M. le rapporteur général n'est sans doute pas de cet avis !
Monsieur le ministre, je constate que le projet de loi de finances pour 2007 persiste dans la même voie dangereuse, qui porte en filigrane l'étouffement financier des communes. Vous continuez à déposséder les maires de leurs ressources et donc de leur autonomie.
La reconduction du contrat de croissance et de solidarité, à l'article 12, annonce une hausse globale de l'enveloppe normée, après ajustements, de 2, 22 %. La DGF est abondée à hauteur de 39, 22 milliards d'euros, pour une hausse de 1 milliard d'euros par rapport à l'année dernière, soit une progression de 2, 5 %. La majorité des dotations étant indexées sur la DGF, c'est bien une progression a minima que vous nous proposez d'entériner, alors que vous avez aggravé les besoins à combler. À ce titre, je regrette que vous persistiez à refuser de porter à 50 % la prise en compte du taux de croissance du PIB dans le calcul de la progression de l'enveloppe normée.
La DSU et la DSR semblent bénéficier de hausses prioritaires, à hauteur de 15, 8 % chacune, après des années de sous-financement chronique. Ce rattrapage ne suffira pas à combler le retard financier que vous avez laissé se creuser depuis 2002, et qui est encore aggravé pas l'ensemble de votre politique.
Et que dire du mode de calcul de la dotation élu local ? Le passage du potentiel fiscal au potentiel financier a artificiellement majoré la richesse de nombreuses communes, lesquelles se verront privées de cette dotation pourtant précieuse. Il avait fallu, en son temps, que le comité des finances locales, auquel je rends hommage, intervienne pour retarder l'entrée en vigueur de cette mesure. Mais, dès l'année prochaine, de nombreuses communes rurales devront se passer d'un financement pourtant précieux pour faire face à la technicité croissante des obligations qui s'imposent aux maires. Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour répondre aux besoins de formation de ces élus ruraux ?
Il faut également se pencher sur l'évolution de la relation financière entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, qui n'est ni exempte d'ambiguïtés ni toujours conforme au principe d'égalité entre contribuables.
Ainsi suis-je interpellé par des maires de communes moyennes, qui, ayant accompli un important effort de développement de leur zone d'activité, se voient soudain dessaisis de la progression de la ressource afférente par la mise en place de la TPU. Pour peu que le calcul de la dotation de solidarité n'intègre pas, ou intègre insuffisamment, ce paramètre, cela se traduit par un manque à gagner important pour le budget communal. Si, en outre, la communauté de communes ou d'agglomération ne rend pas ces sommes à la commune, sous la forme de subventions d'investissement, le préjudice est réel, et le contribuable de cette commune se retrouve à payer deux fois.
J'entends bien qu'il convient de laisser assez de souplesse aux élus membres des conseils des communautés de communes ou des communautés d'agglomération, selon le principe de libre administration. Pour autant, monsieur le ministre, ne faudrait-il pas fixer un cadre minimal de reversement pour éviter des situations choquantes, qui confinent à une forme de spoliation au détriment des communes ayant contribué par leur engagement financier à la création de richesses et d'emplois sur tout leur territoire ? Nous avons le recul nécessaire pour envisager sereinement cette question, sans remettre en cause la dynamique des EPCI.
À l'autre bout de la chaîne, s'agissant de l'intercommunalité, on constate bien des insuffisances et des incompréhensions. Les EPCI, spécialement lorsqu'ils englobent des communes moyennes, attendent plus de souplesse et de moyens.
Or, les différences de traitement entre les multiples catégories d'intercommunalité sont flagrantes, sans que le degré d'intégration de l'établissement public justifie à lui seul les écarts de niveaux de dotations. En 2006, la DGF par habitant des communautés de communes à TPU simple, dont celles qui sont les plus intégrées, atteint 21, 95 euros, contre 42, 38 euros pour les communautés d'agglomération, et 83, 60 euros pour les communautés urbaines ! Pourquoi les intercommunalités constituées pour l'essentiel de communes rurales et moyennes, qui sont déjà peu aidées par les dispositifs de péréquation, doivent-elles faire face à ce lourd handicap ?
L'impact de l'ensemble de ces dispositifs négatifs se double de l'absence d'une véritable politique de péréquation à l'échelon national. De ce point de vue, le projet de loi de finances pour 2007 illustre cet axiome ancien : on ne touche pas aux rentes de situation ; la péréquation ne se fait qu'aux marges, non comme principe d'organisation du budget. Ainsi se renforce le processus de paupérisation, qui regroupe sur les mêmes territoires communes à petits revenus et habitants à faibles ressources. Là est le coeur du malaise territorial français, dont les émeutes dans les banlieues, à la fin de l'année 2005, ne sont que l'un des symptômes.
Enfin, je me contenterai de mentionner la dernière cause de cette aggravation des inégalités entre collectivités : la politique de « décentralisation », initiée par le gouvernement Raffarin en 2002, et qui s'est faite à marche forcée, sans association réelle des collectivités et, surtout, sans compensation intégrale, alors qu'elle avait été promise !
Monsieur le ministre, voilà le jugement que je porte sur la loi de finances pour 2006 et sur le projet de loi de finances pour 2007. Les mesures financières à destination des collectivités locales que vous nous proposez sont inéquitables, confuses, inadaptées aux problèmes que vivent les élus locaux.