Monsieur le président, madame la ministre, permettez-moi d’exposer ici les répercussions qu’aura la réforme du surloyer sur la situation des habitants de mon département, la Seine-Saint-Denis.
La suppression, cette nuit, de l’article 17, dont je me félicite, ne saurait en effet cacher le reste de votre texte, notamment cet article 20, qui consiste à abaisser le plafond des ressources permettant de désigner les locataires assujettis au surloyer. Des milliers de locataires de logements sociaux seront ainsi concernés par la réforme du surloyer dans ce département.
Actuellement, et jusqu’au mois de décembre 2008, sont contraints de payer ce surloyer les locataires du parc public dont les ressources excèdent de 60% le barème établi par les organismes d’habitations à loyer modéré.
Si votre réforme était adoptée, madame la ministre, ce plafond serait fixé dès le 1er janvier 2009 à seulement 20 % de ce même barème. Le surloyer concernerait par conséquent davantage de foyers, parmi lesquels des locataires aux revenus plus modestes que ceux qui étaient concernés jusqu’ici.
Je ne vais prendre qu’un seul exemple. En Seine-Saint-Denis, dans le parc de l’office départemental HLM, le surloyer concerne actuellement 42 locataires. Si votre texte était adopté, madame la ministre, ce seraient environ 500 personnes, soit onze fois plus, qui devraient payer le surloyer à partir du début de l’année prochaine.
La réforme du surloyer aurait par ailleurs pour conséquence d’inciter les foyers aux revenus moyens à quitter le logement social. Vous favoriseriez ainsi la progression de la ghettoïsation des quartiers populaires ! Au lieu de répondre à l’ambition d’un logement de qualité pour tous, y compris dans le parc public, vous institutionnaliseriez une périlleuse division entre, d’une part, un logement social uniquement dédié aux personnes les plus en difficulté et, d’autre part, un logement privé réservé de fait aux classes intermédiaires et aisées.
Il en résulterait une accentuation de l’exclusion, ce qui constituerait une terrible régression et une inacceptable relégation des personnes les plus fragilisées.
Par le biais de cette mesure sur le surloyer, le Gouvernement exhorte également les foyers percevant des revenus moyens à se loger dans le privé. Pourtant, ces classes intermédiaires jugées « trop aisées » pour vivre dans un logement social ne le sont souvent pas assez pour assumer un loyer dans le privé ou une lourde mensualité dans le cadre d’un achat immobilier.
Cette incitation à l’accession « à tout prix » au logement privé n’est pas sans rappeler la spirale générée par ce type d’orientation dans d’autres pays du monde, notamment aux États-Unis, où la politique du logement a mené tout droit à la crise des subprimes, responsable aujourd’hui d’un grave crash financier mondial.
Comme si cette crise financière considérable n’était pas déjà une source suffisante d’inquiétude pour les Français, après des années de stagnation des salaires, des mois de baisse du pouvoir d’achat, d’augmentation des prix des denrées alimentaires et de l’énergie, vous vous attaquez à un autre élément essentiel de la vie quotidienne, le logement.
Voilà donc la réponse du Président et du Gouvernement aux difficultés quotidiennes, à l’heure où, selon un récent sondage, plus de la moitié des Français redoutent de devenir SDF.
Selon nous, la vraie réponse au problème du logement ne se trouve pas dans la division des locataires français mais bien dans la construction de logements sociaux supplémentaires, car c’est un fait établi : notre pays souffre cruellement de cette pénurie.