Intervention de Philippe Adnot

Réunion du 28 novembre 2008 à 9h45
Loi de finances pour 2009 — Recherche et enseignement supérieur

Photo de Philippe AdnotPhilippe Adnot, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à bien des égards, la mission « Recherche et enseignement supérieur », la MIRES, paraît privilégiée dans un contexte budgétaire très contraint

Ses crédits, qui s’élèvent à 24, 1 milliards d’euros en crédits de paiement, affichent une progression 3, 2 % par rapport à 2008.

Ses emplois échappent à la règle du non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux, les taux réels étant d’un pour huit dans l’enseignement supérieur et d’un pour douze pour la recherche.

La programmation des finances publiques montre une continuité de cet effort budgétaire jusqu’en 2011.

On peut y voir la valeur d’investissement dans l’avenir des dépenses engagées dans cette mission, vision que Christian Gaudin et moi-même partageons. Cela étant, il restera à vérifier que ces moyens seront bien utilisés.

Le programme « Formations supérieures et recherche universitaire » sera doté de 11, 7 milliards d’euros de crédits de paiement, soit presque la moitié de ceux de la mission. Plusieurs innovations de ce projet de budget le concernent.

Ainsi, le 1er janvier 2009, vingt établissements universitaires accéderont à l’autonomie, en application de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités, la loi LRU : 34 491 emplois équivalent temps plein travaillé, ETPT, représentant une masse financière de près de 1, 9 milliard d’euros, doivent leur être transférés.

Par ailleurs, on met en place le nouveau système d’allocation des moyens aux universités, destiné à remplacer l’ancien outil San Remo, dans une logique donnant la priorité aux besoins réels et à la performance sur les calculs théoriques. Il prend en compte les observations qui ont été présentées par l’Assemblée nationale et par le groupe de travail sénatorial commun à notre commission et à la commission des affaires culturelles.

Madame la ministre, je reviendrai sur ce point à la fin de mon propos. Je souhaite savoir si cette nouvelle méthode est définitive. La valorisation de la recherche aurait mérité d’être davantage prise en compte. Cette nouvelle méthode le permettra-t-elle ? Le tableau qui m’a été transmis n’est pas satisfaisant sur ce point.

Les moyens financiers nécessaires à la réussite de cette délicate transition sont aussi au rendez-vous : 91 millions d’euros sont prévus en 2009, l’effort total devant s’élever à 511 millions d’euros sur la période 2009 à 2011.

Sur ce programme, il convient aussi d’évoquer deux axes.

Le premier est la revalorisation des carrières de certaines catégories de personnel, parmi lesquelles les jeunes maîtres de conférences, dont la rémunération sera majorée de 240 à 510 euros bruts par mois, soit de 12 à 25 % d’augmentation. Madame la ministre, nous vous remercions de cette initiative qui nous satisfait pleinement, car elle répond à notre attente.

Le second axe est la poursuite du plan « Réussite en licence » qui sera doté de 68 millions d’euros en 2009.

Enfin, d’un point de vue extra-budgétaire, il faut évoquer l’opération campus, qui doit doter la France d’une dizaine de campus accueillants et performants, compétitifs sur la scène internationale. Dix campus ont ainsi été sélectionnés par le ministère pour « leur ambition scientifique et leur rayonnement international, l’urgence immobilière et les projets présentés en termes de vie de campus ».

Le financement de l’opération provient des produits financiers dégagés par le placement, sur un compte spécifique, du produit de la vente par l’État d’une partie des actions qu’il détient dans EDF. Cinq milliards d’euros devaient y être consacrés. Le produit de la vente déjà effectuée s’élève à 3, 7 milliards d’euros. Ce n’est sans doute pas le moment de réaliser les autres actions, au risque de ne pas dégager l’intégralité des moyens nécessaires. L’essentiel est de pouvoir engager cette action.

En 2009, 157 millions d’euros doivent être ainsi mobilisés. Madame la ministre, nous serions heureux que vous puissiez détailler ces engagements et préciser le calendrier de lancement des premiers chantiers.

Pour ce qui concerne le programme « Vie étudiante », les moyens sont également au rendez-vous, avec un peu plus de 2 milliards d’euros de crédits, en augmentation de 3, 2 % par rapport à 2008 à périmètre constant.

Cette augmentation reflète l’effort supplémentaire consacré aux systèmes d’aides sociales.

Pour 2009, il convient de souligner quatre aspects.

Premièrement, les aides au mérite montent en puissance – 1 800 euros par étudiant – et elles peuvent éventuellement se cumuler avec les bourses attribuées sur des critères sociaux. Le nombre d’étudiants aidés doit doubler entre septembre 2008 et septembre 2010, pour atteindre alors 18 000 étudiants.

