Intervention de Michel Charasse

Réunion du 17 février 2009 à 22h20
Application des articles 34-1 39 et 44 de la constitution — Article 13 priorité suite

Photo de Michel CharasseMichel Charasse :

Monsieur le secrétaire d’État, l’article 13 me fait penser à une espèce de repentance d’une révision que personne, sur les points concernés en tout cas, n’avait vraiment réclamée et qui a abouti, vous l’avez largement démontré dans votre brillant exposé tout à l’heure, à priver l’exécutif de prérogatives aussi essentielles que l’ordre du jour prioritaire illimité ou l’usage de l’article 49, troisième alinéa, cette invention de notre ami Guy Mollet.

Nous avons supprimé en juillet dernier une partie des dispositions qui ont mis un terme à la faiblesse de la République et de l’État et à l’instabilité gouvernementale.

Il faut donc rattraper ce coup malencontreux. Faute de pouvoir le faire par la Constitution, texte suprême, on se rabat sur les règlements des assemblées, ces textes que le doyen Vedel, je crois, comparait aux « règlements de garnison » !

Cruel dilemme pour ceux qui, comme moi, sont très attachés à la République, à l’État et au régime parlementaire !

Peut-on revenir aux dispositions modifiées ou supprimées en juillet dernier ? Non, en tout cas pas dans le cadre de cette loi organique.

Veut-on revenir aux régimes précédents ? Sûrement pas !

Il faut donc trouver une autre formule, conforme à la Constitution. L’article 13 constitue-t-il « la » formule ? Peut-être ! En tout cas, c’en est une !

Je ne vais pas m’éterniser sur la question de savoir si le dispositif de l’article 13 remet vraiment en cause le droit d’amendement. Il n’interdit pas à tout député ou sénateur de déposer autant d’amendements qu’il veut : 10 000, 20 000, ou 50 000 ! Il y a simplement un temps global ; s’il est dépassé, les amendements seront mis aux voix sans débat, mais ils figureront au Journal officiel. L’article 13 n’empêche donc pas qu’ils soient imprimés, distribués, diffusés, examinés en commission, et soumis au vote de l’assemblée concernée.

Avec le système de l’article 13, on peut gagner un peu de temps ; il y aura simplement une absence de parole.

Monsieur le secrétaire d’État, comme ce dispositif ne sera pas, à mon avis, finalement très opérant, autant l’utiliser avec prudence, à titre exceptionnel, et sans chercher à humilier ou à brimer qui que ce soit. C’est l’esprit dans lequel je présente mon amendement. J’aurais évidemment pu proposer la suppression de l’article, mais, puisque nous sommes engagés dans sa discussion, autant essayer d’en améliorer la rédaction.

Tout d’abord, je crois qu’il faut être clair : le temps global imposé est un geste politique ; il faut donc que l’on sache d’où vient le « coup ». C’est pourquoi je propose d’ajouter « À la demande du Gouvernement ou sur décision de la conférence des présidents », c'est-à-dire à la demande de la majorité de l’assemblée concernée, étant entendu que la procédure du temps global n’est évidemment pas de droit.

Ensuite, cette procédure ne pourra être utilisée que si l’on ne peut pas faire autrement, c'est-à-dire uniquement pour faire respecter le temps global s’il y a un risque qu’il soit dépassé ou s’il l’est déjà.

En définitive, ce système ne devrait ni aller très loin ni compromettre les droits sacrés des parlementaires, tout au plus contrecarrer des droits qui ont pu, en raison de la faiblesse de l’institution parlementaire, prospérer dans un passé récent, comme le filibustering, même si, M. Mercier le faisait remarquer, le terme n’est pas approprié.

La rédaction différente que je propose tend à préciser que le temps global ne peut pas être utilisé à n’importe quelle condition. Le texte de la loi organique doit, à mon avis, donner une indication claire à ceux qui auront à rédiger le ou les règlements. Nous savons que, en l’espèce, cela concerne principalement le règlement de l'Assemblée nationale, compte tenu de la position prise par la commission des lois du Sénat.

Monsieur le secrétaire d’État, j’appelle à une application souple et intelligente du dispositif, marquée par la volonté de laisser la priorité au débat. Plus que les textes, la pratique sera vraiment essentielle sur ce sujet.

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