverte aux exploitants agricoles mentionnés au 1 du même I, sous réserve qu’ils souscrivent un engagement contractuel pluriannuel portant sur la vente ou l’achat d’une quantité de céréales, fourrages ou aliments du bétail déterminée à un prix convenu.
Cette déduction supplémentaire peut être librement pratiquée au titre de chacun des exercices clos durant la période d’exécution du contrat. Son montant cumulé réalisé au titre desdits exercices ne peut excéder 30 000 €.
En cas d’inexécution, même partielle, du contrat mentionné au premier alinéa du présent article, la fraction de déduction supplémentaire mentionnée au présent article non encore rapportée est rapportée au résultat de l’exercice de constatation de cette inexécution, majorée d’un montant égal au produit de cette somme par le taux de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du code général des impôts.
Un décret précise les modalités d’application du présent article.
L’amendement n° 34 rectifié, présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
Pour des raisons analogues à celles que nous avons invoquées à l’amendement n° 33 rectifié, nous ne sommes pas favorables à la multiplication des allégements fiscaux sans étude d’impact précise et préalable qui permettrait d’en évaluer les éventuelles conséquences.
Cet amendement a donc pour objet de supprimer l’article 7, qui vise à instaurer à titre expérimental une DEP supplémentaire, en cas de contractualisation entre les filières animales et végétales, qui pourrait être librement appliquée dans la limite de 30 000 euros par exercice budgétaire.
Une fois de plus, nous nous interrogeons sur les réels bénéficiaires d’un tel dispositif. Est-ce qu’une telle mesure répond véritablement à l’exigence d’un « choc de compétitivité », pour reprendre les termes de l’intitulé de la présente proposition de loi ?
Cet article 7, qui a pour objet d’instituer l’expérimentation, pour une durée de trois ans, d’une DEP supplémentaire en cas de contractualisation entre les filières animales et végétales, répond à une forte demande de la profession agricole, issue particulièrement des filières animales.
Elles subissent de plein fouet les fluctuations du cours des céréales, qu’elles ne parviennent que très imparfaitement à répercuter sur leurs prix de vente.
Monsieur Redon-Sarrazy, pour répondre à votre question sur les avantages d’un tel dispositif, une contractualisation entre ces filières permettrait aux éleveurs de bénéficier de prix convenus à l’avance ainsi que d’une lisibilité sur plusieurs années. Je le répète, c’est là une demande de l’ensemble des filières, et cela permettrait de ne léser aucune partie.
Avis défavorable.
M. Marc Fesneau, ministre. Avis favorable sur cet amendement n° 34 rectifié, qui tend à supprimer l’article 7.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Cela étant dit, il faut reconnaître que la mesure proposée à l’article 7 est intéressante à double titre. D’une part, elle a pour objet d’inviter les filières animales et végétales à contractualiser – et il faut les y encourager. D’autre part, la dotation d’épargne de précaution doit être davantage déployée pour améliorer la résilience de nos exploitations, comme nous l’avons déjà mentionné.
Toutefois, nous sommes opposés à cette mesure – sur le fond, on peut essayer de travailler sur ce sujet –, en raison de la rédaction actuelle de l’article, qui soulève des difficultés.
Premièrement, cette proposition est susceptible de constituer une subvention aux prix, contraire aux règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et pouvant être qualifiée d’aide d’État, au regard des règles européennes. En effet, la mesure viendrait baisser le coût du contrat pour les producteurs, créant une distorsion de concurrence, qu’il paraît difficile de justifier.
Deuxièmement, la mesure proposée s’articule mal avec le renforcement des règles en matière contractuelle, inscrit dans le cadre de la loi Égalim, où est établi le principe du caractère pluriannuel des engagements contractuels. Il faut noter que les filières végétales ont souhaité déroger au cadre établi par Égalim, plus spécifiquement à la pluriannualité, au motif qu’elle n’était pas adaptée à leur fonctionnement.
Troisièmement, cet article aurait davantage sa place dans un projet de loi de finances.
Nous avons sans doute besoin de travailler sur un mécanisme qui permettrait de creuser la piste que vous envisagez à cet article 7, madame la rapporteure.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 7 est adopté.
Par dérogation au premier alinéa du I de l’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, une expérimentation de l’utilisation des aéronefs télépilotés ou contrôlés par intelligence artificielle pour la pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques est menée, pour une période maximale de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, sur des surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % ou dans le cadre d’une agriculture de précision sur des surfaces restreintes.
Les conditions et les modalités de cette expérimentation sont définies par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture, de l’environnement et de la santé de manière à garantir l’absence de risque inacceptable pour la santé et l’environnement.
Cette expérimentation fait l’objet d’une évaluation par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, visant à déterminer les bénéfices liés à l’utilisation de drones pour l’application de produits phytopharmaceutiques en matière de réduction des risques pour la santé et l’environnement.
Mon intervention portera sur le fondement même de cet article 8, qui prévoit de rétablir l’épandage aérien des produits phytopharmaceutiques. Elle fera également référence aux articles 13 et 18, que nous examinerons ultérieurement.
Avant d’aborder les questions techniques que soulèvent ces articles, il me semble tout de même nécessaire de rétablir quelques vérités au regard du discours tenu sur les pesticides selon lequel nous serions l’un des pays les plus exigeants, et l’un de ceux qui surtransposeraient le plus…
Face à ce discours, je rappellerai simplement que l’Agence européenne pour l’environnement (AEE), qui appelé l’ensemble des États membres à réduire leur consommation de pesticides, a indiqué que les plus fortes augmentations de vente de substances actives ont été enregistrées en Allemagne et en France entre 2011 et 2020.
D’après l’Atlas des pesticides, la France serait même le troisième pays de l’Union européenne à autoriser le plus de substances actives, pour un total de près de 291 substances autorisées.
Je tiens également à rappeler que 34 % de l’eau distribuée en France serait non conforme aux réglementations, notamment à cause d’une contamination par les métabolites du chlorothalonil, un pesticide interdit depuis 2019.
Monsieur le ministre, nous pourrions également revenir sur votre opposition à l’interdiction de l’herbicide S-métolachlore, alors même que l’Anses a prouvé que des dérivés de ce pesticide ont été retrouvés dans des eaux souterraines.
Nous pourrions également évoquer les injonctions à ne pas trop contrôler les arboriculteurs adressées aux inspecteurs de l’Office français de la biodiversité (OFB).
Mes chers collègues, vous le voyez, les exemples ne manquent pas pour prouver la quantité de pesticides dans les méthodes de production et le poids de ce lobby industriel dans de nombreuses décisions des pouvoirs publics !
Cet article 8, qui revient sur une disposition qui avait fait consensus lors de l’examen de la loi Égalim, le prouve également. Nous nous y opposerons donc avec conviction.
Nous abordons l’examen de l’article 8, qui autorise l’usage d’aéronefs télépilotés pour la pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques.
J’avais à cœur d’intervenir sur ce sujet qui touche directement mon département, où le vignoble est caractérisé, par endroits, par de fortes pentes.
Le recours à des drones représente sur ces parcelles la meilleure des solutions pour la santé des opérateurs, d’une part, pour le respect et la protection de l’environnement, d’autre part.
En effet, le traitement par voie terrestre est particulièrement dangereux pour les opérateurs qui en sont chargés.
Rappelons que procéder par voie terrestre les oblige à être directement au contact des produits et les expose à un fort risque d’accident, tant il n’est pas rare que, dans le contexte de forte pente, les chenillards se renversent.
Aussi, le recours aux drones constitue pour les salariés une amélioration de leurs conditions de travail.
Par ailleurs, l’efficacité, la précision et la rapidité du recours aux drones permettent des interventions efficientes et ciblées, dans le respect de l’environnement.
C’est ce que confirme l’expérimentation qui s’est achevée en octobre 2022 à Guebwiller, en Alsace. Or, à l’issue de cette expérimentation, et en dépit des conclusions positives de l’évaluation réalisée par l’Anses, les exploitants concernés sont aujourd’hui sans solution.
Il convient d’être vigilant et d’anticiper la fin de l’expérimentation pour les producteurs.
Aussi, je suis particulièrement favorable à cet article, dont je salue la modification de bon sens apportée par Mme la rapporteure en commission en vue d’en assurer la conformité avec le droit européen.
Ce sujet illustre parfaitement la manière dont l’innovation et la technologie peuvent être au service de l’agriculture, en aidant les exploitants à concilier les contraintes inhérentes à leur activité avec le respect de l’environnement.
Dès lors, ne soyons pas dogmatiques et embrassons les progrès !
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 35 rectifié est présenté par Mme Bonnefoy, MM. Tissot, Montaugé et Devinaz, Mme Préville, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mme Monier, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 60 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 107 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 35 rectifié.
L’article 8 introduit une dérogation au principe général d’interdiction de la pulvérisation aérienne des produits phytopharmaceutiques, en autorisant l’utilisation d’aéronefs télépilotés et contrôlés. Cette dérogation générale reviendrait ainsi sur une interdiction introduite par les lois Grenelle dans le droit français conformément à une directive européenne de 2009.
Dans mon rapport d’information sur les pesticides adopté par le Sénat en 2012, je relevais, avec Sophie Primas, que cette technique présentait le risque d’exposer aux produits épandus des espaces situés à proximité de la zone d’épandage.
La dérive, lors des épandages aériens, est d’autant plus importante que le vent est fort.
Cette volatilité est un réel problème, souligné, d’ailleurs, par le rapport d’expertise de l’Anses publié à l’automne : selon ce dernier, « les applications par drone s’avèrent dans l’ensemble moins efficaces que celles par pulvérisateurs classiques ».
Par ailleurs, le même rapport constate que « les niveaux de contamination des mannequins, placés à une distance de la parcelle de 3 et 10 mètres, sont supérieurs lors d’une pulvérisation avec un drone en comparaison avec un atomiseur à dos ».
Alors que cette étude renforce les inquiétudes sanitaires et remet même en question l’efficacité de cette technique, il n’est pas sérieux de revenir sur cette interdiction. Il y va de la protection de la santé de nos agriculteurs, qui sont les premières victimes des pesticides.
Les dérogations à l’interdiction de l’épandage aérien qui existent d’ores et déjà doivent rester l’exception et répondre à des motifs très précis.
Pour ces raisons, nous vous demandons de supprimer cet article, qui, s’il était adopté, remettrait en cause un acquis législatif solide pour la défense de notre environnement.
La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour présenter l’amendement n° 60.
Nous ne pouvons pas véritablement conclure à ce jour que l’utilisation des drones pour la pulvérisation de précision des pesticides sur les terrains agricoles soit sans danger pour la santé et l’environnement.
En revanche, ce que nous savons avec certitude, c’est que les populations d’oiseaux des milieux agricoles ont chuté de 43 % en quarante ans et que les insectes et les pollinisateurs disparaissent de manière dramatique. Nous faisons partie des pays qui, comme d’autres, peinent à maintenir la biodiversité dans leurs milieux agricoles, alors même que produire autrement est aujourd’hui une question de survie du modèle agricole lui-même.
Au regard de ces éléments, du manque d’informations sur les impacts potentiels sur l’environnement et en application du principe de précaution, il nous paraît nécessaire de poursuivre les études à ce sujet et de mettre en place des procédures d’évaluation de risques sur l’environnement, en particulier sur les pollinisateurs, qui, nous le savons, sont indispensables à notre système agroalimentaire.
De plus, nous ne pouvons avec certitude écarter le risque sur la santé des agriculteurs et des salariés agricoles eux-mêmes.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Comme nos collègues socialistes et communistes, nous plaidons pour la suppression de cet article.
Je veux simplement, en complément de ce qui a déjà été dit – et bien dit –, appuyer sur les conclusions du rapport publié par l’Anses en 2022, qui vient alimenter nos craintes. Ce rapport dénonce une dérive aérienne 4 à 10 fois supérieure pour les vignes et les bananeraies et une potentielle dérive, dans les sédiments, 3 à 5 fois plus importante pour les pommiers.
L’Anses précise que les drones entraînent un courant descendant dû à leur rotor, qui représente des risques différents des technologies préexistantes. Elle montre un dépôt de pesticides irrégulier sur les cultures, qui peut exposer les travailleurs à des quantités de produits problématiques.
Comment, dans ces conditions, proposer d’ouvrir à des usages plus larges ?
L’expérimentation proposée ne nous semble pas conforme à l’interdiction des épandages aériens prévue par le droit européen. Elle va à rebours d’une politique de sortie de l’usage des pesticides que nous appelons de nos vœux, cependant qu’elle expose nos concitoyens à des risques nouveaux.
Nous proposons donc avec force la suppression de cet article. Nous ne pouvons accepter d’entendre dire que les agriculteurs n’ont pas d’autre solution. D’autres solutions existent ! Il faudra bien s’engager dans la sortie des pesticides, donc se fixer des trajectoires. Nous attendons beaucoup du Gouvernement sur ce plan.
L’usage des drones en agriculture ne fait pas consensus, comme le prouvent ces amendements de suppression. Je vais essayer de m’en tenir aux faits et de ne pas trop verser dans l’opposition dogmatique.
Je vous rappelle que la rédaction initiale envisageait une autorisation générale de l’utilisation des drones. Notre commission a largement fait évoluer le dispositif, en le transformant en une expérimentation sur terrain en pente et réduite à l’agriculture de précision.
En effet, nous manquons encore de données. C’est d’ailleurs l’une des conclusions principales du rapport de l’Anses.
Or, pour avoir des données, madame Varaillas, il faut expérimenter ! Par définition, il n’y a pas de données sans expérimentation…
Bien évidemment, l’usage du drone ne sera pas la réponse à tout en tous lieux pour toutes les problématiques auxquelles les cultures sont confrontées, mais il semble que les résultats préliminaires soient intéressants en ce qui concerne les dérives de pulvérisation, comme le signale l’Anses dans son rapport. Je ne suis pas certaine que nous en ayons lu les mêmes pages…
Le fait que l’Anses reconnaisse qu’il faut collecter davantage de données pour pouvoir mener correctement à la fois le travail d’évaluation et le travail de recommandation sur l’utilisation des drones plaide en faveur de cette expérimentation. Si nous nous en passions, ce serait un mauvais signal envoyé aux agriculteurs pour poursuivre dans la voie de l’innovation.
Il est assez clair qu’un agriculteur intervenant au bout de son champ et en l’absence de vent est bien plus protégé, en cas d’infestation par des insectes ou d’autres maladies, quand il pulvérise par précision que lorsqu’il pratique un épandage plus classique. Il en est de même, d’ailleurs, pour les riverains.
Il ne faut pas se priver des progrès liés à l’innovation, il faut les quantifier. Et, si ce ne sont pas de vrais progrès, il faut le dire !
Quoi qu’il en soit, il faut collecter de la donnée, raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
À la vérité, la rédaction initiale de l’article aurait pu justifier que nous émettions un avis favorable sur vos amendements, mais, comme Mme la rapporteure l’a rappelé, le travail qui a été fait en commission permet d’orienter l’usage des drones d’une façon qui nous semble pertinente.
D’abord, c’est une expérimentation. Je me réjouis que tout le monde se réfère au rapport de l’Anses – cela préfigure les débats que nous aurons à l’article 13 –, même si chacun n’en lit manifestement pas les mêmes pages…
Dans ce rapport, l’Anses constate qu’il y a des données intéressantes, mais que l’on aurait besoin de données complémentaires. C’est bien que l’Anses reconnaisse elle-même qu’elle n’est pas pleine de certitudes. N’ayons pas plus de certitudes que l’Anses ! Sinon, on attentera à la réalité des faits scientifiques… Il est nécessaire de pousser l’examen plus avant.
Que dit l’Anses ? Que l’on a besoin de données complémentaires.
Vous avez le droit de faire du refus des drones une position de principe – je ne parle même pas de dogmatisme. Cependant, l’encadrement proposé par votre commission permet d’engager une expérimentation, sur des terrains en pente et dans le cadre d’une agriculture de précision sur des surfaces restreintes.
Dès lors qu’elle vient servir l’objectif de réduction et de dosage au mieux de la molécule utilisée pour tel ou tel usage, le recours au drone nous paraît aller dans le bon sens.
De fait, cet équilibre me paraît intéressant, même s’il méritera sans doute que l’on y travaille encore.
Il est cependant un point sur lequel nous pouvons, me semble-t-il, avoir un vrai désaccord.
Je n’ai pas d’appréhensions par rapport à la technologie. Je ne dis pas non plus qu’elle marque nécessairement un progrès, mais, au moins, regardons, expérimentons, et essayons de voir si elle ne peut pas apporter des solutions à des défis techniques posés à l’agriculture.
Je veux bien que l’on parle d’autres solutions, mais, à un moment, si l’on refuse la technologie, si l’on refuse la robotique, le numérique, les drones, la recherche génétique, on va se retrouver face à des « y’a qu’à faut qu’on » de tribune, et à rien d’autre. Or nous avons besoin d’alternatives dans la trajectoire que nous essayons de tenir, qui est une vraie trajectoire de réduction d’usage des produits phytosanitaires. Cet usage expérimental des drones y contribue.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
J’irai dans le sens de Mme la rapporteure, pour dire que nous avons intérêt à utiliser ces drones, par dérogation, en m’appuyant sur l’exemple de la riziculture dans mon département.
Nous avons besoin de la riziculture en Camargue. Nous avons besoin de riziculteurs, dans les Bouches-du-Rhône comme dans le Gard, notamment pour maintenir cette Camargue qui nous est chère – ils m’ont d’ailleurs saisi en ce sens, monsieur le ministre, comme ils l’ont fait avec vous.
Marques d ’ ironie sur les travées du groupe GEST.
La Camargue n’est pas pentue, mes chers collègues, mais l’utilisation des drones nous faciliterait la tâche, car le terrain est très meuble, ce qui est très problématique, et la riziculture se pratique sur un territoire très exigu.
Nous avons besoin de la riziculture pour l’apport d’eau potable brute sur ce secteur, pour maintenir l’équilibre de notre Camargue. Sinon, cela fera augmenter la salinité.
Nous avons donc besoin de cette dérogation, et j’espère, monsieur le ministre, que vous l’accepterez pour maintenir la riziculture et pour maintenir cet équilibre qui nous est si cher en Camargue.
… puisque, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, je suis convaincu – et mon seul dogme est celui-ci – que nous devons trouver des alternatives aux pesticides et aux produits phytosanitaires.
Or la solution qui nous est proposée n’est évidemment pas une alternative. C’est une manière d’appliquer différemment des produits phytosanitaires, mais, je le répète, ce n’est pas une alternative à ces produits. Il faut s’entendre sur les choses.
La problématique des produits phytosanitaires est clairement une problématique sanitaire. Un produit phytosanitaire a un impact sur les populations, sur l’eau, sur la biodiversité. Il faut donc évidemment parvenir à mettre en place une transition pour éviter l’application de ces produits, qui, en premier lieu, ont un impact sur les populations qui l’utilisent, donc sur les agriculteurs.
Je reviens sur le rapport de l’Anses.
C’est bien de demander des rapports ou des expérimentations, mais il faut ensuite les étudier ! Certes, on peut en regarder toutes les pages, mais un article, une page, suffit parfois à comprendre que ces produits et ce mode d’application peuvent avoir un impact très fort sur les personnes qui les utilisent.
De fait, on lit, dans l’article concernant les travailleurs, que « plusieurs études montrent que les dépôts sur les cultures présentent une variabilité supérieure après utilisation de drones en comparaison avec les matériels d’application classiques. Ainsi, la question de l’impact de la quantité des dépôts sur les cultures sur l’exposition des travailleurs se pose ».
Il faut savoir s’arrêter là et se dire que ce mode d’application n’apporte rien par rapport aux modes classiques et que la vraie solution réside bien dans les alternatives aux pesticides.
Monsieur le ministre, permettez-nous d’être un peu circonspects.
On nous annonce la baisse des pesticides depuis des années. En 2015, on nous annonçait, une baisse de 50 % pour 2030. Il y a eu, depuis, la COP15. Vous nous direz où nous en sommes, mais les chiffres dont je dispose montrent que leur utilisation a augmenté plus qu’elle n’a baissé.
On met toujours en avant la technologie, censée nous sauver. C’est un peu comme les frappes chirurgicales : on nous promet que les buses seront de plus en plus précises, de moins en moins nombreuses…
Résultat des courses, la baisse des pesticides n’est pas au rendez-vous. C’est un miroir aux alouettes. Je n’utilise pas cette expression par hasard, car ce petit passereau de nos plaines qu’est l’alouette est en train de disparaître, comme le bruant ortolan.
Une étude qui vient de paraître met en avant le rôle des pesticides dans la disparition des oiseaux. Pendant longtemps, comme dans beaucoup d’autres domaines, on a joué sur le doute, disant qu’elle était multifactorielle. Non ! La hiérarchie des causes est désormais clairement établie : ce sont les pesticides qui expliquent que ce petit oiseau, dont on parlait dans nos contes et qui figurait dans plein de nos expressions – songeons au pâté d’alouette –, est en train de disparaître. Or, quand l’alouette disparaît, c’est tout un écosystème qui disparaît. Et, on le sait, quand un écosystème disparaît, ce sont des chaînes alimentaires, des chaînes trophiques qui s’amenuisent, et une résilience qui disparaît. Il faut alors utiliser plus de pesticides… Voilà où nous en sommes : à un système qui appelle toujours plus de pesticides.
Je suis désolé, mais les facteurs technologiques ne nous conduisent pas vers une réduction. Permettez donc que nous soyons plus que circonspects !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano, Bilhac, Corbisez, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Après le mot :
aéronefs
insérer les mots :
à motorisation non thermique
II. – Alinéa 3
Après le mot :
drones
insérer les mots :
à motorisation non thermique
La parole est à M. Christian Bilhac.
Le présent amendement, déposé par notre collègue Henri Cabanel, a pour objet de préciser que les drones mentionnés à l’article 8 ne peuvent être des drones dont la motorisation est thermique.
Il faut rappeler, dans un premier temps, que cet article vise à déroger au principe d’interdiction des traitements aériens pour les produits phytosanitaires dans les États membres de l’Union européenne.
Si cette procédure d’exception ne s’étend qu’aux aéronefs télépilotés ou contrôlés par intelligence artificielle, pour la pulvérisation de précision de produits phytopharmaceutiques sur des terrains agricoles en pente ainsi que pour l’agriculture de précision, il me semble nécessaire de rappeler que le plus haut niveau d’exigence environnementale indispensable à l’autorisation de cette dérogation passe aussi par la limitation des émissions directes en gaz à effet de serre.
En ce sens, il n’est pas concevable que la dérogation prévue par le présent article puisse autoriser le recours à des aéronefs à motorisation thermique, d’autant plus dans le contexte de la transition énergétique et écologique.
Il faut rappeler que l’autonomie reste l’un des points faibles des drones et peut varier selon les conditions météorologiques ou les manœuvres à effectuer. L’une des possibilités d’extension serait de passer sur des systèmes de motorisation électriques ou hybrides, en empêchant le recours à des drones dont la motorisation est uniquement thermique.
Mon cher collègue, cet amendement me laisse quelque peu circonspecte…
D’après ce que j’ai pu trouver dans la documentation – il n’y en a pas beaucoup –, il existe très peu de drones à propulsion thermique. Les drones fonctionnent essentiellement avec des batteries.
Par conséquent, je ne suis pas sûre que cet amendement ait une portée très importante.
J’émets donc un avis défavorable, mais j’avoue que mon argumentation n’est pas extrêmement solide.
Je suis également défavorable à l’amendement, et j’userai des mêmes précautions de langage que Mme la rapporteure.
Je veux simplement lire le premier paragraphe des recommandations de l’Anses, à destination de MM. Gontard et Salmon : « Au regard de l’interdiction des applications de produits phytopharmaceutiques par hélicoptère et des limites associées au passage des pulvérisateurs, le recours à des drones de pulvérisation est envisagé comme une alternative pouvant présenter de multiples avantages. » Ce n’est pas moi qui le dis : c’est l’Anses !
Exclamations sur les travées du groupe GEST.
Ne triez donc pas dans ce que dit l’Anses. Du reste, cette recommandation ne signifie pas que l’agence ne prend pas de précautions sur un certain nombre de sujets et d’usages, mais que les débats sont permis.
J’en veux pour preuve que vous avez manifestement vous-mêmes des débats avec l’Anses ! C’est, d’ailleurs, intéressant.
M. Guillaume Gontard proteste.
Écoutez-moi, monsieur Gontard ! Vous venez d’arriver…
L’Anses estime qu’il y a de multiples avantages, mais aussi des doutes concernant les personnes qui traverseraient les parcelles après la pulvérisation – il y en a moins s’agissant des utilisateurs.
Au fond, ce que dit l’Anses, c’est que nous avons besoin d’une expérimentation et de données complémentaires. Ni vous ni moi ne savons. L’expérimentation peut donc avoir son intérêt.
Pardon, madame la présidente, d’avoir outrepassé mon avis sur l’amendement lui-même. Je voulais préciser des choses sur ce que l’Anses dit, sur ce qu’elle sait et ne sait pas, et sur ce que doivent être les décisions du politique.
J’ai du mal à suivre. Mme la rapporteure me dit : « Cet amendement n’a pas lieu d’être puisque les drones sont électriques ! »
Si les drones sont électriques, l’amendement est d’ores et déjà satisfait !
Sur le fond, je ne vois pas la différence entre un hélicoptère à moteur thermique avec un pilote et autre sans pilote. Il faut être logique ! Un drone, c’est un aéronef sans pilote, mais cela reste un aéronef.
Étant donné qu’il a le même moteur, à part le fait que l’absence de pilote permet de transporter 80 litres de produits supplémentaires, je ne vois pas de différence.
Je suis donc un peu surpris par les motivations de l’avis défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 36 rectifié, présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
phytopharmaceutiques
par les mots :
autorisés en agriculture biologique
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
Cet amendement est un amendement de repli par rapport à l’amendement de suppression de cet article défendu par le groupe socialiste.
Il s’agit de limiter la réintroduction de cette expérimentation à un dispositif proche de celui qui avait été voté dans le cadre de la loi Égalim, afin que la pulvérisation par drone ne puisse être autorisée que pour les produits autorisés en agriculture.
En effet, nous tenons à rappeler que nous souhaitons avant tout le maintien de l’interdiction générale de l’épandage aérien de pesticides, avec, comme seule exception, les cas de dangers sanitaires graves ne pouvant être maîtrisés par d’autres moyens, comme le précise actuellement l’article L. 253-8 du code rural.
Je serai très bref. Je veux simplement répondre à M. le ministre.
On entend souvent le même argumentaire : l’évocation de situations qui seraient encore pires. En l’occurrence, ce serait pire si c’était en hélicoptère…
Pour notre part, nous ne sommes pas pour le « moins pire » ! Nous sommes pour le « vraiment mieux ».
Sur les pesticides, le mieux, c’est souvent pas de pesticides du tout !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Duplomb et J.M. Boyer, Mme Férat, MM. D. Laurent et Menonville, Mme Gruny, MM. Paccaud et Henno, Mme Loisier, M. Bascher, Mmes Berthet et Puissat, MM. Bacci et Burgoa, Mme Demas, M. Savary, Mme Thomas, M. Decool, Mme Schalck, M. Pellevat, Mme Lassarade, M. Hugonet, Mme Belrhiti, M. Chasseing, Mme Ventalon, MM. Bouchet, B. Fournier et Canévet, Mme M. Mercier, MM. Rietmann et Daubresse, Mmes Drexler, Billon et Pluchet, MM. Détraigne, C. Vial et Pointereau, Mme Lopez, M. Duffourg, Mme Joseph, M. Chauvet, Mme Garriaud-Maylam, M. Somon, Mmes Bellurot et Malet, MM. Chatillon, Genet et Lefèvre, Mme Dumont, M. Charon, Mme Dumas, MM. J.P. Vogel et Folliot et Mme Imbert, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Après le taux :
insérer les mots :
, sur des cultures submergées
La parole est à M. Laurent Duplomb.
Pour défendre cet amendement, je reprendrai en partie les propos de Laurent Burgoa concernant la riziculture.
Il faut être conscient que la riziculture rencontre aujourd’hui de plus en plus de problèmes. La surface cultivée est passée de 14 000 hectares en 2020 à tout juste 10 000 hectares en 2022. L’utilisation de drones pour que la pulvérisation soit la plus limitée possible pourrait régler le problème de l’utilisation des phytosanitaires dans la riziculture, avec la difficulté de la mécanisation évoquée par mon collègue.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai l’amendement n° 9 rectifié en même temps.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Duplomb, Mme Férat, M. J.M. Boyer, Mme Loisier, M. Menonville, Mme Gruny, M. D. Laurent, Mmes Puissat et Berthet, MM. Bascher, Henno, Paccaud et Savary, Mme Demas, MM. Burgoa et Bacci, Mme Schalck, M. Decool, Mme Thomas, M. Pellevat, Mme Belrhiti, M. Hugonet, Mme Lassarade, MM. B. Fournier et Bouchet, Mme Ventalon, MM. Chasseing et Rietmann, Mme M. Mercier, M. Canévet, Mmes Malet et Bellurot, M. Somon, Mme Garriaud-Maylam, M. Chauvet, Mme Joseph, M. Duffourg, Mme Lopez, MM. Verzelen, Pointereau, C. Vial et Détraigne, Mmes Billon et Drexler, MM. Daubresse, Genet, Chatillon, Lefèvre et Charon, Mmes Dumont et Dumas, MM. J.P. Vogel et Folliot et Mme Imbert, et ainsi libellé :
Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
Lorsque, à l’issue d’une expérimentation menée au titre de l’article 82 de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, l’évaluation conduite par l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail conclut à l’absence de risques inacceptables pour la santé et l’environnement, le ministère en charge de l’agriculture peut délivrer, dans le respect de l’article 9 de la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable, pour la production concernée et pour une durée ne pouvant excéder cinq ans, une autorisation d’utilisation des aéronefs télépilotés ou contrôlés par intelligence artificielle pour la pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques.
L’autorisation sera évaluée tous les deux ans par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Dans la mesure où l’Anses parviendrait à conclure que l’utilisation des drones serait sans risque, l’amendement n° 9 rectifié laisse la possibilité d’une autorisation provisoire pour cinq ans, avec l’obligation d’une réévaluation par l’agence tous les deux ans, pour vérifier que ce risque déterminé comme nul ou faible à une période ne puisse pas définitivement évoluer négativement par la suite.
Cela permettrait de garantir que l’Anses puisse, après la publication de cette étude, considérer l’utilisation du drone comme une solution et de voir comment on peut non seulement encadrer cette évolution, mais aussi vérifier sa pertinence au fur et à mesure du temps.
Je sollicite le retrait de l’amendement n° 8 rectifié, qui est d’ores et déjà satisfait : rien n’empêche la riziculture d’utiliser l’expérimentation telle qu’elle est prévue à cet article.
Je comprends l’intention qui sous-tend l’amendement n° 9 rectifié. Je souligne que les autorisations qui pourraient être délivrées par le ministre de l’agriculture devront, d’une part, se fonder sur une décision de l’Anses relative à l’absence de risque inacceptable pour la santé et l’environnement, ce qui est de nature à rassurer tout le monde, et, d’autre part, respecter les prescriptions de l’article 8 de la directive européenne relative à l’usage des pesticides. Il s’agit donc de ne s’affranchir ni de l’évaluation de l’Anses ni du droit européen.
Toutefois, je m’interroge sur l’opportunité de laisser à l’appréciation d’une autorité administrative le soin d’ouvrir la possibilité au ministère de délivrer ou non des autorisations d’utilisation de drones pour certaines productions.
