Sur l'ensemble de ces amendements, le Gouvernement émet un avis défavorable, non pas sur le fond, mais sur la forme. En outre, si ces amendements étaient adoptés, le texte pourrait ne pas être opérationnel, notamment au regard du droit européen.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte tel qu'il résulte des travaux de la commission contient bien des dispositions relatives au temps de travail. Celles-ci figuraient d'ailleurs déjà dans la version issue des travaux de l'Assemblée nationale ; elles ont été maintenues. Je les rappelle dans la rédaction issue des travaux de votre commission : « L'organisation du travail applicable aux salariés employés sur les navires mentionnés à l'article L. 5591-1 est fondée sur une durée de repos à terre au moins équivalente à la durée de leur embarquement. »
En revanche, la commission des affaires sociales du Sénat a souverainement décidé de supprimer les motifs justifiant une équivalence entre la durée d'embarquement et le temps de repos, considérant qu'il n'était pas utile de les indiquer. Pour notre part, nous considérions qu'il fallait justifier cette équivalence, notamment pour des raisons de sécurité de la navigation.
L'essentiel pour moi, c'est que ce dispositif soit inscrit dans la loi – nous sommes le premier pays en Europe à agir ainsi.
Pour lutter contre le dumping social sur le transmanche, trois critères ont été fixés dans le texte.
Premièrement, le salaire minimum doit être équivalent entre le Royaume-Uni, les îles anglo-normandes et la France.
Deuxièmement, une durée égale entre temps en mer et temps à terre est garantie. C'est fondamental, car c'est sur cette variable que se joue le dumping social.
Troisièmement, le décret d'application apportera les précisions nécessaires qui ne figureront pas dans le texte. Elles seront soumises au Conseil supérieur de la marine marchande, qui regroupe syndicats et organisations patronales.
Ces trois éléments seront inscrits dans le dur de la loi, c'est une avancée considérable.
Monsieur Bacchi, imposer une nationalité de pavillon aux armateurs pour qu'ils puissent effectuer des liaisons maritimes est totalement contraire au droit européen. Si l'on peut imposer des conditions sociales et salariales – ce que nous faisons avec les différents dispositifs sur le salaire minimum et la durée égale entre temps à terre et temps en mer –, on ne peut en revanche imposer une nationalité, d'autant que certains pays peuvent avoir fixé des conditions sociales moins favorables. On ne peut donc pas prévoir que seuls les navires battant pavillon français peuvent assurer les liaisons sur le transmanche.
En revanche, vous avez raison, il faut un alignement des conditions de travail. C'est tout l'objet de la charte proposée aux armateurs du transport maritime transmanche, mais aussi de ce texte, qui met en œuvre ces différents dispositifs, notamment des clauses miroirs avec la loi britannique.
Mesdames Vogel, Apourceau-Poly et Brulin, sur les heures supplémentaires, qui trop embrasse mal étreint, comme disait ma grand-mère. §J'aimerais pouvoir vous suivre sur ce terrain, mais le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne est très clair : il ne revient pas aux États de procéder à de telles régulations. C'est pourquoi le Gouvernement demande le retrait des amendements concernés : ces propositions, nous le savons très bien, ne sont absolument pas conformes au droit européen.
Pour autant, il faut continuer à travailler sur les questions des heures supplémentaires et des indemnités de congés, notamment dans le cadre des chartes entre les différentes compagnies maritimes. Elles sont toutefois déconnectées des deux éléments que nous pouvons inscrire dans la loi : le salaire minimum et la durée égale entre temps en mer et temps à terre.