Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, cette mission retrace les principales subventions versées par l’État à des régimes spéciaux de retraite ou à des dispositifs de préretraite. Elle met en évidence tout un ensemble de régimes très coûteux, maintenus sous perfusion depuis des décennies grâce à la solidarité nationale.
Près de 5, 2 milliards d’euros y seront consacrés l’an prochain, et ce montant augmentera encore dans les prochaines années car la masse des pensions versées par ces régimes spéciaux continuera de croître sous l’effet du « papy-boom ».
Pour 2011, on envisage déjà une dotation de 5, 75 milliards d’euros. C’est dire combien les enjeux financiers sont importants.
Ils justifient aussi l’exigence d’une présentation claire et sincère des crédits. À ce sujet, la commission des affaires sociales constate que, cette année, des améliorations ont, fort heureusement, été apportées à la présentation des comptes, en particulier sur les contributions de l’État aux caisses de retraite de la SNCF et de la RATP.
En effet, les subventions d’équilibre versées à ces deux caisses font désormais l’objet de deux actions distinctes et la dotation de l’État accordée à la caisse de retraite de la RATP, jusqu’à présent sous-évaluée, apparaît cette année mieux calibrée.
En revanche, je remarque, cette année encore, que les indicateurs de performance continuent d’être exclusivement consacrés aux dépenses de gestion. Or celles-ci ne représentent que 1 % à 3 % des charges des régimes spéciaux. L’essentiel des informations intéressantes sur ces régimes se situe donc ailleurs.
C’est pourquoi la commission des affaires sociales considère que l’information du Parlement reste partielle.
Elle aimerait d’abord pouvoir connaître, pour chacun de ces régimes, la proportion de départs à la retraite par tranches d’âge, à savoir avant cinquante-cinq ans et entre cinquante-cinq ans et soixante ans.
Elle souhaiterait également disposer de données permettant d’établir des comparaisons entre les régimes spéciaux et les autres régimes pour prendre en compte l’assurance vieillesse dans toute sa diversité.
Je plaide, une fois encore, pour l’introduction de nouveaux indicateurs portant sur l’évaluation du rendement des sept principaux régimes spéciaux, sur le niveau de leurs engagements à long terme ainsi que sur le profil de leurs retraités et cotisants.
Je suis d’autant plus attaché à ces propositions que les informations sur les retraites des grandes entreprises publiques sont rarement publiées ou très difficilement accessibles, y compris pour les commissions parlementaires.
Ce débat m’amène surtout à évoquer la réforme des régimes spéciaux entrée en vigueur cette année.
Les pouvoirs publics ont enfin décidé de s’attaquer à une situation qui a, pendant des années, empoisonné la vie politique et sociale de notre pays. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
En harmonisant progressivement les règles en vigueur dans les régimes spéciaux avec celles qui sont applicables dans les régimes de la fonction publique, cette réforme vise à rétablir plus d’équité entre les assurés sociaux.
Je rappelle également qu’une place majeure a été accordée au dialogue social dans les entreprises. La réforme s’est en effet accompagnée de la négociation de mesures salariales d’accompagnement ou de compensation, en particulier à la SNCF et à la RATP – création d’échelons supplémentaires d’ancienneté, déblocage de la grille des salaires, possibilité de rachat d’années d’études, etc. J’en tire la conclusion que le principe d’une spécificité des droits des assurés des régimes spéciaux a été maintenu.
Bien sûr, ce dialogue social approfondi était nécessaire, mais je crains qu’il n’ait abouti à des contreparties qui pourraient, à terme, vider la réforme d’une partie de sa substance. L’an dernier, la commission des affaires sociales avait déjà averti des risques financiers que présentait l’octroi de mesures de compensation aux salariés.
D’après les premières estimations, il semble que ces contreparties auraient un impact important sur l’équilibre financier des régimes concernés. La SNCF, par exemple, évalue le coût des mesures d’accompagnement entre 120 millions d’euros et 200 millions d’euros par an entre 2009 et 2012. Or ce coût correspond à peu de choses près au montant des économies escomptées de la réforme du régime spécial de l’entreprise !
Je note que la Cour des comptes, dans un rapport de juin dernier, a estimé que les gains financiers résultant de la réforme des régimes spéciaux pourraient s’avérer quasiment nuls pour la collectivité.
En définitive, s’il est bien sûr encore trop tôt pour dresser un bilan définitif de cette réforme, je suis conduit, mes chers collègues, à envisager avec une extrême prudence les économies annoncées par le Gouvernement, à savoir 500 millions d’euros cumulés en 2012.
La commission des affaires sociales s’est néanmoins déclarée favorable à l’adoption des crédits de la mission pour 2009 en raison des efforts engagés pour clarifier les enjeux financiers.