Une expérimentation de cinq ans doit être menée. Il sera bien temps de légiférer de nouveau à la lumière des conclusions qu’on pourra en tirer. Je m’en remets donc, pour cet amendement, à la sagesse de notre assemblée.
Conformément à ce que j’ai dit tout à l’heure, il me semble que l’équilibre qui a été trouvé par la commission est un bon équilibre.
Je suis donc défavorable à ces deux amendements.
Il me paraît utile, pour préparer les débats intéressants que nous aurons à l’article 13, d’entendre ce qui est dit sur le respect à la fois de la réglementation européenne et de l’avis de l’Anses.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement est adopté.
Je mets aux voix l’article 8, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 284 :
Le Sénat a adopté.
L’amendement n° 37 rectifié, présenté par MM. Montaugé, Tissot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un bilan exhaustif des systèmes actuellement soutenus au titre des paiements pour services environnementaux, et analyse les freins ou les leviers qui permettraient d’en accroître l’efficacité et le développement.
Ce rapport s’attache notamment à évaluer l’intégration des paiements pour services environnementaux dans la nouvelle politique agricole commune, leur articulation avec les autres outils existants et leur reconnaissance dans le cadre du plan stratégique national français afin de proposer, le cas échéant, des pistes de réflexions pour en encourager le développement.
La parole est à M. Franck Montaugé.
Les membres de mon groupe espèrent que, dans le cadre de la future loi d’orientation, l’agroécologie, sur la voie de laquelle on s’est engagé en 2014, sera confortée et approfondie. Si c’est le cas, comme je l’espère, il faudra se doter d’outils pour valoriser les apports environnementaux de l’agriculture en général et des agriculteurs en particulier – les reconnaître et les payer.
Depuis 2018, notre groupe se bat pour faire entrer ces PSE dans la loi. Cette année-là, nous avions voté ici – à l’unanimité, si je me souviens bien – une proposition de loi visant à leur création.
Trois ans plus tard, dans le cadre de la loi Climat et résilience, nous faisions entrer, dans le code rural et de la pêche maritime – à l’article L. 1 –, la notion de PSE.
Les gouvernements qui se sont succédé ces derniers temps ont un peu avancé en ce sens, notamment en créant un fonds de 150 millions d’euros dans le cadre du plan biodiversité pour développer les PSE.
Il faut, monsieur le ministre, aller beaucoup plus loin. Vous avez dit précédemment, sur ce point, que c’était compliqué. Je me suis rendu compte que des études et des recherches étaient menées sur ce sujet depuis vingt ans, si ce n’est trente ans. Je suis d’accord avec vous, c’est extrêmement compliqué, mais je pense que nous avons la matière pour avancer.
Cet amendement vise donc, au travers de cette demande de rapport, à faire un point de situation et à tracer des perspectives pour que soit prise en compte la dimension environnementale de la compétitivité.
Il n’est pas dans l’habitude du Sénat de demander des rapports au Gouvernement. Toutefois, comme je l’ai déjà dit, j’ai conscience que les PSE sont un levier trop peu mobilisé pour encourager et aider financièrement les agriculteurs à mener des actions visant à maintenir ou à restaurer des services écosystémiques.
J’ai également le souvenir qu’une précédente demande de rapport avait été faite via un amendement adopté dans le cadre de la loi Climat et résilience, sur l’initiative de la rapporteure Anne-Catherine Loisier, et relatif à l’extension des PSE à la forêt. Aussi, à l’instar de Franck Montaugé, j’invite le Gouvernement à se pencher sérieusement sur cette question.
L’avis est donc favorable.
M. Marc Fesneau, ministre. Monsieur le sénateur Montaugé, nous partageons le point de vue selon lequel ce sujet est compliqué, mais que ce n’est pas une raison pour ne pas avancer ! Or d’aucuns invoquent parfois l’argument de la complexité pour ne pas améliorer les choses – cela nous est arrivé à tous de le faire.
Sourires sur des travées du groupe Les Républicains.
Il y a deux questions : que sont les services environnementaux et qui les paie, sur quel budget – celui de l’agriculture ou un autre ? Ce point est d’ailleurs valable au niveau national comme au niveau européen.
Revient-il au budget de l’agriculture, ou à d’autres budgets, de payer un service lié à l’entretien du paysage ou à la biodiversité ? C’est une bonne question !
Il faut donc définir ce que sont ces services et qui doit les payer. Si, chaque fois, la réponse est que leur financement relève du budget de l’agriculture, nous aurons un problème au regard de nos objectifs de compétitivité.
Je suis défavorable à cet amendement, car cette question ne peut être résolue par la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement. Je veux néanmoins ouvrir une porte : je propose que le corps d’inspection qu’est le CGAAER travaille sur ce sujet – peut-être en collaboration avec des équipes ne relevant pas du ministère de l’agriculture – afin de documenter ce que sont les PSE et d’étudier les voies de leur financement.
Telle est la proposition concrète que je vous fais, car nous avons besoin d’une étude complémentaire rédigée par un corps d’inspection qui soit au fait de ces sujets, plutôt que d’un rapport du Gouvernement.
Je remercie Mme la rapporteure pour son soutien sur cet amendement.
J’entends votre proposition, monsieur le ministre, et j’y suis très favorable. J’ajouterai un commentaire sur la question du paiement des services environnementaux. Vous avez pris l’exemple de l’entretien du paysage : je veux dire, à cet égard, que des paysages qui se referment sur eux-mêmes, faute d’activité agricole, et qui prennent feu du fait de cet abandon, cela coûte très cher à la collectivité !
Ce sujet très concret relève de l’intérêt général.
Il faut donc trouver les moyens là où ils se trouvent pour rémunérer le travail d’entretien des paysages, qui est utile pour les motifs que je viens d’évoquer, mais aussi pour des raisons touristiques, entre autres.
M. le ministre acquiesce.
Nous soutenons, bien sûr, cette proposition de Franck Montaugé, qui l’a déjà évoquée dix ou quinze fois, que ce soit en séance ou en commission.
« Paiements pour services environnementaux » : ça dit bien ce que ça veut dire… En effet, monsieur le ministre, ce n’est pas simple ! Par ailleurs, vous n’avez pas répondu à ma question précédente. Du coup, j’y insiste, car j’insisterai toujours…
Il y a, d’un côté, des externalités négatives causées par certaines pratiques, et, de l’autre, des aménités positives produites par d’autres pratiques. Si l’on veut parler véritablement d’économie agricole, mais aussi de justice dans le domaine de l’agriculture, il faut mettre ces questions sur la table.
En 2016, il y a eu sur le sujet un début d’étude conjointe de l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et de l’Institut technique de l’agriculture biologique (Itab), laquelle n’a pas abouti. J’ai appris, de source sûre, que ces intéressants travaux avaient été repris. Monsieur le ministre, vous êtes forcément au courant : quand cette étude va-t-elle sortir et quand disposerons-nous de ces chiffres ?
Vous demandez qui va payer… Je le répète, il faut entre 1 milliard et 1, 5 milliard d’euro pour restaurer la qualité de l’eau. Qui devrait-on faire payer pour atteindre cet objectif ? Pourquoi ne pas le demander aux fabricants de pesticides ? Ce serait un moyen pour qu’ils arrêtent d’en vendre… Car il va bien falloir qu’on en finisse avec ces pesticides qui se retrouvent dans l’eau, le sol, l’air, l’organisme des humains et dans l’ensemble de la biodiversité !
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 8.
Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le 10° bis du I de l’article L. 1 est ainsi modifié :
a) La seconde occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : «, » ;
b) Sont ajoutés les mots : « et de stockage de carbone dans les sols agricoles » ;
2° Après le 3° de l’article L. 111-2, il est inséré un 3° bis A ainsi rédigé :
« 3° bis A La valorisation du stockage de carbone dans les sols agricoles ainsi que la réduction des émissions de gaz à effet de serre peuvent être appréciées à l’occasion d’un diagnostic de performance agronomique des sols et d’émissions de gaz à effet de serre cofinancé par l’État, dont les modalités et le champ sont précisés par décret ; ».
Je suis saisie de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 92 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mmes Jacquemet et Dindar, M. Hingray, Mme Billon, M. Kern, Mme Canayer, MM. Henno, Duffourg, J.M. Arnaud, Pellevat et Cigolotti, Mme Perrot et MM. Détraigne et Moga, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Remplacer ces alinéas par six alinéas ainsi rédigés :
1° Le I de l’article L. 1 est ainsi modifié :
a) Le 10° bis est ainsi modifié :
– les mots : « de services environnementaux et » sont supprimés ;
– sont ajoutés les mots : « et de services environnementaux, incluant les réductions des émissions de gaz à effet de serre » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du 10° bis du présent I, les réductions des émissions de gaz à effet de serre désignent indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées dans les sols agricoles. » ;
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Actuellement, le 10° bis du I de l’article L. 1 du code rural dispose que la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation a pour finalité de reconnaître et mieux valoriser le stockage de carbone dans les sols agricoles.
Cet amendement vise à ce que soit reconnue et mieux valorisée la réduction de gaz à effet de serre (GES) de manière générale, en incluant indifféremment les émissions évitées et les émissions séquestrées dans les sols.
L’élargissement du champ de cet article serait en cohérence avec la démarche du label bas-carbone, dont l’objectif est également d’agir sur les deux leviers que sont la réduction et la séquestration des GES.
L’amendement n° 84 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano, Bilhac, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
et de stockage du carbone dans les sols agricoles
par les mots :
de réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° bis A Apprécier, de manière volontaire, la vulnérabilité de l’exploitation agricole aux impacts du changement climatique, à l’occasion d’un diagnostic de vulnérabilité. Ce diagnostic sera financé par le fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté prévu à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime. Ce diagnostic sera complété par l’élaboration d’un plan de transformation de l’exploitation qui prendra en compte l’atténuation du changement climatique et l’adaptation face au changement climatique. Les modalités et le champ du diagnostic et du plan d’action, cofinancés par l’État, sont précisés par décret. »
La parole est à M. Christian Bilhac.
Le présent amendement, proposé par Henri Cabanel, vise à ce que la politique d’aménagement rural traite la transition des exploitations agricoles de manière globale et systémique, en prenant comme fil conducteur le changement climatique.
Pour assurer leur viabilité, les exploitations doivent s’inscrire dans une démarche d’atténuation du changement climatique, au travers des réductions de leurs émissions de gaz à effet de serre et de l’adaptation au changement climatique.
La réalisation d’un diagnostic de vulnérabilité de l’exploitation agricole et d’un plan de transformation de cette dernière, choisi par l’agriculteur, permettra aux exploitations agricoles de contribuer de manière pérenne à la lutte contre le changement climatique.
Ce diagnostic de vulnérabilité, qui remplacerait celui qui est prévu à l’alinéa 6 du présent article, serait financé par le fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté prévu à l’article 3 de la proposition de loi que nous examinons.
La dynamisation, la modernisation, l’attractivité et la durabilité de notre modèle agricole ne pourront être atteintes sans prendre en compte l’évolution des pratiques agricoles que le changement climatique ainsi que les transitions écologique et climatique induiront. Le besoin de visibilité et d’accompagnement est essentiel dans ce contexte soumis aux changements climatiques, sociaux ou démographiques.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 22 rectifié bis est présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay, Mmes Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, MM. Duffourg et Détraigne, Mme Perrot et M. Chauvet.
L’amendement n° 75 rectifié est présenté par M. Menonville, Mme Loisier, MM. A. Marc, Decool, Médevielle, Verzelen et Wattebled, Mme Mélot et M. Lagourgue.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
et de stockage du carbone dans les sols agricoles
par les mots :
de réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° bis A Apprécier, de manière volontaire, la vulnérabilité de l’exploitation agricole aux impacts du changement climatique, à l’occasion d’un diagnostic de vulnérabilité. Ce diagnostic sera complété par l’élaboration d’un plan de transformation de l’exploitation qui prendra en compte l’atténuation du changement climatique et l’adaptation face au changement climatique. Les modalités et le champ du diagnostic et du plan d’action, cofinancés par l’État, sont précisés par décret. »
La parole est à M. Alain Duffourg, pour présenter l’amendement n° 22 rectifié bis.
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 75 rectifié.
L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. Cabanel, Artano, Bilhac, Corbisez, Fialaire, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
et de stockage du carbone dans les sols agricoles
par les mots :
de réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° bis A Apprécier, de manière volontaire, les réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées, à l’occasion d’un diagnostic réduction de l’impact carbone et de performance agronomique des sols. Ce diagnostic sera financé par le fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficultés prévu à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime. Ce diagnostic sera complété par l’élaboration d’un plan d’action qui s’appuiera sur les méthodes du label bas-carbone. Les modalités et le champ du diagnostic et du plan d’action, cofinancés par l’État, sont précisés par décret. »
La parole est à M. Christian Bilhac.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 23 rectifié ter est présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay, Mmes Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, MM. Duffourg et Détraigne, Mme Perrot, M. Chauvet et Mme Doineau.
L’amendement n° 76 rectifié est présenté par MM. Menonville, Chasseing, A. Marc, Decool, Médevielle, Verzelen et Wattebled, Mme Mélot et MM. Lagourgue et Malhuret.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
et de stockage du carbone dans les sols agricoles
par les mots :
de réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 3° bis A Apprécier, de manière volontaire, les réductions d’émissions de gaz à effet de serre, désignant indifféremment des quantités de gaz à effet de serre dont l’émission a été évitée ou des quantités de gaz à effet de serre séquestrées, à l’occasion d’un diagnostic réduction de l’impact carbone et de performance agronomique des sols. Ce diagnostic sera complété par l’élaboration d’un plan d’action qui s’appuiera sur les méthodes du label bas-carbone. Les modalités et le champ du diagnostic et du plan d’action, cofinancés par l’État, sont précisés par décret. »
La parole est à M. Alain Duffourg, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié ter.
La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° 76 rectifié.
L’amendement n° 108, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, à long terme, via des pratiques favorisant la biodiversité
II. – Alinéa 6
1° Remplacer les mots :
La valorisation du
par les mots :
La protection de la biodiversité, de la qualité de l’eau, de la qualité de l’air, le
2° Supprimer les mots :
agronomique des sols et d’émissions de gaz à effet de serre
Dois-je considérer que cet amendement est également défendu, monsieur Labbé ?
Sourires.
Nouveaux sourires.
Nous arrivons enfin à l’article de cette proposition de loi proposant une petite avancée ! Mais, comme nous ne sommes jamais contents, nous estimons qu’il faut aller plus loin…
Sourires.
Afficher les trois premiers ingrédients entrant dans la composition des produits alimentaires transformés ne suffit pas…
On signale à l ’ orateur qu ’ il se trompe d ’ amendement. – Il met plusieurs secondes à retrouver ses notes. – Mouvements divers. – Défendu ! sur les travées des groupes Les Républicains et UC.
Mme le président. Monsieur Labbé, vous ne disposerez pas de deux minutes supplémentaires !
Sourires.
Je vous prie de m’excuser…
Cet amendement vise à rappeler un élément fondamental : le fait de considérer l’impact carbone de l’agriculture sans prendre en compte la biodiversité et les autres dimensions environnementales est une erreur qui produit de nombreux effets pervers. Il semble davantage pertinent d’évaluer globalement la performance environnementale de l’exploitation agricole, plutôt que sous le seul angle de l’impact carbone.
L’amendement n° 125, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
La valorisation du
par les mots :
Valoriser le
et les mots :
peuvent être appréciées à l’occasion
par les mots :
notamment par l’établissement
La parole est à Mme le rapporteur.
L’amendement n° 91 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mmes Jacquemet et Dindar, M. Hingray, Mme Billon, M. Kern, Mme Canayer, MM. Henno, Duffourg, J.M. Arnaud, Pellevat et Cigolotti, Mme Perrot et MM. Détraigne et Moga, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après la seconde occurrence des mots :
effet de serre
insérer les mots :
, accompagné d’un plan volontaire d’atténuation et d’adaptation au changement climatique de l’exploitation,
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Si vous me le permettez, madame la présidente, je donnerai dans un premier temps l’avis de la commission sur les amendements n° 92 rectifié bis et 91 rectifié bis présentés par le président Longeot.
L’amendement n° 92 rectifié bis apporte une précision bienvenue à la définition de la réduction de GES en agriculture. Cette définition, issue du label bas-carbone, est reprise à l’alinéa 6 du dispositif, mais l’expliciter en début d’article lui donnera plus de poids. En effet, lorsqu’on évoque la réduction des gaz à effet de serre, on fait référence, d’une part, à ceux dont l’émission a été évitée et, d’autre part, aux quantités de gaz séquestrées dans les sols agricoles.
L’avis est donc favorable sur cet amendement.
L’amendement n° 91 rectifié bis tend à préciser que le diagnostic de performance agronomique des sols et d’émissions de GES est accompagné d’un plan volontaire d’atténuation et d’adaptation au changement climatique de l’exploitation. Il s’agit d’un ajout utile qui permettra aux exploitations de s’engager plus facilement par la suite dans une démarche de labellisation.
L’avis est également favorable sur cet amendement.
Je demande le retrait des amendements n° 84 rectifié, 22 rectifié bis, 75 rectifié, 85 rectifié, 23 rectifié ter et 76 rectifié, qui ont peu ou prou le même objet et sont satisfaits par l’amendement n° 91 rectifié bis.
Sur l’amendement n° 108, j’émets un avis très défavorable, dans la mesure où il vise à étendre le dispositif, globalement, à la protection de la biodiversité, à la qualité de l’eau et à la qualité de l’air, et à supprimer la référence à la qualité agronomique des sols, ce qui est contraire à l’intention des auteurs dudit amendement.
Vous avez évoqué, monsieur Labbé, les effets pervers du label bas-carbone ; or cela n’est pas du tout ressorti des auditions que nous avons menées, bien au contraire.
Le label bas-carbone est une démarche qu’il convient d’accompagner et d’intensifier, et tel est l’objectif de l’article 9.
Je dirai, tout d’abord, un mot de l’article 9, qui me semble aller dans le bon sens. La valorisation de la capacité du monde agricole à stocker le carbone, dans le sol et de façon plus globale, est régulièrement évoquée lors des concertations nationales et territoriales, et il convient d’y réfléchir. Outre qu’elle représente un moyen de financement, elle permet de montrer que l’agriculture peut avoir d’autres fonctions que la production d’aliments destinés à notre alimentation, et en particulier le stockage de carbone.
L’amendement n° 92 rectifié bis du président Longeot me semble apporter des précisions utiles ; je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
L’amendement n° 84 rectifié vise à lier le label bas-carbone à d’autres éléments, ce qui aurait pour conséquence d’exclure de fait un certain nombre de productions, notamment la viticulture, l’élevage et le maraîchage. J’en demande donc le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Sur les amendements identiques n° 22 rectifié bis et 75 rectifié, qui tendent à apporter des précisions utiles, j’émets un avis de sagesse.
Sur l’amendement n° 85 rectifié, l’avis est défavorable, car son adoption aurait pour conséquence, là encore, d’exclure un certain nombre de productions.
L’avis est également défavorable sur les amendements identiques n° 23 rectifié ter et 76 rectifié.
J’en viens à l’amendement n° 108, présenté par M. Labbé. Comme l’a dit très justement Mme la rapporteure, préciser qu’il faut aller plus loin sur la question du label bas-carbone peut être utile. Mais il ne faut pas accumuler les labels et les diagnostics… À force de prévoir des labels qui mélangent tous les sujets, on risque d’être confrontés à un problème de lisibilité, et par suite de rémunération.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement.
Sur l’amendement n° 91 rectifié bis du président Longeot, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
Enfin, l’avis est favorable sur l’amendement rédactionnel n° 125 de la commission.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, les amendements n° 84 rectifié, 22 rectifié bis, 75 rectifié, 85 rectifié, 23 rectifié ter, 76 rectifié et 108 n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° 125.
L ’ amendement est adopté.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 9 est adopté.
L’article L. 412-4 du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’indication, par ordre pondéral décroissant, du pays d’origine des trois principaux ingrédients est obligatoire sur les produits alimentaires transformés. » ;
2° À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et quatrième » sont remplacés par les mots : « à cinquième ».
L’amendement n° 109, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
des trois principaux ingrédients
par les mots :
de tout ingrédient représentant plus de 5 % de la masse pondérale du produit
La parole est à M. Joël Labbé.
Sourires.
L’article 10 est intéressant, mais insuffisant, car il prévoit un affichage de l’origine seulement pour les trois premiers ingrédients. Pour notre part, nous proposons de renforcer le dispositif en affichant l’origine de tout ingrédient représentant plus de 5 % de la masse pondérale du produit.
Il est important d’encourager la relocalisation de l’alimentation, la traçabilité et la transparence pour le consommateur. Un affichage des trois premiers ingrédients ne permettra pas d’atteindre cet objectif.
Tandis que l’article 10 prévoit l’affichage obligatoire de l’origine des trois premiers ingrédients des produits alimentaires transformés, le présent amendement vise à étendre cette obligation à tout ingrédient représentant plus de 5 % de la masse pondérale de ces produits.
Je le dis en toute transparence, le présent article 10 ne me semble pas tout à fait conforme au droit européen, et notamment à l’article 39 du règlement concernant l’information du consommateur sur les denrées alimentaires (Inco). Cependant, monsieur le ministre, nous n’avons pas voulu le supprimer. Je crois en effet que les auteurs de la proposition de loi voulaient avant tout envoyer un message politique à l’État et à la Commission européenne à l’occasion de la révision en cours du règlement Inco.
Pour autant, cher Joël Labbé, il ne servirait à rien d’aller plus loin, étant donné que, même s’il était voté, cet article serait écarté à l’occasion d’un litige et ne serait pas opposable juridiquement.
L’avis est donc défavorable.
Je remercie Mme la rapporteure d’avoir décrit la situation avec une telle honnêteté intellectuelle, ce qui ne m’étonne pas d’elle.
Sur l’article 10, tout d’abord, je disais souvent lorsque j’étais ministre chargé des relations avec le Parlement, ou président de groupe, qu’il fallait faire attention à ne pas voter des articles dont on sait par avance qu’ils ne sont pas conformes au droit européen. En effet, c’est une façon de mettre en scène collectivement notre impuissance publique : on sait que l’on sera attaqué au moindre recours. Et l’on dira après que c’est la faute de l’Europe, alors que le problème est lié au vote de lois non conformes aux règlements européens…
Par ailleurs, si j’étais taquin, je qualifierais cet article de parfait exemple de surtransposition.
MM. Jean-Claude Anglars et Laurent Duplomb abondent.
Et au travers de l’amendement n° 109 visant à étendre l’obligation d’affichage à d’autres ingrédients, M. Labbé procède même à de la « sur-surtransposition » ! Et tout cela dans un texte qui vise à éviter les surtranspositions… Nous devons veiller à être cohérents par rapport à ce que nous préconisons.
Nous travaillons sur le règlement Inco, en cours de révision, afin de porter plusieurs exigences, notamment celle de qualité des ingrédients et d’information non trompeuse des consommateurs, qui vous tient à cœur. Mais cela peut se faire seulement dans un cadre européen, et non par le biais d’une surtransposition. L’article 10 mériterait même que soit déposé un amendement d’appel sur ce point…
Sur l’amendement n° 109, l’avis est donc défavorable.
Mme Sophie Primas, rapporteur. Puisque M. le ministre est taquin, je vais me permettre de l’être à mon tour.
Sourires.
Sans empiéter sur la discussion relative aux surtranspositions qui aura lieu lors de l’examen de l’article 12, je rappelle que ledit article n’interdit pas les surtranspositions, …
… à la différence d’une proposition de résolution récemment adoptée à l’Assemblée nationale.
L’article 12 prévoit que les surtranspositions doivent être, d’une part, connues et, d’autre part, présenter un bénéfice : il s’agit en quelque sorte d’une balance bénéfices-risques. On peut donc considérer que le présent article 10, même s’il n’est pas conforme au droit européen, présente un avantage suffisamment intéressant pour que l’on passe outre le problème de surtransposition.
Nous tenons à souligner que cet article 10, selon nous insuffisant, représente toutefois une avancée. Nous allons donc le voter.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 10 est adopté.
L’amendement n° 26 rectifié ter, présenté par Mmes Gatel et Loisier, MM. Longeot et Laugier, Mme Vermeillet, M. Henno, Mmes Gacquerre et Jacquemet, MM. Lafon, Moga, P. Martin et Le Nay, Mme Herzog, M. Duffourg, Mme Morin-Desailly, M. Delahaye, Mme Férat, MM. Détraigne et Chauvet, Mme Saint-Pé, MM. Canévet et Hingray, Mmes Perrot et de La Provôté, M. J.M. Arnaud et Mmes Sollogoub, Billon et Doineau, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les premier et second alinéas du II de l’article L. 412-9 du code de la consommation sont complétés par les mots : « au plus tard le 1er janvier 2024 ».
La parole est à Mme Françoise Gatel.
Cet amendement représente, à la fois, une remontée dans le temps et un rappel à l’ordre aimable, mais exigeant.
Je rappelle que nous avions voté en 2021 une disposition de la loi Égalim 2 qui rendait obligatoire l’indication du pays d’origine ou du lieu de provenance pour les viandes utilisées en tant qu’ingrédient dans des préparations de viandes et des produits à base de viande lorsque l’opérateur a connaissance de cette information en application d’une réglementation nationale ou européenne.
Il n’aura échappé ni à votre vigilance, monsieur le ministre, ni à la nôtre qu’aucun décret d’application n’a été publié à ce jour. Nous vous invitons donc à y remédier. Cet amendement vise en effet à ce que les modalités d’application soient fixées par décret au plus tard le 1er janvier 2024.
Par cet amendement judicieux, Mme Gatel rappelle à juste titre que l’article 14 de la loi Égalim 2 n’est toujours pas applicable, faute d’un décret d’application qui était pourtant prévu pour la mi-juillet 2022. Or il aurait permis de rétablir une égalité de traitement entre la restauration hors foyer et les dark kitchens, ces établissements qui livrent à domicile, mais n’ont pas de salle pour consommer sur place.
Un décret a bel et bien été pris pour rendre obligatoire l’indication de l’origine des viandes en restauration hors foyer, le décret n° 2022-65 du 26 janvier 2022 modifiant le décret n° 2002-1465 du 17 décembre 2002 relatif à l’étiquetage des viandes bovines dans les établissements de restauration : il étend l’obligation qui valait de longue date pour la viande bovine aux viandes « porcines, ovines et de volailles ».
Il est étonnant que ce décret n’ait pas couvert les dark kitchens, puisqu’il est postérieur de trois mois à l’entrée en vigueur de la loi Égalim 2. Nous vous invitons donc, monsieur le ministre, à le prendre dans les meilleurs délais.
L’avis est donc favorable.
M. Marc Fesneau, ministre. Madame Gatel, j’ai compris le rappel à l’ordre, car je sais entendre les messages du Sénat…
Sourires.
La plupart des décrets d’application de la loi Égalim ont été pris, comme l’a rappelé Mme la rapporteure. Mais nous avons dû, sur ces textes, organiser une concertation un peu plus large que prévu, ce qui a pris du temps. Je prends l’engagement devant vous de finaliser rapidement cette publication.
J’émets un avis défavorable non sur le fond de votre demande, mais sur la forme. En effet, mieux vaut ne pas entrer dans la logique qui consiste à présenter un amendement tendant à ce que le Gouvernement prenne un décret… Vous avez cependant raison d’exiger que les décrets d’application soient pris dans les délais impartis. En l’occurrence, j’y veillerai et vous en informerai personnellement.
M. Daniel Salmon. Pour vous montrer que nous ne sommes pas dogmatiques, nous allons voter cet amendement qui va dans le bon sens, celui de la transparence.
Marques de satisfaction sur des travées du groupe Les Républicains.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 10.
L’amendement n° 38 rectifié, présenté par Mme Préville, MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mme Monier, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 412-12 du code de la consommation, il est inséré un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-… – Les aliments ultratransformés désignent tout aliment vendu dans le commerce ou utilisé par un service de restauration, ayant subi d’importants procédés de transformation et dont la formulation contient des substances industrielles ou des ingrédients technologiques, et des additifs non nécessaires à la sécurité sanitaire visant à en améliorer les qualités sensorielles ou à imiter les aliments naturels, dans le but de masquer les défauts du produit mis à la vente.
« Le ministère en charge de l’économie se charge de la mise en place, pour le 1er janvier 2024, d’un étiquetage supplémentaire sur les denrées alimentaires informant le consommateur sur le caractère ultratransformé d’un aliment. »
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.
Cet amendement est proposé par Angèle Préville.
Le déséquilibre de l’alimentation est l’une des premières causes de l’épidémie de maladies chroniques constatée en France, dont les conséquences sont lourdes en termes de mortalité et de morbidité. L’alimentation ultratransformée est en grande partie responsable de ce fléau et l’état actuel des connaissances appelle à la mise en place de premières actions préventives de santé publique.
En s’appuyant sur l’usage du Nutri-score, qui ne fait plus débat aujourd’hui, des actions ambitieuses visant les produits trop gras, trop salés et trop sucrés pour lesquels des preuves de nocivité sont indubitables et communément admises doivent être mises en place.
D’après l’OCDE, une réduction de 20 % de l’apport calorique des aliments riches en sucre, en sel, en calories et en graisses saturées permettrait de prévenir 582 000 cas de maladies non transmissibles d’ici à 2050 en France.
Pour que le consommateur puisse facilement et rapidement faire le tri dans les rayons de supermarchés, les denrées alimentaires présentées à la vente doivent comporter un étiquetage permettant de bien l’informer, en particulier lorsque celui-ci s’apprête à consommer un aliment ultratransformé.
À ce jour, ces aliments représentent dans notre pays probablement de 40 % à 50 % de l’offre actuelle en supermarché, et seraient, selon les chercheurs, la première cause indirecte de mortalité précoce dans les grandes villes, responsable en grande partie de la stagnation de l’espérance de vie en bonne santé, laquelle est inférieure à 65 ans pour les hommes et les femmes.
Les ingrédients et additifs cosmétiques utilisés dans ces aliments sont en réalité des substances alimentaires non habituellement utilisées en cuisine, que les industriels utilisent pour limiter les qualités organoleptiques d’un aliment brut et de leurs préparations culinaires, ou pour masquer les défauts d’un produit.
En outre, on ne sait encore que peu de choses des effets cocktail potentiellement délétères de ces additifs sur le long terme, ainsi que de leur action sur la flore microbienne.
Il est donc urgent de réguler un tel commerce, mais via des dispositions transitoires afin de ne pas perturber les acteurs du commerce et de la distribution, pour aboutir à une limitation de leur consommation.
Les auteurs de l’amendement considèrent que l’ultratransformation est un facteur de risque pour la santé humaine. C’est peut-être aller un peu vite en besogne en l’état de nos connaissances. Ainsi, je puis témoigner qu’au stand de l’Inra, lors du salon de l’agriculture, la démonstration nous a été faite de l’intérêt de la fermentation, en vue par exemple de faire consommer davantage de fruits et légumes : ce processus de transformation semble plutôt bénéfique pour la santé publique.
J’ajoute que nos collègues Fabien Gay, Françoise Férat et Florence Blatrix Contat avaient pointé, dans leur rapport d’information intitulé Information du consommateur : privilégier la qualité à la profusion, le risque d’une dilution de cette information, alors même que le Nutri-score pourrait être rendu obligatoire prochainement dans toute l’Europe et intégrer bientôt les aliments transformés.
Invitant mes collègues à faire preuve d’un peu de patience, j’émets un avis défavorable.
L’amendement vise à définir les aliments ultratransformés et à rendre obligatoire leur étiquetage. Je justifierai en trois points l’avis défavorable du Gouvernement.
