Intervention de Yves Pozzo di Borgo

Réunion du 14 octobre 2009 à 14h30
Victimes des essais nucléaires français — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Yves Pozzo di BorgoYves Pozzo di Borgo :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui un projet de loi portant sur un sujet complexe, qui mêle santé, science et défense. Il doit permettre de réparer les erreurs d’hier et de prévoir les évolutions qui pourraient survenir demain.

Ce texte est extrêmement délicat car il évoque tant la construction de la puissance française et le progrès technique que des drames humains.

Il est également très important : important pour la France, treize années après son dernier essai nucléaire, car notre pays s’honore en reconnaissant sa responsabilité dans les souffrances que supportent aujourd’hui ceux qui l’ont servie hier ; important aussi à l’égard des autres puissances nucléaires qui se sont déjà dotées d’un dispositif d’indemnisation efficace ; important, enfin, pour les victimes.

Ce projet de loi acte la reconnaissance des conséquences sanitaires des essais, après des années d’opacité et de tabou – elles s’expliquent par la culture du silence de « la grande muette » et, il ne faut pas l’oublier, par la Guerre froide -, mais aussi la reconnaissance à l’égard de ceux qui ont contribué à assurer la sécurité du pays. La France leur doit une juste réparation et une gratitude légitime. L’insertion par l’Assemblée nationale du mot « reconnaissance » trouve ici tout son sens.

Ce texte a donc une portée symbolique et constitue une avancée concrète. Il propose une réponse aux difficultés que rencontrent les victimes pour faire reconnaître leurs droits.

Comme l’ont souligné M. le ministre et M. le rapporteur, le système actuel de prise en charge des personnes souffrant d’une maladie radio-induite est trop complexe et trop long. Mais, plus grave encore, il laisse peu de chances aux victimes de voir leurs demandes aboutir.

À cet égard, on sait qu’il existe une différence de traitement entre les militaires et le personnel civil. Il faut mettre un terme à cette iniquité, et je sais que vous y êtes très attaché, monsieur le ministre.

Aujourd’hui, demander une pension sur la base de la participation aux essais, c’est s’engager dans une démarche longue et difficile. En l’absence de présomption, même partielle, d’un lien de causalité, les victimes ne parviennent pas à obtenir réparation. Comme elles ne peuvent pas établir un lien de causalité inattaquable entre leur maladie et l’exposition à des rayonnements ionisants, les personnes sont déboutées de la plupart de leurs demandes.

Il est insupportable que, à ce jour, vingt et une pensions seulement soient versées, alors qu’il y a eu trois cent cinquante-cinq demandes de pensions militaires d’invalidité au titre de maladies liées aux essais nucléaires. Actuellement, cent trente-quatre demandeurs ont introduit des recours contentieux, ce qui peut être épuisant et douloureux, en particulier pour des personnes parfois très gravement malades.

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