Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, cette proposition de loi que nous adopterons aujourd'hui est très solennelle et émouvante. Elle prend place dans un contexte particulier, celui des lois relatives à des restitutions.
Le Gouvernement a commencé par présenter une série de textes précis sur un tel sujet. À présent, nous nous engageons dans une phase consacrée à des lois-cadres. La première était la loi-cadre relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites de 1933 à 1945. La deuxième est celle que vous nous présentez actuellement, relative à la restitution des restes humains appartenant aux collections publiques. La dernière portera le débat sur certaines œuvres provenant des anciennes colonies.
Cette nouvelle phase permet de rompre en trois temps avec le fait que le Parlement soit amené à chaque fois à se prononcer sur le caractère inaliénable ou non de chaque œuvre. Je pense que la démarche ainsi entamée est la bonne.
Ce texte est particulièrement émouvant parce qu'il nous rappelle des heures sombres de l'Histoire, notamment la façon dont nous avons traité les restes humains et les conditions dans lesquelles ils ont été introduits sur notre territoire. Il a été souligné une forme de racisme : on peut le dire.
Le cas de la « Vénus hottentote » a été cité. Je me souviens d'ailleurs de cette scène absolument saisissante du film d'Abdellatif Kechiche, Vénus noire, dans laquelle Saartjie Baartman est examinée par Georges Cuvier. Évidemment, la caméra de Kechiche, dans son naturalisme et dans son réalisme crus, n'épargne rien de la violence de cette scène. Il est vrai que cette histoire a changé le rapport que nous avons à la restitution des restes humains. C'est ce que l'ethnologue Gould a qualifié de « mal-mesure de l'homme », qui a marqué certaines périodes de notre histoire. C'est l'occasion d'évoquer ce passé, comme vous l'indiquiez également, madame la ministre.
C'est aussi pour nous l'occasion de nous souvenir que le code civil dispose que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort », de nous souvenir enfin que, depuis 3, 3 millions d'années et le paléolithique inférieur, homo sapiens prend soin de ses défunts. C'est donc quelque chose qui est vraiment au cœur de notre commune humanité et même de la définition de ce qu'est l'humanité : au cours de l'évolution, l'espèce humaine a pris soin de ses restes, les enterrant avec des rites funéraires très différents d'une région à l'autre, ce qui fait la beauté et la grandeur des tombes que l'on étudie.
Ce texte est le bienvenu : il est clair, il est transparent et il est extrêmement précis. Il est scientifique et raisonné au travers de l'idée de solliciter l'avis d'un comité scientifique, lorsqu'il y a un doute, pour pouvoir vraiment se prononcer sur la qualification des restes humains. Madame la rapporteure, je ne peux donc que vous féliciter pour ce travail que vous avez réalisé de façon très rigoureuse, en lien avec le ministère de la culture. C'est pourquoi notre groupe votera ce texte.