Premier point : dans le cadre du programme national nutrition santé (PNNS), l’Anses a été saisie afin de caractériser les aliments ultratransformés, d’évaluer les définitions existantes et leur impact sur la santé. Dans l’attente des conclusions de ces travaux, prévues pour l’été 2024, il est difficile de s’avancer sur une définition.
Deuxième point : nous devons poser collectivement la question de l’étiquetage. On assiste en effet à la multiplication des étiquetages : Nutri-Score, score carbone, score bien-être animal, Éco-score, etc. Pour que le consommateur s’y retrouve, il faut une lisibilité de l’étiquetage.
Troisième point : ne prenons pas, de grâce, des mesures réglementaires dont nous savons qu’elles ne s’appliqueraient, par nature, qu’aux produits français et qu’on ne pourrait pas imposer aux autres pays européens et à leurs produits – c’est précisément le problème que nous rencontrons avec le Nutri-score.
La première étape serait de nous mettre d’accord, à l’échelle européenne, sur le Nutri-score, qui est un élément d’étiquetage intéressant, avant d’en inventer de nouveaux, que nous serions peut-être les seuls à appliquer.
Nous devons laisser l’Anses travailler et nous fonder sur les résultats de leurs travaux pour améliorer la lisibilité des produits pour les consommateurs et œuvrer à la cohérence entre pays européens.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, il émet un avis défavorable.
Je comprends votre réponse, monsieur le ministre, et la partage même, d’un certain point de vue.
Mme la rapporteure a cité un rapport ; pour ma part, j’en évoquerai un autre, intitulé Surpoids et obésité, l ’ autre pandémie, qui met en cause les aliments ultratransformés (AUT) de manière assez claire. Vous dites qu’il n’existe pas de définition claire des AUT, mais il existe tout de même une classification. Nous ne partons donc pas de rien.
Les deux points de vue ne sont pas forcément opposables : si nous parvenons à limiter les AUT au profit d’aliments peu ou pas transformés, l’agriculture peut s’y retrouver.
Une question de santé publique se pose avec force, notamment au sujet des maladies chroniques. Nous devons travailler pour définir la bonne ligne de crête pour que l’incorporation de produits « nobles » affecte positivement notre agriculture tout en incitant fortement à limiter les AUT, qui sont à l’origine de maladies chroniques constituant une véritable épidémie.
Nous soutenons cet amendement, car, comme vient de le dire François Bonhomme, il s’agit d’une question de santé publique.
Nous savons que les produits ultratransformés sont plus gras, plus sucrés, plus salés, plus nocifs pour la santé. J’entends vos arguments, monsieur le ministre, mais ce n’est pas parce que nous ne parvenons pas à avancer à l’échelle européenne que nous devons balayer le sujet d’un revers de main.
La question est la suivante : la France est-elle un précurseur sur cette question et poussons-nous vers moins de produits ultratransformés ? Un débat européen existe sur le Nutri-score, puisque 320 scientifiques, dont le professeur Hercberg, le père du Nutri-score à la française, viennent de signer une tribune sur l’étiquetage nutritionnel. Vous avez raison, monsieur le ministre, nous devons aller vers une harmonisation du Nutri-score, mais elle doit se faire vers le haut.
Nous devons défendre le Nutri-score à la française, qui s’appuie sur une réalité scientifique et a fait progresser les industriels, dont certains produits notés E ou D sont passés à C, B ou A. Quelle est votre position sur cette question ? Défendrez-vous le Nutri-score à la française ?
M. le ministre fait mine de s ’ offusquer.
Je vous pose simplement une question ; vous disposerez vous aussi de deux minutes pour y répondre…
Sourires.
Nous voterons donc cet amendement, dont l’adoption vous donnera de la force dans les négociations européennes.
Merci, monsieur Gay, de vouloir me donner de la force dans les négociations européennes !
Sourires.
Vous n’êtes pas tombé dans la caricature, tâchons de continuer dans cette voie.
Justement, monsieur le sénateur, je dis que vous n’êtes pas tombé dans la caricature !
Premièrement, bien sûr que nous soutenons le Nutri-score, qui est une question portée par la France. Toutefois, si nous ne sommes que 6 pays européens à le faire, contre l’avis des 21 autres, c’est très sympathique, mais nous ne pouvons pas avancer. N’ayons pas l’arrogance, toute française, de penser parfois que nous avons raison tout seuls, alors que nous sommes minoritaires à l’échelle européenne.
Deuxièmement, nous partageons tous des préoccupations relatives à la santé publique, monsieur Bonhomme, qu’il s’agisse de l’affichage, de la pédagogie ou de l’éducation à l’alimentation, sur lesquelles nous devons continuer de travailler. Mais ce que je tente d’expliquer, monsieur Gay, c’est non pas que je ne veux pas d’un affichage de la nature de la transformation des produits, mais que, si nous le décidions seuls et que nos 26 partenaires n’étaient ainsi pas soumis à la même obligation, seuls les produits français seraient concernés.
Qu’aurons-nous alors gagné ?
Les produits français seront montrés du doigt parce que nous aurons imposé un affichage, tandis que les produits européens ne seront pas soumis à cette obligation.
L’affichage du Nutri-score n’est pas obligatoire pour les Italiens. Or, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais les produits italiens passent la frontière ! On peut bien essayer de fermer notre frontière aux produits italiens, …
J’en conviens…
Donc, plutôt que de fermer notre frontière aux produits italiens, il semble préférable de nous montrer un peu cohérents.
Si vous me dites que nous devons défendre une harmonisation à l’échelle européenne, nous nous retrouverons. Mais évitons de mettre, comme d’habitude, la charrue avant les bœufs en adoptant une réglementation qui pénaliserait les produits français, sans égard pour la position européenne.
Ma première préoccupation est d’obtenir un Nutri-score européen.
Avant d’ajouter un nouvel étiquetage, nous devons solder la question du Nutri-score, que, je le répète, je défends !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Le I de l’article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1°
2° Après le 7°, il est inséré un 7° bis ainsi rédigé :
« 7° bis Ou bénéficiant d’une démarche de certification de conformité des produits, si cette démarche est subordonnée au respect de règles destinées à favoriser la qualité des produits agricoles ou des denrées alimentaires ou la préservation de l’environnement, sous le contrôle du ministre chargé de l’agriculture ; ».
J’essaierai de faire une synthèse de cet article 11, qui élargit la liste des produits durables et de qualité à privilégier en restauration collective publique – qui est un secteur stratégique – aux produits bénéficiant d’une démarche de certification de conformité.
Le législateur se réfère à la loi Égalim et à la loi Climat et résilience, avec un objectif de 50 % de produits de qualité durable. Sont concernés : l’État, les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics.
L’article 11 assouplit la définition des produits durables et de qualité qui doivent composer une part significative de l’offre alimentaire en restauration collective publique. Sous l’autorité de M. le ministre de l’agriculture, le but est également de réduire les importations.
De plus, dans un contexte de forte inflation alimentaire, il s’agit, comme l’a souligné Mme le rapporteur, de répondre à un appel à l’aide des collectivités territoriales. Il y a urgence à soutenir ces dernières et à favoriser l’achat de produits durables et de qualité.
Surtout, il convient d’accompagner et de préserver la production de ces denrées sur l’ensemble du territoire et de promouvoir le savoir-faire de l’ensemble de nos agriculteurs en votant cet article.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 39 rectifié est présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mme Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 61 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 110 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n 39 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer l’article 11, qui élargit la liste des aliments autorisés dans les 50 % de produits durables et de qualité dans la restauration collective, définie par la loi Égalim.
Plus précisément, cet article intègre tous les produits faisant l’objet d’une certification de conformité, ce qui nous semble incompatible avec l’esprit de la loi.
Le ministère de l’agriculture précise ainsi que, pour être reconnus, ces produits doivent respecter « des exigences et des recommandations fixées au préalable, au niveau de la production, de la transformation ou du conditionnement », et que ses services s’intéressent à « la composition du produit, à ses caractéristiques visuelles, olfactives et gustatives ou à certaines règles de fabrication ».
Ainsi, le champ retenu est beaucoup trop large et n’offre pas les mêmes garanties de durabilité et de qualité que les produits estampillés d’un signe de qualité, d’un écolabel, d’une mention « fermier » ou « produit à la ferme », ou encore issus de l’agriculture biologique.
Ce n’est pas la première fois que nous débattons de cette liste dans cet hémicycle. À vouloir trop élargir celle-ci, nous risquons, au bout du compte, de totalement dénaturer l’esprit de la loi, car, demain, tous les produits pourraient y figurer.
Si nous avons conscience que les objectifs sont parfois difficiles à atteindre dans certains territoires, notamment en matière de circuits courts, nous considérons que la solution ne consiste pas à les abandonner tout simplement, alors que nous nous les sommes fixés collectivement.
Il faut parfois se donner du temps. À cet égard, je rappelle que le dispositif issu de la loi Égalim reste très récent, plus encore si l’on considère les années mouvementées que nous venons de traverser et que nous traversons encore.
Je me pose une question.
Nous avons voté la loi Égalim en 2019, qui prévoit d’intégrer 50 % de produits durables et de qualité en restauration collective, dont 20 % issus de l’agriculture biologique. L’horizon fixé était 2022, c’est-à-dire hier. Nous n’avons pas eu le temps de faire le bilan que nous proposons déjà d’en rabattre sur nos ambitions !
Pour ma part, je propose une autre méthode : laissons la loi s’appliquer pendant deux ou trois ans pour disposer d’un bilan ; regardons sérieusement les contraintes qui peuvent peser sur certaines filières et nous empêchent d’atteindre l’objectif de 50 % ; renforçons les aides aux collectivités mises en difficulté financièrement.
En un mot, laissons à la loi le temps de se mettre en place ! Cela me semble du bon sens. Nous n’avons même pas eu le temps de faire un bilan ! Je demande donc à ceux qui veulent modifier l’objectif : quels sont les chiffres ? où en sommes-nous ? pouvez-vous nous en dire plus avant que nous ne corrigions la loi ?
En revanche, je trouve sensé que, une fois le bilan dressé, dans deux ou trois ans – cela reste à déterminer –, nous procédions au cas par cas. Nous pourrons alors décider, pour les filières en difficulté, d’aller vers des produits bénéficiant d’une démarche de certification de conformité – pas de problème ! – tandis que là, constatant que la contrainte est d’ordre financier, le débat devra être budgétaire.
Ainsi, nous estimons qu’il faut supprimer cet article 11.
Dans le même ordre d’idées, nous estimons que la loi serait affaiblie par l’intégration des produits bénéficiant d’une démarche de certification de conformité, qui n’est pas un label exigeant. Il s’agit d’un retour en arrière par rapport à la loi Égalim.
Nous souhaitons donc évidemment que cet article soit supprimé.
Nous savons que nous sommes, à l’heure actuelle, très loin des objectifs qui ont été fixés pour ce qui concerne le pourcentage de produits bio et de produits sous signe de qualité.
De même, nous savons que nombre de collectivités se sont approprié ces objectifs en mettant en place des dispositifs logistiques tels que des cuisines centrales. Il faut donc, en effet, laisser du temps au temps pour que les collectivités progressent.
Que faisons-nous lorsque nous ajoutons la certification de conformité de produit ? Tout d’abord, je remarque que l’ensemble des produits qui sont sous signe de qualité ont des cahiers des charges très différents les uns des autres. Nous agrégeons donc déjà, dans ces 50 %, des produits divers.
Les produits faisant l’objet d’une certification de conformité, auxquels nous vous proposons d’élargir la liste, sont des produits de qualité. De plus, ils ne sont pas nombreux ; cela n’élargit pas considérablement la liste. Il ne s’agit pas du tout d’une dilution des produits. Comme son nom l’indique, le certificat de conformité des produits offre des garanties de qualité.
Je prendrai deux exemples.
Le certificat « agneau de qualité », de la Fédération bétail de qualité Bourgogne, domiciliée en Côte d’Or – chez Anne-Catherine Loisier –, garantit que l’agneau est élevé avec sa mère pendant 60 jours, avec une alimentation complémentaire, et qu’il est élevé pendant 270 jours au maximum.
De même, le certificat « jeunes bœufs et génisses » de la société vitréenne d’abattage Jean Rozé, domiciliée à Vitré, atteste que les bêtes sont alimentées, après sevrage, avec au moins 80 % d’herbe conservée et de foin, et que leur âge est compris entre 16 mois et 30 mois.
Ces produits sont donc soumis à des cahiers des charges en matière de qualités requises. De plus, ils sont très majoritairement issus du territoire français. Il s’agit donc de produits de qualité, dont l’intégration ne dénature pas l’esprit de l’objectif de 50 %, et ne conduit pas, étant donné leur nombre réduit, à une dilution.
En revanche, je partage l’avis de Fabien Gay et de plusieurs autres collègues : nous avons besoin de temps, à la fois pour mettre en place le dispositif et pour apprécier les résultats obtenus.
La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements, pour les raisons invoquées par les sénateurs Gay et Labbé.
Il me semble qu’une évaluation est nécessaire. L’échéance était fixée en 2022 ; nous sommes à la mi-2023. Il ne me semble donc pas inutile de déterminer ce qui a fonctionné.
Par ailleurs, nous savons qu’il y a une montée en puissance. Les programmes alimentaires territoriaux sont un formidable moteur pour déterminer les modes de production et d’organisation, par exemple pour ce qui concerne les cuisines centrales, comme l’a évoqué Mme la rapporteure.
Les questions qui se posent sont les suivantes : dispose-t-on de suffisamment de producteurs et de logistique ? l’organisation, dans les collectivités, est-elle efficace ?
Ce n’est pas parce que nous n’avons pas atteint les objectifs que nous nous étions fixés – il faut bien le reconnaître, et chacun doit prendre sa part, l’État comme les collectivités –, que nous devons reprendre rendez-vous dans trois ans. Nous devons d’abord analyser les causes de cet échec
M. Laurent Duplomb s ’ exclame .
En effet, nous sommes d’accord sur le fait que la commande publique peut constituer un levier puissant pour développer la filière bio et pour valoriser les produits de qualité ou issus de circuits courts.
Le Gouvernement a la volonté d’évaluer le dispositif et d’étudier les pistes qui nous permettraient de nous améliorer pour atteindre enfin les objectifs fixés par la loi Égalim. Au reste, je ferai des propositions sur ce sujet dans les prochaines semaines.
J’ajoute un dernier argument. Nous devons progresser. Très bien ! Et, comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, madame la rapporteure, les collectivités s’y mettent.
Imaginons le signal que nous allons envoyer ce soir. Les filières se sont structurées, sachant que l’objectif n’était pas rempli, mais faisant preuve de la volonté d’y parvenir, avec en ligne de mire un chemin, un horizon déterminés. Nous allons leur dire que finalement, ce n’est pas grave, que nous allons en partie revoir nos ambitions à la baisse – même si Mme la rapporteure a donné des exemples pour le contester – et qu’il n’est plus nécessaire d’atteindre l’objectif.
M. Laurent Duplomb proteste.
Je trouverais dommage que nous envoyions un tel signal, alors que nous commençons à prendre le bon chemin, un cap ayant été fixé.
Mon cher collègue, nous n’envoyons aucun signal. Nous intégrons des produits de filière française, qui sont certifiés par un label de qualité.
Nous ne diluons pas l’objectif de 50 % en y mettant n’importe quoi. Nous ajoutons des produits locaux, dotés d’un label de qualité et répondant à un cahier des charges.
Ne nous trompons pas de message : celui que nous envoyons est extrêmement positif pour l’agriculture française.
Je soutiens ces amendements.
Comme le ministre l’a souligné, en Île-de-France, des plans alimentaires territoriaux sont en cours d’élaboration dans la plupart des collectivités. Ces dernières, qui ont traversé la crise covid, ont pris acte des ambitions fixées par la loi Égalim ; elles y travaillent, et elles progressent.
Or ce n’est pas toujours facile, en particulier dans des territoires dépourvus de terrains agricoles – cela étant, en Île-de-France, on trouve un peu de production agricole. Nous revendiquons souvent de la stabilité pour nos collectivités. Nous ne faisons pas autre chose en défendant l’équilibre qui a été trouvé. Grâce à cette exigence de qualité, la commande publique deviendra sans doute, à l’avenir, l’un des moteurs de la transition agroécologique.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Je défendrai également ces amendements, car l’enjeu est important. Le sujet avait été débattu lors de loi Égalim. Du temps s’est écoulé depuis lors, et nous pouvons d’ores et déjà dresser un premier bilan.
À cet égard, l’Observatoire national de la restauration collective bio et durable a produit un rapport intéressant. Toutes les cantines ne sont pas étudiées, mais les 10 000 qui le sont servent tout de même 1, 4 million de repas par jour, composés en moyenne de 36 % de produits bio – sachant que ces derniers représentent environ 7 % de la consommation alimentaire nationale.
Cela veut dire que non seulement nos collectivités travaillent pour faire fonctionner des filières locales, mais que cela fonctionne ! Tout le monde a à y gagner, y compris les mondes agricole et paysan, qui fournissent ces denrées. En effet, nous savons qu’en favorisant le bio, nous favorisons le local – c’est prouvé. Nous avons donc intérêt à poursuivre en ce sens.
Aussi, madame la rapporteure, en repoussant l’échéance, nous enverrions un très mauvais signal aux collectivités, qui ont pourtant pris les choses en main et avancent sur cette question, au bénéfice des agriculteurs et du développement de filières locales.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 111, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 4
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
1° Au 6°, l’année : « 2026 » est remplacée par l’année : « 2024 » ;
2° Au 7°, l’année : « 2027 » est remplacée par l’année : « 2024 » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2027, la part des produits répondant aux conditions prévues au présent I doit représenter, en valeur, au moins 80 %, et la part des produits mentionnés au 2° du présent I doit être portée à 50 %. »
La parole est à M. Joël Labbé.
Cet amendement, ambitieux, vise à fixer de nouveaux objectifs de qualité dans la restauration collective, à savoir atteindre, en 2027, 80 % de produits de qualité et 50 % de produits bio.
Je m’explique : les bilans de la loi Égalim montrent que, si la part de bio a progressé dans la restauration collective, elle l’a fait dans des proportions très insuffisantes. Pour relancer la dynamique, nous devons non pas repousser l’échéance, mais fixer de nouveaux objectifs plus ambitieux.
Le Gouvernement a annoncé, au sujet de la crise de l’agriculture biologique, vouloir utiliser la restauration collective comme une partie de la réponse. Par cet amendement, nous vous proposons, monsieur le ministre, de mettre en application vos annonces.
L’agriculture biologique est actuellement en crise du fait d’une stagnation de la demande et d’une augmentation de la production. Les producteurs bio se sont, face à la loi Égalim, organisés collectivement pour répondre à la demande, mais, de son côté, la puissance publique n’a pas pu tenir ses engagements. Nous devons donc rehausser l’ambition exprimée dans cet article.
Par ailleurs, cet amendement tend à supprimer, en 2025, la mention « haute valeur environnementale » sur les produits. Ce label présente si peu de garanties en matière environnementale qu’il est attaqué en justice pour tromperie auprès du consommateur. Aussi, il n’a pas sa place dans la définition de l’alimentation de qualité en restauration collective.
Alors que nous venons juste de dire que nous ne parvenons pas à atteindre les objectifs, votre réponse est de les doubler !
C’est exactement ce qu’a dit le Président de la République il y a quelques jours : nous avons déjà des objectifs, parfois très exigeants, à atteindre – vous êtes tous convenus de la difficulté à atteindre celui dont il est question – et vous nous proposez d’y aller encore plus fort. C’est, au fond, la prophétie autoréalisatrice des amendements.
C’est une technique comme une autre… Pour ma part, je considère que, si nous voulons être crédibles dans le débat public, il serait bien que nous adoptions des amendements dont nous savons qu’ils sont réalisables.
Monsieur Labbé, si, déjà, nous parvenions à atteindre les objectifs de la loi Égalim, ne pensez-vous pas qu’il s’agirait d’une bonne nouvelle ? A-t-on besoin d’en rajouter ? Je répète que nous devons maintenir les objectifs d’Égalim, mais, de grâce, alors que nous avons du mal à atteindre ceux-ci, ne nous dites pas qu’il faut aller plus loin, car c’est faire preuve d’un ennuyeux déni de réalité !
Avis défavorable.
Monsieur le ministre, certaines collectivités sont parvenues à atteindre l’objectif et approchent même les 100 % de produits de qualité.
C’est donc possible de le faire !
Les projets alimentaires territoriaux, que nous avons évoqués, ont été mis en place à cet effet : relocaliser et développer l’agriculture biologique.
Vous arguez que nous ne sommes pas parvenus à atteindre l’objectif, mais à un moment donné, il nous faut faire preuve d’ambition ! Mettons le paquet et fixons-nous des objectifs forts à moyen terme, car, une fois le processus lancé, il suivra son cours !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 112, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le même article L. 230-5-1 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« .… – Pour l’application du présent article et en articulation avec le comité régional pour l’alimentation prévu à l’article L. 230-5-5 du présent code, un référent préfectoral est nommé par le représentant de l’État dans le département, parmi les sous-préfets.
« Sans préjudice des attributions des collectivités locales et des services compétents, il est chargé de la concertation, à l’échelle départementale, sur l’approvisionnement de la restauration collective, avec notamment l’objectif de faire progresser chaque année la part des produits mentionnés au I du présent article. »
La parole est à M. Joël Labbé.
Par cet amendement, nous souhaitons répondre aux difficultés d’application de la loi, en nous dotant d’outils de dynamique territoriale.
Pour affirmer une véritable volonté politique sur l’application de cet article et lever les blocages, cet amendement vise à ce que soit nommé un sous-préfet référent pour l’application de la loi dans chaque département. Celui-ci pourrait faire remonter les difficultés des collectivités locales et organiser la concertation entre les acteurs.
Nous en sommes convaincus, il faut faire appliquer cette loi et non proposer de revenir en arrière !
Avis défavorable.
Il me semble qu’en la matière, les meilleurs sous-préfets sont les parents d’élèves et les concitoyens qui demandent à leur maire de respecter la loi Égalim.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je mets aux voix l’article 11.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 285 :
Le Sénat a adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 56 rectifié bis est présenté par Mme Loisier, MM. Bacci et Chasseing, Mmes Guidez et de La Provôté, MM. Hingray, Bonneau et Henno, Mme Gacquerre, MM. Savary et Bonnecarrère, Mme Sollogoub, M. Duffourg, Mmes Billon et Perrot, MM. Cigolotti, Chauvet et Le Nay, Mmes Herzog et Férat, MM. Détraigne, Anglars et Folliot, Mme Doineau, MM. B. Fournier, Rietmann et Perrin, Mme Pluchet et M. Gremillet.
L’amendement n° 83 rectifié bis est présenté par MM. Cabanel, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Pantel et M. Requier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 412-4 du code de la consommation, il est inséré un article L. 412-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412 -4 -… – Le miel mis en vente sur le marché français fait l’objet d’analyses régulières afin de s’assurer de son origine géographique et florale ainsi que de son absence d’adultération.
« Les conditions dans lesquelles ces analyses sont réalisées et la liste des laboratoires habilités à les réaliser sont définies par décret. »
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 56 rectifié bis.
Cet amendement concerne le miel, qui est victime d’un haut niveau de fraude, que ce soit à l’appellation d’origine, à l’appellation florale ou à l’adultération, c’est-à-dire le fait de mélanger le miel avec d’autres substances, ce qui est formellement interdit.
Le miel est le cinquième produit le plus sujet à la fraude dans le monde. En France, près de 46 % des miels vendus seraient suspectés d’adultération. Il est donc nécessaire d’agir pour protéger ce produit de nos terroirs.
Seul un mécanisme d’analyses régulières avant la mise en vente sur le territoire français garantira un bon niveau de protection des consommateurs. À cet effet, cet amendement vise à instaurer de telles analyses, dont les modalités seraient à définir par décret afin de préserver les plus petites exploitations et d’éviter de les mettre en difficulté sur le plan économique.
La parole est à M. Christian Bilhac, pour présenter l’amendement n° 83 rectifié bis.
La plupart du miel consommé en France est importé. Il s’agit souvent d’un miel industriel complètement dénaturé, voire trafiqué, dans lequel des tas de substances sont ajoutées.
À côté de la relance de la production de miel français, il convient de lutter contre ces contrefaçons, qu’on ne peut pas franchement appeler du miel !
Ces amendements identiques s’inscrivent dans la continuité d’un long combat du Sénat sur le miel pour assurer la loyauté des transactions et l’information des consommateurs. Des révélations récentes nous ont appris qu’en Europe « plus de la moitié des miels [étaient] faux ».
Il s’agit de prévoir des contrôles réguliers pour s’assurer de leur origine géographique et florale et de l’absence d’adultération. Ces contrôles devront être réalisés par des laboratoires habilités, et non par les services déconcentrés de l’État.
Le ministre m’objectera sûrement que la révision à venir de la directive Miel de 2001 nous donnera, enfin, partiellement satisfaction sur certains points – partiellement, j’y insiste. Ce sera le cas pour l’indication obligatoire de l’origine géographique des mélanges de miel, mais pas pour l’ordre pondéral décroissant – une mesure que le Sénat a déjà souhaité introduire après une longue bataille d’amendements que je n’ai pas oubliée.
Sur les contrôles, qui doivent concerner l’ensemble des miels vendus en France, il nous faut agir dès maintenant. Certes, il s’agit bien d’une surtransposition, mais elle est tout à fait justifiée.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. Marc Fesneau, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements
Marques de déception sur les travées du groupe Les Républicains.
Premièrement, concernant les miels issus d’assemblages, les analyses effectuées sur les produits finis ne permettent de contrôler ni l’origine géographique et florale ni l’absence d’adultération. Seules des analyses réalisées avant assemblage peuvent détecter l’intégralité des fraudes.
Deuxièmement, l’adoption de ces amendements introduirait une situation de concurrence déloyale concernant les miels commercialisés sur le marché français. En effet, les opérateurs français seraient contraints de réaliser les analyses que vous réclamez, alors même que leurs concurrents, en vertu du principe de reconnaissance mutuelle, ne seraient pas soumis à cette obligation. Certes, il s’agit d’une surtransposition choisie dont on peut penser qu’elle est utile, mais elle ne s’appliquerait qu’aux miels qui ne sont pas la cible de ces amendements, à savoir les miels français.
Troisièmement, l’obligation imposée par ces amendements paraît méconnaître la directive européenne 2001/110/CE relative au miel, dont l’article 5 prévoit que « les États membres n’adoptent pas […] des dispositions nationales non prévues par la présente directive ». La révision de ce texte, qui est en cours, doit nous permettre d’aboutir à une rédaction qui réponde à vos exigences.
En résumé, ce qui est proposé ce soir, c’est une surtransposition qui ne s’appliquerait qu’aux apiculteurs français. Je ne suis pas sûr que ce soit le message que vous vouliez leur envoyer. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Je suis d’accord avec la dernière partie de l’intervention du ministre, à ceci près que des dérogations sont possibles en cas de fraudes avérées – et il en existe. On peut donc aller au-delà de la législation européenne, si bien que ces amendements peuvent être adoptés.
Il faut de la transparence à l’égard du consommateur. Tel n’est – hélas ! – pas le cas et cela ne concerne pas que le miel : le cas du cidre est actuellement sur la table.
M. Michel Canévet. Il faut de la clarté sur la composition des produits proposés à nos concitoyens. Par conséquent, il est important que des normes particulièrement drastiques soient fixées.
Très bien ! sur des travées du groupe UC.
Ces amendements concernant le miel sont très intéressants. En effet, nous avons bien souvent affaire à une concurrence déloyale, puisque des mélanges à base de glucose et de mélasse sont présentés comme du miel, ce qui est problématique.
Il est tout à fait significatif que nous ayons ce débat au moment où il est question des pesticides. Dans les miels français, on trouve énormément de pesticides, en particulier des néonicotinoïdes. C’est un vrai sujet. Il faut aussi penser à tous les apiculteurs qui perdent à peu près 30 % de leurs abeilles tous les ans.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Mon intervention avait pour but de montrer que tout était lié. Les interventions ne peuvent pas être à géométrie variable : les pesticides font partie du problème.
Monsieur le ministre, nous abordons là des sujets très complexes et toute proposition est évidemment perfectible.
Je reviens néanmoins sur ce que vous venez dire. Si l’on demande aux entreprises de conditionnement de réaliser des analyses, on connaîtra la composition florale des miels à défaut de leur origine exacte. Cela nous donnera déjà un certain nombre d’éléments sur l’approvisionnement frauduleux ou pas du mélange.
Cela constituerait tout de même une avancée pour lutter contre des pratiques qui sont pour le moins frauduleuses, même si je reconnais que cela n’apportera pas toute la transparence que nous souhaitons.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 56 rectifié bis et 83 rectifié bis.
Les amendements sont adoptés.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 11.
L’amendement n° 119 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Husson, Mme Joseph, MM. Sautarel, Rietmann et Perrin, Mme Richer, M. Mandelli, Mme Chauvin, MM. Panunzi, Cadec, Brisson et Louault, Mmes Di Folco, Berthet et Gacquerre, MM. Houpert, Burgoa et Piednoir, Mme Muller-Bronn, MM. Lefèvre et Bouchet, Mme Micouleau, MM. Anglars et Mouiller, Mmes Belrhiti et Thomas, MM. D. Laurent et Somon, Mmes Ventalon, Férat et Lassarade, MM. Savary et Chauvet, Mme Gosselin, M. Pointereau, Mme F. Gerbaud, MM. Sido, Klinger, Rapin et Sol et Mmes M. Mercier, Gruny et Del Fabro, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le II de l’article L. 230-5-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Il est institué auprès des ministres chargés de l’agriculture, des collectivités territoriales, de l’éducation nationale, de la santé et de l’environnement, un conseil national de la restauration collective.
« Ce conseil est composé de représentants des secteurs agricole et agroalimentaire, de représentants des collectivités territoriales, de représentants des ministères concernés, de représentants des associations de consommateurs et de protection de l’environnement, qui siègent à titre gratuit. Il est consulté sur la politique relative à la restauration collective. »
II. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Daniel Gremillet.
Cet amendement vise à créer une base légale au Conseil national de la restauration collective (CNRC), qui existe de façon informelle depuis 2019 à la suite de l’adoption de la loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi Égalim.
Cette instance de concertation, qui regroupe au sein de sept collèges les acteurs impliqués dans la restauration collective, a une mission d’accompagnement sur le suivi nutritionnel des repas, sur la situation économique du secteur, sur la substitution des plastiques ou encore sur l’utilisation de contenants réemployables.
Pour les collectivités, il s’agit d’un enjeu majeur.
Le Conseil national de la restauration collective existe déjà aujourd’hui de façon informelle et il fonctionne bien.
La définition de sa mission nous semble toutefois suffisamment large pour éviter les rigidités que son introduction dans la loi entraînerait, d’autant que nous sommes d’accord sur l’objectif d’un travail en commun pour trouver des solutions.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 11.
TITRE III
LUTTER CONTRE LA SURREGLEMENTATION EN MATIERE AGRICOLE
Le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Après le 1° A du I de l’article L. 1, il est inséré un 1° B ainsi rédigé :
« 1° B De veiller à ce que des normes législatives ou règlementaires allant au-delà des exigences minimales des normes européennes ne soient pas adoptées, sauf lorsqu’elles sont justifiées et évaluées avant leur adoption ; »
2° Après l’article L. 3, il est inséré un article L. 3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 3 -1. – Pour l’application du 1° B du I de l’article L. 1, le Conseil d’État identifie, dans les avis mentionnés à l’article L. 112-1 du code de justice administrative, les dispositions excédant les exigences minimales des normes européennes. Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard sept jours avant l’examen du texte concerné par la commission permanente de la première assemblée parlementaire saisie, un document estimant les conséquences financières des dispositions ainsi identifiées et recensant les dispositions similaires éventuellement adoptées dans les autres pays de l’Union européenne.
