Intervention de Vincent Eblé

Réunion du 15 juin 2023 à 14h45
Mécénat culturel — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Vincent EbléVincent Eblé :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le secteur culturel est en difficulté depuis de nombreuses années, singulièrement depuis la crise sanitaire de la covid-19 et la crise économique qui l’a suivie.

L’inflation incite nombre de nos concitoyens à prioriser leurs dépenses, les sorties culturelles et les loisirs étant souvent les premières variables d’ajustement des familles pour réguler leur budget. Cela emporte des conséquences non négligeables sur le financement de la filière culturelle.

Si l’État, avec l’appui des collectivités territoriales, a pris sa part dans le soutien au monde de la culture pendant la période de la covid-19 en mettant en place des aides spécifiques, la situation tendue que nous traversons révèle que les milieux culturels ont encore besoin d’être confortés par l’action publique.

La filière doit affronter une reprise, à tout le moins incertaine et erratique, qui demeure timide et sujette à de nombreux questionnements. Nous avons donc besoin d’innover pour relancer le secteur.

La proposition de loi de notre collègue Sylvie Robert, dont je salue l’engagement actif et de longue date en faveur de la culture, est de nature à apporter un nouvel outil aux collectivités territoriales pour faciliter les investissements en la matière.

Nos collectivités sont devenues les principaux financeurs de la culture, une tendance en progression constante depuis dix ans : 70 % de l’investissement en faveur du secteur culturel, soit 9, 5 milliards d’euros, en provient. L’exercice partagé de la compétence culture avec l’État favorise une dynamique qui permet le développement de projets culturels à l’échelle locale.

Cependant, lorsque les conjonctures économiques deviennent défavorables, le risque de désengagement cumulatif est très fort. La création de nouveaux instruments au service des collectivités est alors essentielle pour trouver des ressources complémentaires au renforcement de l’action des politiques publiques culturelles. L’idée que porte cette proposition de loi – ouvrir le mécénat culturel aux sociétés publiques locales intervenant dans ce secteur – doit nous rapprocher de cet objectif.

Le droit positif, en l’état actuel, n’autorise le mécénat d’entreprise que si l’État est l’un des actionnaires des sociétés de capitaux bénéficiaires. Cela exclut de fait les sociétés publiques locales, qui sont détenues par les seules collectivités territoriales. Cette proposition de loi a donc pour ambition de rectifier cette inégalité d’action entre l’État et les collectivités locales, alors que ces dernières contribuent largement – ce n’est plus à démontrer – à la pérennité des actions en faveur de la culture.

En ouvrant le mécénat culturel aux SPL à vocation culturelle ou patrimoniale, nous envoyons un signal de confiance fort à l’ensemble des élus territoriaux, qui nous semblent être les mieux à même de construire des politiques culturelles de proximité répondant aux attentes de leurs concitoyens.

Avec les collègues de mon groupe, nous avons toujours à cœur que les collectivités disposent de moyens utiles à leur action et à leur engagement. C’est pourquoi nous soutenons avec force et conviction la proposition de loi de notre collègue Sylvie Robert.

Le travail transpartisan qui a permis l’élaboration initiale de ce texte en réunissant plusieurs cosignataires issus de divers groupes politiques montre bien que la préoccupation de trouver des solutions novatrices en faveur de la promotion culturelle est largement partagée au sein de notre Haute Assemblée.

Concrètement, le dispositif proposé fait converger le souhait des collectivités territoriales d’une plus grande souplesse dans leur action culturelle et la volonté d’engagement des entreprises au niveau local. Les études conduites en la matière démontrent que soutenir la vie culturelle pour participer à l’attractivité d’un territoire est la deuxième priorité d’engagement des entreprises dans le mécénat.

Avec l’adoption de cette proposition de loi, les dons des très petites et moyennes entreprises s’accorderont davantage avec l’offre culturelle et patrimoniale des territoires dans lesquels celles-ci sont implantées.

La rédaction rigoureuse du texte permet également de surmonter les obstacles à sa mise en œuvre : il n’affectera pas la composition des conseils d’administration des SPL et la tenue d’une comptabilité analytique permettra d’isoler les activités culturelles et patrimoniales et les dons afférents.

La question du coût pour nos finances publiques est également bien maîtrisée : environ 1, 7 million d’euros, soit moins de 1 % des 230 millions d’euros que représente le mécénat culturel chaque année. Ce montant reste très modéré au regard de la dynamique qu’il aidera à initier dans les territoires qui bénéficieront de ce nouvel outil.

Ce constat nous conduit à manifester une certaine colère envers l’avis défavorable du Gouvernement, monsieur le ministre, qui méconnaît une exigence élémentaire d’égalité de traitement entre l’État et les collectivités locales. Les électeurs sauront s’en souvenir lors des élections qui approchent…

Il nous semble par ailleurs important de souligner l’excellent travail réalisé par notre collègue Michel Canévet, rapporteur de cette proposition de loi, qui a su sécuriser le dispositif proposé pour éviter le risque de conflits d’intérêts.

Notre groupe votera donc en faveur de ce texte et souhaite son adoption par nos collègues de l’Assemblée nationale afin qu’il entre en vigueur dans les meilleurs délais.

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