Intervention de Jean-Pierre Decool

Réunion du 13 juin 2023 à 14h30
Restitution des restes humains appartenant aux collections publiques — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certains restes humains ont intégré par le passé de manière suspecte, voire illégitime, nos collections publiques. Parfois collectés en tant que trophées de guerre ou de conquête, ils témoignent d’un temps révolu et de pratiques anciennes qu’il ne nous appartient pas de juger.

Notre rôle, en revanche, est de réparer par la loi les éventuelles injustices. Nous nous sommes récemment félicités de l’adoption du projet de loi facilitant les restitutions des biens spoliés aux familles juives pendant la Seconde Guerre mondiale. Son examen a été l’occasion d’échanges et de témoignages d’une grande émotion en ces murs.

De la même manière, notre groupe se félicite de l’adoption à l’unanimité de ce texte en commission, la semaine dernière. Il s’agit d’une loi de dignité, essentielle, qui nécessitait un espace parlementaire dédié. En effet, les restes humains sont loin d’être des biens culturels comme les autres et renvoient à des événements historiques et à des situations très spécifiques. Il était important de rendre hommage aux familles et aux États concernés par certains abus en leur consacrant une loi.

J’en profite pour saluer l’engagement de longue date de Catherine Morin-Desailly, accompagnée de Max Brisson et de Pierre Ouzoulias. Les auteurs de la proposition de loi permettent une grande avancée et participent à la politique mémorielle de la France.

L’accueil unanime dont cette loi a bénéficié est tout à leur honneur. Il récompense un travail de longue haleine, parfois rendu difficile par des vents contraires…

Cela a été indiqué lors du vote, madame la ministre : il s’agit d’un texte à dimension presque philosophique. Il touche à notre rapport à la mort et à notre manière de rendre hommage aux défunts. Cette proposition de loi permettra de simplifier et d’accélérer les procédures. En effet, comme cela a été rappelé, la nécessité de recueillir l’autorisation du Parlement avant toute restitution ralentit considérablement le processus. Cela risque de décourager les initiatives, ajoutant de la difficulté à une situation déjà éminemment complexe.

Par ailleurs, le principe d’inaliénabilité protège nos collections. Des garde-fous sont nécessaires pour empêcher toute restitution irréfléchie et précipitée de restes humains intégrés aux collections publiques ; ce texte fort sécurise les procédures afin d’éviter toute dérive. L’un des amendements de notre rapporteure, adopté en commission, tend à encadrer encore davantage l’instruction des demandes.

Comme nous l’avions souligné lors de l’examen de la loi du 21 février 2022 relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites, les auteurs de ce texte nous invitent également à repenser le rôle des expositions et l’organisation muséale. Nos collections publiques sortiront amoindries des départs de restes humains rendus aux États demandeurs. Ces demandes pourraient s’accélérer dans les années à venir ; il deviendra alors essentiel de trouver de nouvelles manières de faire vivre ces œuvres au sein de nos musées et dans nos territoires. Il s’agira, par exemple, de conserver des espaces dédiés au sein des salles d’exposition en s’appuyant sur des photographies, sur des animations ou sur des œuvres numériques. Des réflexions passionnantes attendent les équipes muséales.

Pour conclure, le groupe Les Indépendants – République et Territoires salue le vote favorable de ce texte et s’y associe.

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