« Dans le cas d’un texte règlementaire soumis à une consultation publique mentionnée à l’article L. 131-1 du code des relations entre le public et l’administration ou à une enquête publique mentionnée à l’article L. 134-1 du même code, le Gouvernement produit le même document à destination du public consulté au plus tard une semaine après le début de la consultation ou de l’enquête. Il transmet ce document aux commissions compétentes du Parlement. »
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 62 rectifié est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 74 est présenté par MM. Marie et Tissot, Mme Préville, MM. Devinaz, Houllegatte et Stanzione, Mmes Poumirol et Meunier, MM. Gillé, Magner et Kerrouche et Mmes Harribey et S. Robert.
L’amendement n° 113 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour présenter l’amendement n° 62 rectifié.
En 2021, un rapport d’information de l’Assemblée nationale d’André Chassaigne et Jean Louis Bourlanges sur les méthodes de transposition des directives européennes indiquait que le phénomène de surtransposition était marginal et que l’on constatait plus souvent un déficit de transposition ou des sous-transpositions, notamment dans le domaine de l’environnement. Il rappelait aussi que les États membres avaient le droit de fixer des normes plus élevées que celles qui étaient définies par la directive.
En ce sens, toute surtransposition n’est pas nuisible en elle-même et peut résulter d’un choix assumé par le Gouvernement ou le Parlement de ne pas s’aligner sur le standard européen minimal, au regard des priorités nationales fixées dans certains domaines.
Ce qui se joue derrière l’article 12 et la bataille contre les prétendues surtranspositions systématiques, c’est en fait la remise en cause de toute ambition en matière environnementale et de progrès vers une réelle agroécologie. Pire, c’est une véritable régression et le choix de la logique du moins-disant environnemental et sanitaire.
Pourtant, en France, 85 000 tonnes de pesticides sont répandues chaque année. Notre pays est le premier consommateur européen et le troisième mondial. Ce classement ne peut pas nous laisser insensibles et nous ne pourrons pas nous cacher éternellement derrière les arguments selon lesquels une baisse de l’usage des pesticides aurait un effet néfaste sur la compétitivité des entreprises françaises et entraînerait des distorsions de concurrence.
En pointant la surtransposition en agriculture, vous voulez justifier la primauté des exigences concurrentielles sur les impératifs inhérents à la santé humaine et à l’environnement. De notre point de vue, cela n’est pas de nature à résoudre les problèmes du secteur agricole.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 74.
Cet amendement vise également à supprimer l’article 12 de cette proposition de loi, qui introduit un principe de non-surtransposition des directives européennes en l’absence de motif d’intérêt général.
Tout d’abord, nous avons de réels doutes sur la rédaction de cet article. Comme dans d’autres articles de ce texte, la notion d’intérêt général est utilisée pour justifier les dispositifs proposés, sans qu’aucune définition précise de cette notion soit établie.
Je pense, mes chers collègues, que nous aurions des approches bien différentes sur les critères que devrait intégrer une telle notion. La santé humaine et la préservation de l’environnement me semblent des critères de premier plan pour une potentielle définition.
De même, la notion d’exigence minimale pour la transposition est particulièrement inquiétante sur le fond, car elle reviendrait à contraindre le gouvernement français et le législateur à se positionner sur les critères les plus faibles. Pourtant, nous savons bien que les négociations européennes, souvent longues et complexes, aboutissent régulièrement à des échelles adaptables pour convenir à la grande majorité des États membres.
Adopter un tel article reviendrait à être le moins-disant possible dans les transpositions du droit européen, qui va du sanitaire au droit du travail, et à affaiblir considérablement la position française dans les débats européens. Il est pourtant indispensable que la France tienne une position forte pour demander une harmonisation des normes européennes à la hausse pour l’ensemble des États membres. L’harmonisation est le seul moyen pour éviter les distorsions de concurrence. L’objectif visé par cet article n’est donc pas le bon.
Enfin, cet article pèche également par incohérence, car il illustre votre opposition à toute surtransposition, alors que vous procédez vous-mêmes à des surtranspositions, notamment à l’article 10 sur l’étiquetage.
Pour toutes ces raisons, qu’il s’agisse de l’imprécision de sa rédaction ou de son idéologie anti-européenne, nous vous proposons de supprimer l’article 12.
Mes collègues communiste et socialiste l’ont bien explicité : l’article 12 est éminemment problématique. On nous accuse de caricaturer le débat, mais ce texte se caricature lui-même et nous en sommes les premiers désolés.
Cet article demande de justifier les mesures qui vont plus loin que les exigences européennes. Soit. Comment ? En s’appuyant sur un rapport du Gouvernement qui analyserait leurs conséquences financières sans envisager les conséquences sur l’environnement, la santé ou l’emploi. Il réduit l’analyse des politiques publiques aux seules conséquences financières. N’est-ce pas caricatural ?
De plus, présenter les surtranspositions comme une problématique majeure de l’agriculture française, comme le fait le rapport qui est à l’origine de cette proposition de loi, n’est-ce pas une caricature ?
Un rapport du Gouvernement de 2022 estime pourtant que les surtranspositions sont rares et que, quand elles existent, elles sont pleinement assumées. Encore une fois, on peut se demander de quel côté est la caricature.
Concernant le S-métolachlore, l’Anses n’a fait qu’appliquer le droit européen et l’autorisation de cette molécule à l’échelle européenne expire à la fin du mois de juillet 2023. D’ailleurs, les conclusions de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) rejoignent celles de l’Anses. N’est-ce donc pas de la caricature que de crier à la surtransposition, comme on a pu l’entendre dans le débat public ?
Pour nous, et comme le rappelait ce rapport, aller plus loin que le droit européen est légal et légitime, notamment pour protéger les citoyens et notre environnement. Cet article cherche à contraindre cette possibilité ; nous estimons au contraire que la France doit être leader sur ces sujets, ce qui permettrait par ailleurs d’anticiper les problématiques à venir.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression de l’article 12.
Il s’agit d’un article très important, qui vise avant tout à tirer la sonnette d’alarme sur les surtranspositions qui affectent massivement le monde agricole et dont les conséquences sont réelles, notamment en termes de concurrence déloyale sur le marché intérieur.
Les surtranspositions ne concernent d’ailleurs pas uniquement les produits phytosanitaires : nombre d’entre elles sont relatives à d’autres problématiques agricoles.
Comme je l’ai mentionné tout à l’heure, cette alerte a également été émise par l’Assemblée nationale au mois de février dernier par le biais du dépôt d’une proposition de résolution visant à lutter contre les surtranspositions en matière agricole. Selon les termes de ce texte qui a été adopté la semaine dernière, l’Assemblée nationale « regrette […] les interdictions brutales de produits phytopharmaceutiques » et « réaffirme l’impérieuse nécessité de lutter contre les surtranspositions des directives européennes, pour éviter les distorsions de concurrence ».
Alerter sur les surtranspositions ne signifie pas pousser au moins-disant. Cela revient à insister sur la nécessité de prendre garde, avant d’adopter des mesures pénalisantes pour notre agriculture sans aucune concertation européenne ni évaluation des conséquences et des effets de bord. Poser un principe de non-surtransposition, comme l’ont fait d’autres pays européens, notamment l’Allemagne, est un signal clair envoyé au Gouvernement.
Il ne s’agit pas de priver le Parlement de son droit fondamental à légiférer ; il n’en a jamais été question et ce serait juridiquement impossible. C’est sur l’évaluation a priori que cet article entend surtout mettre l’accent, pour que le Parlement ait bien conscience de ce qu’il s’apprête à voter et des conséquences de son vote.
Il ne me semble pas inacceptable de demander au Conseil d’État d’identifier dans ses avis les surtranspositions et de demander au Gouvernement de s’en expliquer. Cet article améliore l’information du Parlement. Les Allemands le font, je ne vois pas pourquoi nous ne le pourrions pas !
Sur l’article 12, comme sur les amendements identiques visant à le supprimer, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
Cet article pose une bonne question : comment limiter la surtransposition ? Si la rédaction de l’article 12 nous semble insuffisante en l’état, sa suppression pure et simple reviendrait à considérer que la question n’est pas pertinente.
Or je rappelle que les surtranspositions ont des conséquences collatérales aux ramifications diverses, que ce soit en matière sanitaire, sociale, alimentaire, commerciale ou environnementale.
Pour autant, adopter cet article en l’état aurait des conséquences sur les concertations en cours sur le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles et le Gouvernement espère aller au bout de ces concertations pour construire collectivement une doctrine sur les surtranspositions.
Je crois par ailleurs que nous pouvons déjà agir sans nécessairement modifier la législation. C’est ce que nous faisons actuellement en ce qui concerne les produits phytosanitaires. Ainsi, nous voulons réviser les objectifs et les modalités de mise en œuvre du plan Écophyto 2030 : nous ne devons interdire une molécule qu’après nous être interrogés sur les alternatives crédibles et sur les moyens de parvenir à son remplacement.
Plus que de lutter contre les surtranspositions, il s’agit de préparer l’agriculture à sortir de certains produits phytopharmaceutiques.
Je le répète : supprimer l’article 12 reviendrait à dire que les surtranspositions sont sans incidence, ce qui ne me semble pas tout à fait exact, et reviendrait à éluder la question ; dans le même temps, la rédaction de l’article n’est pas complètement aboutie.
À notre sens, la question des surtranspositions est un leurre que l’on agite pour éviter de débattre des véritables sujets agricoles, à savoir les inégalités liées à la PAC ou encore l’absence de régulation européenne des marchés et d’équité dans les relations commerciales. Par exemple, c’est la fin des quotas qui a été le principal souci de la filière betterave.
Puisqu’il est question de surtranspositions, parlons des néonicotinoïdes : ils se sont invités dans le débat ici même en 2014 lors de l’examen d’une proposition de résolution européenne. J’avais alors arraché ma cravate de colère.
Exclamations amusées sur certaines travées.
Nous sommes parvenus à interdire les néonicotinoïdes en France dans le cadre de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, dite loi Biodiversité. On avait alors parlé de surtransposition, mais la disposition avait été maintenue et, deux ans après, l’Union européenne les interdisait à son tour.
À la suite de tous ces débats, des dérogations permettant la réintroduction de certains néonicotinoïdes ont été accordées, notamment pour la filière betterave. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et le Conseil d’État ont cassé ces autorisations ; c’est à ce moment-là que la France a été exemplaire et elle peut l’être dans d’autres domaines.
M. Laurent Duplomb. Les néonicotinoïdes sont un cas typique de surtransposition.
Marques d ’ approbation sur des travées du groupe Les Républicains.
Cela ne s’est pas passé tout à fait comme l’a raconté Joël Labbé.
Il existe en Europe cinq familles de néonicotinoïdes. L’Union européenne en a interdit quatre et en autorise toujours une.
La France, par surtransposition totale, a interdit tous les néonicotinoïdes. Se rendant compte des incidences de cette décision sur la production de betteraves, elle a réintroduit les néonicotinoïdes dans l’enrobage de la graine, ce qui était interdit au sein de l’Union européenne. Par conséquent, très normalement, la CJUE est intervenue pour empêcher la France de continuer.
Aujourd’hui, parce qu’elle a surtransposé et s’est vu interdire la seule mesure sur laquelle elle était revenue, la France se retrouve sans solution, alors même que tous les autres pays européens auront la possibilité de traiter le puceron foliaire avec l’acétamipride.
Nous sommes donc dans l’impasse, et cela ne concerne pas seulement les betteraves. Par exemple, avec l’interdiction à venir de la spirotétramate, les Polonais continueront de traiter le puceron cendré de la pomme avec la cinquième famille de néonicotinoïdes, autorisée à l’échelon européen, mais interdite en France !
M. Laurent Duplomb. Pour la pomme, comme pour la betterave, les arboriculteurs français seront dans une impasse technique !
Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.
M. Guillaume Gontard. Monsieur Duplomb, je vous remercie d’avoir expliqué pourquoi il faut parfois surtransposer !
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Quelle est la problématique des néonicotinoïdes ? Quelque 1 200 études, sinon plus, attestent scientifiquement de leur dangerosité
M. Laurent Duplomb proteste.
Dans ces conditions, heureusement – heureusement ! – que la France garde la liberté d’interdire ces produits qui sont dangereux pour la santé humaine et pour la biodiversité.
M. Laurent Duplomb. On mangera donc du sucre brésilien et des pommes polonaises !
Exclamations sur des travées des groupes GEST, SER et CRCE.
Heureusement que nous pouvons surtransposer ! Cela me paraît particulièrement important.
Par ailleurs, si l’on veut renoncer à toute surtransposition, il vaudrait tout de même mieux que la France respecte déjà le droit européen… Or elle a été condamnée un nombre assez important de fois pour non-respect de directives européennes, qu’il s’agisse de la qualité de l’air ou de l’eau, des gaz à effet de serre, etc. Soyons cohérents !
Sur la question de produits qui ont été établis comme dangereux par de nombreuses études scientifiques, la responsabilité du Gouvernement est engagée. Je me rappelle Barbara Pompili, alors ministre de la transition écologique, déclarant à cette tribune : nous savons et nous serons responsables.
Alors, oui, heureusement que nous pouvons surtransposer pour interdire certains produits. Il n’est qu’à prendre l’exemple du chlordécone : si la France avait pris les devants et interdit ce produit, nous n’aurions pas les problèmes sanitaires que nous connaissons aujourd’hui.
Allons jusqu’au bout de votre démonstration, mon cher collègue.
Vous refusez le sucre fabriqué grâce aux néonicotinoïdes, mais puisque l’industrie sucrière française est en train de fermer en raison de ce qu’on considère comme un danger pour l’être humain, on importe du sucre fabriqué de cette manière… Votre démonstration n’est donc pas aboutie.
Dans le même temps, notre balance commerciale se dégrade et nous perdons nos producteurs et notre savoir-faire. Continuez ainsi et ce sera bientôt la fin de l’agriculture française !
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Sourires.
Il y a des solutions ! Des producteurs de betteraves proposent du sucre bio ; il est vrai que cela entraîne parfois des baisses de rendement, mais c’est tout à fait possible.
M. Laurent Duplomb ironise.
Il faudrait sans doute réfléchir aux moyens de favoriser cette production en France.
« Il n’y a pas de solution », « c’est inéluctable » : voilà ce qu’on entend tous les jours ! Il existe pourtant bien des possibilités, mais il faut avoir la volonté de les mettre en place, ce qui demande de travailler sur d’autres pratiques.
Le directeur scientifique agriculture de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) a récemment été auditionné par la commission des affaires économiques.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
On peut continuer ainsi longtemps – faire le vide, stériliser les campagnes – et on aura de plus en plus de soucis. Prenons le taureau par les cornes.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
M. Daniel Salmon. Regardons les choses en face et faisons attention à la terre que nous léguerons à nos enfants.
Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.
On parle de danger pour l’environnement ou pour la santé humaine, mais jamais de dose. Pourtant, c’est une notion fondamentale : les substances ne présentent de toxicité qu’à partir d’une certaine dose épandue.
Monsieur Labbé, j’ai fait partie, avec Chantal Jouanno, des premiers cosignataires pour interdire les néonicotinoïdes, lorsqu’il a été établi que c’était dangereux pour les abeilles. Je l’ai fait sans réserve, même s’il se trouve que cela n’a pas été suffisant, puisque les abeilles sont confrontées à d’autres dangers et qu’il s’agit d’un problème multifactoriel.
En matière de toxicité et de toxicologie, on ne parle pas suffisamment des doses, alors même que c’est fondamental, je le répète. Entre le danger et le risque se pose la question de la dose épandue, paramètre que l’on ne prend pas assez en compte.
Si l’on parle d’un système à zéro pesticide, comme le prônent certains de mes voisins dans cet hémicycle, il est clair que nous reviendrons rapidement aux famines du Moyen Âge.
M. Daniel Salmon s ’ exclame.
Nous aurons toujours des insectes, des bactéries, des champignons prêts à dévaster nos cultures.
Exclamations sur les travées du groupe GEST.
Avec le remembrement, nous avons des surfaces cultivées de plus en plus importantes et, en cas d’épidémie, ce sera la catastrophe. Il est vrai que nous ne connaîtrons pas de famine, parce que nous importerons !
J’ai des amis producteurs en bio qui sont ravis que leurs voisins traitent leurs champs…
Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.
Soyons réalistes : l’agriculture bio à 100 % n’est pas possible aujourd’hui sur notre territoire. Certains s’y sont essayés, comme des viticulteurs alsaciens ou des producteurs du Sud-Ouest : ce n’est pas possible.
Protestations sur les travées du groupe GEST.
Soyons raisonnables ! Le Président de la République a dit : « Il n’y aura pas d’interdit sans solution. » Il a raison.
Voilà bien des années que les néonicotinoïdes sont utilisés sur la betterave, qui n’est pas une plante mellifère. Cela signifie qu’il n’y a aucune dangerosité avérée
C ’ est faux ! et protestations sur des travées du groupe GEST.
– aucune ! – et que la solution de l’enrobage avec des néonicotinoïdes permettait, pendant une période de quatre-vingts jours à quatre-vingt-dix jours, de protéger la plante le temps de son développement. Il n’y avait aucune trace, de quelque nature que ce soit, à part celle que certains veulent inventer, mais qui ne s’appuie sur rien de concret.
Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.
Si vous ne permettez pas le développement de la recherche pour que nous puissions nous passer de néonicotinoïdes en 2028 et continuer à produire de la betterave, alors nous serons totalement dépendants de nos importations pour ce qui est du sucre, de l’alcool, du gel hydroalcoolique, du carburant ou de l’alimentation animale.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Je ne vais pas revenir sur le débat que nous avons déjà eu il y a quasiment trois ans sur les néonicotinoïdes.
Je tiens juste à apporter certaines précisions.
Dans l’affaire des néonicotinoïdes, on peut parler d’un cas avéré de surtransposition. On peut aussi faire le constat d’un échec : quand on perd 30 % ou 60 % d’une récolte de betteraves, c’est non pas à cause des quotas, mais de la jaunisse.
M. Guillaume Gontard s ’ exclame.
Il nous faut crédibiliser les solutions de remplacement. Tel était d’ailleurs l’objet de la dérogation de trois ans qui avait été votée au Sénat et à l’Assemblée nationale.
La décision de la Cour de justice de l’Union européenne s’impose à nous, le sénateur Duplomb l’a très bien expliqué. Au fond, la Cour de justice a simplement rappelé – vous me pardonnerez cette tautologie – que, lorsque c’est interdit, c’est interdit…
Essayons de tirer une leçon de ce qui s’est passé. Lors d’une prochaine transposition, il serait bon de réfléchir en amont aux solutions de remplacement et aux moyens à consacrer à la recherche pour éviter de nous retrouver en situation de surtransposition et de fragiliser les filières.
Enfin, monsieur Salmon, vous dites que la solution, c’est de consommer du sucre bio, mais connaissez-vous l’état du marché ? Seulement 0, 5 % du sucre consommé en France est bio ! Il faudrait alors ajouter dans la proposition de loi un nouvel article pour interdire de consommer du sucre non bio… Ce serait évidemment une surtransposition, mais surtout un déni de réalité !
Je le répète : 0, 5 % du sucre consommé en France est bio. Ce n’est pas l’offre qui va créer la demande ; il faut créer de la demande pour qu’il y ait de l’offre, sinon nous n’y arriverons pas et le sucre consommé en France ne sera pas produit dans notre pays.
Je tiens à rétablir une vérité, car depuis le début de la soirée, on a l’impression qu’il y a, d’un côté, l’agriculture vertueuse, qui n’utilise aucun produit phytosanitaire, et, de l’autre, une agriculture qui ne pense qu’à ramasser du pognon, quitte à jouer avec la santé et le bien-être de nos concitoyens.
Nos collègues du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires prétendent, chiffres à l’appui, que l’utilisation de produits phytosanitaires n’a fait qu’augmenter depuis des années, mais ils se sont arrêtés aux années 2017-2018. Or depuis, selon un rapport gouvernemental, la consommation par le monde agricole de produits phytosanitaires – je les appelle « produits de soin de la plante » – a chuté.
Ainsi, la consommation globale de produits phytosanitaires a baissé de 19 % entre 2019 et 2021, celle des produits dits à grands risques, les produits cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de catégorie 1 (CMR1), de 85 %. Les seuls produits dont l’utilisation a augmenté ces dernières années, ce sont les produits utilisés en agriculture biologique, que l’on appelle aussi biologiquement contrôlable : leur utilisation est en hausse de 15 %.
Il ne faut donc pas croire qu’il y aurait les bons d’un côté, les mauvais de l’autre. L’agriculture en général fait des efforts importants depuis un certain nombre d’années pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 95, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° B De veiller à ce que des normes législatives ou réglementaires soient conformes aux normes européennes en matière de protection de la santé et de l’environnement ; »
II. – Alinéa 5
1° Première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
ainsi qu’une analyse de la conformité des mesures proposées aux normes européennes, qui comprend une analyse des normes européennes en la matière qui ne seraient pas respectées par l’état du droit
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le Gouvernement présente également une analyse des conséquences pour l’environnement et la santé des non-conformités du droit français au droit de l’Union européenne identifiées, et les mesures qu’il compte mettre en œuvre pour y remédier.
La parole est à M. Daniel Salmon.
Cet amendement devrait vous satisfaire, monsieur le ministre, mes chers collègues, car il vise à trouver un équilibre.
À l’inverse de la logique proposée à l’article 12, nous proposons ici un principe de non-« sous-transposition » et de lutte contre les sous-réglementations en matière environnementale, sanitaire et de protection sociale.
Il nous paraît essentiel de nous interroger sur une bonne harmonisation du droit de l’Union européenne entre les États membres et sur une juste articulation entre le droit national et le droit communautaire.
Or, en mettant l’accent sur les surtranspositions, cet article occulte un pan entier de la réflexion : le fait que la France est également concernée par des sous-transpositions ou des sous-réglementations.
Pour illustrer mon propos, j’évoquerai quelques exemples dans les domaines de la santé et de la préservation de l’environnement.
En février 2023, la Commission européenne a adressé à la France un avis motivé lui demandant de se mettre en conformité avec la directive Eau potable.
Dans une décision du 15 novembre 2021, le Conseil d’État a enjoint au Gouvernement de prendre, dans un délai de six mois, les mesures nécessaires pour veiller à ce que l’utilisation de pesticides soit effectivement restreinte, voire interdite, dans les zones classées Natura 2000 pour se conformer au droit européen.
La Commission européenne a également estimé prendre très au sérieux les potentielles infractions à la directive-cadre sur l’eau liées aux projets de stockage d’eau qui se développent sur le territoire français.
Par ailleurs, dans sa lettre d’observation sur la première version du plan stratégique national (PSN) français en matière de politique agricole commune, elle a formulé de nombreuses critiques et demandes d’ajustements, principalement sur une insuffisance de la prise en compte des enjeux environnementaux.
Au regard de ces exemples, il nous semble essentiel que le présent article prévoie également une étude des sous-transpositions dans notre droit.
On ne peut pas en permanence se victimiser et ne pas regarder les choses dans leur globalité. Tout n’est pas ou tout blanc ou tout noir. Il existe à la fois des sous-transpositions et des surtranspositions.
L’amendement n° 126, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
pas adoptées, sauf
par les mots :
adoptées que
La parole est à Mme le rapporteur.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement est adopté.
Je mets aux voix l’article 12, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 286 :
Le Sénat a adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport dressant un bilan de la mise en œuvre de l’article L. 236-1 A du code rural et de la pêche maritime et présentant les possibilités de mise en place de clauses miroirs aux frontières du marché intérieur.
L’amendement n° 96, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ce rapport comporte un bilan sur la politique de contrôle sanitaire des denrées alimentaires importées. Il précise le nombre de contrôles effectués pour l’année, dont le nombre de contrôles aléatoires, le nombre d’agents affectés à ces contrôles, les résultats de ces enquêtes, ainsi que les mesures, mises en œuvre et proposées, au niveau national et européen pour mieux lutter contre les risques sanitaires et environnementaux liés aux produits importés.
La parole est à M. Daniel Salmon.
Nous proposons de compléter le contenu du rapport relatif à la mise en œuvre des clauses miroirs, dont on parle si souvent, plus précisément en ce qui concerne l’article 44 de la loi Égalim.
Ce dossier n’avance pas. Les moyens affectés par l’État pour protéger notre agriculture de la concurrence déloyale des produits importés qui ne sont pas conformes aux exigences que, à raison, nous nous appliquons sont bien trop faibles pour permettre à l’administration de mener à bien sa mission.
L’instauration de clauses miroirs aux frontières du marché intérieur serait pourtant un moyen de protéger notre agriculture de la concurrence déloyale, comme cela est démontré dans le rapport d’information du Sénat sur les retraits et les rappels de produits à base de graines de sésame importées d’Inde ne respectant pas les normes minimales requises dans l’Union européenne et dans le rapport sur le projet de loi de finances pour 2023.
Les producteurs font face à une concurrence déloyale, tandis que les consommateurs sont exposés à des risques sanitaires.
La lutte contre les importations ne respectant pas nos normes sanitaires et environnementales est l’un des éléments permettant de construire une véritable compétitivité pour notre agriculture dans ses dimensions économiques, sociales, environnementales et sanitaires.
Nous proposons que soit dressé un bilan de la politique de contrôle sanitaire des denrées alimentaires importées. Au Sénat, on parle depuis très longtemps des clauses miroirs, sur lesquelles nous sommes assez nombreux à être d’accord. Il faut désormais aller de l’avant pour lutter contre la concurrence déloyale.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 12 bis est adopté.
L’amendement n° 97, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 12 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Pour l’atteinte des finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation mentionnées au présent I, la France soutient au niveau international et européen le principe d’un traitement différencié dans le cadre des relations commerciales internationales du secteur agricole, qui l’exclut de tout accord commercial global ou de libre-échange. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
Si les clauses miroirs évoquées dans la présente proposition de loi peuvent constituer un outil pour amorcer une régulation des échanges, elles ne seront pas suffisantes.
Par ailleurs, la Commission européenne semble résolue à conclure l’accord avec la Communauté économique des pays d’Amérique du Sud (Mercosur), alors que les conditions, notamment des clauses miroirs suffisantes, ne sont pas réunies.
C’est pourquoi nous proposons d’inscrire, parmi les finalités de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation, le soutien de la France, à l’échelon international et européen, au principe d’un traitement différencié du secteur agricole dans le cadre des relations commerciales internationales, afin de l’exclure de tout accord commercial global ou de libre-échange.
Sans régulation des marchés agricoles et sans sortie de ce secteur des accords de libre-échange, la construction de la compétitivité environnementale, sociale, économique et sanitaire de notre agriculture sera nécessairement mise à mal par la concurrence de productions moins-disantes.
Penser que les agriculteurs français pourront rivaliser avec leurs concurrents à l’échelle mondiale est un leurre. Une telle rivalité n’est en outre pas souhaitable, car la compression des normes et des charges se fait au détriment de la protection sociale des travailleurs et de l’environnement.
Le choix des systèmes alimentaires doit s’effectuer sans dumping, pour atteindre la souveraineté alimentaire telle qu’elle a été définie par La Via Campesina lors du sommet de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) : il s’agit du « droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée, produite par des méthodes […] durables, et le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires ».
Tel est le sens de cet amendement.
Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel, parce que l’exclusion du secteur agricole de tout accord commercial global ou de libre-échange ne me semble ni réaliste ni même souhaitable.
Néanmoins, je partage les préoccupations de notre collègue : il faut être attentif à l’addition des accords de libre-échange conclus à l’échelon européen et à leurs conséquences sur chacune des filières.
Enfin, cet amendement s’apparentant à une injonction au Gouvernement, la commission y est défavorable.
Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement, pour les raisons que vient d’invoquer Mme la rapporteure.
J’ajoute, à la suite de l’échange que nous avons eu précédemment sur les questions de surtransposition, que si nous étions déjà d’accord entre Européens sur les normes à appliquer, l’idée qu’il faut avancer sur les clauses miroirs serait davantage acceptée.
Quand je dis à nos partenaires européens qu’il faut mettre en œuvre des clauses miroirs, ils me répondent que les sujets concernés relèvent d’une réglementation française. C’est notamment pour cette raison que je milite pour des réglementations européennes s’appliquant dans tous les États membres : c’est à partir de ce moment-là que nous pourrons imposer des clauses miroirs dans les accords commerciaux.
Enfin, comme l’a indiqué Mme la rapporteure, nous avons besoin d’accords internationaux et de règles dont l’agriculture ne doit pas être exclue. C’est d’ailleurs parce que nous signons des accords internationaux que nous pouvons faire reconnaître nos signes de qualité à l’extérieur de nos frontières et empêcher que certains faussaires ne viennent troubler le jeu.
Nous devons travailler sur les clauses miroirs, les penser en Européens et ne pas exclure totalement le secteur agricole des accords internationaux, ce qui serait contraire à la vocation exportatrice de notre pays.
Je remercie notre collègue Daniel Salmon d’avoir déposé cet amendement. Il nous donne l’occasion de parler un peu de la question du libre-échange, alors que le Parlement est privé de débat sur ce sujet – il y a quand même là un petit problème démocratique.
Je le dis de nouveau, il faudra bien que le Ceta, l’accord économique et commercial global avec le Canada, soit examiné un jour par le Sénat.
D’ailleurs, monsieur le ministre, je vous répète également que je suis toujours disponible pour visiter une exploitation agricole qui trouverait des avantages à la signature de cet accord.
De même, si vous trouvez une exploitation pour laquelle un accord avec le Mercosur serait bénéfique, je suis preneur !
Vous êtes le quatrième ministre de l’agriculture en six ans à me dire que vous allez me faire visiter une telle exploitation : j’attends toujours !
Pour ma part, je ne comprends pas comment le Sénat peut continuer à se laisser humilier ainsi par le Gouvernement. Allons-nous un jour contraindre le Gouvernement à débattre au Parlement du Ceta et à nous permettre de voter sur cet accord ? En cas de vote négatif, peut-être remettrons-nous sur la table certaines choses ?
Les clauses miroirs, c’est très intéressant : il ne faut pas accepter d’importer des produits qui sont interdits en France. Je pense que nous pourrions nous mettre d’accord sur ces questions avec une grande partie de la droite sénatoriale.
Par ailleurs, monsieur le ministre, je suis ravi d’apprendre qu’il faut des accords de libre-échange pour faire du commerce ! Si tel était le cas, nous n’aurions pas beaucoup commercé depuis le Moyen Âge ! Ainsi, il aurait fallu attendre l’ultralibéralisme et le libre-échangisme pour faire du commerce ? J’ignorais que l’on vivait en autarcie avant les années 1970.
Sourires.
Je pense que la question se pose d’inscrire dans les traités de libre-échange une exception agricole, à l’instar de l’exception culturelle, car l’agriculture est toujours la variable d’ajustement dans ces traités. Sommes-nous d’accord pour dire que les produits alimentaires et agricoles ne sont pas des produits comme les autres ?
Il faudra bien, à un moment, que nous ayons un débat sérieux sur ces questions. Et j’espère que le Sénat dans son ensemble se fera un jour respecter par le Gouvernement !
Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Pierre Cuypers et Mme Anne Chain-Larché applaudissent également.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Mes chers collègues, je vous informe que, depuis la reprise de la séance, nous avançons au rythme de quatorze amendements à l’heure, ce qui pourrait nous conduire, si nous continuions ainsi, à achever l’examen du texte vers trois heures trente du matin.
