Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet qui nous occupe est éminemment sensible, dans la mesure où il touche à des libertés aussi essentielles que celles de se déplacer ou de faire grève.
En tant que fonctionnaires, les contrôleurs aériens ne peuvent participer à une grève que s'ils sont couverts par un préavis de cinq jours francs. À la différence des travailleurs du transport terrestre régulier de voyageurs, par exemple les salariés de la SNCF et de la RATP – depuis la loi du 21 août 2007 – et des autres travailleurs du secteur aérien privé – depuis la loi du 19 mars 2012 –, un contrôleur aérien n'est pas contraint, s'il veut participer à l'action sociale collective que constitue une grève, d'en informer personnellement ses supérieurs hiérarchiques, dans une sorte d'individualisation limitante d'un droit par essence collectif.
En revanche, les contrôleurs aériens doivent assurer un service minimum depuis la loi de 1984 et son décret d'application avec un taux de réquisition variable. Il leur est ainsi imposé d'assurer une capacité pour les survols égale à la moitié de celle normalement prévue pour respecter nos engagements internationaux, ce qui est nécessaire à la défense et aux besoins vitaux de notre pays.
La DGAC ne pouvant pas connaître le nombre exact de grévistes, elle est conduite à annuler préventivement des vols, sans savoir s'ils auraient pu être assurés, ou à procéder à des annulations de dernière minute. Voilà ce à quoi veulent remédier les auteurs de cette proposition de loi, qui est, d'une certaine façon – disons-le ! –, une réaction aux perturbations qu'a provoquées en février et mars derniers l'exceptionnelle et puissante mobilisation populaire contre la retraite à 64 ans.
En effet, nous avons connu un 11 février sans service minimum, puis un mois et demi avec un service minimum quasi permanent, mais souvent disproportionné, aux dépens des voyageurs.
Pour autant – disons-le aussi ! –, l'essentiel des retards et des annulations ne résulte pas de l'exercice de ce droit de grève. Nos quatre mille contrôleurs aériens sont sous pression, la faute à des effectifs insuffisants et à des conditions techniques et matérielles perfectibles. Monsieur le ministre, vous l'avez dit, il s'agit d'un service public essentiel et nous devons le renforcer.
Au service minimum, cette proposition de loi adjoint un affaiblissement important du droit de grève : la déclaration préalable. Or ce qui ne fonctionne pas bien actuellement, c'est l'application de ce service minimum. Ce dernier est régi par un décret si vieux et obsolète qu'il s'applique, par exemple, à l'aéroport de Deauville, mais pas à celui de Montpellier... Les modalités de sa mise en œuvre sont lourdes, difficiles et inadaptées.
C'est par là qu'il convient de commencer ! Monsieur le ministre, un tiens vaut mieux que deux tu l'auras : que le Gouvernement travaille sur l'efficacité de ce service minimum et qu'il révise ce décret, voilà le préalable nécessaire ! J'ai entendu votre engagement, la balle est désormais dans le camp du pouvoir réglementaire – à vous de jouer !
Cette proposition de loi est, d'une certaine façon, inopportune, en cela qu'elle créerait un déséquilibre. Or c'est au contraire d'équilibre que nous avons besoin, et on ne le trouvera que par le dialogue social.
Voilà pourquoi le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre ce texte.