Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à vous remercier, madame la ministre, pour votre participation à ce débat – nous comprenons parfaitement l’absence de M. le ministre délégué chargé des outre-mer. C’est un sujet fondamental, mais complexe en raison des réalités de chacun de nos territoires.
Vous l’aurez compris, notre délégation attend des réponses claires. Vous avez apporté de premiers éléments : nos vingt-six recommandations sont sur la table et il revient au Gouvernement ainsi qu’aux autres acteurs concernés de se saisir de notre rapport. Soyez assurée que notre délégation effectuera un suivi précis et exigeant de cette question au cours des prochains mois, sans esprit partisan, comme à son habitude.
Ce débat intervient à un moment clef, puisque le prochain Ciom se tiendra le 12 juin. Il nous semble – cela nous paraît même incontournable et prioritaire – qu’il devra inclure un volet consacré aux déchets.
Vos propos ainsi que certaines déclarations récentes du Gouvernement sont de premiers signaux positifs. Il faut désormais les concrétiser par des actes.
Pour ce qui concerne notamment l’action des éco-organismes, notre délégation a noté avec intérêt que vos collègues Bérengère Couillard et Jean-François Carenco avaient réuni conjointement le 6 avril dernier les éco-organismes pour leur demander de « se mettre à niveau avant la fin de l’été ». Dans le communiqué conjoint, les deux ministres s’appuyaient d’ailleurs sur le rapport de notre délégation.
Espérons que cette déclaration sera un électrochoc. À défaut, je vous invite à engager les mécanismes de pénalités financières et à abaisser les seuils de responsabilité, conformément aux recommandations de nos rapporteures.
Agir vite et fort, pour reprendre les mots de Gisèle Jourda, est impératif, car le sujet des déchets est symptomatique des défis à relever pour nos outre-mer.
Enjeu environnemental et sanitaire, la gestion des déchets revêt aussi un enjeu économique – Marta de Cidrac en a parlé. Le développement touristique, et donc la création de richesses, ne peut réussir si les plages sont polluées, les routes bordées d’épaves et le paysage abîmé.
Les déchets peuvent aussi être une opportunité pour rapatrier de la valeur ajoutée sur les territoires, en développant des filières locales de recyclage.
Mais surtout, pour les outre-mer, les déchets sont l’autre service public de base au cœur du quotidien de chacun, au même titre que l’eau potable, l’assainissement ou l’électricité, sans lequel il ne peut y avoir de développement harmonieux et digne.
La crise de confiance qui s’est exprimée lors des dernières échéances électorales dans les outre-mer est notamment la conséquence des difficultés à fournir à nos concitoyens ces services publics essentiels du quotidien.
Le récent rapport d’information de la délégation sénatoriale sur l’évolution institutionnelle des outre-mer souligne d’ailleurs que la pertinence d’éventuelles évolutions de ce type doit être évaluée à l’aune de leur capacité à déployer des politiques publiques plus efficaces. La défiance et la crise démocratique ne seront surmontées que lorsque ces services publics fondamentaux auront des résultats tangibles.
Un autre aspect transversal réside dans l’ingénierie – vous en avez parlé, madame la ministre –, c’est-à-dire la capacité à transformer une idée en réalité. C’est le point faible des outre-mer pour toutes les politiques publiques. Là encore, notre rapport fait plusieurs propositions tout aussi essentielles que celles relatives à l’effort financier, qui n’est pas la seule donnée de l’équation.
Enfin, j’achèverai mon propos, en évoquant l’enjeu de la différenciation et de la territorialisation. Notre délégation porte cette exigence sur tous les sujets ultramarins ; celui des déchets n’y échappe pas.
Viviane Malet l’a évoqué, notamment en mettant en avant la nécessité de développer la valorisation énergétique. Plus globalement, il faut sans doute réinterroger pour nos petits territoires insulaires ou isolés la hiérarchie des modes de traitement. Est-il, par exemple, toujours pertinent d’expédier à l’autre bout du monde des déchets plastiques pour les recycler ? Ne vaudrait-il pas mieux les valoriser localement pour produire de l’électricité ? La valorisation matière doit être envisagée de manière pragmatique et réaliste.
C’est au niveau de chaque territoire que la stratégie la plus fine, sans idée préconçue, doit être définie et contractualisée. Madame la ministre, vous avez évoqué une feuille de route territorialisée ; il s’agit de l’un des aspects de la méthode de Jean-François Carenco.
Le Gouvernement n’est pas le seul responsable des questions liées à la gestion des déchets. Les collectivités et de nombreux autres acteurs, par exemple les éco-organismes, doivent aussi s’investir. La mise en place d’une contractualisation par territoire est très importante pour que chacun prenne ses responsabilités.
Les choses sont toujours plus claires quand tout le monde signe en bas de la page ! J’appelle donc de mes vœux l’enclenchement d’un tel cercle vertueux – je pense que chacun ici me rejoindra sur ce point. La gestion des déchets est une responsabilité collective qui doit être partagée et la contractualisation, dont je suis partisan, permet justement de responsabiliser l’ensemble des acteurs.