Or, pour des raisons de cohérence, je vous propose d’essayer d’achever l’examen de ce texte ce soir. Si nous accélérions un peu notre rythme, nous pourrions peut-être nous coucher à une heure un peu plus raisonnable. Ne voyez toutefois dans mon propos aucune volonté de ma part de contraindre le débat très intéressant que nous avons ce soir.
Mes chers collègues, il est presque minuit, je vous propose d’ouvrir la nuit afin de terminer l’examen de ce texte dans les conditions que vient d’indiquer Mme le rapporteur.
Il n’y a pas d’objection ?…
Il en est ainsi décidé.
I. – Les deuxième et troisième phrases du deuxième alinéa de l’article L. 1313-5 du code de la santé publique sont remplacées par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, le ministre chargé de l’agriculture peut, par arrêté motivé, suspendre une décision du directeur général prise en application du onzième alinéa de l’article L. 1313-1, après avoir réalisé une balance détaillée des risques sanitaires, environnementaux et de distorsion de concurrence avec un autre État membre de l’Union européenne, et évalué l’efficience de solutions alternatives. »
II. – La section 1 du chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 253-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 253 -1 -1. – Un retrait d’autorisation ou une modification de l’autorisation d’utilisation visant à restreindre l’usage d’un produit emporte l’obligation pour l’État de financer un accompagnement technique et de recherche adapté pour les professionnels.
« Dans le cas d’une décision de retrait, et sous les réserves mentionnées à l’article 46 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil, le délai de grâce est systématiquement porté à six mois pour la vente et la distribution, et à un an supplémentaire pour l’élimination, le stockage et l’utilisation des stocks existants.
« Le directeur général peut, à l’occasion de l’instruction d’une demande d’autorisation préalable à la mise sur le marché et à l’expérimentation telle que décrite à l’article L. 1313-1 du présent code, s’en remettre à la décision, par arrêté, du ministre chargé de l’agriculture. »
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 40 rectifié est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mme Préville, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy, J. Bigot, Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 63 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 114 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer l’article 13.
Initialement, cet article prévoyait que l’Anses devait présenter, dans ses décisions d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits phytopharmaceutiques, une balance détaillée des bénéfices et des risques sanitaires, environnementaux et économiques.
En commission, la rapporteure a proposé de réécrire le dispositif, estimant que l’Anses ne pourrait pas assumer cette mission, et donné au ministre de l’agriculture le pouvoir de suspendre une décision du directeur général de l’Anses sur le fondement de cette balance bénéfices-risques.
L’article 13 prévoit également d’introduire un délai de grâce systématique en cas de retrait d’une AMM pour permettre, dans un premier temps, et pendant six mois, de continuer à vendre et distribuer ce produit, puis, dans un second temps, de continuer à l’utiliser, à le stocker ou à l’éliminer pendant une année supplémentaire.
Les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s’opposent fermement à ces deux propositions, qui, si elles étaient adoptées, remettraient totalement en cause le processus actuel d’autorisation et de retrait des AMM et affaibliraient fortement l’Anses, et ce uniquement dans une logique économique.
D’une part, nous estimons que l’Anses est une agence d’expertise scientifique indépendante, dont le rôle est notamment d’évaluer l’impact d’un produit sur la santé humaine et l’environnement. Il semble inenvisageable que ses décisions puissent être dictées ou remises en cause sur le fondement de critères économiques.
Nous considérons qu’un ministre de l’agriculture ne peut pas avoir le pouvoir de suspendre à son gré une décision de cette agence, notamment s’il peut invoquer, à l’appui de sa décision, les distorsions de concurrence avec un autre État membre.
Nous savons tous ici qu’il n’en faudra pas plus à certains lobbies pour s’engouffrer dans la brèche, exercer des pressions et produire des analyses plus ou moins fondées, comme l’a bien montré le récent scandale Phytéis.
D’autre part, l’introduction d’un délai de grâce automatique, qui pourrait courir pendant une durée de dix-huit mois, pose aussi de graves questions en matière de sécurité sanitaire et environnementale.
Rien, dans cet article, ne va dans le bon sens. Une fois de plus, nous avons le sentiment que, derrière la recherche de compétitivité, il y a une volonté de déréguler et de déréglementer.
La commission est évidemment défavorable à la suppression de cet article.
Je l’ai dit lors de la discussion générale, nous ne touchons pas aux missions de l’Anses, nous redonnons au ministre de l’agriculture un pouvoir politique sur un certain nombre de molécules.
Il s’agit de lui permettre non pas d’agir à son gré, mais de procéder à une analyse bénéfices-risques, de vérifier si les molécules qui sont en cause sont autorisées ou pas dans d’autres pays européens, s’il existe des solutions de repli et d’évaluer les conséquences sur les filières et sur l’industrie agroalimentaire.
Fort de ces éléments, le ministre pourra ensuite prendre une décision, pousser la recherche afin de trouver des solutions de remplacement et inciter l’Union européenne à décréter une interdiction totale dans l’ensemble de l’Union européenne, si cela est nécessaire.
Cela ne remet absolument pas en cause l’indépendance de l’Anses, qui continuera de rendre ses avis de la même manière.
J’avoue être très surprise de la position du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui a adopté des positions très fortes sur le projet de fusion de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) lors de l’examen du projet de loi relatif au nucléaire. Vous avanciez alors la question de l’indépendance ; vous vous contredisez aujourd’hui, mais peu importe.
Paradoxalement, à partir des mêmes arguments que Mme la rapporteure, j’émets un avis favorable sur ces amendements.
Je n’ai jamais dit, y compris lors des récentes controverses sur ce sujet, qu’il fallait remettre en cause les prérogatives de l’Anses. Jamais ! J’ai simplement dit qu’on pouvait débattre avec elle, comme vous le faites d’ailleurs vous-même dans bien des cas, quand cela vous arrange, sur le rapport coût-efficacité et sur les conséquences de ses travaux.
Mesdames, messieurs du groupe écologiste, vous avez vous-mêmes remis en cause les préconisations de l’Anses sur la grippe aviaire, ainsi que sur les nitrites.
Si, si, vous avez remis en cause les préconisations de l’Anses sur le plan nitrites, mais aussi sur d’autres sujets.
La question des néonicotinoïdes est un problème de droit européen et de surtransposition française. L’Anses n’a rien à voir dans cette affaire.
Cela étant, il ne faut pas nier les obstacles. Nous devons mettre fin à l’utilisation des néonicotinoïdes, tout le monde est d’accord sur ce point, y compris ici au Sénat.
La dérogation n’aura duré que deux ans, mais le fait est que nous avions initialement prévu trois ans. Si certains souhaitent que l’on renouvelle cette dérogation pour trois ans, puis encore pour trois ans, etc. alors le problème est d’une autre nature. Il nous faut trouver des solutions de remplacement, car nous sommes pour l’instant dans une impasse.
Nous avons besoin que l’Anses éclaire les débats et qu’elle délivre les autorisations de mise sur le marché, mais il n’est pas inutile que nous ayons un débat sur la synchronisation avec les négociations européennes.
Monsieur le sénateur Labbé, vous avez dit que l’on connaissait déjà la décision de l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Non, nous ne la connaissons pas : une décision sur le S-métolachlore sera rendue dans quelques semaines, à la fin du mois de mai. Qu’adviendra-t-il si la décision prise à l’échelon européen diffère de celle de l’Anses ?
Qu’aurons-nous gagné ?
La question qui se pose n’est pas de savoir ce que dit l’Anses sur le fond, d’autant qu’elle a accordé un délai de six mois pour la vente des produits contenant du S-métolachlore et d’un an pour l’utilisation des stocks ; la question est, et cela ne me paraît pas révolutionnaire, d’essayer de synchroniser les agendas européens et nationaux.
Mais je m’éloigne de l’article 13. Je le redis, j’émets un avis favorable sur les amendements de suppression, car cet article ne règle pas les questions que nous nous posons sur l’Anses. Les sujets qu’il nous reste à traiter sont, pour certains, devant nous, en particulier la synchronisation avec le calendrier européen.
Le risque n’est pas ici la concurrence avec des pays tiers hors de l’Union européenne. Si certaines molécules étaient durablement interdites dans notre pays, bien avant les autres États membres de l’Union européenne, aucune disposition ne nous permettrait d’empêcher l’arrivée des produits. Ce sont alors nos filières qui disparaîtraient, quand d’autres pays continueraient d’utiliser des produits que nous aurions, nous, interdits. Tels sont les sujets sur lesquels nous devons travailler, dans le cadre d’un débat apaisé.
L’Anses n’est pas une autorité indépendante, c’est une agence, placée sous cotutelle conformément à la loi – le dire n’a rien d’insultant. En tant que tutelle, le ministre de l’agriculture a le droit d’émettre un avis et d’essayer de trouver la voie d’un compromis. Cela ne remet pas en cause la validité des éléments scientifiques utilisés par l’Anses.
Nous devons continuer de travailler sur ces sujets afin d’éviter les surtranspositions.
Mon explication de vote portera sur l’article 13, qui est au cœur des débats sur cette proposition de loi.
J’ai déjà fait part de mes réticences sur un certain nombre de dispositions concernant l’usage des pesticides.
Comme je l’ai expliqué lors de la réunion de la commission des affaires économiques, les modifications qui ont été introduites en commission sont pour moi une ligne rouge, car elles induisent un durcissement du dispositif.
La version initiale de cet article préservait la souveraineté de l’Anses, et ce malgré l’introduction d’un calcul bénéfices-risques. En offrant au ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire un droit de veto sur ses futures décisions, les modifications introduites en commission retirent de facto son pouvoir décisionnaire à l’Agence.
Confier la décision finale de l’interdiction d’un produit phytosanitaire au ministre présente le risque que les arbitrages ne se fassent pas dans le but de défendre le seul intérêt général.
C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai fait en commission des affaires économiques, je voterai contre l’article 13.
Je prends brièvement la parole pour répondre à M. le ministre, qui a avancé à plusieurs reprises le même argument concernant l’Anses et la grippe aviaire.
Monsieur le ministre, il ne vous a pas échappé que nous ne faisions pas partie du Gouvernement. En tant que groupe d’opposition, nous pouvons émettre des critiques contre des décisions de l’Anses. Les choses sont éminemment différentes, quand un ministre en exercice critique une autorité indépendante.
L’Anses n’est pas une autorité administrative indépendante !
Je tenais à vous faire remarquer qu’il existe une petite différence entre vous et nous.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 127, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
, par arrêté,
La parole est à Mme le rapporteur.
L ’ amendement est adopté.
Je mets aux voix l’article 13, modifié.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 287 :
Le Sénat a adopté.
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi puis tous les trois ans, un rapport des mesures d’encadrement des pratiques agricoles, en précisant et détaillant les objectifs recherchés, les coûts de la transition, leur couverture par des accompagnements publics ou des rémunérations par les marchés et leurs impacts sanitaires, environnementaux et économiques au regard des objectifs initiaux.
L’amendement n° 21 rectifié ter, présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay et Détraigne, Mmes Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, M. Duffourg, Mme Perrot, M. Chauvet et Mme Doineau, est ainsi libellé :
Après le mot :
agricoles
insérer les mots :
ainsi que de l’aquaculture lacustre et de rivière
La parole est à M. Michel Canévet.
L’article 14 vise à solliciter un rapport sur les mesures d’encadrement des pratiques agricoles. Il me semblerait utile de regarder aussi, dans ce cadre, la situation de l’aquaculture lacustre et de rivière. Ce secteur est au point mort dans notre pays depuis de nombreuses années, il est donc important de faire le point sur les freins à son développement.
Cet amendement de plusieurs sénateurs centristes me semble satisfait, mais je partage pleinement l’intention de ses auteurs de donner un coup de projecteur sur l’aquaculture, comme nous en avons donné un tout à l’heure sur l’agriculture ultramarine.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. À défaut, son avis sera défavorable.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 117, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ce rapport évalue également les coûts des externalités négatives des pratiques agricoles pour la collectivité, notamment les coûts sanitaires et environnementaux des pollutions liées à l’usage des produits phytosanitaires et des engrais de synthèse, des pollutions liées aux nitrates, ainsi que la part des dépenses publiques qui contribue à réduire ces coûts. D’autre part, il évalue les gains liés aux externalités positives des pratiques agroécologiques et notamment de l’agriculture biologique et la part des dépenses publiques orientée vers ces pratiques.
La parole est à M. Joël Labbé.
Cet amendement tend à compléter le rapport d’évaluation des mesures d’encadrement des pratiques agricoles et de leur impact financier.
En effet, si l’information demandée peut être intéressante, le périmètre est trop réduit. Nous proposons de chiffrer aussi les impacts environnementaux et sanitaires des pratiques agricoles. Les pratiques agricoles conventionnelles génèrent de nombreuses externalités négatives : les coûts liés aux pollutions de l’eau et de l’air comme ceux en lien avec la santé, la biodiversité ou les pollinisateurs doivent aussi être pris en compte par les politiques publiques.
Nous proposons aussi de chiffrer la part des dépenses publiques qui financent ces pratiques néfastes. Une étude des financements publics liés à l’utilisation agricole des pesticides en France a été publiée en 2021 par la Fondation Nicolas Hulot et le bureau Basic : elle montre que moins de 1 % des dépenses publiques contribue réellement à la réduction de l’usage des pesticides. Ces données sont intéressantes pour orienter notre politique agricole.
Nous proposons enfin de chiffrer l’ensemble des externalités positives, qu’on appelle aménités, dont nous bénéficions du fait des pratiques alternatives agroécologiques. L’agriculture biologique, notamment, protège l’eau, les sols, la qualité de l’air, la biodiversité, les pollinisateurs. Ces données sont elles aussi à prendre en compte, quand on parle d’évaluation des politiques publiques.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, car l’évaluation des dispositions législatives fait partie des missions du Parlement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 14 est adopté.
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° L’article L. 211-1 est ainsi modifié :
a) Au 5° bis du I, après les mots : « stockage de l’eau », sont insérés les mots : «, qui présente un intérêt général majeur » ;
b) Au 3° du II, après le mot : « agriculture », sont insérés les mots : «, pour laquelle les ouvrages ayant vocation à stocker l’eau présentent un caractère d’intérêt général majeur dans le respect du 5° bis du II du présent article, » ;
2° Après le même article L. 211-1, il est inséré un article L. 211-1-1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 211 -1 -1 A. – Les plans d’eau, permanents ou non, comme les prélèvements nécessaires à leur remplissage, à usage agricole, sont réputés répondre à un intérêt général majeur s’ils s’inscrivent dans le respect du 5° bis du II de l’article L. 211-1. Dans le respect d’une gestion équilibrée de la ressource en eau et d’une production agricole suffisante et durable, dès que possible, ces installations et activités tiennent compte d’un usage partagé et raisonné de l’eau. »
Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 14 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
L’amendement n° 41 rectifié est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mmes Préville et S. Robert, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy, J. Bigot, Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 64 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 72 est présenté par Mme Schillinger, MM. Patriat, Buis, Lemoyne et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 14.
Alors que les infrastructures de stockage d’eau à des fins agricoles suscitent débats, critiques et contentieux et que les sécheresses se multiplient, l’article 15 prévoit de déclarer automatiquement d’intérêt général majeur les ouvrages de stockage d’eau.
Les écologistes ne s’opposent ni à l’irrigation ni au stockage de l’eau – je le rappelle, parce qu’il est facile de caricaturer –, mais nous estimons que ces solutions doivent intervenir en dernier recours, une fois que tous les leviers de sobriété ont été mis en œuvre, notamment les pratiques agronomiques permettant de retenir l’eau dans les sols. Je rappelle que 93 % de notre agriculture est une agriculture pluviale, qui n’a donc pas besoin d’irrigation.
Déclarer ces projets d’intérêt général majeur sans aucun encadrement ni garde-fou ne nous semble pas la solution. Certes, l’article a été modifié en commission pour tenter d’atténuer la mesure, en l’articulant avec le principe de l’usage partagé et les hiérarchies des usages de l’eau, mais cette précision est insuffisante.
Si l’irrigation est nécessaire dans certains cas, elle doit être conditionnée à des pratiques agroécologiques et au soutien à la souveraineté alimentaire, et non être déclarée comme présumée d’intérêt général majeur. L’objectif est de placer l’usage agricole de l’eau au même niveau que l’eau potable et l’usage sanitaire, ainsi que le bon fonctionnement des milieux aquatiques déjà largement mis à mal.
Des alternatives à l’actuelle généralisation de l’irrigation existent : produire sur des sols vivants et avec des principes d’agroécologie. La priorité, face à la raréfaction de la ressource en eau, doit être de discuter des changements à opérer. La répartition des volumes d’eau d’irrigation entre les filières et le rôle de ces dernières au sein de stratégies territoriales doivent retenir toute notre attention.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 41 rectifié.
Nous abordons avec cet article un sujet très difficile, souvent clivant, qui mériterait une loi à part entière : la question du stockage de l’eau à usage agricole.
Sur la forme, les sénateurs de mon groupe considèrent dans leur très grande majorité qu’il serait très difficile de traiter ce sujet au détour de cette proposition de loi, sans étude d’impact ni concertation.
Sur le fond, nous regrettons le parti pris beaucoup trop marqué de cet article 15, qui propose de reconnaître dans la loi, par principe, le stockage de l’eau en agriculture comme d’intérêt général majeur.
Au vu du contexte sociétal et politique extrêmement tendu sur cette question, il ne nous semble pas judicieux d’inscrire un tel principe dans la loi au détour de l’examen d’un texte qui, nous le rappelons, n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact.
La question des retenues d’eau en agriculture est complexe. Seule une solution équilibrée et durable pourra apaiser les tensions et répondre aux attentes des différents acteurs concernés par ce type de décision.
Le groupe socialiste du Sénat mène actuellement un travail de fond sur la question des usages de l’eau, dans le cadre de son droit de tirage annuel. Nous rendrons nos conclusions à l’été 2023. C’est seulement à partir de ce travail sérieux, fruit de six mois d’auditions, de concertations et de réflexion, que des solutions équilibrées et sociétalement acceptables pourront émerger.
Dans cette attente, il nous semble totalement imprudent d’inscrire dans la loi des positions aussi définitives. Nous vous proposons donc de supprimer cet article.
Cet article mérite que nous lui consacrions un peu de temps, madame la présidente. Je pense que nous devons avoir un débat sérieux sur la gestion de l’eau.
L’été dernier, en France, cent villages n’ont pas eu accès à l’eau potable pendant plusieurs jours. Puis, il y a eu les méga-feux et des inondations. Vous me direz que c’est déjà arrivé dans le passé. Oui, mais cela s’accélère et s’intensifie : il faut vraiment que nous soyons sérieux sur cette question.
Face à une telle situation, il y a des biens que nous devons exclure du marché : appelons-les des biens communs de l’humanité, si vous voulez. Et nous devons faire en sorte qu’il n’y ait plus de conflits d’usage entre la biodiversité, l’agriculture, nos centrales nucléaires, etc.
Je ne confonds pas les mégabassines de retenue et celles qui pompent dans les nappes phréatiques.
Il faut faire du cas par cas. Proposer de globaliser et de tout rendre par principe d’intérêt général majeur, cela ne me paraît pas au niveau du débat que nous devons avoir.
Nous demandons donc la suppression de cet article. Pour autant, nous devons nous mettre sérieusement au travail sur ces questions. Si les mégabassines pompent dans les nappes phréatiques, il n’y aura bientôt plus rien à pomper : il n’y aura plus ni nappes phréatiques, ni mégabassines, ni par conséquent d’agriculture !
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 72.
La question de la gestion de l’eau est redevenue une problématique structurante du débat public, alors que nous nous étions habitués à une certaine abondance et à une relative facilité.
L’agriculture est en première ligne, puisque environ 10 % de l’ensemble des volumes d’eau douce prélevés en France lui sont destinés et qu’elle représente 45 % de la consommation d’eau.
Le Président de la République a annoncé, dans le cadre du plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau, une territorialisation de la politique de l’eau. Il a réaffirmé l’importance du respect de l’équilibre entre prélèvements et ressources et annoncé l’accompagnement de la création d’un fonds hydraulique doté de 30 millions d’euros par an.
Dans ce contexte, nous comprenons qu’il faille reconnaître la priorité à donner à l’agriculture, ce qui conduit à proposer de déclarer d’intérêt général majeur les ouvrages de prélèvement et de stockage de l’eau à des fins agricoles. Mais nous sommes favorables à ce que la gestion de l’eau et des milieux aquatiques soit définie au sein de chaque territoire à la suite d’une concertation locale, projet par projet.
Nous demandons donc la suppression de cet article.
Il nous semble également important que, lorsque la construction d’un ouvrage a été décidée localement et collectivement, elle puisse se faire rapidement. Il sera nécessaire, lors de l’examen du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, d’aborder ce sujet, en tenant compte de la multiplication des actions en justice et de la capacité qu’ont certains acteurs, qui ne sont pas toujours implantés localement, d’alourdir les procédures et d’allonger les délais de mise en œuvre. Ces acteurs alimentent l’agribashing et estiment parfois être mieux placés pour décider des stratégies locales de gestion de l’eau que les citoyens et les élus.
L’équilibre trouvé en commission est de nature à sécuriser les agriculteurs, souvent très inquiets, et à prendre en compte les autres enjeux de la gestion de l’eau qui ont été évoqués et qui sont aussi très importants.
La commission a mis en cohérence les dispositions de l’article 15 avec l’article L. 211-1 du code de l’environnement, qui est relatif aux objectifs de la politique de l’eau et prend en considération l’ensemble des usages de l’eau de manière hiérarchisée. Cet article mentionne d’ores et déjà, dans le 5 bis du paragraphe I, la « promotion d’une politique active de stockage de l’eau pour un usage partagé de l’eau permettant de garantir l’irrigation, élément essentiel de la sécurité de la production agricole et du maintien de l’étiage des rivières, et de subvenir aux besoins des populations locales. »
La plupart des ouvrages de stockage d’eau à vocation agricole font l’objet d’une procédure de déclaration ou d’autorisation. Nous avons donc pris toutes les précautions qui permettent de répondre aux objections qui viennent d’être faites.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements de suppression.
Vous avez raison, monsieur Gay, c’est un débat qui est largement devant nous. Cela dit, la conflictualité des usages, c’est vieux comme le monde : il y en aura toujours, en particulier quand l’eau vient à manquer !
Essayons de lever le nez du guidon, de ne pas commenter la météo mois par mois, mais de regarder la trajectoire.
D’ailleurs, ce que dit le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) sur les arythmies à prévoir et les difficultés que rencontrera chaque territoire est très clair : la quantité d’eau qui tombera sur le sol français sera à peu près la même, mais l’évapotranspiration et les disparités territoriales vont créer du stress hydrique.
Du coup, certains territoires qui n’avaient pas besoin d’irrigation jusque-là pourront en avoir besoin. Il faudra l’assumer et la voie pour y parvenir passe notamment par la sobriété à l’hectare.
Vous évoquiez, monsieur Gay, la question des prélèvements dans les nappes. Mais il n’y a pas qu’une seule nappe en France ! Il y en a plusieurs et leurs caractéristiques sont différentes. Nous devrions d’ailleurs nous inspirer de l’exemple vendéen, je le dis sous le contrôle de M. Retailleau.
Le travail de répartition de la ressource réalisé en Vendée est même salué par les associations environnementales.
Vous parlez d’or, monsieur Salmon, quand vous réclamez la réduction de la consommation par une évolution des pratiques. Je vais vous en donner un exemple : à Sainte-Soline, la réduction de la consommation sera de 30 %, des haies seront plantées, les assolements vont évoluer et la consommation de produits phytosanitaires diminuera.
M. Daniel Salmon le dément.
M. Marc Fesneau, ministre. Voulez-vous dire que les agriculteurs ne respectent pas leur parole ? Si, ils respectent leur parole et ils respectent la loi – et j’aimerais que tout le monde le fasse, y compris à Sainte-Soline.
Marques d ’ approbation à droite.
Certains projets sont vertueux, il faut être capable de le reconnaître. Je pense à ce qui a été fait en Vendée, au projet de Sainte-Soline ou à ceux qui sont développés en Poitou-Charentes, notamment autour de Poitiers. Sinon, que serait un projet vertueux ? Un projet où l’on ne prélève plus d’eau ?
Nous avons besoin d’assurer la transition nécessaire de l’agriculture et, pour cela, nous avons besoin d’ouvrages. Vous avez parlé de mégabassine pour Sainte-Soline : comment nommer alors ce qui a été fait dans le Sud-Est, par exemple Serre-Ponçon ?
Une bassine occupe 12 hectares ; Serre-Ponçon en fait 4 000… Je suis sûr qu’aujourd’hui vous remettriez en cause Serre-Ponçon ! Ce barrage permet pourtant de lutter contre les incendies, d’alimenter la population en eau potable, de faire de l’irrigation de manière vertueuse, y compris pour les étiages des cours d’eau. À mon avis, le multi-usage est souvent une piste intelligente – et il comprend l’usage agricole.
Je soutiens donc les amendements de suppression de cet article, parce qu’on ne peut pas faire une telle généralité. Mais je m’inscris en faux contre l’idée qu’on n’aurait pas besoin d’ouvrages. Nous ne pourrons pas avancer si, à chaque fois qu’on essaie de faire un ouvrage, on trouve tous les motifs de faire échouer le projet.
Je pense qu’il faut territorialiser les choses et faire évoluer les pratiques. Nous devons aussi faire en sorte de raccourcir les procédures. Le Président de la République l’a dit pour l’industrie, nous ne pouvons pas avoir des procédures qui durent dix ans… Sinon, c’est l’impasse. Allons vers des procédures concomitantes et suffisamment courtes pour crédibiliser les démarches !
Le Gouvernement souhaite donc la suppression de cet article 15, mais nous devons ouvrir le débat sur ce sujet de manière plus sereine et moins caricaturale que ce qu’on entend. Et nous devons encourager les agriculteurs à mener les transitions, en leur permettant d’accéder à ce qui est essentiel pour eux, c’est-à-dire l’eau.
Je me pose une question basique, à laquelle quelqu’un aura peut-être la réponse.
On connaît les projets d’intérêt général – ils sont définis dans le code de l’urbanisme –, les projets d’intérêt majeur, les raisons impératives d’intérêt public majeur – elles sont aussi juridiquement définies.
Mais nulle part je n’ai trouvé de référence à des projets « d’intérêt général majeur ». Quelle est la définition juridique de cette notion qui me semble hybride ? Quelles en sont les conséquences ?
Ce qu’a dit M. le ministre m’oblige à réagir.
Il faut quand même veiller à ne pas mélanger les choses, en l’espèce les différents types de retenue d’eau. Il existe des retenues qui sont situées sur un cours d’eau – vous avez évoqué le lac de Serre-Ponçon –, des bassines qui pompent dans les nappes phréatiques, des retenues collinaires, etc. Toutes ces retenues ne sont pas à mettre dans le même panier, il faut notamment prendre en compte l’hydrologie.
Vous parlez de légalité : nous pourrions parler des cinq bassines illégales qui sont pourtant remplies…
Aller vers une forme de privatisation de l’eau pose aussi question. Où est le partage de l’eau dans une telle situation ?
Vous parlez de Sainte-Soline comme d’un exemple à suivre, où tout serait parfait. J’y suis allé et j’ai constaté que tous les champs sont drainés par des canaux pour évacuer l’eau le plus vite possible.
M. Laurent Duplomb ironise.
Nous devons revenir à un principe simple, le respect des cours d’eau et des zones humides, pour avoir moins besoin de stocker dans l’avenir.
M. Bruno Retailleau. Je ne peux pas laisser le ministre parler de la Vendée de façon solitaire…
Sourires.
Je ne partage pas son avis sur les amendements. Depuis des mois, j’ai entendu beaucoup de prises de position idéologique sur ce que vous appelez les bassines, et que nous appelons les réserves de substitution.
En Vendée, nous avons commencé il y a plus de vingt ans de telles expérimentations, que j’ai suivies personnellement au titre tant de la région que du département. Nous pouvons désormais établir des constats, loin de toute idéologie.
Nous sommes partis d’une situation dramatique, avec des conflits d’usage. Aujourd’hui, nous savons que nous allons vers de telles situations, car, avec le réchauffement climatique, s’il ne tombera pas moins d’eau, celle-ci tombera de manière plus concentrée et sans doute de façon plus violente. Si nous voulons une agriculture productive, si nous voulons assurer l’avenir des agriculteurs, le stockage de l’eau et notre adaptation à la transition écologique sont essentiels.
Nous pouvons constater des résultats et ils sont vérifiables. Je sais qu’une mission d’information du Sénat travaille sur la question et j’invite ses membres à venir voir ce qu’il en est en Vendée. Dans le marais poitevin, une grande zone humide fragile que nous cherchons à préserver, le décrochage des niveaux a reculé de vingt à quarante jours, soit plus d’un mois de gain, et nous avons également observé des gains de 20 à 40 centimètres sur les niveaux d’eau et jusqu’à trois mètres pour la nappe phréatique. Ces chiffres ont été corroborés en 2022, une année particulièrement sèche, ce qui a confirmé l’efficacité du dispositif.
En ce qui concerne l’agriculture, nous avons constaté une baisse de la culture du maïs, une augmentation des cultures biologiques et la préservation de l’élevage dans le marais poitevin. Ces observations concrètes démontrent les aspects positifs du dispositif que nous avons mis en place. Il est important de se détacher de l’idéologie pour revenir à l’observation concrète.
Il s’agit d’une modification fondamentale de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006, qui consacre la gestion équilibrée de la ressource sans interdire le stockage.
Le paragraphe 7 de l’article 4 de la directive-cadre sur l’eau de 2000 permet de déroger au principe de non-détérioration de l’état d’une masse d’eau ou de ne pas atteindre les objectifs de bon état dans le cadre d’un projet d’intérêt général majeur, mais cela n’est pas permis de manière systématique dès lors qu’il s’agit d’un projet de stockage d’eau à des fins agricoles.
Or cet article 15 pose un principe général, alors qu’on ne peut pas faire l’amalgame entre barrages, retenues, lacs et mégabassines. C’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet article.
M. Philippe Mouiller. Pour ma part, je voterai l’article 15. Sainte-Soline est dans mon département, j’ai suivi l’élaboration du protocole et toutes les études préliminaires et je voudrais rappeler qu’au moment de la signature du protocole d’engagement avec le monde agricole, presque toutes les associations environnementales ont donné leur accord.
Mme le rapporteur le confirme.
Je ne sais pas si c’est de l’idéologie, mais c’est seulement à l’approche de l’élection présidentielle que tout a dévissé…
Je souhaite m’exprimer sur ce sujet. Tout d’abord, je soutiens ces amendements supprimant l’article 15, car il n’est pas possible de déclarer un projet d’intérêt général majeur par principe.
Le ministre a parlé des barrages, notamment de celui de Serre-Ponçon. Je ne sais pas si des projets de cette nature verraient le jour aujourd’hui – c’est une véritable interrogation –, mais il y a une particularité importante : Serre-Ponçon, c’est un village en moins ! Ces barrages ont des répercussions sur les populations et la biodiversité et ne sont donc pas des projets anodins.
Ce qui distingue un projet comme Serre-Ponçon ou les grands barrages des bassines dont nous parlons par ailleurs, c’est le travail important de réflexion sur les différents usages de l’eau – l’irrigation, le tourisme, l’eau potable… Avec ces projets, nous prenons en main le bien commun, l’eau, et nous faisons appel à la puissance publique pour gérer cette problématique. C’est comme cela que les choses doivent fonctionner et que nous pouvons avoir confiance en une gestion équitable des ressources.
Les écologistes n’ont jamais été opposés au stockage de l’eau, à l’adaptation et à la résolution des problèmes liés à l’eau, mais je tiens à rappeler que 95 % de la surface agricole utile n’est pas irriguée, ce qui signifie que nous avons encore beaucoup de travail devant nous, si nous devions suivre votre direction…
Au fond, pourquoi les projets que vous défendez ne sont-ils pas acceptés ? Parce qu’ils représentent une privatisation de l’eau.
