Je suis d’autant plus défavorable à cet amendement, monsieur le sénateur, que le contrat d’emploi pénitentiaire qui a été voté il y a assez peu de temps, comme cela vient d’être rappelé, réforme considérablement, et en profondeur – je pèse mes mots –, le statut de détenu travailleur.
En premier lieu, les détenus bénéficient depuis lors d’un véritable contrat de travail de droit public, ce qui n’existait pas autrefois. Ils ne sont plus payés à la pièce : la pratique a totalement disparu. La France fixe des minimums de rémunération qui sont parmi les plus élevés : 5, 15 euros de l’heure contre 1, 50 euro en Allemagne, 1, 73 euro en Belgique et 2, 80 euros aux Pays-Bas.
Avec ce salaire, le détenu est tenu de rembourser ses victimes. Ce contrat d’emploi pénitentiaire est donc au moins triplement vertueux. D’abord, il y a sûrement à la clé un travail ou une formation, ce qui va dans le bon sens pour une réinsertion et pour l’absence de récidive. Ensuite, c’est intéressant pour les patrons : il y a un intérêt économique, mais également un engagement citoyen qui est fort. C’est enfin intéressant pour les victimes.
En second lieu, le détenu a un certain nombre de droits sociaux : assurance chômage, assurance vieillesse, ouverture de droits en matière d’accident de travail, etc. Tout cela n’existait pas autrefois. Il s’agit donc là d’améliorations.
Je pense que le travail est l’un des leviers qui permettent de lutter sérieusement contre la récidive.
Le sens de l’effort n’est pas un sens interdit, ni en prison ni ailleurs. Avec ce contrat d’emploi pénitentiaire, nous ferons venir de plus en plus de patrons dans les établissements pénitentiaires pour fournir du travail.
Pour vous donner des chiffres, dans les années 2000, 50 % des détenus travaillaient. Quand je suis arrivée à la Chancellerie, tel était le cas pour seulement 20 % d’entre eux, soit 30 points de moins. Aujourd’hui, plus de 30 % des détenus travaillent, alors même que la population carcérale a augmenté au cours des dernières années. Le nombre de détenus travaillant a donc nettement augmenté, ce qui me paraît aller dans le bon sens. En effet, quelqu’un qui travaille dispose d’un petit pécule et se forme. Par ailleurs, il est souvent embauché par l’entreprise qui l’employait en tant que détenu.
Il faut tout faire pour éviter les sorties sèches ; c’est le gage d’un moins grand nombre de récidives. Sans doute pouvons-nous tous être d’accord sur ce point.