Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d’abord de rappeler que le Sénat, en première lecture, a débattu du présent projet de loi dans des délais très contraints. Présenté à peine deux semaines avant son examen, le texte répondait pourtant à une exigence constitutionnelle, puisque, en l’absence de ratification, l’une des ordonnances prises sur le fondement de l’article 74 de la Constitution serait caduque le 26 août prochain.
Ce projet de loi a fait l’objet d’une procédure de législation en commission. Le Sénat a apporté plusieurs corrections formelles à des dispositions essentiellement techniques. Il a également validé la ratification de trois ordonnances, dont deux tendaient à la recodification des dispositions du code monétaire et financier applicables en outre-mer. Ces dispositions étaient devenues illisibles, pour les collectivités d’outre-mer comme pour les professionnels.
Le Sénat a, par ailleurs, soutenu la modernisation des missions de l’Institut d’émission d’outre-mer (Ieom) et de l’Institut d’émission des départements d’outre-mer (Iedom).
Il a en revanche supprimé l’article 9, qui visait à donner un fondement législatif au fichier des comptes d’outre-mer (Ficom), contrairement aux dispositions applicables pour les fichiers de comptes bancaires en métropole et dans les cinq départements d’outre-mer, le fichier national des comptes bancaires et assimilés (Ficoba) et le fichier des contrats de capitalisation et d’assurance vie (Ficovie).
Enfin, en lien avec la ratification d’une ordonnance relative au financement participatif, nous avons inséré un article additionnel visant à prolonger de deux ans l’expérimentation du financement participatif obligataire pour les collectivités territoriales.
En effet, alors que le Parlement avait voté, au mois d’octobre 2021, une expérimentation de trois ans, l’arrêté qui devait l’encadrer n’a été publié que quinze mois plus tard, c’est-à-dire en janvier 2023, imposant qui plus est des conditions d’éligibilité très restrictives, voire impossibles à respecter pour les collectivités. Il est par exemple demandé à celles qui s’engageraient dans un projet de huit ans de disposer de leurs prévisions de ressources totales d’investissements et d’emprunts bancaires jusqu’en 2031, ce qui est simplement impossible.
L’arrêté a également fixé un délai limite de candidature au 31 mars 2024, conduisant de fait à faire passer la durée de l’expérimentation de trois ans à un an à peine.
Malheureusement, cet exemple illustre parfaitement les raisons pour lesquelles le Parlement doit être vigilant quant à l’application des textes qu’il vote : trop souvent, l’administration témoigne d’une mauvaise volonté évidente à se conformer à la volonté du législateur.
L’expérimentation durera donc cinq ans formellement, mais trois ans dans les faits. Nous ne pouvons malheureusement pas modifier les conditions d’éligibilité, qui relèvent du domaine réglementaire.
Pour donner suite aux interpellations du rapporteur général et de moi-même à ce sujet, le ministre Barrot, qui représentait le Gouvernement, nous a signalé lors de l’examen du texte que l’exécutif ne s’interdisait pas de réviser les critères si ceux-ci se révélaient trop stricts.
La prolongation de l’expérimentation doit être mise à profit pour les assouplir et pour permettre aux collectivités de pleinement se saisir de cette nouvelle possibilité de financement. Nous vous le demandons solennellement, monsieur le ministre.
Lors de l’examen du projet de loi à l’Assemblée nationale, nos collègues députés ont poursuivi le travail d’adaptation du droit monétaire et financier aux outre-mer, avec deux nouvelles dispositions concernant respectivement les délais d’encaissement des chèques et l’application du règlement européen sur un régime pilote pour les infrastructures de marché reposant sur la technologie des registres distribués.
L’Assemblée nationale a également conservé la prolongation de deux ans de l’expérimentation relative au financement participatif. En revanche, elle a rétabli l’article 9, pour donner un fondement législatif au fichier des comptes d’outre-mer.
Six articles restaient donc en discussion lors de la réunion de la commission mixte paritaire (CMP). Je salue à cet égard le travail fructueux que nous avons conduit avec le rapporteur de l’Assemblée nationale pour proposer un texte commun.
La CMP a conservé cinq articles dans leur rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale. Elle a toutefois retenu la position du Sénat concernant la suppression de l’article 9, s’accordant sur le fait que la création d’un fichier de données ne relevait pas du domaine de la loi.
Bien entendu, la suppression de l’article ne conduit pas à celle du fichier, lequel continuera à fonctionner comme auparavant, avec la possibilité pour les deux instituts d’émission d’outre-mer d’y contribuer.
Mes chers collègues, je vous invite donc à voter les conclusions de la commission mixte paritaire.