M. le ministre le dément.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 14, 41 rectifié, 64 et 72.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 98, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 5° bis du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« 5° bis La promotion d’une politique de sobriété d’usage de l’eau en agriculture, notamment via le développement de pratiques agronomiques, et l’encadrement des ouvrages ayant vocation à stocker l’eau pour l’irrigation, garantissant qu’ils contribuent, dans le cadre d’un projet de territoire, à un usage transparent, partagé et sobre de la ressource en eau, et à la mise en œuvre de pratiques agroécologiques. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
Je reviens sur un point : ce texte ne propose pas de qualifier l’alimentation en eau potable ou le fonctionnement des milieux aquatiques comme étant d’intérêt général majeur. Il y a pourtant une hiérarchie dans les usages de l’eau, que tout le monde connaît.
Il propose plutôt de prendre en compte « dès que possible » un usage partagé et raisonné de l’eau. Je trouve cette approche peu sérieuse, compte tenu de l’exacerbation des tensions sur les usages de l’eau et de la nécessité de réfléchir collectivement à sa répartition dans la perspective du réchauffement climatique.
En tant qu’écologistes, nous alertons sur le réchauffement climatique depuis plusieurs décennies. Aujourd’hui, nous devons nous adapter et continuer de lutter. Nous savons bien que le stockage de l’eau le plus pertinent, c’est celui des nappes phréatiques, qui peut être favorisé grâce à un travail sur les sols et les haies.
Cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article, afin de replacer le stockage de l’eau pour l’agriculture dans le cadre d’une politique démocratique permettant la sobriété et un partage équitable de l’eau inscrit dans des projets de territoire.
Actuellement, sur le terrain, on refuse souvent l’accès à l’irrigation pour de faibles volumes à de petits maraîchers bio, ce qui empêche parfois leur installation. Pendant ce temps, des centaines de milliers de mètres cubes d’eau sont consacrés à des quasi-monocultures de maïs, qui sont néfastes pour l’environnement et qui ne contribuent pas à une véritable souveraineté alimentaire. En effet, pour cultiver du maïs, il faut du soja, et ce soja provient de l’autre côté de l’Atlantique, du Brésil plus précisément, ce qui n’est pas neutre en termes d’aggravation des problématiques liées au réchauffement climatique.
Dans ce contexte, cet amendement propose d’établir les bases d’un véritable encadrement du stockage de l’eau à des fins agricoles, afin que celui-ci contribue à une utilisation sobre et partagée de cette ressource commune.
La rédaction actuelle du 5° bis du paragraphe I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement pose d’ores et déjà l’exigence d’un usage partagé de l’eau. C’était l’objet des amendements que j’ai déposés en commission. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 98.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je mets aux voix l’article 15.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 288 :
Le Sénat a adopté.
L’amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Duffourg, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Burgoa, Decool, Pellevat, Kern, Chasseing, Le Nay, Bonhomme, Mizzon, Henno et Moga, Mme Lopez, M. Chatillon, Mmes Muller-Bronn et Loisier, MM. Médevielle, Canévet, Hingray et J.M. Arnaud, Mme Ventalon, M. Somon, Mme Malet, MM. Folliot, Chauvet et Cigolotti, Mmes Doineau et Saint-Pé et M. Klinger, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa du II de l’article L. 214-3 du code de l’environnement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont notamment soumises à déclaration les retenues collinaires de moins de 150 000 mètres cubes d’eau. »
La parole est à M. Alain Duffourg.
Cet amendement vise à simplifier la création de retenues collinaires inférieures à 150 000 mètres cubes d’eau, soumises à déclaration. Contrairement aux bassines dont il a été fait état tout à l’heure, ces retenues ne consistent pas à aller puiser l’eau dans les nappes phréatiques, mais seulement à la retenir pendant les périodes pluvieuses ou durant l’hiver.
Cet amendement peut, à mon sens, faire consensus, étant précisé que les agriculteurs conventionnels, les agriculteurs biologiques, les maraîchers et les éleveurs pourront bénéficier de ces dispositifs. Un certain nombre de produits pourront ainsi être cultivés au bord de la Méditerranée, ce qui est tout de même préférable à aller les chercher à l’autre bout du monde.
L’amendement n° 17 rectifié, dont je comprends la finalité, mériterait d’être plus longuement expertisé, puisque les ouvrages de prélèvement et de stockage de l’eau sont soumis à la nomenclature des installations, ouvrages, travaux, activités (Iota). Cette nomenclature permet de savoir si un ouvrage doit faire l’objet d’une autorisation ou d’une déclaration.
L’amendement mentionne le volume de la réserve, qui est certes un critère de la nomenclature, mais d’autres éléments doivent être pris en compte tels que la superficie du plan d’eau, sa hauteur, son mode d’alimentation ou encore la zone dans laquelle la retenue est installée.
Au-delà du fait qu’il mériterait d’être expertisé, cet amendement n’est pas de nature à produire les effets escomptés. La commission demande donc son retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Cet amendement soulève une question assez juste et s’inscrit dans le prolongement des travaux que vous avez menés vous-même sur ces sujets, monsieur le sénateur, et que je voudrais saluer.
Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été indiqués par Mme la rapporteure, le Gouvernement demande néanmoins le retrait de l’amendement n° 17 rectifié. À défaut, son avis sera défavorable. Cet amendement soulève trop de questions pour que l’on puisse le laisser passer ainsi.
Dans le prolongement de cet amendement, je crois que nous devons nous poser la question du curage des retenues collinaires existantes. Selon les spécialistes, cette opération permettrait de récupérer de 25 % à 30 % de la capacité initiale de stockage de ces ouvrages. Or la réglementation rend de telles opérations de curage extrêmement compliquées à mettre en œuvre. Les dossiers sont quasiment aussi lourds que pour la création d’une retenue collinaire, ce qui est tout à fait regrettable.
Il y a peut-être là matière à simplification. On s’éviterait de la sorte d’avoir à construire des retenues collinaires neuves, sachant à quelles difficultés nous sommes confrontés parfois – et même souvent – dans ce cadre.
Je voudrais soutenir l’amendement défendu par Alain Duffourg.
Pour ce qui concerne l’énergie, nous essayons de trouver des mesures permettant de simplifier la réalisation des projets. Il en ira sans doute de même pour l’industrie.
Or, sur un sujet aussi important que celui de l’eau, un gain de simplification apparaît également indispensable. Cet amendement va dans ce sens. Je trouve donc regrettable qu’il ne soit pas soutenu.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° 99, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 15
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La construction de tout ouvrage de stockage d’eau étanchéifié, rempli au moins partiellement par pompage en nappe ou en rivière, et à usage quasi exclusif agricole, d’une capacité et d’une surface supérieure à un seuil défini par décret est suspendue sur l’ensemble du territoire national.
II. – Un décret définit les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Daniel Salmon.
Nous estimons que les mégabassines ne constituent pas un modèle efficace et durable. Nous pouvons d’ailleurs le constater, comme je le disais tout à l’heure, en Espagne, où le recours aux réserves de substitution est important et où les ouvrages peinent à se remplir et semblent mettre à mal les milieux naturels.
Alors que plusieurs projets de mégabassines ont été jugés illégaux, nous pouvons nous interroger sur la conformité de ces structures au droit européen, en particulier à la directive-cadre sur l’eau.
Pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, il est nécessaire de mettre en place un moratoire sur les projets de mégabassines. C’est l’objet de l’amendement n° 99. Ce moratoire doit permettre l’organisation d’un véritable débat serein et éclairé, s’appuyant sur l’expertise scientifique – il en existe une – et associant les citoyens sur la gestion de ce bien commun qu’est l’eau.
La priorité est d’organiser une convention citoyenne sur l’eau pour repenser et démocratiser les choix de restriction et de hiérarchisation en temps de sécheresse, que nous pourrons avoir à faire dans les années à venir, et engager une réflexion démocratique sur le partage de l’eau. C’est ce que nous appelons de nos vœux.
L’amendement n° 99 entre en totale contradiction avec les objectifs de cette proposition de loi. Avis défavorable.
Avis défavorable. La seule réponse que vous nous proposez face aux difficultés qui sont devant nous, c’est un moratoire – c’est-à-dire d’attendre.
Or certains projets, y compris ceux que nous avons évoqués tout à l’heure, sont en discussion depuis des années, jusqu’à parfois dix ans. De plus, comme l’a très bien souligné votre collègue des Deux-Sèvres, les personnes qui apposent leur signature au bas des documents ne la respectent pas. Pour que les démarches territoriales soient crédibles, il faut que les gens considèrent qu’ils sont engagés, lorsqu’ils signent au bas d’un document.
M. Laurent Duplomb approuve.
Ce n’est pas la peine de faire des moratoires, si les procédures durent de sept à dix ans et si la parole donnée – y compris par le biais d’une signature – n’est même pas respectée !
Pour répondre par ailleurs au sénateur Montaugé, je suis tout à fait d’accord avec vous sur la question de la réutilisation des ouvrages. Il y a de nouveaux ouvrages à construire, mais il en est aussi d’existants – des canaux ou des barrages – et ils ont besoin d’entretien. Je ne crois pas que cela relève de la loi. Nous sommes en train de travailler sur ce sujet, par exemple dans le Tarn-et-Garonne. Des questions de même nature se présentent dans votre département. Tout cela relève davantage de la réglementation.
S’il s’avérait nécessaire de légiférer sur cette question, nous reviendrions évidemment devant vous. Il est vrai néanmoins que cette question est importante. On estime ainsi que nous pourrions mobiliser de cette façon un tiers de capacité de stockage d’eau supplémentaire sur un certain nombre d’ouvrages existants.
Je suis d’accord avec vous, mais ce sujet ne date pas de l’actuel gouvernement. J’ai dit que j’essaierai de trouver un chemin pour améliorer les choses. La question qui se pose est celle du statut des boues.
M. le ministre, Mme le rapporteur et M. Laurent Duplomb s ’ exclament.
Les études du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) qui ont été mises en avant pendant longtemps sur les mégabassines s’appuient sur le climat et les données hydrologiques que nous connaissions il y a vingt ans. Or les choses ont bien évolué depuis lors. Cela va même très vite, et beaucoup plus vite que nous ne le pensions.
Ce qui était vrai hier ne le sera plus demain. C’est bien pour cela qu’il faut réfléchir à cette question. Nous devons nous assurer que l’on ne construit pas, à grand renfort d’argent public – il représente souvent 70 % du financement total –, des ouvrages qui seront à sec. Il n’y a pas de honte à attendre et à étudier. Il ne s’agit pas de mettre en place un moratoire ad vitam aeternam, mais de tenir compte de l’évolution de la situation.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Après le premier alinéa de l’article L. 213-7 du code de l’environnement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le préfet coordonnateur de bassin définit les situations dans lesquelles, en France métropolitaine, la conduite des projets de territoire pour la gestion de l’eau doit être encouragée, à l’exception du bassin de Corse où la collectivité de Corse est compétente. »
L’amendement n° 65 rectifié, présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 42 rectifié, présenté par MM. Montaugé, Tissot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le processus de conception et de mise en œuvre des dispositifs de gestion partagée de l’eau à l’échelle des bassins hydrographiques concernés prend en compte les préconisations de l’instruction du Gouvernement du 7 mai 2019 relative aux projets de territoire pour la gestion de l’eau. »
La parole est à M. Franck Montaugé.
Il s’agit d’un amendement d’appel ayant pour objet de développer davantage de projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) sur le territoire national. Ces projets ont la vertu de mettre autour de la table toutes les parties prenantes à l’usage de l’eau : les agriculteurs en premier lieu, mais aussi les consommateurs et toutes les autres parties prenantes.
Il existe un PTGE sur mon territoire, le Gers, dans le secteur de l’Adour. Son évaluation a montré qu’il avait produit des effets positifs, même si nous aurions pu en espérer davantage. Il a surtout permis à des personnes qui ne se seraient pas parlé a priori de le faire et d’envisager un plan d’action en rapport avec la question de l’utilisation de la ressource en eau.
Ne serait-ce que pour cela, et eu égard à ce que l’on a pu constater sur des projets qui ont donné lieu à des polémiques voire à des affrontements – ce que je regrette –, je pense qu’il y a lieu de promouvoir le développement de ces PTGE.
Le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) ont analysé une quinzaine de PTGE et ont formulé des recommandations à leur sujet, après avoir constaté qu’il s’agissait d’une démarche vertueuse.
Nous n’avons rien à perdre à développer ces projets de territoire. C’est la demande que je présente au Gouvernement. Nous avons tous les éléments nécessaires pour les poursuivre et les développer, et je crois qu’il ne faut pas nous en passer.
L’amendement n° 100, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Ces projets permettent une concertation large et équilibrée associant les représentants des collectivités territoriales, de leurs groupements et des établissements publics locaux, des usagers non professionnels dont les associations de consommateurs, des associations de protection de l’environnement, des usagers professionnels des secteurs de l’agriculture, notamment l’ensemble des syndicats agricoles représentatifs, des représentants des pratiques agricoles agroécologiques, et notamment des représentants des organismes nationaux à vocation agricole et rurale, des représentants de l’agriculture biologique, de la sylviculture, de la pêche, de l’aquaculture, de la batellerie et du tourisme et des usagers professionnels du secteur industriel et de l’artisanat, des représentants de l’État ou de ses établissements publics concernés.
« Ils prévoient une concertation avec les citoyens des territoires concernés.
« Ils permettent d’envisager, à partir d’un diagnostic de la situation hydrologique et de l’état des prélèvements, l’ensemble des modalités permettant de construire une gestion de l’eau et de ses usages à la fois sobre, équitable et transparente, et ne se construisent pas sur la base d’un projet préétabli.
« Ces projets prévoient également le suivi de la mise en œuvre des modalités définies. »
La parole est à M. Daniel Salmon.
Cet amendement vise à donner un cadre juridique aux projets de territoire pour la gestion de l’eau. Il s’agit de créer les conditions d’une concertation large et équilibrée pour ces PTGE pour qu’ils soient de vrais outils de dialogue dans les territoires et de démocratie autour de l’eau.
Au sens des instructions ministérielles du 7 mai 2019, les PTGE ne concernent pas uniquement les ouvrages et usages agricoles de l’eau – ce que nous inscrivons ici dans le code de l’environnement.
Les modalités actuelles de concertation sur les PTGE ne permettent pas de penser de façon partagée l’usage de l’eau. C’est pourquoi nous ouvrons leur composition à un maximum d’acteurs d’un territoire, notamment à l’ensemble de la diversité des voix agricoles, ce qui n’est pas toujours le cas aujourd’hui : agriculture paysanne, agriculture biologique, agroforesterie, etc.
Afin de rendre les PTGE plus efficaces, nous donnons toute leur place aux mesures que sont la recherche de la sobriété des usages, les changements de pratiques agricoles et les solutions fondées sur la nature aux multiples cobénéfices : restauration des fonctionnalités des sols et des zones humides, plantation de haies, etc.
Un rapport du CGAAER portant sur les haies vient d’ailleurs de paraître. Il faudra se pencher sérieusement sur ce sujet. La haie est certainement le couteau suisse de la transformation de l’agriculture et constitue sans doute l’un des éléments permettant de restaurer la biodiversité. En lien avec la question de l’eau, il me paraît donc essentiel de travailler sur ce sujet et d’avancer à grands pas.
Il s’agit également de garantir que les modalités de mise en œuvre des PTGE sont compatibles avec les lois existantes sur l’eau ou les espèces protégées et avec les orientations du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (Sdage) ou du schéma d’aménagement et de gestion de l’eau (Sage). Le PTGE ne doit pas être vu comme un dispositif de contournement de ces réglementations.
L’amendement n° 42 rectifié – j’ai bien entendu qu’il s’agissait d’un amendement d’appel – ajoute inutilement à l’article 16 la référence à l’instruction du Gouvernement du 7 mai 2019 relative aux PTGE. La loi n’a pas vocation à renvoyer à des instructions gouvernementales l’application d’une mesure.
Par ailleurs, cet amendement est incomplet dans la mesure où l’instruction susmentionnée a d’ores et déjà été complétée par un additif en date du 17 janvier 2023. Son adoption aurait donc pour effet de figer dans la loi une référence à un document obsolète.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 42 rectifié.
S’agissant de l’amendement n° 100, l’ensemble des acteurs entendus lors des auditions m’ont invitée à ne surtout pas rigidifier les PTGE, qui sont des outils agiles de concertation locale.
Cet amendement entend dresser une longue liste des parties prenantes aux PTGE, ce qui n’est pas souhaitable. Il faut laisser à l’intelligence des territoires le soin d’organiser leurs propres concertations. Cela semble fonctionner, puisque environ soixante-dix PTGE ont été finalisés à ce jour et qu’une centaine est en construction. L’intervention d’acteurs étrangers aux problématiques du territoire serait sans doute de nature à freiner le déploiement des PTGE.
Pour ces raisons, la commission émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 100.
J’entends que l’amendement n° 42 rectifié est un amendement d’appel qui tend à souligner que les PTGE forment une voie intéressante pour développer des projets dans les territoires. Il ne me semble toutefois pas nécessaire d’en dire plus que cela dans la loi. Il faut essayer de le faire concrètement.
Par ailleurs – cela rejoint ce que j’ai dit tout à l’heure –, les PTGE constituent un outil territorial de gestion et de concertation. De grâce, ne les rigidifions pas et ne faisons pas intervenir des gens qui n’ont rien à voir avec le territoire en question.
Je ne me sens pas légitime pour aller dire aux élus de tel ou tel territoire ce qu’ils doivent faire sur la question de l’eau. Selon les territoires, les sujets ne sont pas de la même nature et les regards que l’on porte les uns et les autres sur eux varient également. Il faut laisser les acteurs locaux s’emparer de ces questions. On ne peut pas ici, dans la Chambre des territoires, les dessaisir de leurs responsabilités.
Enfin, je répète ce que j’ai dit précédemment : il faut aussi que l’on accepte, y compris dans le cadre des PTGE, que la majorité s’impose à la minorité. Quand bien même la minorité a été écoutée, à la fin, il faut que les projets se déploient. Si les PTGE se terminent au contentieux, on se demande à quoi ils servent ! On a le droit d’aller au contentieux, mais les PTGE sont justement des procédures de partage d’informations et de recherche de consensus. Ce n’est pas forcément votre position qui l’emporte, mais c’est bien cela, la concertation. La concertation ne consiste pas à ce que chacun impose son point de vue – sinon, on n’y arrive pas !
S’il me semble en effet intéressant de développer les PTGE, l’amendement n° 42 rectifié est un amendement d’appel, que je prends comme tel – et j’ai bien entendu votre message. L’amendement n° 100 me semble quant à lui apporter une rigidification excessive à ce dispositif. Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 16 est adopté.
Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de justice administrative est complété par un article L. 311-14 ainsi rédigé :
« Art. L. 311 -14. – Les cours administratives d’appel sont compétentes pour connaître, en premier et dernier ressort, des recours dirigés contre les décisions prises en application des articles L. 214-1 à L. 214-6 et L. 214-8 du code de l’environnement relatives aux projets d’ouvrages de prélèvement d’eau à usage d’irrigation et infrastructures associées, dans les conditions prévues à l’article L. 214-10 du même code.
« La cour administrative d’appel territorialement compétente pour connaître de ces recours est celle dans le ressort de laquelle l’autorité administrative qui a pris la décision a son siège. »
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 15 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
L’amendement n° 43 rectifié est présenté par MM. Tissot et Montaugé, Mmes Bonnefoy et S. Robert, M. Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy, J. Bigot et Devinaz, Mme Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 66 rectifié est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Salmon, pour présenter l’amendement n° 15.
Cet amendement tend à supprimer l’article 17 qui attribue aux cours administratives d’appel (CAA) une compétence directe, en premier et dernier ressort, pour connaître des projets d’ouvrages de prélèvement et de stockage d’eau.
Alors que les questions relatives à la création de ces ouvrages sont source de nombreuses tensions dans les territoires, il n’apparaît pas opportun de limiter l’accès à la justice. Le véritable outil pour éviter l’extension des contentieux est une concertation large et sincère – nous en parlions tout à l’heure.
De plus, cet article présente un risque d’asphyxie des CAA, ce qui serait contraire à l’objectif affiché de réduction de la durée des contentieux relatifs à ces projets.
Les dossiers présentés directement en CAA ne font pas l’objet de l’éclairage d’une première instruction et décision en tribunal administratif. Leur instruction est donc plus difficile, ce qui aggrave encore le phénomène d’asphyxie.
Il convient avant tout de donner des moyens à la justice, et ce n’est pas en supprimant un échelon que nous gagnerons du temps.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 43 rectifié.
Cet amendement a pour objet la suppression de l’article 17 de cette proposition de loi, qui vise à réduire la durée des contentieux pour les projets d’ouvrages de stockage et de retenue d’eau, en reconnaissant que les cours administratives d’appel sont compétentes pour connaître, en premier et dernier ressort, les recours contre les projets d’ouvrages de prélèvement et de stockage d’eau.
À l’instar de ce que nous avons dit concernant l’article 15, nous estimons qu’aucune décision ne doit être prise hâtivement sur le sujet sensible de l’eau, plus particulièrement sur la question du stockage en agriculture.
De plus, une nouvelle fois, une prise de position aussi tranchée vient nécessairement faire écho à l’actualité et ne manque pas de soulever une vive opposition de la part du monde associatif et citoyen.
À ce sujet, le secteur associatif est formel : il n’y a pas de prolifération des contentieux. Si certains projets sont particulièrement médiatisés – je pense évidemment à Sainte-Soline –, il ne faut pas en tirer de mauvaises conclusions ni en faire des généralités non pertinentes.
Par ailleurs, nous ne partageons pas la philosophie ambiante, portée notamment par le Président de la République, considérant que tout doit être accéléré et que les outils de contrôle démocratique, par exemple les études de l’impact de ces projets sur notre environnement, doivent être remis en cause. Ce n’est pas la conception que nous avons de l’agriculture de demain ni d’ailleurs de la gestion de l’eau en tant que bien commun.
Pour toutes ces raisons, nous nous opposons à l’article 17 et en demandons la suppression.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 66 rectifié.
Réguler la durée des contentieux relatifs à ces ouvrages est une nécessité, comme l’actualité l’illustre fréquemment.
Il ne s’agit pas d’entraver l’accès à la justice, toujours possible dans un État de droit, mais simplement d’éviter que des projets fassent l’objet de procédures pouvant durer cinq, sept, dix ou douze ans, ce qui est absolument dramatique pour ceux qui travaillent sur ces projets.
L’article 17 s’inspire d’autres dispositifs introduits par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, ainsi que par des lois ultérieures visant à réguler des contentieux abondants, notamment dans le domaine des éoliennes.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques n° 15, 43 rectifié et 66 rectifié.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements. Nous avons besoin de travailler sur ces sujets, car la solution trouvée dans cet article ne nous paraît pas satisfaisante. Elle pourrait en effet donner le sentiment que l’on cherche à réduire l’accès à la justice.
En réalité, comme Mme la rapporteure le précisait à juste titre, la philosophie de cet article et de la proposition de loi en général consiste à essayer de réduire la durée globale de montage des projets. Or cette durée n’inclut pas uniquement celle du contentieux, mais également celle requise par toutes les études préalables que j’évoquais précédemment.
Monsieur le sénateur Tissot, je ne crois pas que ce soit faire insulte à un projet ou aux études préalables et à la documentation qui l’entourent que d’essayer de tenir ces délais parallèlement les uns aux autres, et non plus dans une succession chronologique. Ce qui est valable pour un projet d’installation d’entreprise doit l’être également pour un projet d’ouvrage relatif à l’eau.
Les études peuvent être menées très sérieusement sans avoir à attendre que la première soit terminée pour commencer la deuxième et ainsi de suite. Travailler ainsi aboutit à un temps d’instruction des dossiers très long, auquel peut ensuite s’ajouter un recours.
Nous avons besoin de penser ce sujet de façon globale. Réduire le temps de montage des projets est une question centrale ; il n’est pas acceptable de mettre sept à dix ans pour construire un ouvrage.
Pour autant, la solution proposée dans l’article 17 nous semble trop réductrice ; c’est pourquoi le Gouvernement est favorable aux amendements de suppression. La question de l’accès à la justice n’est pas seule en cause. Il faut que nous réfléchissions globalement.
Monsieur le ministre, la disposition prévue dans cet article que le Gouvernement entend supprimer a déjà été votée à l’Assemblée nationale par la majorité présidentielle, à la faveur d’un amendement du président de la commission des affaires économiques, Guillaume Kasbarian…
Je mets aux voix les amendements identiques n° 15, 43 rectifié et 66 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L ’ article 17 est adopté.
Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Les articles L. 253-5-1 et L. 253-5-2 sont abrogés ;
2° Le VI de l’article L. 254-1 est abrogé ;
3° Les articles L. 254-1-1 à L. 254-1-3 sont abrogés ;
4° À la fin du 2° du I de l’article L. 254-2, les mots : « et qu’elle respecte les dispositions des articles L. 254-1-1 à L. 254-1-3 » sont supprimés ;
5°
Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 44 rectifié est présenté par Mme Bonnefoy, MM. Tissot, Montaugé, Devinaz et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau, Redon-Sarrazy et J. Bigot, Mme Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 67 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 93 est présenté par Mme Schillinger, MM. Patriat, Buis, Lemoyne et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
L’amendement n° 115 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 44 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer l’article 18 qui, à l’image de nombreux articles de ce texte, a pour but de revenir sur des acquis environnementaux obtenus de haute lutte.
Nous sommes clairement opposés au rétablissement de l’autorisation des remises, rabais et ristournes sur les ventes de produits phytopharmaceutiques, ainsi qu’à la suppression de la séparation de la vente et du conseil concernant ces produits.
Les sénateurs socialistes ont porté ces propositions par le passé, notamment dans le cadre du rapport d’information Pesticides : vers le risque zéro réalisé par notre collègue Nicole Bonnefoy en 2012 et d’une proposition de loi de 2013.
Revenir sur de telles interdictions va à l’encontre de l’histoire et à rebours de la volonté, affichée par les pouvoirs publics, de diminuer la consommation de pesticides en France. L’article 18 acte un recul pour la protection des sols et de la santé des Français, alors que la transition agroécologique devrait être au cœur de nos préoccupations.
S’agissant de la séparation des activités de vente et de conseil, je tiens à rappeler l’existence d’un risque de conflit d’intérêts, dès lors qu’il reviendrait aux mêmes personnes ou entités de vendre ces pesticides et de fournir des conseils à leur sujet. Dans les cas où la rémunération d’un conseiller est fonction des ventes, il est difficile de ne pas envisager qu’il soit tenté d’encourager son client à acheter davantage que nécessaire.
Je tiens d’ailleurs à rappeler que, dans le cadre de la loi Égalim, les rapporteurs de l’époque, Michel Raison et Anne-Catherine Loisier, s’étaient opposés à la suppression de cette séparation. J’espère que, par cohérence, il en ira de même aujourd’hui.
En tout état de cause, il nous semble impensable de soutenir un tel article, dont nous proposons la suppression.
L’article 18 revient sur la séparation des activités de vente et de conseil pour les pesticides, ainsi que sur l’interdiction des remises à l’occasion de la vente de ces produits. Or ces interdictions avaient été instaurées pour réduire l’utilisation des pesticides.
Le cumul des activités de vente et de conseil pour les pesticides entraîne des conflits d’intérêts et des conseils orientés pouvant conduire à une surutilisation de ces mêmes pesticides et, in fine, à une augmentation des risques de contamination pour les pollinisateurs.
Pire, vous revenez sur une disposition qui a déjà été affaiblie. Ainsi, la séparation capitalistique des structures économiques n’est pas totale, puisqu’a été introduite la possibilité que 32 % des parts d’une structure de conseil soient dans les mains de structures de distribution. Les structures de conseil pourront donc toujours être influencées par les vendeurs de pesticides.
La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l’amendement n° 93.
L’interdiction des remises, rabais et ristournes et la séparation de la vente et du conseil pour les produits phytopharmaceutiques constituent deux mesures fortes de la loi Égalim de 2018 qui ne sont entrées en vigueur qu’en janvier 2021.
Il est nécessaire de rappeler que l’esprit de cette seconde mesure était de prévenir tout risque de conflit d’intérêts résultant de la coexistence chez un même opérateur des activités de conseil et de vente pour les produits phytopharmaceutiques et de garantir aux utilisateurs professionnels un conseil annuel individualisé, qui concourt à la réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques et des risques et impacts associés.
Nous sommes bien conscients du fait que cette mesure peut créer des externalités négatives, mais revenir dessus enverrait un signal particulièrement négatif, alors que nos agriculteurs sont déjà engagés sur la voie de la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires.
Il nous paraît plus opportun de renforcer, dans le cadre du futur projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, la recherche et l’innovation, notamment dans les méthodes alternatives, le déploiement des nouvelles technologies ou les biocontrôles, pour soutenir les agriculteurs dans la trajectoire de réduction de l’usage des produits phytosanitaires, tout en préservant leur compétitivité.
C’est pourquoi nous proposons la suppression de cet article.
Faisons un peu d’histoire : la mission d’information sur les pesticides et leur impact sur l’environnement et la santé, dont Sophie Primas était présidente et Nicole Bonnefoy rapporteure, avait recommandé à l’unanimité de séparer les activités de vente et de conseil pour les produits phytopharmaceutiques. Il a fallu un peu de temps, mais cette recommandation s’est finalement traduite dans la loi Égalim.
Il est question aujourd’hui de revenir sur cette disposition. Nous souhaitons nous opposer à ce recul majeur pour l’environnement et pour les agriculteurs. Le cumul des activités de vente et de conseil pour les pesticides entraîne des conflits d’intérêts et des conseils orientés pouvant conduire à une surutilisation des pesticides, ce qui pénalise en premier lieu les agriculteurs qui ne peuvent bénéficier d’un conseil indépendant.
La suppression de cette mesure est à l’opposé du sens de l’histoire. J’en veux pour preuve que l’on discute actuellement de sa mise en œuvre à l’échelle européenne, où elle est notamment défendue par le Conseil européen des jeunes agriculteurs.
Il est possible que sa mise en œuvre ait suscité des difficultés au démarrage, mais le conseil indépendant se développe. Des sessions individuelles et collectives permettent aux agriculteurs de s’interroger sur leurs pratiques quant à l’usage des produits phytosanitaires, toujours dans le sens, évidemment, de la diminution de cet usage, voire de son arrêt. Cela nous semble bénéfique pour l’autonomie des exploitations, pour leur performance économique et pour nos ambitions collectives de sortie des pesticides.
Alors, n’envoyons pas, en adoptant cet article, un signal de recul sur le sujet des produits phytosanitaires !
L’objet de ces amendements de suppression est contraire à celui de la proposition de loi.
Leurs auteurs affirment que, sans cette séparation, le conseil aux agriculteurs encouragerait la consommation de produits phytopharmaceutiques.
Je tiens à rappeler que, bien avant la séparation du conseil et de la vente, de nombreux garde-fous avaient été mis en place. Ainsi, les vendeurs comme les conseillers devaient détenir un agrément spécifique délivré par l’autorité administrative, en plus du certificat individuel de produits phytopharmaceutiques, le certiphyto. Le conseil devait être écrit et la rémunération des vendeurs n’était pas indexée sur les quantités vendues.
Il n’est pas démontré que ce cumul encouragerait la surutilisation de produits phytopharmaceutiques ; cette affirmation découle en réalité d’un présupposé insinuant que les agriculteurs utiliseraient à dessein plus que ce qui est nécessaire pour assurer la viabilité de leur production agricole.
