Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a trouvé un accord sur ce texte très technique. C’est une bonne nouvelle.
Nous avions supprimé l’article 9 visant à donner un fondement législatif au fichier des comptes d’outre-mer, avant que l’Assemblée nationale ne le rétablisse ; il est à nouveau supprimé, conformément à l’analyse de notre rapporteur Hervé Maurey, que je partage. C’est très bien !
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires regrette toutefois que vous ayez choisi de corriger l’erreur heureuse du Gouvernement, lequel avait maintenu la gratuité de tous les retraits d’espèces dans les distributeurs automatiques de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française. En effet, nos concitoyens ultramarins font face à des coûts de la vie plus élevés qu’en France métropolitaine. Les frais de tenue de compte et de retrait ou de virement sont souvent plus importants et pèsent lourdement sur les dépenses des ménages.
De plus, il n’y a pas une réalité ultramarine, mais des réalités économiques, démographiques et sociologiques qui convergent toujours : dans ces territoires, « le niveau de vie et les revenus […] sont significativement moins élevés » que dans l’Hexagone, « les prix […] sont structurellement plus élevés » et ce de manière forte, les collectivités territoriales connaissent un « sous-financement » et « le traitement que réserve l’État » est insuffisant et « inéquitable ».
Mes chers collègues, je viens de citer les termes de la proposition de résolution du député socialiste Johnny Hajjar visant à créer à l’Assemblée nationale une commission d’enquête chargée d’étudier et d’évaluer l’ensemble des mécanismes qui concourent au coût de la vie outre-mer.
Lorsque l’inflation nous touche toutes et tous, elle frappe plus brutalement les portefeuilles des foyers ultramarins. La vie chère, le manque d’emploi, une jeunesse en déshérence et le manque de perspectives sont le quotidien – hélas ! – de nombreux habitants des outre-mer.
Je vous donne un exemple concret à propos d’un sujet qui me tient à cœur : le coût de l’eau et l’accès à cette ressource. En Nouvelle-Aquitaine, le prix moyen de la distribution de l’eau potable et de l’assainissement est de 4, 63 euros ; à la Guadeloupe, il est de 6, 52 euros et à la Martinique de 5, 45 euros.
D’après le Conseil économique, social et environnemental, un quart de la population de la Guadeloupe n’a pas accès tous les jours à l’eau, du fait des nombreuses coupures. De fait, les tarifs pratiqués en outre-mer sont les plus élevés de notre territoire. S’y ajoutent des difficultés supplémentaires : vétusté du réseau et des infrastructures, manque d’investissement, problèmes de gouvernance… Pourtant, l’eau est un droit fondamental, tout autant qu’un bien commun.
Dans son rapport remis il y a quelques jours, le Haut Conseil pour le climat dresse une liste de recommandations pour améliorer l’adaptation et appelle à une attention particulière pour les territoires des outre-mer. En effet, avec l’accélération du réchauffement climatique, il est probable, selon le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), que 70 % à 90 % des récifs coralliens disparaissent dans les vingt prochaines années.
La disparition des coraux entraîne déjà des répercussions sur les écosystèmes, mais aussi des conséquences économiques en matière de pêche, de tourisme et d’érosion côtière. Les cyclones seront de plus en plus intenses, avec tout ce que cela emporte de conséquences sanitaires, sociales et financières. Les submersions conduiront des populations insulaires à migrer.
La seule solution pour y faire face n’est pas dans le texte du livre VII du code monétaire et financier. Elle est dans des mesures nouvelles pour limiter nos émissions de gaz à effet de serre et, ainsi, empêcher ces catastrophes.
Vous me répondrez que je me suis nettement éloigné du livre VII du code. Je vous l’accorde bien volontiers. En effet, sur ce sujet, il n’y aura pas de désaccord entre nous. Notre groupe votera en faveur de ce texte.
En ce qui concerne les enjeux climatiques et d’adaptation en revanche, notamment pour les territoires insulaires et ultramarins, le Gouvernement n’a pas encore pris conscience des dégradations irrémédiables qui sont en cours. Les écosystèmes des outre-mer rassemblent 80 % de la biodiversité française : cette richesse est inestimable. Il faut cesser de mettre en avant des solutions lentes et de réaliser de petits pas, pour mettre en place des trajectoires d’adaptation ambitieuses.
Tel est le message que je voulais défendre, en quelque sorte par effraction, à l’occasion de l’examen de ce texte relatif au livre VII du code monétaire et financier.