Cet article 22 modifie profondément la structure de l’Agence pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, structure qui, ne l’oublions pas, a été créée par la loi pour l’égalité des chances.
Mais ce n’est pas une création ex nihilo, puisque l’Agence reprenait pour une grande part les missions jusqu’alors accomplies par le Fonds d’action sociale pour les travailleurs immigrés et leur famille, ou FAS, mais aussi par la Délégation interministérielle à la ville.
Transformée en guichet unique, l’Agence rassemble les financements liés à l’intégration : d’une part, ceux de l’ex-FASILD – Fonds d’action et de soutien pour l’intégration et la lutte contre les discriminations –, ainsi que ceux de l’Agence nationale d’accueil des étrangers et des migrations, l’ANAEM, et, d’autre part, ce qui reste de la politique de la ville confiée à l’État, à savoir les crédits du ministère de la ville, exception faite de ceux qui sont destinés à la rénovation urbaine, laquelle se voit confiée à l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.
Ainsi, pour ce qui concerne les quartiers défavorisés, la rénovation est désormais du ressort de l’ANRU, tandis que le social relève de l’Acsé, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances. Quant à la prévention de la délinquance, pourtant inscrite dans le décret du 28 octobre 1988, qui la confie à la DIV, la délégation interministérielle à la ville, elle ressortit au ministère de l’intérieur.
II semble d’ailleurs que celui-ci doive également exercer sa tutelle sur l’Acsé. L’article 22 du projet de loi précise, en effet, que le représentant du département y est le délégué de l’agence, lequel « signe les conventions passées pour son compte ». Nous assisterons donc à une prise en main des décisions, structures et instances de l’Agence par le ministère de l’intérieur.
Dès l’origine, l’agence se trouvait confinée sur un créneau de financement de plus en plus réduit, une situation qui ne s’est d’ailleurs pas améliorée, puisque la plupart des lignes budgétaires ouvertes à son profit ont eu tendance à subir les effets de la régulation budgétaire. Les craintes que nous avions exprimées en 2006, lors de la discussion du projet de loi pour l’égalité des chances, sont donc aujourd’hui pleinement confirmées.
Arguant de la révision générale des politiques publiques, l’Acsé se trouve privée, dans le présent texte, de toute fonction quant à la question de l’intégration des populations étrangères, qui se retrouvent sous la tutelle du ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. En clair – car il faut être très précis sur ce point –, les fonds de l’ancien FASILD et les dispositifs qu’il soutenait passent sous la coupe d’un ministère dont la raison sociale est de mener une course aux reconduites à la frontière ! Telle est la démonstration de l’amalgame que nous avions également dénoncé lors de l’examen du projet de loi pour l’égalité des chances.
Pour ce qui concerne les moyens de cette agence, force est, là encore, de constater que les craintes que nous avions se confirment. Que l’on ne s’y trompe pas : appeler au concours des collectivités locales pour financer les actions de cette agence n’est rien d’autre que reconnaître explicitement que les moyens budgétaires qui lui seront dévolus seront sans commune mesure avec les besoins. La disparition de tout un tissu associatif autonome, reconnu comme nécessaire pour lutter contre les inégalités, favoriser le « vivre ensemble », est de fait prévisible.
Nous ne pouvons évidemment que nous opposer au contenu de l’article 22 du présent texte, qui ne pose aucunement un jalon dans la lutte contre l’exclusion. Il s’agit bel et bien d’un article destiné à permettre au budget social de la nation d’être ajusté à la baisse !