Par ailleurs, la séparation de la vente et du conseil a prouvé, à l’usage, sa totale inefficacité ; c’est la raison pour laquelle je n’ai aucun mal à revenir sur l’une des recommandations que nous avions formulées ensemble à l’issue de la mission d’information sur les pesticides. Quand on recommande une mesure, qu’on la met en place et qu’elle ne marche pas, il faut avoir l’humilité de dire qu’il faut la retirer.
En outre, l’Inrae, dans la contribution écrite qu’il nous a remise à l’occasion de cette proposition de loi, nous a indiqué que cette séparation avait peu d’incidences sur les ventes. Elle peut en revanche freiner l’adoption des produits de biocontrôle et ainsi éloigner les agriculteurs des innovations. Il me semble que c’est un point important.
En réalité, je pense comme vous que les agriculteurs ont besoin d’être accompagnés. Or, pour l’instant, le conseil stratégique ne fonctionne pas ; les chambres d’agriculture sont débordées et n’arrivent pas à répondre aux besoins d’accompagnement spécifique exprimés dans chacune des exploitations. Les témoignages que nous avons recueillis proviennent surtout d’agriculteurs qui se trouvent démunis, trop seuls pour trouver des solutions. Dans une telle situation, la mesure en question peut faire plus de mal que de bien.
Toutes ces raisons expliquent notre avis défavorable sur ces quatre amendements identiques.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements de suppression, et ce pour plusieurs motifs.
Tout d’abord, comme l’a très bien rappelé Mme Schillinger, le dispositif en question n’est en œuvre que depuis un peu plus de deux ans. Laissons-lui le temps de faire ses preuves ! Je répète ce que j’ai pu dire sur des dispositions de même nature, y compris certaines issues de la loi Égalim : faisons déjà en sorte d’évaluer comment le dispositif se met en route.
Cette approche n’exclut pas de reconnaître – vous avez raison sur ce point, madame la rapporteure – que le sujet du conseil, voire des conseillers, doit être examiné. Nous ferons donc des propositions sur ce sujet, car nous avons compris que des questions se posent quant au conseil aux agriculteurs, en particulier s’agissant du conseil stratégique. On ne peut pas à la fois séparer la vente et le conseil et empêcher, de fait, l’accès des agriculteurs à ce conseil.
Pour autant, il existe, selon nous, une autre voie que celle prévue dans cet article ; nous allons essayer de l’explorer et nous aurons sans doute des annonces à faire sur ces questions.
Il est vrai que l’on bute ici sur un problème, il vaut mieux le reconnaître, mais cela n’est pas une raison suffisante pour revenir sur un dispositif qui, adopté en 2018, n’est opérationnel que depuis 2021, soit un peu plus de deux ans. C’est pourquoi nous sommes favorables à la suppression de cet article.
M. Christian Bilhac. Je m’abstiendrai, sur ces amendements comme sur l’article, parce que je ne suis ni pour ni contre, bien au contraire, comme disait l’autre !
Sourires.
Je m’abstiendrai, parce qu’il y a une chose qu’on oublie trop souvent : c’est que les paysans – ce n’est pas péjoratif dans ma bouche, puisque j’en suis un, d’une certaine manière – ne sont quand même pas si bêtes ; et surtout, ils savent compter ! Ce n’est pas parce qu’un marchand de produits phytosanitaires leur dit qu’il faut en acheter 20 kilos qu’ils vont lui obéir s’ils n’ont besoin que de 10 kilos.
Ce que j’entends de la part de mes amis agriculteurs, c’est que cette année, avec l’inflation, ils ne veulent pas dépenser plus que l’année dernière en produits phytosanitaires : le commerçant pourra leur raconter ce qu’il voudra, il ne vendra pas un kilo de plus !
Je trouve donc que ces amendements se fondent sur une certaine méconnaissance de la profession.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Oui, les agriculteurs ont besoin de conseil, beaucoup d’entre eux en sont demandeurs, car ils se disent que, s’ils peuvent se passer de pesticides, ils s’en passeront, bien sûr, mais ils ne savent pas comment s’y prendre. On parle de cabinets de conseil indépendants, mais il faudrait qu’ils soient formés, avec l’appui du Gouvernement. Si celui-ci veut, lui aussi, que l’on sorte des pesticides, ou du moins que l’on progresse vers la sortie, il doit s’engager à son tour.
La solution retenue dans cet article – revenir sur la séparation de la vente et du conseil – est trop facile. C’est à la fois incompréhensible et inacceptable !
Je mets aux voix les amendements identiques n° 44 rectifié, 67, 93 et 115.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L ’ article 18 est adopté.
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Après le 1° de l’article L. 5312-1, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
« 1° bis Assurer une orientation active des demandeurs d’emploi vers les secteurs prioritaires en tensions identifiés par le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles mentionné à l’article L. 6123-3 ; »
2° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 5411-6-1, après le mot : « local », sont insérés les mots : «, et notamment les listes des secteurs prioritaires en tension telles qu’établies par le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle mentionné à l’article L. 6123-3 ».
II. – Le chapitre VIII du titre Ier du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complété par une section 7 ainsi rédigée :
« Section 7
« Secteurs agricoles prioritaires de la politique de l’emploi
« Art. L. 718 -10. – Sauf décision contraire du comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle mentionné à l’article L. 6123-3 du code du travail, le secteur agricole est réputé secteur prioritaire en tension au sens de l’article L. 5312-1 du même code. »
Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 16 est présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
L’amendement n° 47 rectifié est présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, MM. J. Bigot et Devinaz, Mme Préville, M. Stanzione, Mme Lubin, M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 68 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 88 rectifié est présenté par Mme Pantel et MM. Artano, Bilhac, Corbisez, Guérini et Requier.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 16.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 47 rectifié.
Le présent amendement vise à supprimer l’article 19, qui crée des « secteurs prioritaires en tension », vers lesquels on orienterait prioritairement les demandeurs d’emploi, et reconnaît d’office le secteur agricole comme un tel secteur.
Les sénateurs de mon groupe ont parfaitement conscience des besoins spécifiques en main-d’œuvre d’un secteur comme l’agriculture ; nous défendons d’ailleurs chaque année, lors de l’examen du projet de loi de finances, des dispositifs comme celui appelé TO-DE pour travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi.
Nous estimons néanmoins que cet article va beaucoup plus loin et que, si nous commençons à inscrire dans la loi des secteurs prioritaires, beaucoup d’autres secteurs pourraient être reconnus comme tels – je pense notamment à la santé ou à l’éducation.
En outre, nous nous interrogeons sur la mise en œuvre de ce dispositif et sur ses conséquences. Une fois de plus, l’absence d’une étude d’impact est préjudiciable sur de tels sujets. En effet, puisque, au-delà de deux refus, un demandeur d’emploi peut perdre ses droits à l’allocation chômage, adopter cet article revient à considérer qu’un demandeur d’emploi doit être mobilisable – quels que soient sa formation, ses aspirations ou son âge – pour aller travailler dans les champs.
Pour les sénateurs de mon groupe, cet article 19, couplé aux articles 20 et 22, participe de la mise en place d’une approche clairement libérale du marché du travail, approche que nous ne soutenons pas sur le fond et qui, sur la forme, aurait nécessité un texte spécifique accompagné d’une réelle étude d’impact.
Quand on en vient aux travailleurs et aux travailleuses, je ne vais pas passer mon tour !
À cet article 19, il est question de la main-d’œuvre. Alors, on aurait pu avoir un débat sur les moyens de revaloriser les filières agricoles ; on aurait pu parler des lycées agricoles, des moyens qu’il faudrait leur attribuer pour mieux former nos jeunes et leur donner envie de choisir cette voie.
Mais pas du tout ! La droite a choisi de dire autre chose et je cite le texte de cet article : « Assurer une orientation active des demandeurs d’emploi vers les secteurs prioritaires en tension identifiés par le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles. »
Ainsi, Pôle emploi, ou France Travail – je ne sais comment vous allez l’appeler, mais le résultat sera le même –, n’accompagnera pas la personne privée d’emploi à partir de son vécu et de son expérience professionnelle, pour mieux la réorienter ; non, on lui dira : « C’est là qu’il faut aller ! Même si tu n’as jamais fait de travaux agricoles, c’est là que tu iras ! »
Et il y aura une double peine, c’est bien arrangé : si la personne ne va pas là, on lui retirera ses indemnités ! C’est le résultat de la réforme de l’allocation chômage que vous avez faite, allocation dont je rappelle qu’elle est un droit, puisqu’on cotise pour cela.
On n’aura donc pas le choix : il faudra y aller, et si l’on ne veut pas, même si l’on n’a pas les compétences nécessaires, même si l’on est cassé, on sera privé d’allocation.
Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.
La parole est à M. Christian Bilhac, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié.
La commission est naturellement défavorable à ces amendements de suppression.
Certes, des arguments sont avancés, du moins dans les exposés des motifs de ces amendements, avec lesquels je ne suis pas en désaccord.
Selon leurs auteurs, il est nécessaire de réfléchir à la formation, aux parcours, aux aspirations et aux compétences du demandeur d’emploi. Mais l’article 19 ne remet nullement en cause cette nécessité !
Il a aussi été souligné qu’il convient de réfléchir à l’attractivité des conditions de travail dans les secteurs en tension, ainsi que d’accompagner les très petites entreprises pour la construction de fiches de poste. Une fois encore, l’article 19 ne remet nullement en cause cette nécessité.
En revanche, il apparaît nécessaire – tel est bien l’objet de cet article – d’envoyer un signal et de permettre une orientation plus active des demandeurs d’emploi vers les secteurs en tension, c’est-à-dire ceux où il y a du travail, parmi lesquels on trouve le secteur agricole.
Mon cher collègue Fabien Gay, je vous engage à venir voir les résultats de l’agence d’insertion du RSA que nous avons installée dans le département des Yvelines. On y assure un accompagnement des allocataires du RSA vers les secteurs en tension dans le département, vers les entreprises qui acceptent de réintégrer ces travailleurs. Cela fonctionne extrêmement bien.
Je trouve qu’il n’y a rien de choquant à accompagner des personnes privées d’emploi vers des secteurs d’activité qui recrutent.
C’est pour ces raisons que l’avis de la commission sur ces amendements identiques est défavorable.
Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces amendements de suppression comme sur l’article 19 lui-même.
Il nous semble en effet que l’examen de telles dispositions aurait mieux leur place dans les débats qui se tiendront bientôt sur le texte relatif à France Travail.
Par ailleurs, monsieur le sénateur Gay, permettez-moi de vous dire que j’ai beau lire l’article 19, je n’y trouve pas ce que vous décrivez. L’expression « orientation active vers les secteurs en tension » n’a rien à voir avec la traduction que vous en faites.
M. Fabien Gay le conteste.
Je serai d’accord avec M. le ministre sur un point et il faut nommer les choses : cet article, dans un texte relatif à l’agriculture, est un cavalier social. On se demande d’ailleurs si l’intention de ses auteurs n’est pas plutôt de prendre de court le Gouvernement, en anticipant sur le prochain projet de loi relatif au plein emploi pour s’arroger la paternité de cette mesure antisociale.
Il est question d’orientation « active ». Je n’ai vu nulle part ce que recouvre cet adjectif ; de fait, une orientation active des demandeurs d’emploi vers les métiers en tension, c’est bien ce qui est déjà mis en pratique à Pôle emploi. Et si le Gouvernement ne communique guère sur les directives que reçoivent les conseillers de Pôle emploi – pour ma part, j’en ai vu certaines –, c’est bien parce que cette politique ne résorbe absolument pas la crise de main-d’œuvre que connaissent les secteurs en tension.
Les métiers saisonniers concernent particulièrement l’agriculture : selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du travail, un quart des saisonniers travaillent dans ce secteur.
Or les réformes successives de l’assurance chômage ont été pénalisantes pour ces métiers. En effet, comme ces contrats ont en moyenne une durée de 73 jours dans l’agriculture, certains saisonniers agricoles ne remplissent plus, depuis la dernière réforme de l’assurance chômage, les conditions d’accès à l’aide au retour à l’emploi ; l’attractivité de ces emplois a donc chuté.
Il est illusoire de continuer de croire qu’il suffira de contraindre les demandeurs d’emploi à combler les emplois vacants, sans se demander pourquoi ceux-ci sont vacants. En effet, les problèmes d’appariement sont plus complexes qu’on le croit : ils sont dus non seulement aux conditions de travail, mais aussi au sens des emplois proposés.
Je veux prolonger la dernière réflexion de notre collègue Raymonde Poncet Monge. Pourquoi ces emplois sont-ils vacants ? C’est dû aux conditions de travail, aux salaires, à la formation. Voilà la vraie question, mais ce n’est pas celle que vous posez !
D’ailleurs, monsieur le ministre, nous avions bien compris que vous étiez d’accord avec la droite sénatoriale sur votre vision du travail – pas besoin d’attendre ce soir pour le savoir ! Vous en avez une vision libérale.
Alors, que veut dire « orientation active » ? On prend les demandeurs d’emploi, et on leur dit : « C’est là, ou tu seras rayé ! » Et c’est ainsi qu’ils sont rayés des listes, parce que les choses se passent déjà ainsi.
M. le ministre s ’ exclame.
Ces hommes et ces femmes en situation de précarité, privés d’emploi, ils sortent des statistiques, mais ils existent toujours. Vous avez beau – vous-même, le Président de la République ou les autres membres du Gouvernement – vous gargariser après coup des chiffres du chômage, qui seraient les meilleurs depuis trente ans, il n’en reste pas moins qu’on n’a jamais vu autant de travailleurs pauvres, autant de travailleurs précaires, autant de travailleurs radiés !
J’ai bien écouté la remarque de Mme la rapporteure sur le RSA. Il y a là une double lame : à ceux auxquels on ne trouve pas d’emploi, maintenant, avec la grande réforme du travail, on va dire que, pour toucher le RSA, c’est-à-dire le minimum pour survivre, ils vont devoir travailler quinze à vingt heures. La belle affaire ! Mais où ? Dans quel emploi ? S’il y a du travail disponible, rémunérons-les et donnons-leur un emploi stable ! On marche quand même sur la tête…
Ce n’est pas ainsi que vous résoudrez les difficultés liées au manque de travailleurs et de travailleuses dans le secteur agricole. Cet article va simplement vous permettre de continuer à radier du monde des listes du chômage, sans résoudre le problème. Si l’on veut vraiment affronter ce problème, il faut s’attaquer à d’autres questions : les conditions de travail, la rémunération et la formation.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 16, 47 rectifié, 68 et 88 rectifié.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je mets aux voix l’article 19.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 289 :
Le Sénat a adopté.
Après l’article L. 262-28 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 262-28-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 262 -28 -1. – I. – Pour une durée de quatre ans à compter de la parution du décret mentionné au VII du présent article, une expérimentation visant à autoriser le cumul temporaire, dans une optique de réinsertion, d’une activité rémunérée et du bénéfice du revenu de solidarité active est mise en place dans des départements volontaires. La liste des départements retenus pour participer à l’expérimentation est fixée par arrêté du ministre chargé de l’action sociale, précisant le nombre de bénéficiaires relevant de cette expérimentation.
« II. – Les bénéficiaires de l’expérimentation sont orientés vers les secteurs prioritaires en tension identifiés par le président du conseil départemental, en lien avec les acteurs économiques, les partenaires sociaux du département, ainsi qu’avec le comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle mentionné à l’article L. 6123-3 du code du travail. Une liste d’activités d’intérêt général, rémunérées directement par le département, peut être dressée par celui-ci en vue d’orienter dans un second temps les bénéficiaires de l’expérimentation.
« III. – Par dérogation aux articles L. 262-2 et L. 262-3 du présent code, les revenus professionnels perçus par les bénéficiaires de l’expérimentation mentionnée au I du présent article dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée d’une durée d’un an ou à durée indéterminée sont exclus pendant une période maximale de douze mois du montant des ressources déterminant l’éligibilité au revenu de solidarité active et servant au calcul de cette allocation, selon des modalités et dans la limite d’un plafond fixés par décret.
« Pendant la même période, le bénéfice de la prime d’activité mentionnée à l’article L. 841-1 du code de la sécurité sociale est suspendu pour les bénéficiaires de l’expérimentation mentionnée au même I.
« Dans le cadre de cette expérimentation, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 3123-7 du code du travail et aux dispositions conventionnelles en vigueur prévoyant une durée plus longue, les bénéficiaires de ladite expérimentation peuvent être embauchés dans le cadre d’un contrat de travail prévoyant une durée de travail hebdomadaire minimale de quinze heures pendant douze mois au plus. Ils peuvent conclure un contrat à durée déterminée au titre du 1° de l’article L. 1242-3 du même code. Lorsque l’employeur est une entreprise de plus de cinquante salariés, il désigne pour chaque bénéficiaire un tuteur parmi les salariés qualifiés de l’entreprise.
« IV. – Les articles L. 121-4 et L. 262-26 du présent code ne sont pas applicables à la décision d’un département de participer à l’expérimentation prévue au I du présent article. Les charges supplémentaires pour les départements résultant du III du présent article font l’objet d’une compensation financière par l’État dans les conditions applicables au financement du revenu de solidarité active.
« V. – Au plus tard dix-huit mois avant le terme de l’expérimentation mentionnée au I, les conseils départementaux des départements sélectionnés dressent le bilan de l’expérimentation. Ce bilan précise la situation individuelle des bénéficiaires de l’expérimentation avant leur entrée dans le dispositif, évalue leur situation à la sortie du dispositif, présente l’évolution du nombre de bénéficiaires du revenu de solidarité active ainsi que celle du nombre d’emplois non pourvus dans le département au cours de la période expérimentale et décrit les dépenses occasionnées par le dispositif.
« VI. – Au plus tard douze mois avant le terme de l’expérimentation mentionnée au I, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation afin de déterminer les conditions appropriées pour son éventuelle généralisation. Ce rapport évalue l’impact du dispositif sur le retour à l’emploi des bénéficiaires du revenu de solidarité active, sur l’appariement entre l’offre et la demande de travail ainsi que sur les finances publiques.
« VII. – Un décret détermine les modalités d’application du présent article ainsi que les exemptions à l’obligation d’activité pouvant être accordées aux bénéficiaires de l’expérimentation. »
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 48 rectifié est présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, MM. J. Bigot et Devinaz, Mme Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 69 est présenté par M. Gay, Mmes Varaillas, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 101 est présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 48 rectifié.
Cet amendement vise à supprimer l’article 20, qui met en place une expérimentation de quatre ans, dans les départements volontaires, pour autoriser le cumul d’une activité rémunérée et du RSA. Cette expérimentation se basera sur les secteurs prioritaires en tension définis à l’article 19.
Comme mon collègue Jean-Claude Tissot vient de l’indiquer, les sénateurs socialistes sont opposés à la philosophie générale des articles relatifs au droit du travail de cette proposition de loi, qui expriment une approche très libérale du marché du travail.
Nous considérons pour notre part que la recherche d’emploi est une activité à part entière, qui demande du temps et de l’énergie. Il semble délicat de demander à des personnes se trouvant parfois dans des situations difficiles à vivre – moralement, socialement et surtout financièrement – de continuer leur recherche d’emploi tout en travaillant quinze, vingt ou vingt-cinq heures par semaine dans les champs, et ce sur une période d’un an ou plus.
Par ailleurs, il faut également avoir à l’esprit que les métiers agricoles nécessitent des connaissances, des compétences et, aujourd’hui, le plus souvent, des formations particulières.
En conséquence, cet article revient à considérer soit que le métier d’agriculteur ne nécessite pas de compétences ni de formation et, partant, que n’importe quel Français peut demain l’exercer – nous ne pensons pas que ce soit l’opinion des auteurs de cette proposition de loi, qui sont pour la plupart attachés au monde agricole et connaissent parfaitement ses problématiques –, soit que seuls les métiers les moins qualifiés et donc, bien souvent, les plus difficiles physiquement et les plus précaires, bien sûr, seront visés par cette expérimentation.
C’est bien sûr sur ce second point que le bât blesse, et c’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article 20.
Dans quelques instants, M. le ministre nous dira certainement qu’il ne souhaite pas prendre parti, mais qu’il est d’accord, philosophiquement et politiquement, avec les mesures contenues dans cet article…
Ça y est, on y vient ! Comme on ne trouve personne pour faire les vendanges à 9, 11 euros net de l’heure, on va proposer une expérimentation aux départements pour que les allocataires du RSA puissent venir vendanger. C’est bien cela, mon cher collègue Laurent Duplomb ? Tout cela augure bien mal du débat que nous aurons bientôt sur ces sujets.
Pour toucher le RSA, on va devoir travailler quinze à vingt heures, ce sera donc du travail gratuit.
M. le ministre et des sénateurs du groupe Les Républicains renchérissent.
M. Fabien Gay. Mais s’ils ne font pas ce travail, on leur suspendra le RSA.
Oui ! sur des travées du groupe Les Républicains.
Nous sommes donc opposés à cet article. Ce n’est pas le moment d’avoir ce débat, cette mesure est ici un cavalier social, mais nous allons affûter nos arguments d’ici à… Monsieur le ministre, quand ce grand projet de loi social nous arrivera-t-il ?
Cette proposition de mettre en place un cumul du RSA et d’un revenu d’activité dans un objectif d’insertion part d’un diagnostic complètement erroné. Les personnes éloignées de l’emploi le sont en raison de multiples facteurs : santé, mobilité, qualification, logement…
C’est plutôt sur l’accompagnement qu’il faut axer les politiques publiques, si l’on veut permettre ce retour à l’emploi. De plus, les problèmes d’appariement entre emplois vacants et demandeurs d’emploi sont avant tout dus à des problèmes d’attractivité des postes proposés – on l’a déjà dit – en termes de conditions de travail et de salaires, problématiques majeures qui ne sont pas prises en compte par ce dispositif.
Par ailleurs, celui-ci pourrait donner lieu à des effets d’aubaine complètement contre-productifs. Les employeurs pourraient ainsi être amenés à remplacer les salaires par des formes de revenu moins coûteuses, au détriment de notre système de protection sociale – et après, on va dire qu’il fonctionne mal ! On peut également s’interroger sur la pression à la baisse des salaires qui pourrait découler de ce dispositif.
En bref, celui-ci alimentera la précarisation du travail en agriculture et ne renforcera pas son attractivité, bien au contraire. Il convient à l’évidence d’expérimenter d’autres voies, comme un revenu garanti décent, des mesures concrètes d’accompagnement à l’insertion des personnes éloignées de l’emploi et surtout l’amélioration des conditions de travail, ainsi que l’attention portée au sens du travail évoqué à l’instant par ma collègue Raymonde Poncet Monge, qui est quelque chose d’essentiel.
Il faudrait se poser les bonnes questions, et d’abord celle-ci : pourquoi tant d’emplois restent-ils vacants ?
En donnant mon avis sur ces amendements, madame la présidente, je me permettrai de présenter les deux amendements suivants, car tout cela est lié. Le premier, l’amendement n° 128, est rédactionnel. Quant à l’amendement n° 129, son objet est lié à l’avis défavorable que je vais donner sur ces trois amendements identiques de suppression de l’article.
Je comprends en effet les réticences, les questions et même les oppositions que cet article peut susciter. Notre amendement n° 129 vise donc à recalibrer cette disposition pour la faire converger plus nettement avec la proposition de loi de notre collègue Claude Malhuret qui a été adoptée dans cet hémicycle le 15 avril 2021, preuve que cette disposition n’est pas tout à fait incongrue.
Par ailleurs, je tiens à souligner que cette expérimentation est d’ores et déjà menée dans pas moins de trente-trois départements, de toutes tendances politiques, soit un tiers des départements français, preuve qu’il s’agit d’un outil intéressant à même de rapprocher du monde du travail certains allocataires du RSA.
Enfin, je veux rappeler que, selon une enquête de 2023 de Pôle emploi, sur près de 246 000 projets de recrutements agricoles, 57 % étaient considérés comme « difficiles » du fait du manque de main-d’œuvre. Il y a donc là un vrai sujet sur lequel les articles 19 et 20 de ce texte permettent d’ouvrir le débat, avant celui qui se tiendra sur le projet de loi à venir relatif au marché du travail.
La disposition en question a par exemple été mise en place dans le département de la Dordogne. Elle y fait l’objet d’une évaluation et les premiers résultats sont extrêmement encourageants. C’est pourquoi il convient d’inciter à la généralisation de ces expérimentations, qui visent à remettre le pied à l’étrier des bénéficiaires du RSA et – pourquoi pas ? – à susciter des vocations agricoles. Il y a aussi une vertu pédagogique dans le lien particulier d’un agriculteur avec les ouvriers qui travaillent avec lui.
Tout cela justifie notre avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression de l’article 20.
Comme sur l’article 19, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces amendements et sur l’article 20. Ces dispositions relèvent de débats qui nous semblent plutôt devoir être menés dans le cadre de l’examen du prochain projet de loi sur le marché du travail.
Essayons de dire les choses telles qu’elles sont. Monsieur Gay, vous avez déclaré que vous alliez affûter vos arguments ; je le souhaite, parce que, à la vérité, c’est bien le cumul de ces deux revenus qui est proposé ici, de manière à éviter la trappe dans laquelle peuvent se retrouver aujourd’hui les bénéficiaires du RSA : soit on le perçoit, soit on travaille. Tel est bien l’objet des expérimentations en cours.
Cela dit, je le répète, il nous semble que cette disposition n’a pas sa place dans ce texte-ci.
C’est pourquoi le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces trois amendements de suppression, comme sur les amendements n° 128 et 129 de Mme la rapporteure.
Madame la rapporteure, vous venez d’évoquer la proposition de loi de M. Malhuret, dont le rapporteur était Daniel Chasseing. Le dispositif permettant de cumuler revenus salariés et RSA fait aujourd’hui l’objet d’une expérimentation qui concerne – vous le dites vous-même – de nombreux départements. Alors, pourquoi légiférer aujourd’hui ? Attendons plutôt ses résultats : par définition, une expérimentation est engagée pour que l’on puisse ensuite l’évaluer et en tirer des enseignements. Pourquoi tenez-vous à doublonner avec une proposition de loi en cours ?
Nous avons dit ce que nous pensons du dispositif ; à l’époque de la proposition de loi de M. Malhuret déjà, nous étions très critiques, notamment sur le risque d’un effet d’aubaine, qui est patent. L’Insee a bien montré que ce genre de mesure entraîne, à terme, une pression à la baisse des salaires ; c’est documenté !
Ce dispositif a pour objet non pas de proposer un parcours à un bénéficiaire du RSA – nous n’en parlerions alors pas dans cette loi –, mais simplement de trouver quelqu’un pour occuper un emploi vacant non attractif. Ce faisant, on prend le problème à l’envers !
Dans les fermes agroécologiques, qui ont adopté un modèle différent, très intensif en emplois, il n’y a pas de difficulté à trouver des volontaires. Peut-être parce qu’on peut y donner du sens à son travail, en ayant le sentiment de participer à une transition.
Interrogeons-nous sur les raisons de la non-attractivité de ces emplois en tension avant de vouloir pousser, sinon obliger demain, les bénéficiaires du RSA à les accepter sous la menace de perdre leur allocation de survie.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 128, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
II. – Alinéa 2
Supprimer la référence :
« Art. L. 262-28-1. –
III. – Alinéas 4 et 7
Remplacer les mots :
du présent code
par les mots
du code de l’action sociale et des familles
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° 129, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
Peut bénéficier du dispositif prévu par la présente expérimentation toute personne volontaire, bénéficiaire du revenu de solidarité active, inscrite sur la liste des demandeurs d’emploi et domiciliée dans un département participant à l’expérimentation mentionnée au I.
II. – Alinéa 8
1° Première phrase
Compléter cette phrase par les mots :
dans un rapport
2° Seconde phrase
Remplacer le mot :
bilan
par le mot :
rapport
III. – Alinéa 10
Remplacer les mots :
du présent article ainsi que les exemptions à l’obligation d’activité pouvant être accordées aux bénéficiaires de l’expérimentation
par les mots
de la présente expérimentation
Cet amendement a également déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 20 est adopté.
I. – Le 4° du III de l’article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.
II. – L’article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Au cinquième alinéa du I, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 25 % » ;
2° Le V est ainsi rédigé :
« V. – Les travailleurs agricoles non occasionnels dont le contrat de travail relève du premier alinéa de l’article L. 1221-2 du code du travail et exerçant une activité de collecte de lait en zone de montagne bénéficient des dispositions du présent article.
« Le bénéfice de l’exonération prévue au présent V est subordonné au respect du règlement (UE) n° 1407/2013 de la Commission, du 18 décembre 2013 relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis, et du règlement (UE) n° 1408/2013 de la Commission du 18 décembre 2013, relatif à l’application des articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne aux aides de minimis dans le secteur de l’agriculture, modifié par le règlement (UE) 2019/316 de la Commission du 21 février 2019. »
Je suis saisie de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 20 rectifié bis est présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay, Mmes Saint-Pé, Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, MM. Duffourg et Détraigne, Mme Perrot et M. Chauvet.
L’amendement n° 51 rectifié est présenté par MM. Montaugé, Tissot et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 55 rectifié ter est présenté par Mme Loisier, MM. Bacci et Chasseing, Mmes Guidez et de La Provôté, MM. Hingray et Bonneau, Mme Gacquerre, MM. Savary et Bonnecarrère, Mme Sollogoub, M. Cigolotti, Mmes Lassarade et Doineau et M. Gremillet.
L’amendement n° 89 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Gold, Mme Pantel et M. Requier.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l’alinéa 2
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le troisième alinéa du I est ainsi modifié :
a) Après la référence : « 1°, », est insérée la référence : « 2°, » ;
b) Les mots : «, à l’exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 20 rectifié bis.
Avec cet amendement, nous souhaitons attirer l’attention sur l’importance de la filière bois pour notre pays. Il est essentiel de la soutenir, notamment en étendant aux entreprises de travaux agricoles et forestiers le bénéfice des exonérations de charges sociales sur les emplois occasionnels.
La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 51 rectifié.
Cet amendement vise à réintégrer les entreprises de travaux agricoles, forestiers et ruraux (Etarf) dans le dispositif TO-DE, dont elles avaient été exclues par la loi de finances pour 2015.
Le nombre d’employeurs concernés s’élève à 21 000, pour un allégement de cotisations d’environ 30 millions d’euros : il y a donc un enjeu évident de compétitivité pour ces entreprises et pour le monde agricole.
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 55 rectifié ter.
Dans un contexte de grande tension, les Etarf sont submergées par les demandes saisonnières, liées à différentes contraintes, notamment au regard des travaux dans les espaces naturels, auxquelles elles sont incapables de répondre.
Ce dispositif devrait leur permettre de recruter plus facilement et de répondre à ces demandes toujours plus importantes.
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 89 rectifié.
Cet amendement concerne les 21 000 Etarf, qui bénéficiaient auparavant du dispositif TO-DE. Depuis la loi de finances pour 2015, ce dispositif est limité aux agriculteurs employeurs de main-d’œuvre à titre individuel ou collectif et aux travaux forestiers, à l’exclusion des tâches réalisées par les Etarf, qui se battent âprement année après année pour continuer d’en bénéficier.
L’adoption de cet amendement apporterait un coup de pouce d’environ 30 millions d’euros aux Etarf, qui sont des acteurs essentiels dans nos territoires. Ces entreprises innovent pour renforcer la compétitivité des activités agricoles, forestières et rurales en se dotant de machines et engins de pointe et recrutent des personnels qualifiés et formés, motivés par la variété des missions et des environnements.
Leur action mériterait d’être encouragée, raison pour laquelle je vous demande de voter cet amendement.
