Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons tous à l’esprit les images de l’été dernier, au cours duquel 72 000 hectares de nos forêts sont partis en fumée et, avec eux, autant d’hectares de notre patrimoine naturel. Je tiens à remercier les sapeurs-pompiers qui ont lutté jour et nuit contre ces feux de forêt. Dans mon seul département du Haut-Rhin, 500 départs de feu ont été recensés en 2022.
En tant que sénatrice d’une région frontalière, je tiens à rappeler que, l’été dernier, nous avons pu compter sur l’aide de nos partenaires européens, l’activation du mécanisme de protection civile de l’Union européenne ayant permis de mobiliser quatre avions de la flotte RescUE.
Le caractère hors norme de l’été 2022 ne doit pas cacher le fait que l’intensification des feux de forêt est un mouvement de fond : sur le pourtour méditerranéen français, les surfaces brûlées pourraient augmenter de 80 % d’ici à 2050. Les conséquences du changement climatique se manifestent de manière spectaculaire.
À l’horizon 2050, 50 % des landes et des forêts métropolitaines seront exposées à un risque incendie élevé, contre un tiers il y a un peu plus d’une décennie. La période à risque devrait également être trois fois plus longue. Quant aux feux hivernaux, ils vont se multiplier.
Dès le mois de mai 2022, le Sénat s’est saisi de ce sujet en constituant une mission de contrôle relative à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie, à l’origine du texte que nous examinons aujourd’hui. Je veux ici remercier très sincèrement les rapporteurs de cette mission. Je m’associe aux propos de Pascal Martin sur les articles 32 et 34.
Les travaux de cette mission ont mis en lumière la future vulnérabilité de notre stratégie de lutte contre les feux de forêt, qui, si elle reste aujourd’hui un modèle en Europe, doit évoluer. Sans changement, notre stratégie de lutte ne suffira pas face à l’intensification et à l’extension des feux de forêt.
La proposition de loi répond pour partie à cette nouvelle problématique, en mettant l’accent sur l’aménagement du territoire, la gestion durable, la valorisation de la forêt et la mobilisation de l’ensemble des acteurs, au premier rang desquels les agriculteurs, maillons essentiels dans l’élaboration du modèle de lutte contre les feux de forêt au XXIe siècle.
Si nous avons fortement investi dans la sécurité civile depuis 2017 – le budget que nous y consacrons a augmenté de 40 % et nous avons acquis de nouveaux avions Dash –, force est de constater que la mobilisation de moyens financiers ne suffira pas pour répondre à l’intensification de la pression qui s’exerce sur nos massifs forestiers.
C’est pourquoi nous avons clarifié le cadre d’intervention des Sdis, conforté les plans communaux de sauvegarde et valorisé l’engagement et le volontariat lors de l’examen de la loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite « loi Matras ».
Je retiens particulièrement la reconnaissance par la Nation du sacrifice ultime des sapeurs-pompiers par la création de la mention « Mort pour le service de la République », ainsi que la reconnaissance des enfants de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires décédés en service en tant que pupilles de la République.
Nous devons aujourd’hui adapter nos politiques et nos territoires en renforçant la prévention et les moyens de lutte tout en accélérant le reboisement post-incendie. Ce texte y contribue. Il comprend également un volet relatif à l’optimisation de la gestion de nos forêts, élément central du modèle à construire pour les années à venir.
Lors de la réunion de la commission mixte paritaire, nous avons affiné le texte, dont je retiens trois apports.
D’abord, la simplification de la stratégie nationale interministérielle permettra d’optimiser les moyens de l’État. La conservation de l’obligation d’élaborer un plan de protection des forêts contre les incendies dans les territoires les plus à risque et la déclinaison de ce plan pour chaque massif forestier permettront de mieux prendre en compte les spécificités de chaque territoire.
Ensuite, le travail global mené sur les obligations légales de débroussaillement nous paraît aller dans le bon sens et répond à une attente forte dans certains territoires.
Enfin, la reconnaissance du rôle primordial des agriculteurs et de la sylviculture dans la prévention des feux de forêt, à laquelle nous sommes très attachés, est maintenue.
En l’état, le texte permet de faire de la prévention, de lutter à la racine contre l’intensification et l’extension du risque incendie dans nos forêts, mais également d’adapter nos forêts et de conforter l’aménagement du territoire comme pierre angulaire de la protection de notre patrimoine naturel.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe RDPI votera ce texte.