Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 17 février 2009 à 16h00
Application des articles 34-1 39 et 44 de la constitution — Article 13 priorité

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Tout est dit : la fixation de limites au droit d’amendement contredit l’autonomie des assemblées et porte un coup intolérable à notre droit sacré de parlementaires de déposer et défendre des amendements.

Finalement, le constituant a maintenu le renvoi à la loi organique et les limitations possibles du droit d’amendement qui lui sont attachés. Peu importe quelle forme prend aujourd’hui cette limitation, qu’elle porte plutôt sur le droit de défendre des amendements que sur celui de les déposer, qu’elle se manifeste par un crédit-temps ou par toute autre formule : avec cet article 13, le droit d’amendement devient une chimère !

Les conclusions du groupe de travail sur la réforme du règlement, dont nous sommes ici plusieurs à faire partie, peuvent laisser penser que nous ne sommes pas concernés par ce crédit-temps. Il s’agirait là, en réalité, d’une mesure disciplinaire à l’égard de députés avides de défendre, à tour de bras, des amendements sans réelle portée pour le débat. J’entends encore ces propos selon lesquels nous ferions beaucoup de bruit pour rien au sujet de cet article 13, puisque le règlement du Sénat pourra prévoir ce qu’il veut, dans la mesure où la loi organique le lui permet…

Mais je vous rappelle, mes chers collègues, que nous faisons la loi pour l’ensemble du Parlement. Alors, pourquoi cette loi organique ? Pour dire que, finalement, il n’y a pas de limite au droit d’amendement ? Certainement pas ! Pour dire qu’il peut, éventuellement, rencontrer des limites dans le cadre fixé par le règlement ? Évidemment, oui ! Et de cette éventualité découle un certain nombre de conséquences qui peuvent mener au musellement des parlementaires, condamnés à voir leurs amendements mis aux voix sans discussion.

Ce procédé est malsain puisqu’il impose une discipline interne, des arbitrages entre des amendements, bref, il oblige à faire un choix.

La première conséquence est simple : il n’y aura plus d’amendements de parlementaires, mais des amendements de groupes parlementaires, puisque c’est au sein de ces groupes que sera centralisée la gestion du crédit-temps.

Ensuite, je souhaite attirer votre attention sur la situation des parlementaires qui, bien que rattachés à un groupe, n’en demeurent pas moins autonomes pour le dépôt et la défense des amendements. Aujourd’hui, les sénateurs Verts jouissent dans ce domaine d’une liberté précieuse que vous voulez transformer en dépendance arithmétique malsaine ! Il faut le reconnaître, grâce au groupe socialiste et à notre mode de fonctionnement, nous avons toujours eu la possibilité de nous exprimer en discussion générale. Mais que se passera-t-il demain, avec votre nouveau dispositif, pour la défense des amendements ? Les sénateurs Verts, qui ne constituent pas un groupe mais sont seulement rattachés au groupe socialiste, seront-ils considérés comme des membres de ce groupe ou un temps spécifique leur sera-t-il accordé ?

Le dispositif que vous nous proposez de voter est une atteinte à notre droit absolu de nous opposer, de nous exprimer et de défendre nos idées dans cet hémicycle ! Ce dispositif est castrateur et vous comprendrez que nous ne puissions pas l’accepter. Au nom de notre droit, au nom de notre responsabilité de parlementaires, nous affirmons que ce système représente un danger, pour notre démocratie parlementaire et pour notre République tout entière ! C’est la raison pour laquelle nous ne pourrons pas voter cet article.

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