Ces quatre amendements visent à étendre aux forestiers un dispositif qui a fait ses preuves chez les agriculteurs.
Dans le secteur agricole, il constitue une mesure de compétitivité et de lutte contre la sous-déclaration ; mais, en l’espèce, il s’agit davantage d’une mesure tendant à renforcer l’attractivité des travaux forestiers, qui relèvent de métiers parfois pénibles et dangereux.
Surtout, le Président de la République a annoncé la plantation de 1 milliard d’arbres d’ici à 2030, ce qui nécessitera beaucoup de main-d’œuvre en forêt pour préparer les terrains, procéder aux plantations et appliquer les protections nécessaires pour faire face aux dégâts des animaux. Or le secteur souffre d’une importante pénurie de main-d’œuvre.
J’ajoute que l’exclusion des travaux forestiers de ce dispositif paraît d’autant moins justifiée que les normes environnementales, notamment celles qui découlent de l’application de la directive Habitats, rendent les travaux forestiers de plus en plus saisonniers.
L’avis est donc favorable.
En 2015, les Etarf n’avaient pas été exclues du dispositif TO-DE par hasard ; et ce n’est pas un hasard non plus si les différents gouvernements qui se sont succédé depuis ne sont pas revenus sur cette mesure.
Madame Primas, vous avez souligné à juste titre que les besoins de main-d’œuvre allaient s’accroître. Mais vous avez aussi relevé qu’il s’agissait moins d’une question de saisonnalité que d’attractivité. §La plantation, l’entretien ne relèvent pas forcément d’emplois occasionnels, madame Loisier.
De plus, nous sommes en train d’additionner des dépenses et des dispositifs d’exonération de cotisations qui auraient davantage leur place dans un texte financier.
Pour ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il y sera défavorable.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 20 rectifié bis, 51 rectifié, 55 rectifié ter et 89 rectifié.
Les amendements sont adoptés.
L’amendement n° 71 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, J.M. Boyer et Louault, Mme Férat, M. D. Laurent, Mme Chauvin, M. Bascher, Mme Noël, MM. Détraigne, Grosperrin, Sol, Pellevat et H. Leroy, Mme Richer, MM. Bonhomme, Guerriau et Reichardt, Mme Muller-Bronn, MM. Henno, Paccaud, Brisson, Daubresse et A. Marc, Mmes Boulay-Espéronnier, Pluchet et Puissat, MM. Somon et Chasseing, Mmes Gruny, Berthet et Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Gatel, MM. Piednoir et Burgoa, Mme Guidez, MM. B. Fournier et Anglars, Mme Micouleau, MM. Calvet et Mouiller, Mme Bellurot, M. Decool, Mmes Billon et Belrhiti, MM. Savary et Chauvet, Mmes Lassarade et Lopez, MM. Rojouan et Duffourg, Mme F. Gerbaud, MM. Rietmann et Pointereau, Mme Ventalon et MM. Sido, Perrin, Klinger, Hugonet, Tabarot et Belin, est ainsi libellé :
I. - Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
…° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :
« …. – Les salariés travailleurs occasionnels et demandeurs d’emploi des sociétés coopératives agricoles et leurs unions qui se consacrent au conditionnement des fruits et légumes, telles que citées à l’article 1451 du code général des impôts, bénéficient des dispositions du présent article. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Laurent Duplomb.
Cet amendement tend à étendre le dispositif TO-DE aux coopératives de conditionnement des fruits et légumes qui emploient des saisonniers.
Quand on importe 71 % de nos fruits et près de 50 % de nos légumes, l’urgence est de retrouver des marges de compétitivité. Dans la mesure où beaucoup de nos fruits et légumes sont conditionnés, sinon produits, par des coopératives, l’extension du dispositif TO-DE aux saisonniers, et non à l’ensemble des salariés, constituerait une réponse intéressante.
Selon le code rural, le dispositif TO-DE est ouvert à tous les « employeurs relevant du régime de protection sociale des professions agricoles ».
L’article L. 722-1 du même code précise que les « établissements de toute nature dirigés par l’exploitant agricole en vue de la transformation, du conditionnement et de la commercialisation des produits agricoles lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production » sont concernés. Il me semble que l’on ne peut être plus clair.
Cet amendement étant satisfait, la commission en demande le retrait.
J’aimerais que le ministre me confirme qu’une coopérative de conditionnement peut bénéficier du dispositif TO-DE pour les saisonniers.
M. Marc Fesneau, ministre. J’entends les arguments de votre rapporteure, que je n’ai pas vocation à contredire par nature.
Sourires.
Toutefois, je ne veux pas vous répondre de manière précipitée, car cette question mérite expertise.
Par ailleurs, je le redis, il me semble que cette mesure relève davantage d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). N’égrenons pas les exonérations !
Mme Anne-Catherine Loisier montre son désaccord.
Si les coopératives sont déjà couvertes par le dispositif, c’est parfait ! L’important, c’est que vous puissiez nous dire clairement, après expertise, si c’est ou non le cas.
Je vous ferai parvenir les éléments de l’expertise, monsieur Duplomb.
L’amendement n° 71 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 102, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
.… - Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport relatif au dispositif travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi, dit TO-DE.
Ce rapport évalue l’efficacité du dispositif pour lutter contre le travail non déclaré, et le recours aux travailleurs détachés, et son impact sur les conditions de travail, d’emploi et de rémunération des saisonniers.
Il évalue la possibilité de conditionner l’exonération de cotisation patronale sur des critères d’éligibilité financière, notamment au regard de la fragilité des filières et des exploitations et sur des critères sociaux et environnementaux, notamment en termes de conditions de travail et de création effective d’emplois.
La parole est à M. Daniel Salmon.
Le dispositif TO-DE est encore nécessaire pour certaines exploitations agricoles, notamment en raison des difficultés rencontrées pour recruter des travailleurs saisonniers, de la faiblesse des revenus agricoles et des conséquences économiques liées aux différentes crises – sanitaire, climatique et géopolitique – qui ont marqué le secteur ces deux dernières années.
Alors que le Gouvernement a acté la prolongation du dispositif jusqu’au 31 décembre 2025, cette proposition de loi le pérennise et étend le champ de ses bénéficiaires. Or cette politique d’exonération de cotisations patronales dans le secteur agricole n’a pas fait l’objet d’une réelle évaluation depuis sa mise en place en 2010.
Rappelons que le dispositif TO-DE profite en premier lieu aux filières à haute intensité en main-d’œuvre – arboriculture, maraîchage, viticulture, grandes cultures – au travers de contrats très concentrés dans le temps, pour un coût total de 561 millions d’euros en 2023 – ce n’est pas rien ! –, somme qui n’a pas été entièrement compensée pour la sécurité sociale.
Ces mesures d’allégement de cotisations patronales ciblées sur les bas salaires peuvent créer un effet de trappe à bas salaires, comme nous l’avons déjà dit, et encourager les exploitations à plafonner les rémunérations à la limite haute du dispositif. Pour quel résultat ? Depuis 2010, le dispositif a-t-il réellement permis de lutter contre le travail illégal et le recours aux travailleurs détachés ou amélioré les performances économiques et sociales de l’agriculture française, notamment en termes de créations effectives d’emplois ?
Pour ces raisons, l’amendement tend à prévoir la remise d’un rapport au Parlement afin d’évaluer réellement l’efficacité de ce dispositif avant d’envisager sa pérennisation.
Avis défavorable : l’annexe 5 du PLFSS, dont vous débattez chaque année, contient les informations nécessaires pour éclairer les assemblées sur l’utilité du TO-DE.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 21 est adopté.
I. – L’article L. 5422-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article ne s’applique pas aux employeurs agricoles et agroalimentaires dont l’activité est directement déterminée par la saisonnalité. »
II
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 49 rectifié est présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Michau et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, MM. J. Bigot et Devinaz, Mme Préville, M. Stanzione, Mme Lubin, M. Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 120 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour présenter l’amendement n° 49 rectifié.
Cet article prévoit d’exclure du champ d’application de l’article L. 5422-12 du code du travail, relatif à la minoration ou à la majoration des taux de contributions des employeurs applicables aux contrats courts, les entreprises agricoles et agroalimentaires dont l’activité est directement déterminée par le cycle naturel des récoltes.
Nous souhaitons rappeler que la logique de ce dispositif dit de bonus-malus sur les contrats courts est d’encourager les entreprises à privilégier le recours à des emplois stables – CDI, CDD de longue durée ou contrats d’insertion.
En conséquence, l’exemption des entreprises agricoles et agroalimentaires revient mécaniquement à encourager ces entreprises à recourir à des contrats précaires.
Par ailleurs, même si les spécificités du secteur agricole en matière de besoin de main-d’œuvre sont réelles, l’extension du champ d’application de cet article à l’ensemble des entreprises agricoles et agroalimentaires semble fortement disproportionnée.
Nous proposons donc de supprimer cet article.
Cet article tend à encourager certaines pratiques dont nous ne voulons pas.
Cela n’empêche pas de prendre en compte un certain nombre de sujets au regard du bonus-malus, en particulier les spécificités du monde agroalimentaire et agricole.
Le Gouvernement demande donc la suppression de l’article.
Avec cet article, nous proposons de pérenniser, en inscrivant dans le dur de la loi, le fait que le secteur agricole et agroalimentaire soit exclu du dispositif de bonus-malus pour des raisons de seuil.
Les travailleurs saisonniers sont consubstantiels à l’ensemble de la production saisonnière, en particulier pour le maraîchage ou l’arboriculture. Il est évident que l’application du bonus-malus viendrait perturber et pénaliser des secteurs d’activité fragiles, dont nous essayons d’encourager la hausse des volumes de production en France.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.
Je souhaite appuyer les propos de la rapporteure.
Monsieur le ministre, notre dépendance aux importations de coulis de tomate de Chine illustre parfaitement la situation.
La production de coulis de tomate est en effet l’exemple typique d’une industrie pénalisée par le bonus-malus. Par définition, les tomates de plein champ ne peuvent être récoltées en hiver ; il s’agit donc bien d’une activité saisonnière.
L’usine de Châteaurenard, que je vous invite à visiter et qui transforme en coulis des tomates françaises, entre parfaitement dans le cadre de notre démonstration : elle subit un malus, alors qu’elle ne pourra jamais embaucher en CDI sur la totalité de l’année dans la mesure où son activité est intrinsèquement liée à la saisonnalité de la récolte et de la transformation des tomates. Les choses sont aussi simples que cela, pas besoin de sortir de Saint-Cyr pour le comprendre !
Le bonus-malus nous avait été vendu à l’époque par Mme Borne comme une contrepartie, demandée aux employeurs, à la réforme de l’assurance chômage particulièrement brutale à l’égard des salariés privés d’emploi.
On exigeait de ces derniers six mois de travail, mais ce n’était pas gênant, selon Mme Borne, puisque les employeurs étaient obligés d’offrir des contrats d’au moins six mois. Voilà qui rappelle un certain index seniors d’une réforme plus récente…
Le procédé est le même : on fait passer une réforme brutale contre une petite contrepartie exigée des employeurs dont, dans un deuxième temps, on demande le retrait.
Aujourd’hui, le temps vous semble venu de supprimer cette mesure qui prétendait assainir la pratique du recours aux contrats courts dans des secteurs particulièrement peu vertueux.
Contrairement à ce qui vient d’être dit, le bonus-malus s’équilibre dans chaque secteur. L’ensemble du monde agricole est concerné par le caractère saisonnier de l’activité. Le malus ne s’applique qu’aux entreprises se situant en deçà de la médiane de leur secteur, alors que les entreprises qui font mieux bénéficient d’un bonus. Les comparaisons se font bien au sein d’un même secteur, dont les entreprises subissent les mêmes contraintes de saisonnalité : à la fin, le dispositif est donc parfaitement à l’équilibre.
Vous voulez pénaliser les salariés – ils ne touchent pas les allocations s’ils n’ont pas travaillé six mois –, sans rien demander aux employeurs : c’est un aveu de renoncement ! Vous acceptez que le secteur agricole reste une trappe à emplois précaires et vous renoncez à lutter contre une réalité qui plombe ce secteur d’activité.
Madame Poncet Monge, vous êtes sans doute une spécialiste des affaires sociales, mais peut-être un peu moins de l’agriculture, aussi ne prenez pas mal ce que je vais vous dire !
À quoi un arboriculteur qui produit des cerises peut-il employer au mois de décembre les cueilleurs qu’il a embauchés au printemps ou en été ?
Tout à fait : en l’occurrence, il s’agit d’un seul et même secteur, celui de l’agriculture.
Et au sein de ce secteur, certaines activités, comme les productions végétales, par exemple, ne requièrent pas d’employés saisonniers et bénéficient de bonus, quand les maraîchers ou les arboriculteurs, qui emploient beaucoup de saisonniers, subissent des malus ! Il ne me semble pas que cela corresponde à ce que nous voulons collectivement.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L’amendement n° 103, présenté par MM. Salmon, Labbé, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Au deuxième alinéa de l’article L. 5422-12 du code du travail, les mots : « minoré ou » sont supprimés.
La parole est à M. Daniel Salmon.
Le calcul du bonus-malus ne semble pas véritablement adapté à son objectif. Il semble même représenter un coût pour la protection sociale : sur plus de 3, 8 millions d’entreprises, seules 18 000 sont concernées par ce dispositif, dont 6 565 ont subi un malus en 2022.
Comme le soulignait ma collègue Raymonde Poncet Monge, le système de calcul est peu incitatif au changement de pratiques, puisqu’il est défini en tenant compte de la moyenne des pratiques du secteur. Ainsi, le taux de séparation de l’entreprise est comparé au taux de séparation médian de son secteur : l’effort demandé aux entreprises est donc particulièrement limité, alors que des solutions existent pour créer des emplois pérennes dans le secteur de l’agroalimentaire et faire face à la saisonnalité. Je pense notamment à la mise en place de groupements d’employeurs afin de limiter le recours aux contrats précaires.
Cet amendement tend donc non pas à supprimer l’ensemble du dispositif de bonus-malus comme le prévoit cet article, mais à conserver seulement le système de malus, dont l’application devrait être revue pour mieux cibler les pratiques abusives bien réelles de recours aux contrats courts de certains employeurs.
La commission est d’autant plus défavorable à cet amendement que la rédaction retenue vise l’ensemble des secteurs économiques, ce qui est très éloigné de l’objet de cette proposition de loi qui se limite au secteur de l’agriculture.
Nous avons beaucoup débattu des bonus-malus en commission des affaires sociales.
N’oublions pas que les secteurs concernés doivent présenter un taux de séparation supérieur à 150 %. Il me semble que cela laisse de la marge pour inclure le secteur agricole.
Et si ce n’est pas possible, il faut dire à Mme la Première ministre que l’on ne peut pas pénaliser des salariés travaillant moins de six mois ! Car c’est bien elle qui avait proposé à l’époque de passer de quatre à six mois contre la promesse d’obliger les employeurs à proposer des contrats un peu plus longs.
Cette promesse, vous nous l’avez vendue pour faire passer une réforme dure pour les travailleurs. Si vous pensez qu’elle ne peut pas être mise en œuvre, alors il faut exclure les travailleurs saisonniers agricoles des nouvelles contraintes d’allongement de la durée d’assurance requise pour toucher les allocations chômage. On ne peut pas avoir l’un sans l’autre !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 22 est adopté.
L’amendement n° 118 rectifié bis, présenté par Mmes Jacquemet, Herzog, Dindar et Guidez, M. Hingray, Mme Gatel, MM. Kern et Henno, Mmes Gacquerre et Sollogoub, MM. Duffourg et Canévet, Mmes Billon et Perrot, M. Détraigne, Mme Saint-Pé et MM. Le Nay et Folliot, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « peuvent opter pour un » sont remplacés par les mots : « bénéficient aussi d’un » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Canévet.
Les chefs d’exploitation agricole ayant des revenus professionnels peu élevés peuvent bénéficier d’une modulation de leurs taux de cotisations d’assurance maladie, invalidité et maternité des exploitants agricoles (Amexa).
Les jeunes agriculteurs, quant à eux, peuvent bénéficier d’exonérations partielles de cotisations sociales.
Cet amendement vise à permettre le cumul de ces deux dispositifs, ce qui me semble souhaitable. En effet, pourquoi les chefs d’exploitation aux faibles revenus ne pourraient-ils pas bénéficier des mêmes exonérations ? Il s’agit d’une question d’équité, notamment pour les Gaec.
Il existe aujourd’hui une exonération de cotisations d’assurance maladie, invalidité et maternité en deçà d’un certain seuil de revenu de l’exploitant.
Il existe également une exonération de cotisations sociales pour les jeunes agriculteurs.
Dans ce second cas, l’exonération est dégressive sur une période de cinq ans, passant de 65 % pour la première année à 15 % pour la dernière.
Le choix d’opter pour l’un ou l’autre de ces dispositifs est définitif ; il est impossible de les cumuler. Or un jeune agriculteur, par définition, manque de visibilité sur celui de ces dispositifs qui serait le plus intéressant pour lui.
Cette situation conduit de jeunes agriculteurs ayant choisi le dispositif qui leur est spécifique à devoir s’acquitter de cotisations sociales plus élevées que leurs aînés, en particulier lors des deux dernières années, en raison du caractère dégressif susmentionné.
La disposition proposée, largement cosignée, a déjà été adoptée au Sénat lors de l’examen en première lecture de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. Le ministre du travail avait alors indiqué préférer donner instruction à la Mutualité sociale agricole (MSA) d’offrir un droit d’option.
Si vous me confirmez, monsieur le ministre, que ce droit d’option est bien effectif, comme semble l’indiquer le site de la MSA, cela permettrait de résoudre la difficulté soulevée par les auteurs de cet amendement, dont je solliciterai le retrait.
Ce droit d’option existe bien, madame la rapporteure, raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.
I. – L’article 200 undecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, les mots : « entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2024 » sont supprimés ;
2° Le premier alinéa du II est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 66 % » ;
a bis)
b) À la deuxième phrase, le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 70 % » ;
3°
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
III
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 116, présenté par MM. Labbé, Salmon, Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard et Parigi et Mmes Poncet Monge et M. Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
a) Les mots : « 50 % des dépenses mentionnées au I et effectivement supportées, dans la limite par an de quatorze jours de remplacement pour congé », sont remplacés par les mots : « 90 % des dépenses mentionnées au I et effectivement supportées, dans la limite par an de sept jours de remplacement pour congé, puis, le cas échéant, à 66 % des dépenses mentionnées au I et effectivement supportées dans la limite de sept jours de remplacement pour congé supplémentaires par an. »
II. – Alinéa 6
Remplacer le taux :
par le taux :
III. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Le présent article ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Joël Labbé.
Cet amendement vise à renforcer le présent article en revalorisant les augmentations proposées du crédit d’impôt permettant de financer le recours au service de remplacement.
Actuellement, grâce à ce crédit d’impôt, les éleveurs et paysans contraints à une présence quotidienne sur la ferme peuvent bénéficier d’un financement égal à 50 % des dépenses de remplacement pour congé, dans la limite de quatorze jours par an.
Depuis le 1er janvier 2022, le recours à ce service est également financé à 60 % en cas d’arrêt maladie.
Concernant le crédit d’impôt pour congé, l’amendement tend à fixer le taux de financement à 90 % pour la première semaine de congé, puis à 75 % pour la deuxième et troisième semaine.
En effet, encore trop d’agriculteurs ne prennent aucun congé sur l’année, du fait de contraintes économiques : dans la version actuelle du crédit d’impôt, le reste à charge est trop important pour nombre d’agriculteurs, qui ne peuvent accéder au dispositif. Le mécanisme proposé leur permettrait de prendre a minima une semaine de congé sur l’année, dans un contexte de forts risques psychosociaux.
Cet amendement vise également à porter le taux de remplacement à 90 % pour ce qui concerne les arrêts maladie, dans une logique de solidarité nationale, alors que les agriculteurs souffrent trop souvent de conditions de travail difficiles et d’épuisement psychologique, avec les conséquences sur la santé et le risque d’accident que cela implique.
Revaloriser fortement le crédit d’impôt permettrait de renforcer l’attractivité du métier d’agriculteur, alors que la France est confrontée à l’enjeu crucial du renouvellement des générations, et de créer des emplois durables dans les services de remplacement, acteurs essentiels pour la dynamique des territoires ruraux.
L’amendement n° 50 rectifié bis, présenté par MM. Tissot, Montaugé et Kanner, Mmes Artigalas et Blatrix Contat, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla et Redon-Sarrazy, Mme Bonnefoy, M. J. Bigot, Mmes Monier et Préville, MM. Stanzione, Marie et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4 :
Remplacer le taux :
par le taux :
II. – Alinéa 6
Remplacer le taux :
par le taux :
III. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Le présent article ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
Le présent amendement vise à renforcer la portée de l’article 23, qui tend à pérenniser et à augmenter le crédit d’impôt pour dépenses de remplacement applicable à certains exploitants agricoles.
Il semble en effet indispensable de redonner de l’attractivité à la profession agricole du fait de l’enjeu crucial de renouvellement des générations et de l’installation des agriculteurs. À ce titre, l’accès au congé est capital, car il s’adresse notamment aux agriculteurs contraints à une présence quotidienne sur la ferme.
Cet amendement tend donc à aller plus loin que le texte issu de la commission, en portant le taux des dépenses engagées au titre du remplacement de 66 % à 75 % quand il s’agit d’un congé et de 70 % à 80 % en cas de maladie ou d’accident du travail.
Je tiens à le rappeler, en commission, nous avons déjà substantiellement augmenté l’incitation fiscale, en portant le taux de 50 % à 66 % en cas de congé pour convenances personnelles et de 60 % à 70 % en cas de congé pour maladie.
Par ailleurs, nous avons ajouté trois jours supplémentaires de congé pour formation au plafond de quatorze jours éligibles au crédit d’impôt.
Il s’agit de progrès majeurs, qui sont consensuels. Nous ne cherchons pas à aller plus loin, pour ne pas rompre l’unanimité, mais aussi et surtout pour que ces mesures soient acceptables tant pour les acteurs que pour les finances publiques.
Je le précise, les acteurs entendus pour instruire cette proposition de loi nous ont indiqué qu’il s’agissait non pas seulement d’une question monétaire, mais aussi d’un problème de disponibilité et de polyvalence des remplaçants, tant la palette des tâches à réaliser dans la journée d’un agriculteur, et plus particulièrement d’un éleveur, s’est considérablement élargie.
D’ailleurs, notre collègue Stéphane Travert, ancien ministre de l’agriculture aujourd’hui député, qui mène un important travail sur l’amélioration du système de remplacement et avec lequel nous serons peut-être amenés à collaborer, m’indiquait que le principal frein était la structuration du système.
Au cours de ses travaux, la commission a, selon moi, suffisamment joué sur l’aspect « demande ». C’est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces deux amendements.
Je partage le point de vue exprimé par la rapporteure.
En effet, le travail mené à l’Assemblée nationale par Stéphane Travert sur le service de remplacement prendra sa place dans une logique globale. Il s’agit de savoir comment on organise le service de remplacement, et de définir les dispositifs d’exonération, qui doivent être plus attractifs, face aux risques psychosociaux et au problème d’attractivité des métiers, en particulier de ceux de l’élevage, pour lesquels la question du répit et des congés doit être posée.
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements, dont les problématiques nécessitent sans doute que nous continuions à y travailler, y compris dans le cadre du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles que je serai amené à vous présenter, afin de favoriser l’installation des jeunes – et des moins jeunes d’ailleurs.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ article 23 est adopté.
TITRE V
MAÎTRISER LES CHARGES DE PRODUCTION POUR REGAGNER DE LA COMPÉTITIVITÉ-PRIX
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 69 est ainsi modifié :
a) Au I, le montant : « 85 800 € » est remplacé par le montant : « 92 000 € » ;
b) Au b du II, le montant : « 365 000 € » est remplacé par le montant : « 390 000 € » ;
2° L’article 151 septies est ainsi modifié :
a) À la fin du a du 1° du II, les mots : «, ou s’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole » sont supprimés ;
b) Le même 1° est complété par un c ainsi rédigé :
« c) 265 000 € s’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole ; »
c) À la fin de la première phrase du 2° du même II, les mots : « et, lorsque les recettes sont supérieures à 90 000 € et inférieures à 126 000 €, pour les entreprises mentionnées au b du 1° » sont remplacés par les mots : «, lorsque les recettes sont supérieures à 90 000 € et inférieures à 126 000 €, pour les entreprises mentionnées au b du 1° et, lorsque les recettes sont supérieures à 265 000 € et inférieures à 371 000 €, pour les entreprises mentionnées au c du même 1° » ;
d) Après le b du même 2°, il est inséré un c ainsi rédigé :
« c) Pour les entreprises mentionnées au c du 1°, un taux égal au rapport entre, au numérateur, la différence entre 371 000 € et le montant des recettes et, au dénominateur, le montant de 100 000 €. » ;
e) L’avant-dernier alinéa dudit II est ainsi rédigé :
« Lorsque l’activité de l’entreprise se rattache à plusieurs des catégories définies aux a, b et c du même 1°, l’exonération totale n’est applicable que si le montant global des recettes est inférieur ou égal à 265 000 € et si le montant des recettes afférentes aux activités définies au a du même 1° est inférieur ou égal à 250 000 € et le montant des recettes afférentes aux activités définies au b du même 1° est inférieur ou égale à 90 000 €. » ;
f) Le dernier alinéa du même II est ainsi rédigé :
« Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, si le montant global des recettes est inférieur à 371 000 € et si le montant des recettes afférentes aux activités définies respectivement aux a et b du même 1° est inférieur respectivement à 371 000 € et 126 000 €, le montant exonéré de la plus-value est déterminé en appliquant le moins élevé des trois taux qui aurait été déterminé dans les conditions fixées au 2° si l’entreprise avait réalisé le montant global de ses recettes dans la catégorie mentionnée au c du 1° ou si l’entreprise n’avait réalisé que des activités mentionnées au a ou au b du même 1°. » ;
g) À la première phrase du III, la référence : « a » est remplacée par la référence : « c » ;
h)
« IX. – Les montants mentionnés au II sont indexés tous les trois ans sur l’indice des prix à la consommation hors tabac, tel qu’il est prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l’année considérée, lorsqu’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole. »
II
L’amendement n° 4 rectifié ter, présenté par MM. Longeot, Bacci et Bonneau, Mme Thomas, MM. Le Nay et Kern, Mme Gatel, MM. Favreau, Moga et Duffourg, Mmes Jacquemet et Billon, M. Hingray, Mme Sollogoub, M. P. Martin et Mme Malet, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …) 500 000 € s’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole cédées aux bénéfices de nouveaux exploitants agricoles s’installant pour la première fois ; »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Afin de favoriser l’installation de jeunes agriculteurs, cet amendement vise à exonérer totalement d’impôt les cessions d’entreprises agricoles effectuées au bénéfice d’un ou de plusieurs nouveaux installants, dès lors que les recettes annuelles sont inférieures ou égales à 500 000 euros.
Il convient en effet de favoriser la cession d’entreprises agricoles au bénéfice des jeunes agriculteurs, dans un contexte de décroissance du nombre d’agriculteurs. Il y va de la survie de la profession !
Comme nous l’avons indiqué en commission à propos d’un amendement identique, cet amendement visant à fixer à 500 000 euros le seuil d’exonération totale des plus-values en cas de cession au bénéfice d’un primo-installant dans le secteur agricole est satisfait par l’article 238 quindecies du code général des impôts.
Cet article, adopté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, prévoit ce seuil d’exonération, quel que soit le secteur d’activité, qu’il s’agisse d’un fonds de commerce ou d’une installation agricole.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.
L’amendement n° 4 rectifié ter est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 24 rectifié ter est présenté par MM. Canévet, Mizzon, Cadic, Levi et Henno, Mme N. Goulet, M. Le Nay, Mmes Saint-Pé, Havet, Billon, Herzog et Jacquemet, MM. Duffourg et Détraigne, Mme Perrot et M. Chauvet.
L’amendement n° 77 rectifié est présenté par MM. Menonville, Chasseing, A. Marc, Decool, Médevielle et Verzelen, Mme Mélot et MM. Lagourgue et Malhuret.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le 1° du I de l’article 238 quindecies est complété par les mots : « et 650 000 € s’il s’agit d’entreprises exerçant une activité agricole cédées aux bénéfices de nouveaux exploitants agricoles s’installant pour la première fois ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 24 rectifié ter.
Cet amendement est similaire à celui que nous venons d’examiner, avec un seuil d’exonération fixé à 650 000 euros.
L’amendement n° 77 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement restant en discussion ?
La commission est bien évidemment défavorable à cet amendement, pour des raisons liées à la situation de nos finances publiques.
S’agissant des exonérations de plus-values, nous avons rehaussé les seuils, qui n’avaient pas été actualisés depuis 2004. L’inflation et l’amélioration du chiffre d’affaires des entreprises nécessitaient en effet ce relèvement.
Par ailleurs, nous avons introduit un dispositif d’indexation, afin d’éviter que nous soyons obligés de légiférer régulièrement.
L ’ article 24 est adopté.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278 bis est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Les livraisons d’équidés vivants et les prestations de service suivantes relatives à leur exploitation, à savoir la préparation et l’entraînement, la location et la prise en pension des équidés, sauf lorsque ces opérations relèvent de l’article 278-0 bis. » ;
2° L’article 278-0 bis est complété par un O ainsi rédigé :
« O. – Les prestations fournies en vue de la pratique de l’équitation. »
II
L’amendement n° 130, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
1° Supprimer le mot :
suivantes
2° Après le mot :
relèvent
insérer la référence :
du O
La parole est à Mme le rapporteur.
L ’ amendement est adopté.
L ’ article 25 est adopté.
TITRE VI
DISPOSITIONS DIVERSES
L’amendement n° 131, présenté par Mme Primas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi l’intitulé de cette division :
Gage
La parole est à Mme le rapporteur.
L ’ amendement est adopté.
I. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour l’État de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour les organismes de sécurité sociale de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III
– Les éventuelles conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services. –
Adopté.
Je remercie l’ensemble de nos collègues d’être restés si tard ce soir pour finir l’examen de ce texte.
Je remercie également M. le ministre et son équipe, ainsi que nos administrateurs pour la qualité de leur travail. Je suis aussi reconnaissante à Mme la présidente et aux services de la séance d’avoir accepté de prolonger nos débats pendant la nuit.
Rendez-vous la semaine prochaine pour les explications de vote !
Je vous remercie d’avoir décidé, par souci de cohérence, d’examiner ce texte dans sa continuité, même si nous achevons son examen tard ce soir.
Je me félicite de la qualité de nos échanges, qui nous a évité de tomber dans les caricatures promises par certains, bien que des désaccords subsistent.
La haute tenue de nos débats a permis d’ouvrir des perspectives non seulement sur ce texte, mais pour de futurs débats.
Je remercie Mme la rapporteure, Mme la présidente et les auteurs de la proposition de loi du travail effectué pour essayer de faire avancer la souveraineté de l’agriculture française.
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe Les Républicains.
Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des articles de cette proposition de loi, dans le texte de la commission.
Je vous rappelle que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble de la proposition de loi se dérouleront le mardi 23 mai 2023, à quatorze heures trente.
La suite de la discussion est renvoyée à cette séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 17 mai 2023 :
À quinze heures :
Questions d’actualité au Gouvernement.
À seize heures trente :
Proposition de résolution, en application de l’article 34-1 de la Constitution, relative à la reconnaissance du génocide ukrainien de 1932-1933, présentée par Mme Joëlle Garriaud-Maylam et plusieurs de ses collègues (texte n° 200, 2022-2023).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mercredi 17 mai 2023, à deux heures vingt.