Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aurais aimé, comme tous mes collègues, que le budget des anciens combattants pour 2009 témoigne davantage de la reconnaissance de la France à l’endroit de celles et ceux qui, avec abnégation et sens du devoir, ont toujours répondu à l’appel de la nation.
L’application de la révision générale des politiques publiques, d’une part, et le manque de moyens de l’État, lié à sa mauvaise politique fiscale, d’autre part, ne le permettent pas. C’est regrettable, mais c’est surtout injuste.
Il est donc assez facile, sans prétendre à l’exhaustivité, d’établir la liste des manquements, avant de reconnaître les quelques avancées proposées et de suggérer de nécessaires corrections, réalisables et justes.
Les manquements sont nombreux. Ils contredisent les engagements pris et affaiblissent la parole donnée, ainsi que la véracité des promesses faites, tant par vos prédécesseurs, monsieur le secrétaire d’État, que par le Président de la République.
Rien sur la campagne double, rien pour rattraper la valeur du point de pension, rien pour les veuves des plus grands invalides, rien pour éliminer l’injustice faite à de nombreux orphelins de guerre, rien pour relever le plafond de la rente mutualiste, et peu pour les crédits sociaux de l’ONAC !
En fait, le budget 2009 permet tout juste l’exécution des mesures adoptées l’an dernier, notamment en matière de décristallisation.
Parmi les nouvelles propositions, je note, à la suite de l’adoption d’un amendement présenté à l’Assemblée nationale, le relèvement de deux points de la pension versée aux anciens combattants, applicable à partir du 1er juillet 2009. Le versement afférent ne sera donc effectué qu’au cours de l’année 2010 !
Je note aussi que le plafond permettant de verser l’allocation différentielle au conjoint survivant est porté à 750 euros et qu’il exclut l’allocation logement des ressources prises en compte.
Quant à l’indemnité de 800 euros qui doit être versée aux anciens du RAD-KHD, que nous attendions depuis de nombreuses années, et pour laquelle nous nous sommes battus avec une grande détermination, elle sera financée pour moitié sur le budget 2009, bien qu’aucune ligne spécifique n’apparaisse à la lecture de celui-ci. À cet égard, monsieur le ministre, prenez-vous l’engagement que les indemnités dues seront bien toutes versées en 2009 ? Devant les insuffisances et les manquements relevés, je souhaiterais que nous nous accordions, au Sénat, sur ce qui pourrait constituer un consensus. Ce dernier s’avère d’autant plus nécessaire qu’il s’agit, pour la représentation nationale, d’être juste à l’égard du monde combattant.
Deux dossiers pourraient faire l’unanimité : celui de l’allocation différentielle et celui de la revalorisation de la retraite du combattant. L’allocation différentielle versée au conjoint survivant est une obligation morale et politique pour la nation. Elle doit permettre à celles et à ceux susceptibles d’en bénéficier de vivre ou de survivre décemment. Aujourd’hui, tel n’est pas le cas. Notre devoir est de tenir compte de la réalité, laquelle nous conduit à proposer un plafond de ressources non pas de 750 euros, mais de 887 euros. C’est le moins que l’on puisse faire, puisque ce montant correspond au seuil de pauvreté déterminé par l’INSEE.
La retraite du combattant est sans doute la mesure la plus emblématique de la reconnaissance de la nation en direction du monde combattant. Le plafond de cette retraite doit être relevé sans tarder. Des engagements ont été pris, ils doivent être tenus. Son montant devrait, annuellement, constituer un treizième mois pour celles et ceux qui perçoivent la retraite de base de la sécurité sociale.
Cette retraite, comme l’ensemble des prestations accordées au monde combattant, à quelque titre que ce soit, devrait évoluer chaque année proportionnellement à l’inflation réelle. Je ne voudrais pas non plus oublier une demande récurrente des anciens combattants concernant le relèvement du plafond de la rente mutualiste, qui vise à la faire passer de l’indice 125 à l’indice 130, afin d’achever son rattrapage. Que comptez-vous faire en ce sens, monsieur le secrétaire d’État ?
Le budget 2009, qui est conforme à la révision générale des politiques publiques, touche aussi l’organisation dédiée aux anciens combattants. C’est ainsi que la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale disparaît. Ses compétences sont confiées à l’ONAC, qui aura la mission de les exercer dans la plus grande proximité avec le monde combattant.
Mais, pour que cette évolution se traduise utilement dans les faits dans chaque département, encore faut-il que les moyens humains et matériels soient donnés aux offices ! Vous engagez-vous, monsieur le secrétaire d’État, à ouvrir dans chaque département des discussions tripartites entre l’État, le monde combattant et les élus, pour que nous soyons assurés de la bonne attribution et de l’affectation réelle de ces moyens nécessaires ?
En ce qui concerne l’ONAC, j’observe que les crédits sociaux qui lui sont attribués sont insuffisants eu égard aux besoins recensés, et ce malgré une majoration de 500 000 euros.
Par ailleurs, monsieur le secrétaire d’État, quel sort réservez-vous aux écoles professionnelles dépendantes de l’ONAC et aux maisons de retraite, qui ont besoin de se mettre aux normes de confort et de sécurité ?
Avant de conclure, je souhaite évoquer un certain nombre de dossiers qui appellent rapidement des réponses concrètes. Il s’agit de la campagne double, des orphelins de guerre et d’un dossier particulier à l’Alsace-Moselle, la « ligne Curzon ».
Sur le dossier de la campagne double, que l’un de vos prédécesseurs, M. Mékachéra, n’a pas clarifié, il faut cesser d’invoquer les travaux de telle ou telle commission. Depuis de nombreux mois, vous avez assez d’éléments pour faire des propositions concrètes ou motiver un refus définitif.
Le dossier des orphelins est douloureux. Vous connaissez la disparité des situations des orphelins de guerre qu’a engendrée le décret du 13 juillet 2000. Malgré des ajustements et des compléments – ils étaient nécessaires -, il existe encore des injustices que le monde combattant ne comprend pas. Là encore, vous disposez de toutes les informations nécessaires à une prise de décision, monsieur le secrétaire d’État. À quel moment comptez-vous agir ?
Certains prisonniers des camps soviétiques – je veux parler des alsaciens-mosellans incorporés de force dans l’armée allemande, faits prisonniers ou qui ont déserté – n’ont pas le même statut selon qu’ils ont été internés à l’est ou à l’ouest de la frontière germano-soviétique de 1941, matérialisée par le fleuve Bug et appelée « ligne Curzon ».
Les décrets pris en 1973, 1977 et 1981 établissent un régime spécial pour ces anciens prisonniers, mais seulement pour ceux dont les camps étaient situés à l’est de la frontière. Ce n’est pas juste ! Monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous corriger cette anomalie ?
Le devoir de mémoire est une belle chose. Il faut le préserver et le développer, en partenariat avec les collectivités territoriales et l’éducation nationale.
Comme la plupart de mes collègues, je crois à la nécessité de préserver les dates de commémoration, lesquelles rythment le devoir de mémoire. Quant à la date du 19 mars, marquant la fin de la guerre d’Algérie, vous savez qu’elle a notre préférence.
Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste ne votera pas ce budget, qu’il juge insuffisant.