Pourquoi sommes-nous tant attachés à ce texte ? Parce qu’il permet d’abattre quelques mythes et de rappeler certaines réalités, sur lesquelles je souhaiterais maintenant revenir.
Premier mythe, nous entendrons encore ce soir, je n’en doute pas, de la part de ceux qui ont fait si peu pour accompagner les transformations de l’audiovisuel public, que nous serions opposés au service public et que notre projet aurait pour objectif d’en réduire les moyens.
La réalité est très différente, comme le démontre la proposition de loi. Nous sommes, au contraire, très attachés à l’existence d’un audiovisuel public fort, indépendant et s’adressant à tous les Français.
S’il nous arrive de formuler des regrets, et même quelques critiques, c’est que nous considérons, comme le Président de la République en son temps, que l’audiovisuel public n’est pas exemplaire, ou tout du moins qu’il conserve des marges de progression pour développer des programmes plus originaux, pour veiller à l’impartialité de son information et pour s’astreindre à une gestion économe des deniers publics.
Nous sommes également opposés, c’est un fait, à la politique du « quoi qu’il en coûte », y compris en matière d’audiovisuel public.
Pour autant, nous ne sommes pas hostiles à la préservation des moyens de l’audiovisuel public, à condition, cependant, que ceux-ci soient utilisés au mieux. Cela signifie que l’audiovisuel public doit continuer à se réformer, en allant plus loin sur les évolutions de structures et en renouvelant profondément son offre de programmes.
L’objectif de cette proposition de loi est de permettre l’émergence de trois ou quatre grands groupes français des médias, qui pourront tenir leur rang en Europe. L’audiovisuel public doit faire partie de ces champions.
Deuxième mythe, les mutualisations entre les sociétés de l’audiovisuel public donneraient satisfaction et il ne faudrait surtout rien changer.
Ce deuxième mythe a peu de partisans parmi ceux qui connaissent la réalité des coopérations menées par les sociétés de l’audiovisuel public. Lors de son audition, le président de l’Arcom, Roch-Olivier Maistre, a ainsi déploré l’absence de coopérations éditoriales entre les équipes de France 3 et celles de France Bleu dans les matinales communes. Il a aussi regretté la persistance de programmes distincts pour la radio et la télévision s’agissant de Franceinfo.
J’ajouterai, pour ma part, qu’il est de plus en plus incompréhensible de maintenir autant de rédactions distinctes au sein de Radio France et de France Médias Monde. De même, on peine à comprendre pourquoi, à une exception près, les équipes de France 3 et de France Bleu en région n’ont toujours pas été regroupées dans des locaux communs.
Les mutualisations ne peuvent continuer à avancer à ce rythme. Or, pour changer de tempo, rien de tel que de nommer un chef d’orchestre.
J’en viens donc au troisième mythe : le regroupement de l’audiovisuel public serait inutile, coûteux et chronophage.
Ce troisième mythe est évidemment le plus facile à démonter. L’éparpillement de l’audiovisuel français est un fait unique en Europe. Il montre chaque jour ses limites. Pourtant, certains n’ont de cesse de trouver cela formidable. Il est vrai que cette structuration n’a pas que des défauts, puisqu’elle permet la multiplication des présidences, des directeurs, des rédactions, des correspondants à l’étranger, des sites internet, des directions régionales et locales. Abondance de biens ne nuit pas, dit le proverbe…
Toutefois, qui peut croire, à un moment où on leur demande autant d’efforts, que les Français vont accepter éternellement un tel laisser-aller ?
Les appels à la privatisation se multiplient, il n’est plus possible de le nier. Pourtant, aucun compte n’est demandé à France Télévisions pour l’échec de Salto, qui a coûté au moins 80 millions d’euros, ni pour l’audience dérisoire de la chaîne Franceinfo, qui coûte également des dizaines de millions d’euros chaque année.
Nous reviendrons sur le prétendu coût de la holding. J’observe cependant que les partisans du statu quo surestiment ce coût, sans jamais le chiffrer, tandis qu’ils oublient toujours d’évoquer les économies considérables qu’elle permettrait de réaliser.