Intervention de Michel Canevet

Réunion du 3 juillet 2023 à 16h00
Règlement du budget et approbation des comptes des années 2021 et 2022 — Discussion générale commune

Photo de Michel CanevetMichel Canevet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la lecture que je fais de ces projets de loi de règlement, au nom du groupe Union Centriste, n’est pas aussi négative que celle que je viens d’entendre.

Rassurez-vous, monsieur le ministre : on trouve un certain nombre d’éléments positifs dans le bilan de l’année passée.

D’abord, le déficit du budget de l’État a été assez proche de celui qui avait été prévu en loi de finances initiale : il a été inférieur de 2, 4 milliards d’euros à ce qui avait été prévu en loi de finances pour 2022.

De surcroît, l’inflation a pu être maîtrisée. Comme on a pu le voir, notre situation est bien plus favorable que dans les autres pays européens, notamment grâce à l’intervention de l’État. Il faut s’en féliciter.

L’année 2022 a été riche en rebondissements, en particulier avec la guerre en Ukraine, qui a eu des conséquences extrêmement lourdes dans le monde entier, notamment une augmentation du coût de l’énergie qui a pesé sur l’activité : sur les entreprises bien entendu, mais aussi sur l’ensemble des particuliers. Les unes comme les autres ont pu surmonter cette inflation, grâce notamment au soutien de l’État en ces périodes difficiles.

Nous devons tout de même nous inquiéter de la situation.

D’abord, notre déficit a été assez important ces deux dernières années : il a atteint 170 milliards d’euros en 2021 et 151 milliards d’euros en 2022. L’ampleur de ces chiffres doit nous préoccuper.

Il en résulte une augmentation de la dette de notre pays, qui a atteint 3 000 milliards d’euros voilà peu. Là aussi, les conséquences sont assez importantes pour notre pays, parce que cela se traduit, notamment dans le contexte de hausse des taux d’intérêt que nous avons connu, par une charge des intérêts de la dette qui devient tout à fait significative – 50 milliards d’euros –, ce qui pèse considérablement dans le budget de notre pays.

Ce que nous pouvons craindre, si nous continuons à devoir nous endetter ainsi en permanence, c’est que cette charge des intérêts de la dette ne devienne le poste de dépenses le plus important du budget de l’État. Ce serait préoccupant, des investissements devant être réalisés pour préparer l’avenir.

Les investissements doivent notamment porter sur la formation. Aujourd’hui, le premier poste de dépenses de l’État est – c’est heureux ! – l’éducation nationale. Il doit le rester, mais cela ne pourra arriver que si la charge des intérêts de la dette ne croît pas.

Nous devons être particulièrement vigilants à cet égard. C’est le sens de l’alerte que le groupe Union Centriste souhaite lancer au Gouvernement.

Nous constatons que la situation est particulièrement difficile pour l’année 2022.

Bien entendu, nous nous réjouissons que nous ayons pu adopter une trajectoire conduisant à la réduction des impôts ; c’est ce que tout le monde souhaite. On voit bien que la France fait aujourd’hui partie des pays où la fiscalité est la plus élevée au monde : il importe que nous puissions corriger cet état de fait. Cela a notamment été le cas s’agissant de l’impôt sur les sociétés sans qu’en découle pour autant une baisse des recettes, qui ont, bien au contraire, augmenté. On peut se réjouir que l’on parvienne à augmenter les recettes en baissant les impôts, même s’il convient de préciser que le contexte économique était propice.

Nous le disons clairement, monsieur le ministre : les membres du groupe Union Centriste auraient souhaité, en 2022, que nous conservions un certain nombre de recettes. Je veux notamment parler de la redevance sur l’audiovisuel, que le Gouvernement a décidé de supprimer cette année-là, avec l’approbation du Parlement bien entendu, mais sans les voix du groupe Union Centriste.

Nous pensons qu’en conservant cette recette, il aurait été possible, par exemple, de supprimer le décalage de la récupération de la TVA pour les collectivités territoriales, puisqu’il se trouve que la moitié d’entre elles récupèrent encore la TVA en n+2. Il serait logique, pour une exécution budgétaire plus saine de rapprocher le moment de la récupération de la TVA de celui où les collectivités acquittent celle-ci.

Cela n’a pas été fait. Si nous avions anticipé cette suppression de la redevance – elle était inévitable, puisqu’elle avait été annoncée par le Président de la République –, nous aurions pu la décaler dans le temps, ce qui aurait certainement permis d’améliorer un tout petit peu la situation financière.

Nous avions également proposé que la suppression de la CVAE, mesure à laquelle nous souscrivons évidemment, soit décalée dans le temps, ce qui nous semblait important compte tenu de la situation des finances publiques à l’époque. Cela aurait permis de retrouver quelques marges de manœuvre. De fait, nous nous retrouvons maintenant à devoir trouver 8 milliards d’euros à 10 milliards d’euros d’économies pour préparer le budget 2024, quand la Cour des comptes, dans sa publication de jeudi dernier, évoque la nécessité de réaliser 60 milliards d’euros d’économies d’ici à 2027. Ce sera difficile.

Par conséquent, il importe que nous puissions conserver les recettes qui permettent de réduire l’effort, les besoins étant extrêmement importants. Nous l’avons vu jeudi dernier, lorsque nous avons voté la loi de programmation militaire, qui prévoit un effort sans précédent. Nous le voyons aussi sur un grand nombre de nos dépenses budgétaires : je pense à la police ; je pense à la justice ; je pense à l’aide publique au développement. Ces secteurs demanderont un effort accru. Il en va de même pour ce qui concerne la police, comme le montre notamment la situation que nous connaissons actuellement. La politique de la ville devra sans doute aussi se voir affecter un certain nombre de crédits supplémentaires pour apporter des réponses au mal-être qui s’est exprimé.

Bien entendu, je n’oublie pas non plus la transition énergétique, qui appelle, là aussi, 50 milliards d’euros à 60 milliards d’euros d’investissements par an. Cela ne pourra se faire que si l’État est en capacité d’accompagner les projets et les mesures à mettre en œuvre.

Trouver des mesures d’économies dans le budget alors que nous avons des besoins importants est une difficulté d’ampleur.

Cela étant, le groupe Union Centriste, dans sa très grande majorité, s’abstiendra sur ces projets de loi de règlement. Seuls deux collègues, Vincent Delahaye et Jean-Marie Mizzon, partisans d’une réelle orthodoxie budgétaire, voteront contre. Les autres s’abstiendront ou voteront pour.

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