L’université de Reims – celle de ces modestes universités que je connais le mieux – a accueilli des chercheurs russes venus nous apporter leur aide dans le domaine des microscopes en champ proche, gros problème industriel, monsieur le secrétaire d’État. Eh bien ! dès que des résultats se sont profilés à l’horizon, deux des trois chercheurs sont partis aux États-Unis, signe qu’un chercheur peut ne pas trouver dans son environnement immédiat la reconnaissance à laquelle ses découvertes lui permettent de prétendre.
Deuxième exemple, la pervincamine, radical aminé découvert par un pharmacien de notre faculté, n’a fait son chemin qu’en sortant du giron de l’université française.
Dernier exemple en date, c’est la fameuse affaire des cellules souches adultes, dont l’Agence de la biomédecine, qui se prévaut de cette découverte, nous rebat les oreilles. Mais si vous saviez, mes chers collègues… C’est le laboratoire de microbiologie animale de cette même petite université qui, voilà trente ans, avait détecté chez les Némertes le pouvoir de régénération cellulaire ! Seulement, la chercheuse n’avait pas trouvé d’écho auprès des grandes universités françaises, dont on abonde pourtant les crédits pour les aider à accéder au firmament de la notoriété internationale. Elle a dû aller à l’université McGill, au Canada, où on lui a confié une chaire de biologie moléculaire du développement. Puis des Coréens et des Japonais, plus présents là-bas que chez nous, se sont intéressés à cette étude et l’ont poursuivie, en Corée et au Japon, et elle nous est revenue il y a deux ans !
Franchement, mes chers collègues, trente ans perdus pour la France, tout simplement parce que la petite université avait vingt ans d’avance sur les grandes !
Madame la ministre, il ne faut pas négliger ces petites universités, les humbles, les sans-grades.