Intervention de Pascal Allizard

Réunion du 20 juin 2023 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 29 et 30 juin 2023

Photo de Pascal AllizardPascal Allizard :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la semaine dernière, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le projet de loi de programmation militaire pour la période 2024-2030. Cette LPM doit être inscrite dans le cadre global de la réaction déterminée et unie des pays européens face au retour de la guerre sur notre continent.

Dans un contexte inédit de « réveil géopolitique de l’Europe », la programmation des dépenses militaires de la France est un aspect essentiel de notre crédibilité comme acteur stratégique sur le continent. Le projet de LPM que nous avons examiné tend à rappeler que la France constitue « un acteur clé » de la défense de l’Europe et qu’elle doit y assumer des « responsabilités particulières ».

D’un point de vue capacitaire, la constitution d’une base industrielle et technologique de défense (BITD) européenne réactive, robuste et souveraine est un objectif que nous portons de longue date. Il faut espérer que les menaces grandissantes qui pèsent sur notre sécurité commune provoquent une prise de conscience collective et rapide.

Seule une volonté politique partagée et clairement affirmée nous permettra de mener à bien nos grands projets capacitaires à développer à l’échelle européenne. Je pense en particulier au projet de système de combat aérien du futur (Scaf), que nous élaborons actuellement avec l’Allemagne et l’Espagne. Ces travaux de développement menés en commun pour élaborer les technologies militaires qui équiperont nos armées demain sont essentiels.

De plus, madame la secrétaire d’État, nous devons nous organiser dès à présent pour répondre dans l’urgence au défi humanitaire, diplomatique, opérationnel, mais aussi logistique, que représente notre soutien collectif à l’effort de guerre ukrainien. L’Union européenne et ses membres ont démontré depuis le 24 février 2022 leur capacité à soutenir l’Ukraine dans la durée et sans que l’unité européenne soit remise en cause, ce qui est extrêmement important.

Cette unité fait notre force, et j’insiste sur l’importance de ne pas céder à la tentation d’une division artificielle, dont nos compétiteurs et nos adversaires seraient évidemment les premiers bénéficiaires.

À cet égard, madame la secrétaire d’État, peut-être nous donnerez-vous des détails sur l’acte de soutien à la production de munitions (Asap pour Act in Support of Ammunition Production), présenté le 3 mai dernier par le commissaire français Thierry Breton. Pouvez-vous nous indiquer quelle est la position française sur ce projet, qui vise un financement de 500 millions d’euros d’ici au mois de juin 2025 en faveur de l’accélération de la cadence de production de munitions en Europe ?

Si nous souhaitons aider l’Ukraine, nous ne désirons pas, en revanche, que la Commission européenne centralise les informations des entreprises de la BITD pour les utiliser à sa guise. Nous faisons face ici à des sujets qui touchent au cœur de la souveraineté nationale.

Par ailleurs, le commissaire Thierry Breton a insisté sur sa volonté d’une adoption rapide de ce programme de financement d’urgence. Alors que le Parlement européen a voté en faveur de ce plan le 1er juin dernier, nous vous demandons, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement défende clairement nos positions sur ce point.

Notre commission soutient le renforcement de la défense européenne, mais selon des modalités pragmatiques qui n’empiètent pas sur notre souveraineté dans ce domaine éminemment sensible. En matière de défense, efficacité opérationnelle est synonyme de subsidiarité.

Enfin, j’évoquerai brièvement un sujet qui concerne notre politique de commerce extérieur.

En août 2019, le Président de la République a fait état de son opposition à la ratification du traité de libre-échange entre l’Union européenne et Mercosur au regard du risque de concurrence déloyale qu’il pourrait faire peser sur certains de nos producteurs.

À la fin de l’année 2021, le Président a réaffirmé son opposition au traité dans son état actuel au motif qu’il est incompatible avec notre agenda climatique et de biodiversité. La semaine dernière, l’Assemblée nationale a adopté une résolution invitant le Gouvernement à réitérer son opposition à l’adoption du traité et à son application partielle.

Pourtant, le voyage récent de la présidente Ursula von der Leyen en Amérique du Sud aussi bien que les perspectives dessinées pour la présidence espagnole du Conseil de l’Union européenne au semestre prochain ont renforcé l’attention portée à ce traité et à l’hypothèse de sa ratification par l’Union européenne.

Dans ce contexte, madame la secrétaire d’État, ma question est la suivante : quelle position la France défendra-t-elle au Conseil européen sur ce dossier ? Quelles sont vos priorités pour mettre en œuvre une politique commerciale européenne qui assure la défense de nos producteurs en cohérence avec nos objectifs climatiques ?

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