Monsieur le ministre, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les menaces qui pèsent sur les centres de soins pour les victimes de torture depuis que la Commission européenne a annoncé le retrait progressif, à partir de 2010, de son soutien financier.
Vous le savez, les personnes concernées sont des demandeurs d’asile ou des réfugiés originaires de pays d’Afrique, d’Asie ou d’Europe de l’Est.
Selon des estimations concordantes, 20 % des demandeurs d’asile et des réfugiés présents sur le territoire de l’Union européenne souffrent de graves traumatismes liés à la torture, aux mauvais traitements, à la guerre et à la violence subis dans leur pays d’origine.
Alors que plusieurs textes européens reconnaissent la nécessité d’une prise en charge spécifique et inconditionnelle des victimes de la torture, qui sont particulièrement vulnérables, lourdement traumatisées et en grande détresse psychologique, très peu de gouvernements nationaux assument pleinement leurs responsabilités en la matière. Les centres de soins dépendent donc fortement des financements de l’Union européenne et du fonds de contributions volontaires des Nations unies pour les victimes de torture.
Si l’Union européenne soutenait jusqu’à présent la prise en charge des victimes de torture indépendamment de leur situation géographique, via le financement de centres de soins, elle a estimé, dans son document de stratégie 2007-2010, que les États membres devaient dorénavant s’engager financièrement et prendre le relais de l’Europe en la matière. Les résultats de cette annonce ne se sont pas fait attendre : en 2008, une vingtaine de centres, en Europe, se sont vu refuser par la Commission des subventions pourtant nécessaires au maintien ou à l’extension de leurs activités, ce qui met en question la poursuite des soins qu’ils dispensent aux victimes de torture et les conduit à réduire drastiquement leurs activités.
Onze de ces centres se trouvent donc dans une situation financière désormais très critique : il s’agit de ceux qui sont situés en Albanie, en Bosnie, en Bulgarie, en Irlande, au Kosovo, en Macédoine, en Moldavie, en Roumanie, en Belgique, en Allemagne et en Italie. Le centre d’Athènes, quant à lui – l’un des plus anciens en Europe et le plus sollicité en raison de sa situation géographique –, a fermé à la fin de l’année 2008.
L’offre de soins aux victimes de torture, qui était déjà en deçà des besoins, est donc aujourd’hui réellement menacée dans plusieurs pays européens.
Les centres de soins situés en France connaissent eux aussi de grandes difficultés ; celles-ci ne manqueront pas de s’aggraver en 2010, lorsque prendront fin les financements européens. On sait pourtant que, sans compensation financière nationale, chaque fermeture de centre a pour conséquence l’abandon de l’aide apportée à des centaines de personnes.
Parce que la décision de l’Union européenne de supprimer à compter de 2010 son soutien financier ne doit pas porter préjudice aux victimes de la torture, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir me préciser les mesures concrètes que vous envisagez afin de prendre dans les meilleures conditions le relais de l’Europe et de garantir ainsi non seulement le financement durable des centres de soins pour les victimes de torture situés en France, mais aussi l’augmentation de leur capacité d’accueil, actuellement encore trop faible par rapport aux besoins.