Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne m'étendrai pas sur le rappel de l'importance de la fonction des douanes. Le ministre l'a soulignée de manière tout à fait convaincante et illustrative tout à l'heure.
Je souhaite simplement ajouter à cette description très juste la très forte évolutivité des techniques et des formes d'intervention de la douane au cours des vingt à trente dernières années – tendance qui se poursuit, notamment du fait du développement du champ numérique.
Il est survenu également un événement politique non dénué d'importance. Les douanes exercent beaucoup plus d'interventions au nom du code des douanes de l'Union européenne qu'au nom du code des douanes national. Leur cadre d'intervention a donc beaucoup changé. En conséquence, la question de l'actualisation du code des douanes se pose, d'autant que ce texte a sérieusement vieilli.
Le projet de loi qui nous est proposé poursuit un double objectif. D'une part, l'idée est de mettre en conformité les interventions contraignantes de la douane avec les droits individuels tels qu'ils sont interprétés dans les évolutions récentes de la jurisprudence. En effet, la déclaration d'inconstitutionnalité que nous avons subie en septembre dernier n'est pas la première. D'autres déclarations d'inconstitutionnalité ont été émises concernant des dispositions importantes du code des douanes, ce qui nous incite évidemment à la vigilance.
D'autre part – et le ministre a été tout à fait explicite quant à la nouvelle dynamique envisagée –, le texte vise à instaurer des mécanismes complémentaires de contrôle pour mieux appréhender des trafics devenus de plus en plus préoccupants.
Les commissions des finances et des lois du Sénat ne sont pas intervenues sur le projet de loi en décalage ni en divergence par rapport à ces deux objectifs, mais en les partageant. Nous avons néanmoins développé des propositions consistant, pour ce qui concerne la commission des lois, à préciser les limites de lieu et de durée des contrôles de la douane sur les voies et sur les lieux de transit et à prévoir l'information et le contrôle de l'autorité judiciaire chaque fois que le contrôle douanier entraîne une contrainte importante pour la liberté de mouvement des personnes.
Comme l'a très bien souligné M. le rapporteur de la commission des finances, nous avons calqué les modalités d'encadrement de ces interventions contraignantes, la plupart du temps, sur celles figurant dans le code de procédure pénale. Ce code est en effet celui qui fait l'objet de la vigilance juridique la plus importante – bien qu'il donne lieu, lui aussi, de temps à autre, à des déclarations d'inconstitutionnalité. Nous devons vraiment partager cette vigilance.
Notre appréciation diffère légèrement de celle du Gouvernement sur ces modalités d'encadrement. Néanmoins, nous sommes en réalité très près d'avoir la même approche.
Les deux nouvelles modalités de contrôle sur lesquelles je veux attirer votre attention sont le développement de l'accès aux données numériques, dans des conditions beaucoup plus intrusives qu'auparavant – développement nécessaire pour l'autre fonction essentielle de la douane qu'est la lutte contre les mouvements de fonds illicites et le blanchiment – et l'exploitation des vérifications des plaques d'immatriculation, outil de renseignement de sérieuse qualité pour repérer les mouvements de transport de stupéfiants de grande ampleur.
Ce dernier point constituant une opération de surveillance généralisée, il suppose également un encadrement précis. À la suite du Gouvernement, nous avons choisi d'en faire une expérimentation sur une durée de trois ans, qui paraît suffisamment représentative. Il y a donc lieu d'affiner les conditions d'encadrement et d'évaluation de cette expérimentation.
Je souhaite insister par ailleurs sur une autre composante du projet de loi, à savoir l'habilitation demandée au Parlement – et que je soutiens fortement – pour recodifier le code des douanes. Sa structure ne correspond en effet pas du tout à celle, beaucoup plus accessible, que nous avons adoptée pour les codes de la dernière génération. À la lumière du principe d'intelligibilité et d'accessibilité du droit mis en avant par le Conseil constitutionnel, le code des douanes ne passe pas l'examen pour un bon nombre de ses dispositions.
Le Gouvernement nous a proposé, déjà, de réécrire dans son intégralité l'article 60 de ce code, relatif aux visites douanières. Nous serons amenés, dans le cadre de la recodification, à revoir complètement la structure du code. Ce sera un travail considérable, indispensable pour que le droit soit effectivement accessible à tous.
Le texte, tel que nous le proposons au Sénat, tient compte pleinement des charges opérationnelles de la douane. Nous partageons l'hommage rendu par le ministre à ses personnels, reconnus pour leur engagement, leur fiabilité et leur volonté de lutter efficacement contre les délits.