Deuxièmement, le contingent des bourses de mobilité, dont les crédits demeurent inscrits sur le programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire », augmente. Il doit passer de 12 000 à 30 000 bourses.

Troisièmement, on peut relever l’augmentation des moyens du Fonds national d’aide d’urgence, dont le financement est complété à hauteur de 4, 5 millions d’euros pour atteindre 45 millions d’euros.

Quatrièmement, une garantie publique, portée par OSEO, contribuera à encourager l’octroi de prêts aux étudiants. En 2009, elle doit permettre à 60 000 étudiants de bénéficier de prêts bancaires d’un montant moyen de 7 500 euros.

S’agissant des autres programmes, je note que le programme « Recherche dans le domaine des risques et des pollutions » bénéficie des effets du Grenelle de l’environnement puisque ses crédits, qui s’élèvent à 298 millions d’euros, augmenteront de 6, 6 % en 2009.

Mais le principal outil dont il profitera est extra-budgétaire. Il s’agit d’un fonds « démonstrateurs technologiques » logé au sein de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.

En soi, ce choix paraît pertinent. Toutefois, madame la ministre, j’aurai aussi l’occasion de vous interroger sur ce sujet. Si l’étape de la démonstration de la validité du fonds nous semble essentielle, nous avons encore besoin de précisions sur sa mise en place, son financement, sa gouvernance et les structures industrielles qui en bénéficieront.

Au sujet du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », je me dois d’évoquer la fusion programmée, au premier semestre 2009, des deux opérateurs du programme : la Cité des sciences et de l’industrie et le Palais de la découverte. Ce rapprochement a été décidé par le comité de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007. À son terme, les deux entités n’en formeront plus qu’une.

Vous vous souvenez peut-être de mon rapport d’information qui dénonçait, au sujet du Palais de la découverte, un condensé de « dysfonctionnements administratifs et politiques ». À l’époque, il n’était pas question du rapprochement annoncé, le Gouvernement n’étant pas favorable à cette opération. Aujourd’hui, j’espère simplement que les différents investissements prévus seront mis en œuvre et que ces lieux pourront recouvrer l’ambition qui n’aurait jamais dû les quitter.

Enfin, le programme « Enseignement supérieur et recherche agricoles » voit ses crédits augmenter de façon substantielle en 2009. Une progression de 4, 5 % à périmètre constant est constatée, permettant d’atteindre près de 280 millions d’euros de crédits de paiement.

Ces crédits permettront de combler en grande partie le retard dans les subventions auxquelles les établissements d’enseignement supérieur agricole peuvent prétendre. À ce sujet, madame la ministre, la faible présence de la recherche agricole dans le Grenelle de l’environnement m’étonne quelque peu, quand de nombreux organismes prennent une part active dans cette démarche.

Il s’agira également de stabiliser le report de charge constaté, à la fin de 2009, au titre des aides sociales aux étudiants, alors même que les effectifs progressent et que les effets des mesures de revalorisation des bourses prennent leur pleine mesure.

Avant de vous remettre l’avis de la commission sur ces crédits, madame la ministre, je voudrais résumer les différentes questions que nous vous soumettons.

Pouvons-nous disposer d’informations sur la mise en place du nouveau système de financement des universités ? Tous les critères de performance ont-ils été déterminés dans ce cadre ?

Est-il possible d’améliorer la place de la valorisation de la recherche dans la grille qui sera mise en place ? Comment pourrait-on mieux prendre celle-ci en compte ?

Qu’en est-il de la controverse dont j’ai eu connaissance s’agissant d’un décret que vous devriez prendre sur les dépôts de brevet ? Qui effectue ces dépôts ? Comment s’organiseraient la responsabilité et le partage ? Personnellement, je suis très favorable à votre réflexion : nous ne pouvons continuer à fonctionner avec plusieurs intervenants, même au sein d’une unité mixte. Cela empêche toute bonne négociation. Je souhaite donc que vous nous éclairiez sur cette petite controverse.

Pouvez-vous nous apporter des précisions sur la faible représentation de la recherche agricole dans le Grenelle de l’environnement. Comment le fonds de soutien aux démonstrateurs en nouvelles technologies de l’ADEME sera-t-il financé ? Quelle sera sa gouvernance ?

À l’avance, madame la ministre, je vous remercie des réponses que vous voudrez bien m’apporter.

Sous le bénéfice de ces remarques et questions, la commission des finances vous recommande d’adopter les crédits de ces programmes, qui lui ont paru de très grande qualité.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion