La séance est ouverte à seize heures cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
J'informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié est parvenue à l'adoption d'un texte commun.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le rapport sur le service annexe d'amortissement de la dette de la SNCF, en application de l'article 159 de la loi de finances pour 2006.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Conformément à la loi de finances pour 2006, il sera transmis à la commission des finances. Il sera disponible au bureau de la distribution.
Mes chers collègues, nous allons procéder au débat sur les recettes des collectivités territoriales.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, il me revient l'honneur d'ouvrir cette discussion consacrée aux collectivités territoriales, discussion qui est toujours, pour le Sénat, un moment fort de l'examen du projet de loi de finances.
Comparé à 2006, l'horizon semble, cette année, presque dégagé. Philippe Marini, avec le talent que nous lui connaissons, ...
Sourires
... nous parlera tout à l'heure de la réforme de la taxe professionnelle.
Sourires
Le Gouvernement n'envisage pas - pour l'instant, en tout cas - de supprimer une dotation telle que la DGE, la dotation globale d'équipement, ou de créer un nouveau dégrèvement, comme celui qui a été consenti l'année dernière pour la taxe sur le foncier non bâti. En apparence donc, toutes les conditions sont réunies pour que nous ayons un débat serein.
Et pourtant, messieurs les ministres, en vous disant qu'une certaine inquiétude nous gagne, ...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. ...je crois traduire un sentiment qui est largement partagé par mes collègues. Pour reprendre les termes de René Char, les élus locaux éprouvent une sorte de « sérénité crispée ».
Oui ! sur les travées socialistes.
D'un côté, nous sommes sereins parce que le Gouvernement a toujours, jusqu'à présent, rempli ses engagements.
Il est même allé au-delà, ...
... dans le cadre du RMI, le revenu minimum d'insertion, et de la reconduction du pacte de croissance et de solidarité.
Mais, d'un autre côté, notre sérénité est « crispée » dans la mesure où nous constatons tous, en tant qu'élus, que la situation est loin d'être aisée, singulièrement dans les départements.
Cette crispation a plusieurs origines, connues, qui concernent toutes les conditions de transfert de charges.
À ce titre, j'évoquerai deux points très précis.
Le premier point, presque rituel, concerne le RMI. Certes, l'État a rempli tous ses engagements, et il est même allé plus loin, en augmentant, depuis 2004, les budgets départementaux. L'article 10 du projet de loi de finances rectificative pour 2006 prévoit ainsi un abondement pérenne de 400 millions d'euros jusqu'en 2008. Pourtant, le compte n'y est pas encore.
En 2005, le déficit s'établissait à 850 millions d'euros ; en 2006, il sera sans doute supérieur à 1 milliard d'euros. Dans ces conditions, comment ne pas comprendre l'inquiétude des élus, qui doivent, au quotidien, équilibrer les budgets, dans des conditions de plus en plus complexes ?
Ce différentiel, de l'ordre de 500 millions d'euros, est à la charge des départements ! Admettez, messieurs les ministres, que le sentiment de crispation ressenti par les élus soit alors légitime !
En outre, ces éléments s'inscrivent dans un contexte où, de toute part, de nouvelles compétences entraînent de nouvelles charges. J'en veux pour preuve - et j'aborderai là mon second point -, la situation des sapeurs-pompiers.
Ainsi, entre 2000 et 2006, les dépenses consacrées aux services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, sont passées de 2 milliards d'euros à 3, 5 milliards d'euros. La part des départements, dans ces dépenses, est passée de 894 millions d'euros à 1, 8 milliard d'euros, soit plus qu'un doublement. Les départements financent donc dorénavant près de 53 % des dépenses des SDIS.
Dans ce contexte, nous apprenons qu'une réforme du Fonds d'aide à l'investissement des SDIS est en cours, et qu'elle se traduirait par une baisse des crédits de 15 millions d'euros environ. Même si nous avons obtenu des précisions en la matière, l'émotion suscitée par cette nouvelle, lors de la discussion des crédits de la mission « Sécurité civile » par la commission, est, me semble-t-il, significative d'une relative crispation des élus.
Par ailleurs - mais nous aurons l'occasion d'en reparler à l'occasion de l'examen de certains amendements -, se pose la question du financement de l'allocation vétérance en 2005.
Là non plus, je ne suis pas sûr, messieurs les ministres, que le « compte y soit ». En 2005, vous avez transféré aux départements 20 millions d'euros, arguant d'une montée en puissance progressive du paiement. Dès 2006, vous avez réévalué cette dépense à 64 millions d'euros, et leur avez transféré la moitié de la somme, soit 32 millions d'euros.
La question qui se pose - je n'ai pas la réponse - est la suivante : les départements ont-ils, oui ou non, supporté plus de la moitié de la dépense en 2005 ? Je peux dire, à titre personnel, que mes collaborateurs chargés des finances m'assurent que le compte n'y est pas encore, ou n'y est pas encore !
Toutes ces considérations me conduisent à évoquer la question des recettes : comment les ressources des collectivités sont-elles réparties ?
J'exposerai brièvement deux points, qui me paraissent être quelquefois sources de malentendu : la réforme de la DGF, la dotation globale de fonctionnement, des départements, et les ressources résultant des droits de mutation à titre onéreux, les DMTO.
J'aborderai, en premier lieu, la réforme de la DGF des départements, notamment le rattrapage des départements « anciennement » éligibles à la dotation de fonctionnement minimale, la DFM, soit vingt-quatre d'entre eux.
À l'occasion de la réforme de 2005, que vous avez « portée », messieurs les ministres, il a été décidé un rattrapage pour les dotations par habitant.
En effet, cette réforme devait viser à renforcer la péréquation, une notion à laquelle nous sommes très attachés parce qu'elle implique la solidarité entre les différentes collectivités locales. Or, aujourd'hui, que constatons-nous ?
La progression des dotations des quarante départements nouvellement éligibles à la DFM s'établit à 24, 2 %, ce qui a correspondu, en moyenne, à 13, 97 euros par habitant en 2005, contre 11, 25 euros en 2004, soit une augmentation de 2, 72 euros.
S'agissant des vingt-quatre départements éligibles à la DFM en 2004, voire avant, le taux de progression s'est élevé, en 2005, à 11, 5 %, leur assurant une dotation par habitant de 45, 04 euros, contre 40, 40 euros en 2004, soit une augmentation de 4, 64 euros.
En dépit de ce mécanisme de rattrapage, je tiens à souligner le fait que la dotation accordée aux départements qui n'étaient pas éligibles à la DFM ne progresse donc que de 2, 72 euros par habitant, contre 4, 64 euros pour les départements qui avaient touché, si je puis dire, le jackpot.
Messieurs les ministres, en dépit de la réforme votée l'année dernière, l'écart en valeur absolue ne cesse de se creuser : est-ce donc pour cette raison que vous souhaitez revoir le dispositif ?
Si la réforme a permis de diminuer l'écart relatif, il n'en reste pas moins que les 40 départements nouvellement éligibles à la DFM ont perçu, en 2005, des attributions 3, 22 fois inférieures à celle des 24 départements anciennement éligibles, alors que ce rapport était de 1 à 3, 59 en 2004. Or, le potentiel financier par habitant des premiers n'excède que de 2, 2 % celui des seconds : rien ne peut donc justifier la préservation d'un écart si important !
J'ai tenu à attirer votre attention sur ce point parce que je sais à quel point la mutation est difficile et doit être longuement expliquée. Notre détermination à mener la réforme la plus juste et la plus équitable est sans faille, et vous savez pouvoir compter sur nous. Cette question de la DFM présente, d'ailleurs, l'intérêt de nous montrer qu'il existe encore des marges de progression : alors que les collectivités, singulièrement les départements, traversent clairement une crise de confiance, la préservation d'inégalités de ce type ne peut que jeter le trouble parmi les élus et, donc, conduire à la fameuse « crispation » que je viens d'évoquer.
En deuxième lieu, j'évoquerai les droits de mutation à titre onéreux.
Depuis le début de la discussion de ce projet de budget, nous entendons une clameur insistante s'élever du banc du Gouvernement : il y a des problèmes liés au RMI, à l'APA, aux routes et aux SDIS, mais les DMTO, eux, progressent ! Cela est tout à fait exact, et il faut s'en féliciter, car cette ressource, qui est la seule à connaître un certain dynamisme, sert de « contrepoint », même si ce n'est pas son rôle, à l'évolution décevante de la TIPP.
Cependant, il faut bien se rendre à l'évidence : si cette ressource a augmenté de 80 % depuis 2000, nos dépenses en niveau ont plus progressé encore. De plus, elle est très mal répartie : entre le département des Alpes-Maritimes et celui de la Meuse, où les DMTO représentent respectivement un montant par habitant de 232 euros et de 48 euros, le rapport est de 1 à 6 !
En conséquence, messieurs les ministres, tout en me félicitant du dynamisme de cette recette qui apporte effectivement un peu de souplesse aux collectivités, il ne faudrait pas ramener tout le débat que nous devons avoir avec vous à la seule question des DMTO.
À mon sens, cette année de « calme relatif » constitue au contraire une pause bienvenue : nous devons impérativement la mettre à profit pour « poser les sujets sur la table », faire le point et réfléchir, afin de ne pas nous retrouver tous les ans à devoir tristement constater que, même si l'État remplit scrupuleusement ses obligations constitutionnelles, il subsiste encore des inquiétudes, et toujours les mêmes.
J'en viens maintenant à un tout autre sujet.
Comme j'en avais exprimé l'intention voilà un an, la commission des finances du Sénat, fidèle en cela à sa vocation, travaille actuellement avec le service des collectivités territoriales sur la constitution d'une base de données relative aux finances locales. Notre objectif, à terme, est de doter le Sénat d'un outil lui permettant de procéder à des expertises et à des simulations de manière complètement autonome.
Afin de déterminer dans quelle mesure un tel outil pouvait être développé, le Sénat a demandé à deux cabinets de réaliser une étude de faisabilité, qui lui a été remise en juillet dernier. Il en ressort que notre assemblée ne peut pas se doter de capacités de simulation aussi efficaces que celles dont dispose le Gouvernement, et ce à double titre : d'une part, du fait de limitations en termes de moyens, notamment d'effectifs, les personnes recrutées ne pouvant avoir toutes les compétences nécessaires pour utiliser cet outil de simulation ; d'autre part, du fait de difficultés relatives à l'obtention des données, notamment en termes de délais.
Outre un coût de fonctionnement significatif, la mise en place d'un tel outil aurait, en effet, un autre inconvénient : il permettrait de ne procéder à des simulations, en « régime de croisière », que sur 10 % des dispositions fiscales et sur 50 % des dotations. Comme une seule simulation à la fois serait possible, avec pour chacune un délai variant d'une heure à plusieurs jours, nous ne pourrions étudier qu'une faible part des mesures proposées dans les amendements déposés lors de la discussion budgétaire et portant sur les collectivités territoriales.
Enfin, bien évidemment la montée en charge d'un tel dispositif serait lente et difficile.
Aussi nous a-t-il semblé plus réaliste d'envisager une action en deux temps.
Dans un premier temps, il convient de convenir avec le Gouvernement des modalités concrètes selon lesquelles les principales données dont il dispose pourraient, dès à présent, être mises à la disposition du Sénat.
Dans un second temps, il importe de mettre en place, au sein de la Haute Assemblée, une « capacité minimale » d'utilisation des données financières et fiscales des administrations centrales, peu coûteuse et rapidement opérationnelle, pour laquelle nous pourrions éventuellement décider d'une montée en puissance ultérieure, en vue d'accéder progressivement à une véritable autonomie d'expertise.
À cet égard, la commission des finances a auditionné, le 18 octobre dernier, le directeur général de la DGI, la direction générale des impôts, le représentant de la DGCL, la direction générale des collectivités locales, et celui de la DGCP, la direction générale de la comptabilité publique, ainsi qu'un représentant du directeur général de l'INSEE. Lors de cette audition, il est apparu que les informations pertinentes pouvaient être obtenues, pour l'essentiel, auprès de ces trois directions générales. Elles se sont, d'ailleurs, engagées à répondre à nos éventuelles demandes et à nous transmettre un certain nombre de fichiers. Je leur ai donc immédiatement envoyé un courrier en ce sens.
Messieurs les ministres, mes chers collègues, seule la DGCP a répondu dans les délais. Je viens seulement de recevoir ce matin même les informations de la DGI. Le cas de la DGCL est plus particulier : non seulement elle nous a adressé les données demandées avec un léger retard, mais, surtout, elle a fait preuve d'un sens de l'humour certain, auquel elle ne nous avait pas habitués jusqu'à maintenant.
En effet, nonobstant les dispositions de l'article 57 de la LOLF, elle nous a demandé de lui régler, sous 30 jours, la somme de 1 526, 01 euros, dont 1, 52 euro de frais de port !
Sourires
J'espère, messieurs les ministres, que vous serez notre avocat auprès de la DGCL, pour éviter ce type de facturation quelque peu désobligeante. En tout état de cause, sous des dehors empreints d'une certaine légèreté, voilà un nouveau sujet de réflexion !
Applaudissements sur les travées de l'UC -UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l'occasion de ce débat sur les finances des collectivités territoriales et, plus particulièrement, sur leurs recettes, je me bornerai à traiter d'un seul sujet, à savoir la réforme de la taxe professionnelle qui en est à sa première année d'application et à l'égard de laquelle l'attitude de la commission des finances se résume en deux mots : cohérence et vigilance.
Cohérence, parce que la réforme n'a qu'un an : il faut donc la « laisser vivre ».
Vigilance, parce nous sommes très attentifs à l'évolution des bases de la taxe professionnelle, et en particulier aux possibilités d'optimisation fiscale que certaines entreprises pourraient être tentées d'exploiter.
Messieurs les ministres, la réforme de la taxe professionnelle était indispensable. Celle qui a été engagée est nettement préférable à la réforme proposée par la commission Fouquet.
Il est, en effet, tout à fait incontournable, dans le monde ouvert qui est le nôtre, d'adapter la fiscalité des entreprises. L'allégement de la taxe professionnelle, plus spécialement pour celles du secteur industriel, est une évidente nécessité.
Comme chacun le sait, si la France se situe dans la moyenne de l'Union européenne en ce qui concerne l'imposition des bénéfices des entreprises, elle figure parmi les États qui imposent le plus les entreprises, tous prélèvements confondus. Par ailleurs, et par nature, la taxe professionnelle est un impôt qui, du fait de son assiette, surtaxe l'industrie par rapport à ses capacités contributives, alors qu'il s'agit du secteur de l'activité nationale le plus exposé aujourd'hui à la compétition internationale.
Certes, j'entends encore assez souvent certaines personnes critiquer le Gouvernement : selon elles, celui-ci aurait renoncé à effectuer une « vraie réforme », c'est-à-dire celle qui a été préconisée par la commission Fouquet, pour faire ce qu'ils appellent, bien à tort, à mon avis, une « réforme au rabais ».
Je vais m'efforcer de vous le démontrer, une telle appréciation est complètement inexacte. Je n'hésite pas à l'affirmer, la réforme engagée a certainement été le meilleur compromis que nous puissions trouver compte tenu des contraintes qui étaient à l'oeuvre. J'avancerai trois raisons.
Premièrement - ne m'en veuillez pas, mais on ne se refait pas quand on représente la commission des finances ! -, la réforme engagée est moins chère pour l'État. En effet, le système proposé par la commission Fouquet aboutissait, d'une part, à supprimer la part régionale de la taxe professionnelle, et, d'autre part - et surtout ! -, à alourdir la fiscalité de nombreuses entreprises, ce qui nécessitait la mise en place d'un dispositif de compensation à la charge de l'État, dont le coût a été évalué à plus de 4, 5 milliards d'euros par an.
La réforme qui est actuellement à l'oeuvre ne coûte que 3, 2 milliards d'euros par an. Même si c'est un montant encore très élevé, j'estime que l'économie réalisée est un point positif.
Deuxièmement, la réforme que nous appliquons est plus favorable à l'industrie. Elle permet d'alléger la fiscalité de ce secteur de 1, 6 milliard d'euros, contre 1 milliard d'euros pour la réforme issue de la commission Fouquet.
Troisièmement, la réforme proposée par la commission Fouquet était au moins aussi complexe à appliquer que celle que nous avons votée l'année dernière. Il aurait fallu, en particulier, neutraliser les transferts entre catégories de collectivités territoriales, ce que nous ne savons pas faire simplement.
Je voudrais maintenant en venir à ce qui, encore aujourd'hui, apparaît pour beaucoup d'entre nous, à juste titre d'ailleurs, comme le principal sujet de débat et le principal point de complexité de la réforme de la taxe professionnelle.
Messieurs les ministres, j'ai la faiblesse de penser que, grâce notamment aux amendements adoptés sur l'initiative de la commission des finances du Sénat, cette réforme est, sinon bénéfique aux collectivités territoriales - ne rêvons pas ! -, du moins acceptable pour elles. (
En ce qui concerne le principe du ticket modérateur, j'en rappellerai les conditions de déclenchement et j'évoquerai les situations particulières de certaines collectivités.
Comme chacun le sait, les collectivités territoriales participent au financement de la réforme, par l'intermédiaire du mécanisme dit du « ticket modérateur ».
J'aurais certes préféré, en tant que maire et président d'agglomération bénéficiant d'une taxe professionnelle unique, que la réforme ne comportât pas un tel mécanisme. Mais pour cela, monsieur le ministre délégué au budget, il aurait fallu bénéficier d'une marge de manoeuvre budgétaire dont nous ne disposons pas.
Nous n'avions donc pas le choix. Dès lors que le plafonnement était désormais effectif, c'est-à-dire qu'il n'était plus tenu compte des conditions économiques et du taux de la collectivité en 1995, il était nécessaire de prévoir, si une collectivité augmentait son taux de taxe professionnelle au-delà d'un certain seuil, que le surcoût du plafonnement en découlant était à sa charge. Il s'agissait simplement de la mise en oeuvre du principe de responsabilité. On ne peut pas, en effet, messieurs les ministres, tenir une conférence, considérer globalement le solde des finances publiques, collectivités territoriales comprises, comme nos engagements européens nous y obligent, et ne pas inciter nos assemblées délibérantes à prendre leurs responsabilités.
Qui parle ? Le Sénat ou le ministre ?
Monsieur le rapporteur général, me permettez-vous de vous interrompre ?
Monsieur le rapporteur général, dans ce débat concernant les recettes des collectivités territoriales, vous vous exprimez au nom de la commission des finances du Sénat.
Je rappelle que notre assemblée représente l'ensemble des collectivités territoriales. Puis-je donc vous suggérer de faire entendre la parole de nos élus plutôt que celle de l'exécutif, c'est-à-dire du Gouvernement ?
Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Mon cher collègue, votre intervention est utile. En effet, il est important de savoir à quelle assemblée nous appartenons.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le Sénat est-il une assemblée qui se borne à représenter les intérêts corporatifs des collectivités territoriales ou bien une assemblée législative de plein exercice, qui a son mot à dire, en particulier, sur tous les grands sujets de politique économique et financière ?
Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.
Dans un débat sur les collectivités territoriales, devons-nous seulement prendre en compte les sujets, au demeurant légitimes, que nous inspire notre pratique locale, ou devons-nous aussi faire l'effort de dépasser notre condition de gestionnaires locaux pour examiner les grand enjeux ainsi que les responsabilités qu'il nous faut prendre vis-à-vis de nos concitoyens, pour l'avenir ?
Je connais les maires aussi bien que vous, comme chacun ici ! Veuillez donc avoir la bonté, mon cher collègue, d'écouter la fin de mon intervention. Peut-être y entendrez-vous des propos qui vous seront plus agréables !
J'en viens donc au « taux de déclenchement » du ticket modérateur.
Nous avons amélioré considérablement le projet de loi initial du Gouvernement. Dans ce texte, le taux de taxe professionnelle était celui de 2004, pour toutes les collectivités. L'Assemblée nationale avait modifié cette rédaction afin de prendre en compte le taux de 2005, pour toutes les collectivités également, mais dans la limite d'une augmentation de 4, 5 % par rapport au taux de 2004.
Dans le texte adopté par le Sénat - et je remercie ceux de nos collègues des différents groupes qui ont oeuvré à ce compromis -, le taux applicable est toujours celui de 2005, mais dans la limite d'une augmentation, par rapport au taux de 2004, fixée à 5, 5 % pour les communes et les EPCI, à 7, 3 % pour les départements et à 5, 1 % pour les régions. Nous nous sommes adaptés à la situation structurelle des différentes collectivités visées, et c'est ce qui nous a permis de conclure un accord l'an dernier.
Contrairement à ce qui a pu être affirmé, ces taux n'ont pas été fixés de manière arbitraire. Ils ont été calculés d'une manière identique pour chaque catégorie de collectivités territoriales : on a retenu la croissance moyenne du taux observée, pour chaque d'elles, en 2002, 2003 et 2004, avec un coefficient d'augmentation uniforme de quatre points.
L'an dernier, toujours sur l'initiative de la commission des finances, nous avons pris en compte les situations particulières qui nous semblaient le mériter le plus. Un mécanisme de réduction du ticket modérateur a ainsi été instauré.
Premièrement, nous avons prévu une réduction comprise entre 20 % et 50 % pour les collectivités bénéficiant de la « réfaction » du ticket modérateur, cette modulation se faisant en fonction du produit par habitant de la collectivité.
Deuxièmement, nous avons souhaité que les conditions de déclenchement du dispositif soient différentes selon que l'on se trouve dans le régime de « droit commun » ou non. Ainsi, dans le cas des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique, qui sont plus dépendants à l'égard de la taxe professionnelle que les collectivités territoriales stricto sensu, une réduction automatique du ticket modérateur est prévue, dès lors que la proportion de bases plafonnées est supérieure à 50 %.
Troisièmement, nous avons pris en compte le cas des EPCI à fiscalité additionnelle, en neutralisant les conséquences des transferts de compétences entre les communes et ces EPCI pour le calcul du ticket modérateur.
Mes chers collègues, compte tenu du réglage auquel nous sommes parvenus et des objectifs économiques qui sont les nôtres - l'emploi, l'investissement, le réveil de la croissance et la compétitivité internationale de notre pays -, nous devons assumer la réforme adoptée l'an dernier.
Cela dit, il convient de faire preuve de vigilance. Au-delà des dispositions que nous avons adoptées, il nous faut veiller à préserver les bases de la taxe professionnelle. Le système que nous avons mis en place l'an dernier me semble, de ce point de vue, perfectible.
Nous avons voté, l'année dernière, deux amendements « anti-optimisation fiscale » qui sont importants.
Le premier, proposé par le Gouvernement, concernait le cas des mises à disposition de personnel.
Le second, déposé par la commission des finances, avait pour objet de limiter le potentiel d'optimisation fiscale résultant d'une fusion intra-groupe plus ou moins fictive, destinée à minorer la base taxable à l'issue de l'opération. En effet, lorsque de telles opérations interviennent, il faut neutraliser leurs conséquences autant que possible. Dans la même usine, si le même investissement reste affecté à la même activité, il n'y a aucune raison qu'une restructuration intervenant dans le groupe entraîne, dans un simple but de convenance et de minimisation de la charge fiscale, une réduction de la base de la taxe professionnelle.
Des mesures sont encore à arrêter en ce domaine et la commission des finances vous invitera à le faire.
Le premier sujet à prendre en compte, l'intérim, a déjà été abordé il y a un an, en particulier sur l'initiative de François Marc. Ce n'est pas parce que notre collègue siège à gauche de l'hémicycle que son amendement était mauvais et que ce sujet de préoccupation n'était pas important !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Le président Jean Arthuis avait souhaité qu'une solution soit trouvée, mais cela n'avait pas été possible alors. Cette année, nous devons adopter la juste formule. Un nouvel amendement sera donc proposé par la commission des finances, afin que l'intérim ne soit pas un moyen de minimiser les bases de taxe professionnelle.
Le second sujet a sans doute une portée plus importante : il convient, mes chers collègues, de neutraliser l'impact sur les bases de taxe professionnelle du passage aux nouvelles normes comptables internationales IFRS.
Cet enjeu est essentiel. En effet, si nous ne prenons pas d'initiative à cet égard, nous assisterons à une véritable attrition de nos bases fiscales. Là encore, la commission des finances, qui s'est attelée à ce chantier technique et difficile, soumettra des propositions à votre examen.
J'ai cru comprendre que vous préfériez, messieurs les ministres, que ces ajustements interviennent lors de l'examen de la loi de finances rectificative. Cela ne nous interdit pas d'évoquer cette question dès aujourd'hui, afin que nous puissions aboutir à un consensus au moment du collectif budgétaire.
Non seulement je suis d'accord avec M. le rapporteur général, mais je considère l'ensemble de son intervention comme un éloge remarquable de la réforme de la taxe professionnelle.
Il en parle, d'ailleurs, mieux que moi. J'en ai les larmes aux yeux !
Sourires
Vous savez, je ne lis jamais un texte écrit ; j'exprime toujours mes propres convictions !
Mes chers collègues, nos débats de la nuit dernière prouvent que nous ne sommes pas toujours complaisants vis-à-vis du Gouvernement.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Il y a des points et des questions de méthode sur lesquels nous n'hésitons pas à émettre des critiques, à prendre date et à faire état de notre vision des choses, car le contrôle de l'exécutif est l'une des fonctions fondamentales d'une véritable assemblée parlementaire.
Dans l'ensemble, nous pouvons être fiers de la réforme votée l'année dernière. Il nous faut à présent regarder devant nous et l'appliquer dans les meilleures conditions possibles, sans la dénaturer. Mais nous devons aussi trouver les ajustements nécessaires afin qu'elle puisse durer et atteindre les objectifs que nous nous sommes assignés.
Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2007 se caractérise, en ce qui concerne les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales, par une volonté de consolidation des réformes importantes réalisées au cours de la législature.
La première de ces réformes a consisté en une révision de la Constitution, intervenue le 28 mars 2003, destinée à consacrer le pouvoir fiscal des collectivités territoriales, à garantir leur autonomie financière, à assurer la compensation des charges afférentes à leurs compétences et, enfin, à renforcer la péréquation. Énoncés à l'article 72-2 de la loi fondamentale, ces principes sont désormais placés sous la protection du juge constitutionnel.
Sur ce fondement, pour permettre aux collectivités territoriales d'exercer des compétences qui ont été considérablement accrues, notamment par les lois du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité et du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, de nouvelles ressources leur ont été attribuées sous la forme d'impôts partagés, tandis que l'architecture et les critères de répartition de la dotation globale de fonctionnement ont été réformés pour améliorer sa prévisibilité et renforcer son effet de péréquation.
En revanche, force est de constater que les impôts directs locaux, qui n'ont pas fait l'objet de la réforme de grande ampleur dont chacun s'accorde, depuis des années, à reconnaître la nécessité, n'ont connu - je pense, en particulier, à la taxe professionnelle - que des aménagements, sans doute nécessaires, mais peu favorables à. l'autonomie fiscale des collectivités territoriales.
Mes observations porteront ainsi sur l'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, sur les compensations financières des transferts, créations et extensions de compétences, et sur la maîtrise des finances locales.
En premier lieu, il convient de saluer le maintien de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités territoriales.
Il s'élèvera à 84 milliards d'euros en 2007.
Tout au long de la législature, l'enveloppe normée du contrat de croissance et de solidarité aura progressé selon un indice composé de l'évolution prévisionnelle des prix de l'année à venir, majorée de 33 % du taux de croissance du produit intérieur brut de l'année en cours.
Cette évolution mérite d'être saluée au regard, d'une part, des objectifs de stabilisation, à compter de 2003, puis de diminution, en 2007, en volume des dépenses de l'État, d'autre part, des modalités d'indexation bien moins favorables aux collectivités territoriales retenues entre 1996 et 2001.
Cette progression sensible, jointe aux réformes des critères de répartition de la dotation globale de fonctionnement, aura permis de renforcer considérablement la péréquation.
Les résultats obtenus depuis trois ans sont particulièrement tangibles. Ainsi, le montant total des différentes composantes de la dotation globale de fonctionnement dédiées à la péréquation a pratiquement doublé, passant de 3 milliards à 5, 4 milliards d'euros entre 2003 et 2006.
Le projet de loi de finances pour 2007 comporte quelques mesures ciblées destinées à renforcer encore la péréquation. La commission des lois y souscrit.
En deuxième lieu, les compensations financières des compétences mises à la charge des collectivités territoriales s'avèrent, dans l'ensemble, à peu près équitables.
S'agissant du revenu minimum d'insertion, le droit à compensation des départements correspond aux dépenses exposées par l'État l'année précédant le transfert de compétences, c'est-à-dire 2003. Il s'élève à 4, 9 milliards d'euros.
Toutefois, sous l'effet de l'augmentation du nombre des bénéficiaires du RMI, la charge des départements s'est considérablement alourdie.
Le Gouvernement et le Parlement ont pris en compte cette évolution, d'abord, par l'attribution aux départements de 457 millions d'euros au titre de l'année 2004, puis, par la mise en place du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, qui est doté de 500 millions d'euros par an pendant trois ans au titre des années 2005, 2006 et 2007.
L'abondement de ce fonds et les modalités de répartition des crédits seront précisés par le projet de loi de finances rectificative pour 2006. Je souhaite qu'ils permettent de prendre en compte les efforts déployés par les départements en faveur du retour à l'emploi des bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, notamment avec !a signature des contrats d'avenir.
Au total, les dépenses exposées auront été intégralement couvertes en 2004, et à 93, 5 % en 2005. Certes, la TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers, ne constitue pas une recette très dynamique. En revanche, les droits de mutation à titre onéreux ont connu une progression rapide au cours des dernières années, sous l'effet de la hausse des prix de l'immobilier et de l'augmentation du nombre des transactions.
S'agissant des compétences transférées par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, le Gouvernement a accédé à plusieurs demandes des élus siégeant au sein de la commission consultative d'évaluation des charges.
Pour le financement des bourses sanitaires et sociales, des formations sanitaires et sociales et des fonds de solidarité pour le logement, les dépenses de l'État lors de la dernière année précédant le transfert seront prises en compte, de préférence à la moyenne des dépenses constatées au cours des trois dernières années. Au total, les collectivités territoriales recevront 157 millions d'euros de plus que ce à quoi elles avaient droit.
En revanche, la compensation des charges induites par les transferts des personnels TOS, techniciens, ouvriers et de service, de l'éducation nationale et des agents du ministère de l'équipement suscite encore l'inquiétude des élus locaux.
Notre collègue M. Éric Doligé s'en est fait l'écho dans un rapport établi au nom de l'Observatoire de la décentralisation du Sénat. Nous avons évoqué ce sujet avec M. Christian Estrosi, ministre délégué à l'aménagement du territoire, lors de son audition par la commission des lois.
Enfin, la réflexion sur la maîtrise des finances locales a été relancée par le Gouvernement, lors d'une conférence nationale des finances publiques réunie au mois de janvier dernier.
Dans ce débat, il me semble nécessaire de ne perdre de vue ni le principe de libre administration des collectivités territoriales, ni le fait que les budgets locaux présentent, par rapport à celui de l'État, la double particularité d'être soumis à des règles d'équilibre strictes et d'être largement consacrés à l'investissement.
S'il est vrai que la dette des administrations publiques locales représentait 6, 9 % du produit intérieur brut en 2005, pour une dette publique totale de 66, 6 % du PIB, les collectivités territoriales ont recours à l'emprunt pour financer, non pas leurs déficits - ce serait de la cavalerie - mais leurs dépenses d'investissement, c'est-à-dire pour préparer l'avenir.
En conséquence, je crois important de souligner que la maîtrise des finances locales suppose de donner aux collectivités territoriales des marges de manoeuvre supplémentaires, à la fois sur leurs dépenses et sur leurs recettes.
Pour ce qui concerne les dépenses, le Gouvernement a formulé un certain nombre de propositions devant le comité des finances locales et les associations d'élus.
Pour ce qui concerne les recettes, les réformes des impôts locaux opérées au cours de cette législature auront eu des effets contrastés sur le pouvoir fiscal des collectivités territoriales.
Plusieurs assouplissements des règles de lien entre les taux de la taxe professionnelle et ceux des impôts locaux pesant sur les ménages ont ainsi donné des marges de manoeuvre supplémentaires aux communes et aux EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale
En outre, à compter de 2007, les régions ont la possibilité - et elles ne s'en privent pas !- de moduler les tarifs de la fraction de TIPP qui leur a été transférée pour un gain supplémentaire potentiel de 500 millions d'euros.
En revanche, le plafonnement de la taxe professionnelle acquittée par les entreprises et l'institution d'un bouclier fiscal au bénéfice des ménages vont amputer le pouvoir fiscal des collectivités territoriales. Heureusement, grâce à cette mesure, certaines entreprises en difficulté seront peut-être sauvées.
En conclusion, je dirai que l'autonomie fiscale constitue à mes yeux, non seulement un facteur d'efficacité de la gestion des collectivités territoriales, mais surtout un fondement de la démocratie locale.
La réforme de la fiscalité locale constitue donc plus que jamais une nécessité. Je forme le voeu qu'elle soit enfin réalisée sous la prochaine législature.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 40 minutes ;
Groupe socialiste, 27 minutes ;
Groupe Union centriste-UDF, 12 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 10 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 9 minutes.
Je vous rappelle que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le temps programmé pour le Gouvernement est prévu au maximum pour trente-cinq minutes.
Le Gouvernement parle quand il le veut ! C'est la Constitution ! On n'est plus sous la IVe République et on n'est pas encore sous la VIe République !
Mon cher collègue, vous n'avez pas à commenter les propositions de la conférence des présidents dont vous n'êtes pas membre, mais où tous les groupes sont représentés !
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, les collectivités territoriales assurent les services indispensables à la vie quotidienne de nos concitoyens, mais aussi ceux qui contribuent à la vie de toutes les entreprises.
Les besoins des populations ont fortement évolué. Ainsi, la modification des situations familiales, notamment la croissance du nombre de familles monoparentales, a nécessité une modification de la conception de l'accueil des enfants dès le plus jeune âge. L'augmentation des places en crèche, mais aussi l'accueil périscolaire, sont devenus d'autant plus incontournables que les transformations affectant le monde du travail se traduisent, bien souvent, par des horaires éclatés dans les activités de commerce ou de services : l'absence du parent rend, en effet, obligatoire la prise en charge de l'enfant.
Ces réalités sont très peu prises en compte et, en cette année 2006, on a enregistré, au contraire, une progression du budget de la CAF très inférieure aux besoins constatés dans les contrats « petite enfance » ou « temps libre » négociés avec les collectivités concernées.
Dans les communes qui accueillent les familles les plus fragiles, l'aggravation des situations pèse lourd sur les budgets : 60 % des salariés, tous secteurs confondus, gagnent moins de 1 600 euros net par mois, 47 % des familles monoparentales ont des revenus inférieurs au seuil de pauvreté En effet, les charges liées au logement - augmentation des loyers, mais aussi coût de l'énergie - absorbent bien au-delà des 30 % des ressources des foyers. Les communes, les conseils généraux sont donc de plus en plus sollicités pour aider, au titre de l'aide sociale, à passer les caps difficiles.
Parallèlement, les prix des services mis à leur disposition doivent tenir compte de leurs capacités contributives.
Dans son dernier rapport, le Secours catholique affirme que le pouvoir d'achat des plus pauvres en 2005 est égal à celui de 2000. Et le rapport du CERC, le centre d'étude des revenus et des coûts, analyse que « l'emploi instable est l'une des principales causes de la croissance des inégalités de revenus en France ».
On nous dit que le chômage diminue, mais les conseils généraux constatent que le nombre de bénéficiaires du RMI augmente. Que recouvrent, en réalité, ces chiffres relatifs au nombre de demandeurs d'emploi ? Ils ne reflètent pas la totalité de ceux qui sont chômeurs !
Ainsi, nos collectivités souffrent directement de cette aggravation des conditions de vie qui touche la grande majorité de la population. Et quand elles ont des quartiers en ZUS, zone urbaine sensible, ou en ZFU, zone franche urbaine, les choses s'aggravent. L'Observatoire national des zones urbaines a dressé un bilan de la situation. Il montre que, à la fin de 2005, le taux de chômage est deux fois supérieur dans ces quartiers à ce qu'il est dans le reste de la France : quatre jeunes sur dix sont en recherche d'emploi.
Les inégalités s'accentuent, et nous constatons aujourd'hui que si la politique de la ville a permis, par ses investissements, d'embellir les espaces publics, d'améliorer les immeubles de logements ou encore les équipements, comme nous l'avons dit lors du débat sur la mission « Quartiers en difficulté », « ce n'est pas une politique de la ville qui reforme à elle seule les dégâts d'une politique de désertification industrielle ou de casse des services publics ».
Quant aux moyens permettant aux collectivités, aux associations de mener des actions sur le terrain pour accompagner toutes ces familles et les aider à retrouver un emploi, à être capables de se mobiliser pour accompagner leurs enfants dans leur développement, ils ont peu à peu fondu.
Quand nous soulevons toutes ces questions, on nous invite à nous tourner vers les collectivités comme les conseils généraux ou régionaux. Mais, aujourd'hui, ces collectivités se retrouvent dans des situations compliquées. Les transferts opérés depuis la loi relative aux libertés et responsabilités locales pèsent lourdement sur leur budget. Je ne vous citerai pas les chiffres, votre ministère les connaît très bien.
Les collectivités sont face à des dépenses obligatoires pour lesquelles elles n'ont qu'à appliquer des choix décidés par le Gouvernement. L'un de nos collègues - je crois même que c'est le rapporteur général du budget, M. Marini - disait que les collectivités territoriales ne voulaient pas devenir les sous-traitants de l'État. Eh bien, je crois que, aujourd'hui, on peut dire qu'elles le sont devenues !
En effet, le Gouvernement exige qu'elles contribuent à la réduction du déficit public. Elles le font puisque, chaque année, elles votent leur budget en équilibre. En fait, non content d'exiger que les collectivités territoriales prennent en charge les dépenses et, surtout, les évolutions que vous ne voulez plus assurer directement dans le budget de la nation, vous attendez, de plus, qu'elles le fassent à périmètre financier constant !
Vous reprochez régulièrement aux collectivités territoriales de vouloir mener, sur leur territoire, des politiques spécifiques qui ne seraient pas de leurs compétences.
En fait, vous voudriez que les élus départementaux et régionaux n'utilisent les impôts locaux que dans les domaines où vous leur avez remis vos responsabilités. Ainsi, ces impôts locaux suffiraient. Mais vous oubliez que les collectivités territoriales sont élues au suffrage universel, et que leurs habitants en attendent des services de qualité. Les actions menées sur le terrain sont indispensables pour leur qualité de vie.
Les élus locaux sont ainsi, bien souvent, des fusibles dans les moments difficiles. Or, par vos choix, vous êtes en train de leur renvoyer « une patate chaude » qui pourrait, en retour, vous brûler les doigts.
Non, les collectivités territoriales ne dépensent pas à tort et à travers ! Non seulement, chaque année, leur budget est en équilibre, mais, de plus, la fiscalité locale est restée relativement stable : elle pesait 5, 5 % en 1997 dans les prélèvements obligatoires, elle est de 5, 7 % aujourd'hui.
Vous le savez également, elles représentent un poids économique non négligeable, puisqu'elles réalisent plus de 70 % des investissements publics, soit quatre fois plus que l'État - 48, 6 milliards d'euros environ pour 2006. Les entreprises du bâtiment et des travaux publics et les emplois de ce secteur en bénéficient pleinement.
Mais si elles sont obligées aujourd'hui d'augmenter les impôts acquittés par les ménages, c'est la conséquence des choix que vous leur imposez.
Le rapport de notre collègue Éric Doligé sur le transfert des personnels TOS et des DDE est éloquent : « La question est de savoir si cette réforme ne va pas se transformer en bombe à retardement financière en raison des écarts observés entre les effectifs transférés et les besoins répertoriés par les collectivités, des incertitudes des emplois disparus ou vacants, de l'alignement des régimes d'indemnités et de primes ou de la dégradation annoncée des comptes de la CNRACL avec l'arrivée de populations TOS relativement plus âgées. »
J'ajoute que la modification intervenue s'agissant des directions départementales de l'équipement se traduit sur le terrain par l'abandon de la gestion du droit des sols auprès des communes de moins de 10 000 habitants, ce qui met ces dernières en grande difficulté pour gérer leurs permis de construire.
La situation ne peut se prolonger, et vous l'avez dans une certaine mesure compris, même si vous ne souhaitez pas y remédier pleinement, comme en témoigne le fait que vous ayez décidé de conserver, en 2007, le pacte de croissance et de solidarité tel qu'il était cette année.
Vous ne pouvez cependant pas en rester là. La décision prise dans la loi de finances pour 2006 de bloquer la taxe professionnelle à 3, 5 % de la valeur ajoutée n'est pas tenable. Les résultats de la simulation mise en ligne sur le site du ministère montrent des écarts importants avec les simulations faites au moment de la loi de finances. On nous dit que nous ne serons pas en mesure de connaître la réalité avant avril, ce qui peut se comprendre techniquement, mais n'est pas acceptable puisque tous les budgets doivent être votés avant le 31 mars.
Les collectivités concernées par ce ticket modérateur, en particulier les EPCI, pourraient en 2007 être dans l'obligation de ponctionner 526 millions d'euros sur leurs ressources fiscales au titre du partage du plafonnement : vingt-deux des vingt-cinq régions, quatre-vingt-trois des quatre-vingt-dix-huit départements et 40 % des intercommunalités sont concernés, et, parmi ces collectivités, un grand nombre ont des taux de taxe professionnelle qui se situent en dessous de la moyenne nationale.
Toutes ces décisions ont un seul but : réduire la dépense publique. Or, cette dernière n'a rien de répréhensible dès lors qu'elle répond aux attentes légitimes de la population, qu'elle contribue au développement économique de nos territoires, qu'elle participe à l'aménagement du territoire, et cela dans l'intérêt général.
L'urgence d'une réforme de la fiscalité locale est manifeste ; les élus vous l'ont rappelé lors du Congrès des maires de France, la semaine dernière. La nécessité de moyens pour assumer nos responsabilités est le constat partagé par tous les élus. Il est urgent de mettre en débat toutes les propositions qui permettront de changer la donne des finances et de la fiscalité locales.
Il faut dès à présent prendre d'autres mesures pour des priorités majeures : moderniser la taxe professionnelle et alléger les impôts des ménages, qui deviennent insupportables. Je l'ai rappelé ici à maintes reprises, et nous avons déposé une proposition de loi dans ce sens, notre fiscalité ne répond plus aux conditions économiques actuelles. Il faut donc la moderniser.
Ce sentiment est partagé par de nombreux élus et par de nombreuses personnalités. Je vous rappelle ce que disait Jean-Paul Delevoye : « La prochaine asphyxie des finances communales a pour principale raison le fait que quand l'économie était agricole, la richesse et la fiscalité étaient basées sur le foncier ; quand l'économie est devenue industrielle, la richesse était fondée sur le travail et le capital, et la fiscalité aussi. L'économie est devenue principalement aujourd'hui une économie de services et financière. Or, cette sphère est notoirement sous-fiscalisée. »
Ce constat est fait aussi par de nombreux chefs d'entreprise. Il y a aujourd'hui huit fois plus d'argent dans la sphère financière que dans la sphère productive, et vous continuez à taxer, messieurs les ministres, ceux qui participent à l'industrialisation de notre pays ! Auriez-vous fait le choix de favoriser les secteurs financiers, assurantiels et bancaires au détriment de nos industries ? Nous pourrions le croire au vu de votre dogmatisme fiscal !
Les actifs financiers représentent cinq fois le budget de la nation, soit 5 000 milliards d'euros.
La réforme fiscale serait une façon de réduire le poids de la pression fiscale sur les ménages en les intégrant dans la base de la taxe professionnelle.
Comme nous vous le proposerons dans un amendement, une taxation modeste ne ferait que diminuer un peu l'inégalité des entreprises face à l'impôt, notamment à la taxe professionnelle. Cette recette nouvelle pourrait servir uniquement à la péréquation.
Nous pensons que l'impôt est un outil de justice et de solidarité. Votre conception est aux antipodes : elle ne favorise que les hautes sphères financières. C'est la raison principale de votre réticence à prendre en compte nos propositions.
Cette question des moyens financiers sera, j'en suis certaine, au coeur des débats en 2007, et pour ce qui nous concerne, en tout cas, nous en débattrons avec la population. §
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, après quatre ans et demi d'exercice des responsabilités gouvernementales, le probable candidat UMP à la prochaine élection présidentielle a décidé d'axer son programme sur le thème de la rupture.
On ne sait si cette stratégie de communication relève du pur marketing politique ou bien si elle s'alimente au généreux guichet de la mauvaise foi, car, si l'on ressent de profonds besoins de changement de la politique conduite en France depuis bientôt cinq ans, on ne peut s'en prendre seulement aux autres alors que l'on a occupé durant toute la période un rôle ministériel éminent au sein du Gouvernement : qu'on ne nous fasse pas croire que le ministre de l'intérieur ne se sent aucune responsabilité dans la conduite des dossiers de la décentralisation, des finances locales et de la politique mise en oeuvre pour les collectivités, ...
...car ici le langage de la rupture ne peut relever que du reniement ou bien de la repentance. Il est vrai qu'il n'est jamais trop tard...
Les évolutions constatées depuis quatre ans et demi dans la politique menée envers les collectivités ont fait intervenir, certes, des adaptations et des simplifications, mais, avec nombre d'observateurs et d'associations d'élus, on se doit aujourd'hui de faire état d'un constat véritablement accablant.
Évoquons, en premier lieu, la loi constitutionnelle de décentralisation et votre incapacité à réduire les inégalités territoriales.
Le cinquième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution, rajouté sur l'initiative de ce gouvernement, précise en effet dorénavant que « la loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ». Or, si le principe, lui aussi constitutionnalisé, d'« autonomie financière » a bien été précisé dans une loi organique de 2004 et fait l'objet d'un suivi spécifique, rien de tel n'a été entrepris pour les dispositifs annoncés de péréquation !
On voit bien, messieurs les ministres, de quel côté vous fait pencher votre logique libérale : la recherche d'une plus grande égalité de ressources entre collectivités reste bien le parent pauvre de votre démarche.
Dans les cinq ans, entre 1997 et 2002, il n'avait pas été fait grand-chose !
Un deuxième grief touche à la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales elle-même, car les élus ont à juste raison le sentiment que le coefficient d'autonomie financière retenu par le Gouvernement est purement théorique et ne génère aucune liberté de manoeuvre supplémentaire pour des responsables locaux confrontés à un processus d'alourdissement des charges obligatoires des collectivités.
Mis dans l'obligation d'augmenter les impôts locaux, les élus supportent de plus en plus mal le discours de culpabilisation qui est développé à leur égard depuis plus d'un an.
D'ailleurs, l'une des revendications unanimes du récent Congrès des maires de France a porté sur un « partenariat plus équilibré avec l'État »...
...et le président de la commission des finances a parlé tout à l'heure de la « crispation accentuée » qui se manifeste chez les élus locaux. Je crois donc que nous faisons le même diagnostic.
Le troisième motif de la « colère » des élus porte sur la compensation financière très insuffisante des transferts de compétences nés de cette décentralisation. On sait que la promesse était de compenser les transferts « à l'euro près ». Or, le manque à gagner cumulé des collectivités se chiffre à au moins 4 milliards d'euros, messieurs les ministres ; dans mon département par exemple, l'ardoise cumulée de l'État était estimée en juin dernier à 67 millions d'euros.
Quant à la réforme de la DGF, elle a certes apporté des simplifications sur la forme, mais elle n'a pas vraiment réorienté sur le fond la répartition très déséquilibrée entre partie forfaitaire et dotation de péréquation. La transparence n'a d'ailleurs pas été clairement au rendez-vous, par exemple pour les départements, arbitrairement classés en deux groupes, « urbains » et « ruraux », sans explication crédible.
Cette énumération des insuffisances gouvernementales serait incomplète si je n'évoquais pas une magistrale déconvenue, celle de la réforme de la fiscalité locale. Annoncée à coups de trompette élyséenne, les réformes de la taxe professionnelle et de la taxe sur le foncier non bâti ont fait long feu : comme on le sait, la montagne a, en définitive, accouché d'une souris.
Ces cinq illustrations démontrent, s'il en était besoin, à quel point la situation des collectivités a pâti ces cinq dernières années de la politique gouvernementale.
La nécessaire réforme des finances locales, qui aurait dû constituer un préalable à la loi de décentralisation, est restée en plan, ...
...ce qui a conduit le vice-président de l'AMF à déclarer au Congrès des maires : « Depuis deux ans, nous annonçons la crise des finances locales. Cette crise - de confiance autant que de chiffres - est désormais devant nous de la façon la plus sûre qui soit. »
Ce Gouvernement n'a incontestablement pas bien su préparer l'avenir, et ce ne sont pas les annonces faites autour du projet de budget pour 2007 qui vont dissiper l'inquiétude des élus.
Ainsi, le fameux contrat de croissance et de solidarité se retrouve en situation de sursis : le Gouvernement annonce sa désindexation progressive en 2008 et en 2009 !
L'inquiétude tient, par ailleurs, à la mise en application, en 2007, du plafonnement de la taxe professionnelle. L'effet est connu : ce sont 526 millions d'euros qui, si rien ne change, pourraient être prélevés sur les ressources fiscales des collectivités.
J'ajoute au tableau peu flatteur de cette réforme gouvernementale que, malgré les dispositions qui ont pu être adoptées en la matière, il existe des risques accrus d'optimisation fiscale de la part des entreprises. En effet, les entreprises ont disposé du temps nécessaire - pas moins de deux ans ! - afin de recourir aux montages financiers adéquats pour éponger la taxe professionnelle au sein de filiales sous capitalisées.
Pis, cette réforme, mal conçue et incomplète, encourage le recours à l'intérim et favorise la précarisation de l'emploi. Malgré les avertissements répétés du groupe socialiste et en dépit même des préoccupations exprimées par le président de commission des finances, M. Arthuis, au moment des débats, l'an passé, le Gouvernement s'est pour l'instant montré incapable de remédier à cet effet pervers.
Le dispositif du bouclier fiscal doit aussi être évoqué ici. Le plafonnement à 60 % des impôts directs versés par le contribuable, véritable « fausse bonne idée », profite aux revenus les plus aisés et impose une nouvelle contrainte aux taxes locales.
Le bouclier fiscal, en apparence indolore localement, est en réalité payé par les collectivités locales à travers la dotation globale de fonctionnement. Plus de 43 millions d'euros seront ainsi prélevés sur les différentes dotations.
Comment ne pas s'inquiéter aussi lorsque l'on voit la stratégie de l'État de non-compensation intégrale des charges en ce qui concerne, par exemple, le transfert aux départements des personnels non enseignants de l'éducation nationale ou des agents de l'équipement ? Le rapport d'Éric Doligé a, là encore, mis à jour le décalage constaté en la matière.
Comment ne pas évoquer également les questions soulevées par le transfert aux régions de la TIPP, impôt au rendement d'assiette décroissant ? Je rappelle que le produit est en baisse de 6 % depuis 2005.
Dans ces conditions, comment ne pas comprendre le vif mécontentement des élus ? Les mesures prises par le Gouvernement, loin de résoudre l'imbroglio fiscal des collectivités, étouffent les finances locales. Nous assistons bien à la mise en place progressive d'un véritable carcan fiscal, solidement verrouillé par la loi organique relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales. Tout va dans le sens d'une disparition des marges de manoeuvre budgétaires et d'une asphyxie des finances locales !
Face à ce constat et aux perspectives du budget pour 2007, il me semble urgent de réagir contre les désordres auxquels la politique mise en oeuvre nous a conduits de façon inexorable.
L'enjeu doit être de restaurer la confiance des élus, de renouer un vrai partenariat entre l'État et les collectivités territoriales et, ainsi, de redonner du sens à l'idée de décentralisation.
Quelques objectifs fondamentaux doivent guider cette démarche.
Il s'agit, en premier lieu, de procéder à un rattrapage et à un rééquilibrage des compensations financières relatives aux transferts de compétences récemment opérés. Les élus de terrain attendent un signe fort qui leur permette de sortir du climat de méfiance dans lequel l'action du Gouvernement les a plongés.
Le deuxième objectif vise à repenser au plus vite le dispositif fiscal local. Vous le savez, le système financier local est sédimenté et opaque. C'est la structure de la fiscalité locale dans sa globalité qui a besoin d'être réaménagée. Il importe notamment de mieux appuyer l'impôt des ménages sur la réelle capacité contributive des contribuables.
Les exemples étrangers le prouvent, les impôts locaux « modernes » doivent prendre en considération le revenu.
A cet égard, on peut envisager de s'appuyer sur l'assiette de la contribution sociale généralisée, plus large que celle de l'impôt sur le revenu. Cette « CSG locale » pourrait, par exemple, être affectée aux départements.
J'aimerais également évoquer l'urgence d'assurer une meilleure justice fiscale au niveau des bases de la fiscalité des ménages. Il est temps d'envisager une réactualisation permanente et décentralisée des bases de la taxe d'habitation.
Je donnerai un dernier argument en faveur de la nécessaire refonte des finances locales : il concerne les deux taxes foncières. Il paraît aujourd'hui important de substituer à une valeur locative obsolète - elle repose sur des bases estimées en 1970 - une valeur vénale qui reflète mieux la valeur réelle des biens immobiliers.
Enfin, il est à déplorer que le processus de décentralisation perde son sens auprès des collectivités territoriales. Les dotations, compensations et dégrèvements de l'État présentent le double désavantage de la complexité et de l'opacité. Ces mesures sont, en outre, incapables de réduire les écarts de richesses entre collectivités et ôtent tout son sens à la décentralisation.
Un troisième objectif consisterait donc à remédier à ce problème par le biais d'un renforcement de la péréquation financière. A ce titre, la ventilation de la DGF doit être revue pour améliorer les volumes financiers affectés à la péréquation. De nouveaux outils de péréquation horizontale doivent également être développés.
Face à l'immense disparité des ressources fiscales entre collectivités, notamment entre les communes, la péréquation est le meilleur moyen de garantir une plus grande égalité des citoyens devant le service public de proximité.
Messieurs les ministres, les collectivités territoriales et leurs élus ont besoin de vraies réponses aux problèmes financiers que votre redoutable politique de décentralisation leur pose. J'espère être parvenu à vous faire entendre qu'une voie dynamique, positive et volontariste est possible. C'est dans cet esprit que nous déposerons un certain nombre d'amendements ambitieux, tendant à améliorer la situation de nos finances locales.
Si ces amendements ne recevaient pas l'assentiment de la Haute Assemblée, nous nous verrions contraints de rejeter le projet qui nous est soumis.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, j'aimerais d'abord vous remercier d'organiser chaque année un débat sur les relations entre l'État et les collectivités locales.
Nous nous interrogions tout à l'heure sur le point de savoir quel était le rôle du Sénat en ce domaine. Il est certain que, constitutionnellement, la Haute Assemblée représente les collectivités territoriales. C'est une assemblée de plein exercice, qui a une mission très particulière : instaurer la confiance entre les collectivités locales et l'État. J'aimerais centrer mon intervention sur ce point. D'ailleurs, monsieur le président, peut-être pourrait-on, grâce à ce débat, économiser quelque temps dans l'examen des crédits relatifs à la mission correspondante ; on dirait alors que la discussion a déjà eu lieu !
Je vous rappellerai, monsieur Mercier, que le Sénat a obtenu une modification de la Constitution afin d'y inclure le principe selon lequel toute question touchant aux collectivités locales est déposée en priorité sur son bureau !
M. Michel Mercier. Rappelons toujours notre action, monsieur le président, vous avez raison !
Sourires
Messieurs les ministres, si je parle de créer, de restaurer la confiance entre les collectivités locales et l'État, ...
...c'est que cette confiance n'est pas pleine et entière. Il faudrait donc nous interroger sur ce point.
Vous allez, tout à l'heure, évoquer les recettes et les crédits attribués par l'État aux collectivités territoriales. Il n'y a pas beaucoup à dire à ce sujet. Je voudrais du moins vous féliciter, monsieur le ministre du budget, d'avoir su maintenir le contrat de croissance au sein du budget : ce n'était ni évident ni facile.
Je vous donne acte que la multiplication de la somme des crédits de l'an dernier par le taux d'inflation de cette année est exacte, à l'euro près.
Lorsque ces crédits sont insuffisants, M. le ministre délégué aux collectivités territoriales trouve une réponse toute faite : pour les départements, les droits de mutation à titre onéreux produisent tant de recettes que vous ne devez savoir qu'en faire...
Afin de vous éviter d'avoir à en reparler, monsieur le ministre, je confirmerai que leur produit a beaucoup augmenté. Je prendrai l'exemple du Rhône, dont j'ai l'honneur d'être l'élu.
Les chiffres figurent dans mes dossiers !
C'est pourquoi je préfère les évoquer moi-même : je serai plus proche de la vérité !
De 2004 à 2006, dans le département du Rhône, les droits de mutation ont augmenté d'environ 45 millions d'euros. Cette progression est extraordinaire.
Toutefois, au cours de la même période, nous avons dû faire face à dépenses supplémentaires : 10 millions d'euros pour l'APA, 11 millions d'euros pour le RMI, 13 millions d'euros pour le handicap, 8 millions d'euros pour les traitements et salaires, 8 millions d'euros pour l'acte II de la décentralisation et 8 millions d'euros pour le service départemental d'incendie et de secours, soit 58 millions d'euros supplémentaires.
C'est pourquoi nous avons été contraints d'augmenter les impôts, ce que nous ne faisons jamais de gaieté de coeur. Le produit des droits de mutation a considérablement progressé, mais les dépenses ont progressé plus rapidement encore.
Si vous pouviez agir à cet égard, monsieur le ministre, nous en serions satisfaits. Nous vous en remercions par avance ; connaissant votre savoir-faire et votre habileté, nous ne doutons pas de l'efficacité de votre action.
Les relations entre l'État et les collectivités locales ne se résument pas aux transferts de recettes de l'État. On ne peut pas non plus opposer l'État, d'une part, aux collectivités locales d'autre part : le bloc des collectivités locales n'est pas uniforme.
Les collectivités locales connaissent des problèmes différents. Je ne les évoquerai pas tous. Signalons du moins que l'intercommunalité, qui est désormais mise en place dans notre pays, et que nous avons tous souhaitée et promue, entraîne des difficultés au niveau des recettes fiscales, notamment quant à la taxe professionnelle unique.
Les régions ont réalisé des efforts fiscaux avant l'heure, mais les infrastructures ferroviaires, dont elles devront assurer le financement, pèsent sur leurs budgets. Il s'agit de dépenses extrêmement lourdes et dont les effets se font peu sentir immédiatement. Les départements, quant à eux, sont devenus les grands spécialistes des dépenses sociales.
Au fur et à mesure de la décentralisation, les problèmes des collectivités locales se sont donc largement différenciés, aussi faudrait-il traiter ces questions selon les catégories de collectivités concernées. Une réponse unique, à l'emporte-pièce, est certes plus facile : on peut affirmer que toute collectivité bénéficie du contrat de solidarité et des droits de mutation, qu'elle doit prendre en charge le RMI, l'APA, les chemins de fer, etc. Tout cela est vrai ; il n'en reste pas moins que les collectivités n'ont pas nécessairement les moyens de tout résoudre en même temps, nous le savons tous.
J'aimerais faire quelques suggestions.
Messieurs les ministres, vous affirmez très souvent - trop souvent - que l'État est vertueux alors que les collectivités locales ne le sont pas.
Je soutiendrai la thèse inverse : les ministres sont vertueux quand ils réduisent leur budget, ce à quoi vous les incitez fort bien, monsieur le ministre, ...
Il me semble vous avoir déjà adressé deux compliments, monsieur le ministre !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. C'est Byzance aujourd'hui !
Sourires
Toutefois, les ministres de votre gouvernement procèdent comme leurs prédécesseurs : ils dépensent l'argent des collectivités locales.
Un des éléments les plus agaçants pour un élu local est d'apprendre, par voie de presse, quelles seront ses futures dépenses !
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
C'est ainsi qu'ils savent ce que les ministres ont décidé à leur place ! Et cela est valable pour tous les gouvernements.
Toutes les augmentations de salaires sont ainsi décidées par l'État. Depuis 2004, cela représente 8 millions d'euros supplémentaires dans le Rhône.
Le niveau des aides sociales est également fixé par l'État. Dans un mois jour pour jour, un journal nous apprendra le montant du RMI, de l'APA, de l'AAH ou celui de la PCH, tous montants dont le Gouvernement aura décidé.
Messieurs les ministres, s'il est un point sur lequel votre action devrait s'exercer, c'est bien celui-ci : le Gouvernement ne doit plus décider seul des dépenses des collectivités locales. Dans un premier temps, peut-être les élus locaux pourraient-ils être associés à ce processus ; ils n'auraient plus alors pour seule tâche de trouver les moyens de financer les dépenses décidées par l'État.
Il s'agit là de l'un des vrais problèmes que pose la décentralisation : s'il n'est pas réglé, elle risque de perdre de son énergie et de son efficacité ; elle finira par être remise en cause.
Quant à la taxe professionnelle, M. le rapporteur général nous a dit tout le bien qu'il fallait en penser. J'ignore si cette réforme est meilleure que celles auxquelles il n'a pas été procédé.
Sourires
Si l'on veut restaurer la confiance, il ne faut pas culpabiliser les élus locaux à cet égard. S'ils utilisent le produit de la taxe professionnelle, c'est parce qu'ils n'ont pas d'autre source de financement à leur disposition.
Ils n'ont pas d'autre choix !
Si cette taxe est inadéquate, qu'on en institue une autre ! Je suis prêt à étudier la question avec vous. En tant que rapporteur, j'ai ma part de responsabilité, mais elle est vraiment ténue ...
Il s'agit de pouvoir et j'en ai bien moins que vous, monsieur le rapporteur général !
Par ailleurs, je rappellerai que le Sénat a incité les intercommunalités à choisir la taxe professionnelle unique comme impôt. Comment conserver la confiance des élus locaux lorsqu'on leur attribue le produit d'une taxe et qu'on le leur retire brutalement l'année suivante ?
Ils ne peuvent pas tout accepter tout le temps ! C'est à cela qu'il faut porter remède, en établissant de nouvelles relations, un pacte de confiance.
Cet après-midi même, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours est réunie. Nous savons de quel poids ces services pèsent sur les budgets des collectivités locales, notamment des départements. Nous savons également que, dans quelques jours, la mise en oeuvre de la loi Jacob va se traduire par une très forte augmentation des dépenses de fonctionnement des SDIS. Est-ce la faute des élus locaux ?
Je ne vous fais pas de reproches quant aux recettes, messieurs les ministres, mais j'exprime de très fortes demandes : les dépenses des collectivités locales ne doivent plus être fixées unilatéralement par le Gouvernement. Je réclame une association plus forte et plus vraie des élus locaux à la prise de décisions relatives aux dépenses qu'ils devront financer.
M. Jean-Jacques Jégou applaudit.
C'est ce que demande M. le Président de la République !
Je sais, d'ailleurs, que vous partagez cette opinion, même si vous ne pouvez le manifester immédiatement.
Oui, mais pas assez !
Ainsi, qu'en sera-t-il ainsi du traitement des sapeurs-pompiers ? Cela va se traduire, à nouveau, par une forte augmentation des charges.
Il faut donc trouver les moyens de définir les dépenses : c'est le défi que nous devons relever si l'on veut donner tout son sens à la décentralisation, qui a été conduite par tous les gouvernements, de gauche comme de droite. Il ne s'agit pas seulement des recettes ; si les élus en réclament davantage, c'est parce que l'on décide des dépenses à leur place. Lorsque cela cessera, nous pourrons leur demander de se montrer responsables en matière de recettes !
Toutefois, aujourd'hui, nous n'en sommes pas là, et votre tâche, messieurs les ministres, c'est de faire en sorte que nous y parvenions demain.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
M. Roland du Luart remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.
M. Louis de Broissia. Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, je ne tomberai pas dans la caricature, comme notre collègue François Marc, qui, à mon grand amusement, a évoqué le site internet « lacoleredeselus.com », patronné par la Fédération nationale des élus socialistes et républicains et né le 1er avril de cette année. Mes chers collègues de l'opposition, je croyais que nous n'en parlerions plus après cette date, mais vous avez remis ce site à l'honneur !
Exclamations sur les travées du groupe socialiste. -Sourires sur les travées de l'UMP.
Je ferai plutôt mien l'esprit de nuance que vient de manifester mon éminent collègue Michel Mercier.
En effet, mes chers collègues, les conseils généraux, dans leur ensemble, accueillent favorablement le volet « recettes » du projet de loi de finances pour 2007.
J'évoquerai les principaux points de ce texte, puis je tracerai quelques perspectives au sujet de l'avenir des relations financières entre l'État et les collectivités territoriales, en allant au-delà des analyses réductrices qui sont parfois proposées.
Les dispositions du projet de loi de finances pour 2007 ont amené Didier Migaud, qui n'appartient pas à ma famille politique, à déclarer à la presse : « la bonne nouvelle, c'est qu'il n'y a pas de mauvaise nouvelle ». C'est dire si, en matière budgétaire, le cru 2007 n'est pas si mauvais, et s'il est même prometteur !
Mes chers collègues, je montrerai que ce budget est à la fois respectueux, solidaire et offensif vis-à-vis des collectivités territoriales. Toutefois, messieurs les ministres, je formulerai également quelques demandes à votre intention.
Premièrement, ce budget est respectueux. Si nous sommes objectifs - et après tout, nous ne sommes pas encore entrés dans le combat électoral de 2007 -, nous devons reconnaître que l'État respecte ses engagements vis-à-vis des collectivités territoriales.
Ainsi, le projet de loi de finances prend acte des transferts de compétences opérés cette année en direction des collectivités. Les montants de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, la TSCA, qui sont prélevés sur la branche « automobile » et que nous avons négociés à l'époque où M. Lambert était ministre chargé du budget, passeront de 110 millions en 2006 à 776 millions en 2007, afin de compenser les transferts, en particulier celui des agents TOS.
Je le rappelle - et nous ne nous en plaindrons pas, nous qui sommes des élus locaux décentralisateurs -, 73, 5 % des agents TOS ont rejoint le camp de la fonction publique territoriale. C'est dire si nous sommes attrayants, mes chers collègues ! Ne voyons pas uniquement le verre à moitié vide : il s'agit là d'une marque de confiance, ce qui n'est pas rien.
L'ensemble des concours financiers aux collectivités, qui représenteront 67, 48 milliards d'euros en 2007, soit une progression de près de un milliard d'euros par rapport à 2006, ainsi que le contrat de croissance et de solidarité, qui a été renouvelé, constituent également des marques du respect de l'État pour les collectivités.
Mes chers collègues, tous ces chiffres témoignent que, à un moment où l'argent public est rare, l'État se lance avec courage dans le soutien aux collectivités locales. Cet effort devra être poursuivi.
Messieurs les ministres, je veux souligner notre attachement au contrat de croissance et de solidarité. De façon maladroite, le Conseil d'orientation des finances publiques a mis en cause les collectivités, en affirmant qu'elles contribuaient à la dette publique. Il s'agit là d'une accusation gratuite, car elles présentent chaque année un budget en équilibre. En outre, les transferts de compétences se sont accompagnés à la fois d'économies de gestion et d'une amélioration du service rendu à nos concitoyens, qui, d'ailleurs, apprécient.
Il est vrai que nous pouvons toujours aller plus loin dans la confiance, qui, comme l'a rappelé à juste titre Michel Mercier, se renouvelle chaque jour.
Le respect des collectivités territoriales passe par l'observation de règles équitables dans les transferts. La neutralité de ces derniers est inscrite dans la Constitution. Veillons à en respecter l'esprit.
Or, messieurs les ministres, ce principe n'a pas vraiment régi le transfert des personnels. Comme d'autres orateurs l'ont souligné, les emplois « disparus » ne seront compensés qu'au terme de la période d'exercice du droit d'option des intéressés. Nous devrons donc consentir des avances sur trésorerie - pardonnez ma franchise, mes chers collègues, mais je dois être objectif, et tout dire.
De même, le mode de calcul retenu pour mesurer la compensation des emplois vacants se base sur le pied de corps et non sur le niveau médian, ce qui n'est pas adapté.
Nous avons suscité sur cette question d'inutiles points d'achoppement. J'espère que notre discussion permettra de perfectionner ce texte de loi.
Je souhaite évoquer une dernière demande des départements, qui porte sur la répartition du produit des radars.
Messieurs les ministres, le produit des radars situés sur les routes transférées doit être affecté à ceux qui entretiennent ces voies.
Nous aurons sans doute l'occasion d'en débattre ultérieurement.
Deuxièmement, ce budget est solidaire. Je m'étonne que François Marc ait affirmé que la dotation de péréquation n'était pas convenable ! En 2006, je le rappelle, la dotation de solidarité urbaine, ou DSU, a augmenté de 8, 8 % - on n'a jamais autant fait pour les villes ! -, et la dotation de fonctionnement minimal, ou DFM, de 12, 6 %.
Mes chers collègues, j'ai été le seul à remercier M. Borloo quand il a remis au maire de Dijon 49, 6 millions d'euros au nom de l'ANRU, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. J'eusse aimé que M. le ministre en fasse de même à l'égard du conseil général de la Côte d'Or ! Pour ma part, je sais remercier.
C'était M. Borloo ! Je l'ai remercié au nom de la ville de Dijon. Mes chers collègues, il est possible de faire de la politique d'une façon qui ne soit pas médiocre !
Je le rappelle, la dotation de péréquation bénéficiera d'un abondement supplémentaire, comme vous l'avez annoncé, monsieur le ministre délégué aux collectivités territoriales, lors d'une récente réunion du comité des finances locales. Il est vrai que nous souhaitons que la refonte de mécanismes de péréquation soit intégrée à notre réflexion collective sur le devenir des finances locales.
À cet égard, et je m'exprime ici au nom des départements, les critères d'éligibilité à la DSU et à la DFM doivent être resserrés, afin de concentrer davantage les crédits publics sur les collectivités territoriales qui sont particulièrement en difficulté. Il s'agirait ainsi d'une véritable péréquation au profit des plus faibles. Il faudra également simplifier les modes de calcul de ces dotations, me semble-t-il. Nous devons corriger des inégalités de situation, non de gestion.
Troisièmement, ce budget est offensif. Le présent gouvernement, comme celui qui l'a précédé, a réalisé des efforts marqués au profit des collectivités territoriales.
Ainsi, les départements ont négocié un abondement de 500 millions d'euros, étalé sur trois années consécutives, au titre du financement du RMI. Je tiens à saluer l'effort accompli dans ce domaine par l'État, puisque, en moyenne, le taux de couverture des dépenses liées au RMI est de 94 %.
J'évoquerai plus tard l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie - en ce qui me concerne, je n'oublie pas cette question !
S'agissant du RMI, l'État s'est donc engagé à compenser les prestations versées pendant trois ans. Nous ne doutons pas que, dans la loi de finances pour 2008, le gouvernement d'alors, quel qu'il soit, honorera ces engagements. D'ailleurs, le Sénat y veillera, car c'est son rôle.
Il est important, me semble-t-il, qu'une partie du Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion prenne en compte les efforts accomplis par les conseils généraux en la matière. Le Gouvernement m'a d'ailleurs suivi sur ce point.
Mes chers collègues de l'opposition, si nous avions satisfait les revendications du site « lacoleredeselus.com », nous aurions dû verser un milliard d'euros aux 102 départements, alors que l'analyse de leur situation ne fait apparaître qu'un besoin de 830 millions d'euros ! Naturellement, il est toujours possible de demander à l'État de compenser au-delà des dépenses réalisées, mais une telle exigence est difficile à négocier, quel que soit le gouvernement en place...
Enfin, je souhaite saluer le coup de pouce donné aux conseils généraux pour le financement des contrats d'avenir, dont M. Borloo a souhaité modifier les règles de financement, ce qui est important.
Selon moi, le projet de loi de finances pour 2007 reflète donc les efforts réels accomplis par le Gouvernement pour inciter les élus locaux à s'engager toujours plus dans la bataille pour l'emploi, qui constitue l'une des principales préoccupations de nos concitoyens.
Je terminerai en formulant quelques voeux, car la saison s'y prête, me semble-t-il.
Messieurs les ministres, je voudrais attirer l'attention, à la suite de Michel Mercier, sur la place particulière qu'occupent les conseils généraux dans le paysage local.
Le département est une institution hybride. Il est une collectivité territoriale pour la moitié de son budget, et le « service instructeur de la solidarité nationale » pour l'autre.
Dans nos départements, pour 50 % de nos budgets, nous appliquons des règles fixées au niveau national, qu'elles concernent l'APA, le RMI, la PCH, la prestation de compensation du handicap, ou l'enfance en danger.
Les collectivités locales sont considérées par l'État comme des sous-traitants !
Notre honneur est, d'ailleurs, d'instruire les dossiers liés à ces prestations de la façon la plus intelligente et la plus adaptée au terrain possible.
Nous, les 4 218 conseillers généraux de France, nous considérons que ce double visage du département, dont nous sommes fiers, doit être reconnu par la loi.
En corollaire, se pose la question du financement, dans la mesure où les conseils généraux ne maîtrisent pas les dépenses liées à des décisions nationales.
S'agissant du RMI, je le répète, le taux de couverture est de 94 %. Nous considérons qu'un taux de 100 % serait préférable, bien sûr, mais 94 % n'est pas un mauvais résultat.
S'agissant de la PCH, la montée en charge de cette prestation n'a pas eu lieu car, pour le moment, les personnes handicapées préfèrent majoritairement conserver I'ACTP, l'allocation compensatrice à la tierce personne, qui leur semble plus intéressante. Il faut avoir l'honnêteté de souligner que la PCH ne constitue pas aujourd'hui une « seconde APA ». Néanmoins, restons vigilants.
J'évoquerai à présent l'APA, dont personne parmi nous ne parle, ce qui est étrange, parce que la situation liée à cette prestation est très préoccupante.
La loi qui a créé l'APA n'a prévu ni mécanisme de compensation ni financement. Je me souviens, car j'étais déjà parlementaire, qu'on indiquait au moment de la création de cette prestation qu'une compensation serait instituée, dont le taux serait négocié, avec l'objectif d'un partage à égalité des coûts entre l'État et les collectivités locales.
Mes chers collègues de l'opposition, que n'avez-vous inscrit alors ce mécanisme de financement et de péréquation dans la loi ! Aujourd'hui, l'APA constitue un gouffre financier. Elle coûte 4, 2 milliards d'euros aux départements et elle est prise en charge par l'État à hauteur de 32 % ou 33 %, dans le meilleur des cas.
Pire, le coût de l'APA ne cesse de progresser. Il a augmenté de 9 % en 2005, alors que les dépenses liées au RMI avaient tendance à baisser, ce qui est heureux d'ailleurs. On nous annonce une hausse du coût de l'APA d'au moins 7 % en 2006. Et ce n'est rien à côté de la prise en charge des générations du « papy boom » qui nous attend !
Messieurs les ministres, il est nécessaire d'apporter une solution définitive à ce problème.
L'idée d'une CSG départementale a été évoquée ici ou là. Mes chers collègues de l'opposition, je suis assez réservé sur cette proposition, dans la mesure où la CSG est un impôt qui, en proportion, touche plus fortement les classes modestes et moyennes, car son taux n'est pas progressif. En outre, le niveau de cet impôt est déjà élevé.
À titre personnel, je plaide, comme beaucoup d'autres, pour que la mise en place de la Caisse nationale pour la solidarité et l'autonomie débouche sur la création d'une cinquième branche de la sécurité sociale. En d'autres termes, je souhaite que nous, les élus des départements, une fois par an, nous puissions rencontrer non seulement les ministres chargés du budget et des collectivités locales, mais également celui chargé de la solidarité nationale, pour discuter.
En conclusion, je le répète, la France ne s'épargnera pas une réflexion en profondeur sur la réforme de sa fiscalité locale. Les présidents des associations représentant les maires, les départements et les régions ont eu raison de saisir conjointement le Conseil économique et social sur ce sujet.
Plusieurs pistes peuvent être suivies. Il s'agirait de limiter les financements croisés, qui sont devenus incompréhensibles - pour inaugurer le moindre édicule, il faut désormais cinq ou six financeurs ! - ; d'appliquer le principe « une collectivité, un champ de compétence, une ressource » ; de réfléchir sur la spécialisation de l'impôt local - je sais que la commission des finances du Sénat travaille activement sur cette question - ; de réviser les bases locatives - il n'est pas acceptable de les laisser se dégrader plus longtemps - ; de poursuivre la réforme de la taxe professionnelle, afin de prendre en compte la dématérialisation de l'économie et de mieux lutter contre les délocalisations - mes chers collègues, ne tournons pas le dos à la réalité de l'économie ! - ; de restaurer l'autonomie fiscale des collectivités territoriales ; enfin, de réviser les mécanismes de péréquation. Vous le voyez, la liste est longue et les pistes de réflexion ne manquent pas.
Ce débat permettra d'aboutir, du moins je l'espère, messieurs les ministres, à une refonte profonde de notre système - oserai-je évoquer une « rupture », pour reprendre un mot à la mode ? -, qui viserait à introduire plus d'équité entre les contribuables et à donner plus de responsabilités aux décideurs, afin d'instaurer une démocratie locale qui est à la base de notre république.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
En m'exprimant l'année dernière à cette tribune, à l'occasion de ce même débat, je vous avais fait part, monsieur le ministre, de ma très grande perplexité - c'était un euphémisme ! - face aux dotations financières insuffisantes que vous offriez aux collectivités locales. Un an plus tard, force est de constater que vous persistez dans cette logique de « décentralisation » des déficits de l'État au détriment des collectivités les plus pauvres, notamment les communes, au nom desquelles je m'exprimerai plus particulièrement.
Déjà, la loi de finances pour 2006 avait considérablement amoindri les ressources financières des communes.
Ainsi, la taxe sur le foncier non bâti concerne essentiellement les terres à vocation agricole. Près de 35 000 communes en bénéficient et, pour 2 200 d'entre elles, elle représente plus de 50 % de leurs recettes fiscales. Or le dispositif voté l'an dernier prévoit que la compensation versée par l'État pour le manque à gagner est indexée sur l'année 2005, ce qui revient à réduire mécaniquement au bout de quelques années les ressources dont disposeront les communes rurales.
Par ailleurs, la réforme de la taxe professionnelle a introduit un dispositif de plafonnement de la valeur ajoutée sur laquelle est assise cette taxe, ce qui permet à l'État de limiter la compensation qu'il doit verser. De fait, elle handicape lourdement les collectivités, car celles-ci ne peuvent plus moduler leur taux. Leur produit fiscal est ainsi largement comprimé. Monsieur le ministre, vos services ont certainement déjà travaillé sur les premiers effets de cette mesure. Est-ce parce que les résultats sont mauvais que vous ne communiquez pas sur ce point ?
En outre, l'instauration d'un bouclier fiscal, qui limite à 60 % des revenus l'imposition réelle des contribuables, ampute encore les recettes propres des collectivités. Cette mesure est non seulement marginale, puisque seuls 90 000 contribuables parmi les plus aisés sont concernés, mais surtout elle est moralement choquante. Notre droit fiscal repose depuis 1789 sur la capacité contributive de chaque contribuable, étant entendu que ceux qui gagnent le plus doivent davantage participer au financement des missions d'intérêt général.
Or ce bouclier fiscal est un nouveau cadeau offert aux plus riches, qui n'en demandaient pas tant.
M. le rapporteur général n'est sans doute pas de cet avis !
Monsieur le ministre, je constate que le projet de loi de finances pour 2007 persiste dans la même voie dangereuse, qui porte en filigrane l'étouffement financier des communes. Vous continuez à déposséder les maires de leurs ressources et donc de leur autonomie.
La reconduction du contrat de croissance et de solidarité, à l'article 12, annonce une hausse globale de l'enveloppe normée, après ajustements, de 2, 22 %. La DGF est abondée à hauteur de 39, 22 milliards d'euros, pour une hausse de 1 milliard d'euros par rapport à l'année dernière, soit une progression de 2, 5 %. La majorité des dotations étant indexées sur la DGF, c'est bien une progression a minima que vous nous proposez d'entériner, alors que vous avez aggravé les besoins à combler. À ce titre, je regrette que vous persistiez à refuser de porter à 50 % la prise en compte du taux de croissance du PIB dans le calcul de la progression de l'enveloppe normée.
La DSU et la DSR semblent bénéficier de hausses prioritaires, à hauteur de 15, 8 % chacune, après des années de sous-financement chronique. Ce rattrapage ne suffira pas à combler le retard financier que vous avez laissé se creuser depuis 2002, et qui est encore aggravé pas l'ensemble de votre politique.
Et que dire du mode de calcul de la dotation élu local ? Le passage du potentiel fiscal au potentiel financier a artificiellement majoré la richesse de nombreuses communes, lesquelles se verront privées de cette dotation pourtant précieuse. Il avait fallu, en son temps, que le comité des finances locales, auquel je rends hommage, intervienne pour retarder l'entrée en vigueur de cette mesure. Mais, dès l'année prochaine, de nombreuses communes rurales devront se passer d'un financement pourtant précieux pour faire face à la technicité croissante des obligations qui s'imposent aux maires. Quelles mesures comptez-vous prendre, monsieur le ministre, pour répondre aux besoins de formation de ces élus ruraux ?
Il faut également se pencher sur l'évolution de la relation financière entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, qui n'est ni exempte d'ambiguïtés ni toujours conforme au principe d'égalité entre contribuables.
Ainsi suis-je interpellé par des maires de communes moyennes, qui, ayant accompli un important effort de développement de leur zone d'activité, se voient soudain dessaisis de la progression de la ressource afférente par la mise en place de la TPU. Pour peu que le calcul de la dotation de solidarité n'intègre pas, ou intègre insuffisamment, ce paramètre, cela se traduit par un manque à gagner important pour le budget communal. Si, en outre, la communauté de communes ou d'agglomération ne rend pas ces sommes à la commune, sous la forme de subventions d'investissement, le préjudice est réel, et le contribuable de cette commune se retrouve à payer deux fois.
J'entends bien qu'il convient de laisser assez de souplesse aux élus membres des conseils des communautés de communes ou des communautés d'agglomération, selon le principe de libre administration. Pour autant, monsieur le ministre, ne faudrait-il pas fixer un cadre minimal de reversement pour éviter des situations choquantes, qui confinent à une forme de spoliation au détriment des communes ayant contribué par leur engagement financier à la création de richesses et d'emplois sur tout leur territoire ? Nous avons le recul nécessaire pour envisager sereinement cette question, sans remettre en cause la dynamique des EPCI.
À l'autre bout de la chaîne, s'agissant de l'intercommunalité, on constate bien des insuffisances et des incompréhensions. Les EPCI, spécialement lorsqu'ils englobent des communes moyennes, attendent plus de souplesse et de moyens.
Or, les différences de traitement entre les multiples catégories d'intercommunalité sont flagrantes, sans que le degré d'intégration de l'établissement public justifie à lui seul les écarts de niveaux de dotations. En 2006, la DGF par habitant des communautés de communes à TPU simple, dont celles qui sont les plus intégrées, atteint 21, 95 euros, contre 42, 38 euros pour les communautés d'agglomération, et 83, 60 euros pour les communautés urbaines ! Pourquoi les intercommunalités constituées pour l'essentiel de communes rurales et moyennes, qui sont déjà peu aidées par les dispositifs de péréquation, doivent-elles faire face à ce lourd handicap ?
L'impact de l'ensemble de ces dispositifs négatifs se double de l'absence d'une véritable politique de péréquation à l'échelon national. De ce point de vue, le projet de loi de finances pour 2007 illustre cet axiome ancien : on ne touche pas aux rentes de situation ; la péréquation ne se fait qu'aux marges, non comme principe d'organisation du budget. Ainsi se renforce le processus de paupérisation, qui regroupe sur les mêmes territoires communes à petits revenus et habitants à faibles ressources. Là est le coeur du malaise territorial français, dont les émeutes dans les banlieues, à la fin de l'année 2005, ne sont que l'un des symptômes.
Enfin, je me contenterai de mentionner la dernière cause de cette aggravation des inégalités entre collectivités : la politique de « décentralisation », initiée par le gouvernement Raffarin en 2002, et qui s'est faite à marche forcée, sans association réelle des collectivités et, surtout, sans compensation intégrale, alors qu'elle avait été promise !
Monsieur le ministre, voilà le jugement que je porte sur la loi de finances pour 2006 et sur le projet de loi de finances pour 2007. Les mesures financières à destination des collectivités locales que vous nous proposez sont inéquitables, confuses, inadaptées aux problèmes que vivent les élus locaux.
M. Gérard Delfau. Je voulais en porter témoignage au nom des maires et de leurs administrés. Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, je ne voterai pas ce projet de loi de finances pour 2007, s'il demeure en l'état.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, François Marc ayant présenté une analyse générale sur la situation des collectivités locales, je m'en tiendrai, pour ma part, au financement des conseils généraux.
Si je suis le quatrième président de conseil général à intervenir dans ce débat, mon département est le plus petit - 167 000 habitants - et a des moyens limités !
Depuis plus de vingt ans, les conseils généraux ont prouvé leur capacité à gérer les compétences qui leur étaient transférées.
Je suis profondément décentralisateur. Aussi me suis-je personnellement investi dans le transfert des nouvelles compétences découlant de la loi organique du 29 juillet 2004 et de la loi du 13 août 2004.
J'ai entendu à plusieurs reprises le ministre délégué au budget affirmer que les transferts se feraient « à l'euro près ».
Force est de constater aujourd'hui qu'il n'a pas tenu parole. L'exemple de la collectivité que je préside suffira à le prouver.
Au 31 décembre 2006, le nombre de fonctionnaires territoriaux du département du Lot aura doublé, passant de 500 à 1 000.
Pour ce qui est du transfert des TOS, il aurait été très simple de faire le calcul des salaires des agents transférés par département. Mais, non ! Vous avez pris la base des indices moyens par académie. Or, dans mon département, les TOS sont un peu plus âgés qu'ailleurs : la perte est donc de 140 000 euros. La faiblesse des crédits de suppléance entraîne de facto un surcoût de 75 000 euros.
Mon collègue Michel Mercier a également cité des chiffres, mais ils ne sont pas comparables, car le département du Rhône et celui du Lot ne sont pas de même dimension !
La compensation des emplois disparus sera étudiée sur la base du pied de corps et interviendra en 2009 pour les TOS et en 2010 pour les emplois relevant de l'équipement. En attendant, les collectivités feront l'avance, et, à cette occasion, on peut dire que vous vous défaussez sur vos successeurs, monsieur le ministre !
S'agissant de la compensation des contrats aidés, la perte des trois quarts des financements de chaque poste se traduit, pour mon département, par un déficit de 180 000 euros.
Quant aux compléments de rémunération, nous avons remarqué que les primes des conseils généraux, même si elles ne sont pas très élevées, étaient supérieures aux primes de l'État. Cette différence s'élève à 272 000 euros !
Le financement total non compensé pour les 160 TOS de mon département est de 667 000 euros. Pour connaître la situation des départements qui emploient un plus grand nombre de TOS, il suffit de multiplier !
S'agissant du RMI, mon collègue Louis de Broissia a souligné que, à l'échelon national, la compensation était de 94 %. §(M. Louis de Broissia acquiesce.) Dans le département du Lot, ce n'est pas le cas. Mais peut-être que la compensation est supérieure à 100 % dans certains départements. Je les envie !
J'ai souhaité jouer le jeu des contrats aidés, y compris avec l'éducation nationale, qui se comporte comme le pire des employeurs : ni formation, ni tutorat, ni encadrement des contrats d'avenir !
Les bénéficiaires du RMI les plus aptes à trouver un emploi sont maintenus à la charge du département par le biais des contrats aidés.
Le déficit attendu pour mon département du Lot, du fait du RMI, est de 2 310 000 euros.
Les conseils généraux financent les emplois aidés du plan Borloo et, dans le même temps, les activités d'insertion de l'ANPE sont tarifées aux collectivités locales sans que l'État compense ce nouveau coût.
Ce n'est pas l'augmentation de 500 millions d'euros du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion qui pourra couvrir le surcoût constaté. D'ailleurs, on peut légitimement s'interroger sur le fait que ce fonds apparaisse ici en tant que prélèvement sur recettes alors qu'il s'agit en fait d'une dépense du budget général. Cette volonté d'affichage politique contredit l'esprit de rigueur de la LOLF dans la présentation du budget. Nous assistons dans ce secteur à une véritable remise en cause des politiques publiques, et ce au détriment des collectivités, notamment des départements.
En 2007, la réforme de la taxe professionnelle et son plafonnement coûteront au département du Lot 596 000 euros, ce qui équivaut à une augmentation de l'impôt des ménages de 1, 9 %. En ma qualité de président du conseil général, chaque fois que j'augmenterai l'impôt de 1 %, je perdrai 118 300 euros.
Le manque à gagner pour les collectivités, sur la base des taux de 2004 majorés, est évalué à environ 600 millions d'euros pour l'année 2007, soit 2, 6 % du produit de la taxe professionnelle, qui représente la moitié des recettes de la fiscalité directe locale.
En plafonnant ainsi la principale ressource fiscale des collectivités qu'est la taxe professionnelle, le Gouvernement réduit les marges fiscales de ces dernières, et ce sont les collectivités qui sont déjà les moins avantagées en termes de présence d'entreprises dynamiques qui en pâtissent.
Cette réforme, aux conséquences néfastes, poussera les collectivités - elles n'auront d'ailleurs pas d'autre choix pour assumer les augmentations à venir de leurs charges - à accroître la pression fiscale sur les entreprises non plafonnées et sur les ménages en augmentant la taxe d'habitation et la taxe sur le foncier bâti.
L'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, coûte à mon département 23 millions d'euros. La compensation de cette charge était de 55 % en 2003, de 47 % en 2004 et de 33 % en 2005 ; j'espère qu'elle restera à ce niveau en 2006.
Le point d'impôt dans le Lot est de 560 000 euros.
Tous ces éléments, monsieur le ministre, doivent vous permettre de prendre conscience de la situation très délicate d'un grand nombre de départements. Ces derniers sont amenés à effectuer des choix fiscaux pour de multiples raisons liées à des situations locales diverses et à l'insuffisante péréquation des ressources. Ces charges nouvelles nous amènent à augmenter la pression fiscale, notamment l'impôt supporté par les ménages, alors que nous savons tous qu'il est très injustement réparti !
Nous n'avons pas eu et vous n'avez pas eu le courage politique de mener à bien la réforme des bases de la fiscalité locale, alors qu'elle aurait dû être le corollaire de cette nouvelle vague de décentralisation.
Une remise à plat des financements des collectivités s'impose, ainsi qu'une vraie péréquation en fonction de critères objectifs. Nos concitoyens l'attendent. Ils ont aujourd'hui le sentiment que l'injustice fiscale est devenue la règle dans notre pays. Les dispositions que vous avez prises concernant l'impôt sur le revenu et le bouclier fiscal ne font que les conforter dans ce sentiment Aucune décision nationale ne devrait être prise sans que son incidence soit mesurée en termes financiers.
L'exemple du financement des SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, est très évocateur de cette méthode. Dans mon département, j'augmente depuis plus de cinq ans de 13 % par an les sommes que j'affecte au budget des SDIS pour appliquer des dispositions nationales qui nous sont imposées.
La récente prise en charge du handicap inquiète quant à ses répercussions financières. La mise en place des Maisons du handicap accompagnée de transferts de personnels en nombre très insuffisant augure mal de la suite. Dans le secteur social plus qu'ailleurs, nous devons travailler avec justice et équité. Sur le territoire national, la solidarité doit s'exprimer pleinement. Ce n'est pas le contribuable local qui doit financer les déséquilibres territoriaux.
Monsieur le ministre, permettez aux conseils généraux d'assumer leurs missions en assurant une juste répartition des moyens nécessaires. Cet objectif passe par la mise en oeuvre d'une réelle politique de péréquation nationale. C'est seulement à ce prix que nous réussirons une véritable décentralisation au service de nos concitoyens.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. - M. Gérard Delfau applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux en tout premier lieu remercier le Gouvernement d'avoir bien voulu confirmer l'application du contrat de croissance et de solidarité pour l'année 2007, ce qui marque la volonté de l'État de tenir ses engagements financiers envers les collectivités territoriales ; mais il ne faudrait pas que les clauses de ce contrat soient ultérieurement modifiées dans un sens défavorable aux collectivités.
Vous savez bien, monsieur le ministre, que certaines collectivités - je pense notamment aux départements - se sont vu transférer un nombre important de compétences, notamment dans le domaine social - RMI, APA, etc. -, et plus récemment les routes nationales, transferts qui ont entraîné une véritable explosion de leurs dépenses.
Or si les recettes de fonctionnement des collectivités devaient stagner à partir de 2008 du fait de la remise en cause du contrat de croissance et de solidarité, que pourrait-il se passer ? Les départements ne pourront pas décemment diminuer les prestations servies au titre du RMI ou de l'APA ; ils n'auront donc comme seul choix que de majorer leur fiscalité ou de réduire leurs investissements, ce qui serait néfaste à leurs territoires.
Quoi qu'il en soit, pour 2007, la progression de la DGF, principal concours financier de l'État, demeure significative, son augmentation de 2, 54 % méritant d'être saluée.
Néanmoins, la répartition des 45 milliards d'euros de la DGF est encore trop inégalitaire. Savez-vous que soixante-deux communes de mon département perçoivent moins de 10 000 euros au titre de la DGF ? Comment voulez-vous, avec des recettes aussi dérisoires, mener une politique communale digne de ce nom et satisfaire aux besoins les plus élémentaires de la population ?
Ces communes sont le plus souvent regroupées au sein de communautés de communes. Mais l'addition de plusieurs communes pauvres n'a jamais débouché sur une communauté de communes riche !
Il est parfaitement injuste que la dotation de base de la DGF soit différenciée suivant l'importance de la population des communes. J'ai déjà eu l'occasion d'évoquer ce problème à cette tribune, mais je souhaite à nouveau, mes chers collègues, vous faire part de quelques éléments : ainsi, une commune rurale aura perçu en 2006 à ce titre 61, 23 euros par habitant alors qu'une ville importante aura bénéficié de 122, 45 euros par habitant.
Or, aujourd'hui, toutes les communes urbaines et suburbaines adhèrent à une communauté d'agglomération ou à une communauté urbaine. Elles ont transféré à ces dernières une très grande partie de leurs compétences et perçoivent une DGF largement majorée, souvent bien plus importante en euros par habitant que celle dont bénéficient la plupart des communautés de communes, ce qui constitue, me semble-t-il, une autre injustice. Il est donc tout à fait anormal que, pour le calcul de la dotation de base acquittée au titre de la DGF, soit maintenue une différenciation entre communes suivant leur population. Où sont les effets promis d'une péréquation qui devait rétablir progressivement l'équilibre ? On a plutôt l'impression que le fossé se creuse.
Mais, monsieur le ministre, je veux aussi vous faire part d'une autre préoccupation. À raison d'une augmentation de 120 millions d'euros par an de la DSU, celle-ci, avec plus de 994 millions d'euros, dépasse désormais, et de très loin, le montant de la DSR. Or, la DSU n'est versée qu'à quelques dizaines de villes, alors que la DSR bénéficie à plusieurs dizaines de milliers de communes rurales.
S'agissant de la fiscalité locale, l'empilement des réformes décidées au cours des dernières années a conduit à une baisse sensible de l'autonomie fiscale de nos communes, qu'il s'agisse des recettes ou des dépenses, comme l'a souligné précédemment notre collègue Michel Mercier. Qu'est-ce donc que cette fiscalité locale dont une part substantielle de la taxe professionnelle est payée non plus par les entreprises mais par l'État, dont une part de la taxe d'habitation est non plus acquittée par les ménages mais prise en charge par l'État, dont les bases n'ont pas été remaniées depuis 1990 pour ce qui concerne la taxe sur le foncier bâti et depuis 1960 quant à la taxe sur le foncier non bâti, aujourd'hui également payées partiellement par l'État ?
Il faudra bien s'attaquer à l'indispensable réforme de la fiscalité locale, car nous ne pourrons pas continuer à voir de plus en plus diminuer l'autonomie fiscale des collectivités territoriales et ces dernières lever des impôts dont les bases sont obsolètes.
Enfin, je veux évoquer avec vous deux sujets qui constituent des préoccupations récurrentes des élus, notamment ruraux, à savoir les conditions d'exercice des mandats locaux et l'insécurité juridique qui entoure les actes des élus des collectivités locales.
Des améliorations ont été apportées aux conditions d'exercice des mandats locaux au cours des dernières années ; pourtant, il est toujours aussi difficile de concilier la responsabilité de maire, de président de communauté de communes avec l'exercice d'une profession ; cette difficulté est encore bien plus grande pour les femmes élues lorsqu'elles sont mères de famille.
Quant à l'insécurité juridique, la responsabilité pénale des élus a certes été encadrée, mais elle demeure. De surcroît, les maires de communes rurales qui sont amenés à exercer plusieurs responsabilités et qui ne disposent que de très peu de collaborateurs peuvent être inquiétés par la justice lorsqu'ils confient à ces derniers des tâches ne correspondant pas nécessairement aux termes du contrat. Selon moi, ce n'est pas admissible.
Rendre plus équitable la répartition de la DGF, réformer la fiscalité locale, rétablir l'autonomie fiscale des collectivités locales, améliorer les conditions d'exercice des mandats locaux, garantir une plus grande sécurité juridique aux élus sont autant de chantiers qu'il conviendra d'ouvrir au cours des prochaines années.
Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour poursuivre ces réformes, nécessaires au mieux-être de nos collectivités, et pour permettre aux élus d'exercer leurs fonctions dans le respect de la démocratie.
Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP. - M. Gérard Delfau applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de budget de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est marqué cette année par une certaine forme de continuité et d'équité, contrairement à ce que certains orateurs précédents ont pu soutenir.
Les lois de finances de 2004, de 2005 et de 2006 ont introduit de grandes réformes en matière de finances locales, telles la réforme de la DGF et celle de la taxe professionnelle. La continuité, que je viens d'évoquer, se caractérise d'abord par la prolongation du contrat de croissance et de solidarité, qui mérite d'être saluée, comme l'ont déjà fait plusieurs orateurs. En effet, dans un contexte budgétaire difficile, l'État s'attache à respecter ses engagements envers les collectivités.
Par ailleurs, pour parvenir au respect de ce pacte, en 2007, il accordera aux collectivités une évolution de leurs dotations nettement supérieure à l'évolution de son budget.
Dans ce contexte, je souhaite souligner également le souci d'équité concrétisé par l'effort consenti par le Gouvernement en faveur de la péréquation et évoquer la réforme de la taxe professionnelle.
S'agissant de la péréquation, plusieurs réformes conduites par le Gouvernement ont renforcé les mécanismes de péréquation et permis d'engager une réduction des inégalités entre collectivités territoriales.
Concrètement, les dotations de péréquation ont augmenté entre 2002 et 2006 de 82 %, taux de progression jamais égalé. Entre 2003 et 2006, la dotation de solidarité urbaine aura augmenté de 43, 1 %, tandis que la dotation de solidarité rurale aura progressé de 40, 54 %, notamment celle des bourgs-centres. Cet effort sera poursuivi en 2007. Une plus grande marge de manoeuvre sera donnée au comité des finances locales pour l'indexation des parts forfaitaires des dotations des communes, des départements et des régions.
Néanmoins, je souhaite appeler votre attention, monsieur le ministre, sur trois points qui justifient d'apporter des ajustements au projet présenté.
Premier point, un amendement adopté par l'Assemblée nationale a gelé la dotation de garantie de certaines communes. Je dis « certaines », mais environ 3 500 communes seraient concernées par cette mesure.
Si l'objectif légitime est, en l'espèce, de renforcer la péréquation, il s'avère que la plupart des communes concernées - 3 200 environ - sont déjà bénéficiaires de la dotation de solidarité rurale, et que 1 650 d'entre elles sont situées en montagne. Le taux de progression de leur dotation forfaitaire se verra donc ralenti pour financer la péréquation dont elles bénéficient. Autrement dit, compte tenu du poids de la garantie dans leur dotation forfaitaire, leur pouvoir d'achat sera diminué progressivement.
Une série d'amendements vous sera donc présentée, pour éviter cet écueil.
Le deuxième point concerne la part superficiaire de la dotation forfaitaire des communes de montagne. Portée depuis 2005 à cinq euros, au lieu de trois euros, par hectare en plaine, grâce à votre appui, monsieur le ministre, elle contribue désormais à la reconnaissance des charges spécifiques auxquelles ces communes ont à faire face.
Toutefois, cette juste compensation entre dans le calcul du potentiel financier de ces communes et diminue de façon significative l'effet péréquateur de cette disposition à laquelle tous les élus de montagne sont très attachés.
Monsieur le ministre, vous vous êtes prononcé en faveur d'une évolution à ce sujet, lors du quatre-vingt-neuvième congrès des maires et des présidents de communautés de France, en précisant qu'il était logique d'éviter d'enlever d'une main ce que l'on donne de l'autre.
Aussi, convaincus de la pertinence de ce propos, nous vous soumettrons un amendement en ce sens.
Le troisième point que je souhaite aborder porte sur la péréquation au sein des départements, plus précisément leur dotation de fonctionnement minimum, ou DFM, évoquée tout à l'heure par le président de la commission des finances, M. Jean Arthuis.
En 2005, une réforme de la péréquation départementale a permis d'introduire une nouvelle dotation de péréquation urbaine et un élargissement de l'éligibilité à la DFM à quarante nouveaux départements.
Dès lors, la diminution progressive de l'écart relatif de dotation entre les départements entrants et les vingt-quatre départements historiques éligibles à la DFM a suscité une certaine incompréhension.
Les taux de progression constatés ont été très différents et ont varié en 2006 de 3 % pour les uns à plus de 20 % pour les autres, le taux de progression minimum des vingt-quatre départements historiques, voté en 2005, n'ayant pas été reconduit en 2006.
Le comité des finances locales s'est saisi de ce sujet et a constitué un groupe de travail dont les conclusions ont débouché sur deux enseignements plutôt rassurants.
En premier lieu, au terme de la phase de progression accélérée des nouveaux départements éligibles à la DFM, les vingt-quatre départements éligibles en 2004 conserveront bien une dotation par habitant supérieure, avec un écart de 1 à 2 à l'horizon de 2010 pour un écart initial de 1 à 3.
En second lieu, à compter de 2008-2009, les vingt-quatre départements éligibles avant 2005 connaîtront un taux de croissance de leur DFM identique à celui des départements entrants. Tout le monde y trouvera donc son compte !
Pour cette année, le comité des finances locales a néanmoins proposé de mettre en place une garantie de progression minimale pour faciliter la phase de transition, égale à la progression de la DGF. Cette mesure a été introduite à l'Assemblée nationale par la commission des finances. Elle est équilibrée et ne pénalise pas l'évolution de la dotation de péréquation des autres départements, tout à fait nécessaire par ailleurs.
Il faudra néanmoins poursuivre nos réflexions pour corriger certaines imperfections de la réforme : en recherchant de nouveaux critères pour cibler cette dotation sur les départements les plus en difficulté, qu'ils soient ruraux ou urbains, et en évitant les effets de seuil qui ne sont pas adaptés à la réalité du terrain.
Je souhaiterais enfin évoquer rapidement l'incidence de la réforme de la taxe professionnelle sur le budget des collectivités dès 2007 et certaines anomalies qui subsistent malgré les améliorations apportées par le Sénat dans le projet de loi de finances pour 2006.
L'incidence de cette réforme touchera nos collectivités dès 2007, car le ticket modérateur sera prélevé l'année même de son calcul. En revanche, pour l'État, le coût de la réforme n'apparaîtra qu'en 2008, car le dégrèvement accordé aux entreprises n'interviendra que l'année qui suit celle de l'imposition au titre de laquelle le dégrèvement est accordé. Ce décalage se retrouvera tout au long de l'application de la réforme.
En conséquence, il paraîtrait justifié que le ticket modérateur soit imputé de façon pérenne aux collectivités l'année qui suit l'année d'imposition, autrement dit, pour la première année, en 2008. Tel est le souhait de l'Association des maires de France et de son président, Jacques Pélissard.
Enfin, et pour terminer mon propos, je souhaite attirer votre attention, monsieur le ministre, sur une indispensable adaptation de la réforme au profit des communautés de communes à fiscalité additionnelle dont les bases plafonnées d'imposition sont fortes et dont les taux, par ailleurs très faibles, ont nécessairement augmenté fortement pour financer les nouvelles compétences qu'elles exercent.
Pour ces établissements publics de coopération intercommunale, la modulation du ticket modérateur votée au Sénat ne suffira pas à limiter des pertes de recettes qui peuvent se révéler très pénalisantes, voire fatales à l'équilibre de leur budget. Or, il s'agit bien souvent d'EPCI ruraux dont les bases d'imposition sont très faibles.
À titre d'exemple, d'après les simulations de la Direction générale des collectivités locales, pour une petite communauté de communes située en Auvergne dont le produit de la taxe professionnelle est d'environ 50 000 euros, ce qui est très faible, le ticket modérateur s'élèverait à 15 000 euros, soit 30 % de sa recette de taxe professionnelle. Il serait donc équitable de prévoir une mesure technique permettant d'éviter ce type de situation.
Telles sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les contributions que je souhaitais apporter à ce débat, en saluant une nouvelle fois l'effort important et constant réalisé par l'État dans ce budget en faveur des collectivités, et ce dans un contexte budgétaire difficile, élément qu'il ne faut pas oublier même en période préélectorale.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je crains fort que le projet de loi de finances pour 2007 ne dissipe pas les inquiétudes des élus locaux autant que ces derniers le voudraient. En tout cas, il n'a pas pour objet, me semble-t-il, de compenser les disparités entre les diverses collectivités locales.
La réforme de la taxe professionnelle est lourde de conséquences pour l'avenir des équilibres financiers locaux, et c'est le moins que l'on puisse dire. Il est heureux que le Gouvernement ait finalement renoncé à contrôler par la loi le niveau de la dépense locale, ce qui aurait été totalement contradictoire avec le principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales.
Les finances locales sont toujours menacées d'une impasse à court terme : les conséquences de la décentralisation se font de plus en plus cruellement sentir dans les territoires, en particulier dans les zones où la faiblesse des bases fiscales ne permet pas de suppléer à la sous-compensation financière des transferts. Notre excellent collègue Gérard Miquel l'a indiqué tout à l'heure pour le Lot, et je pourrais reprendre la même démonstration sans aucune difficulté pour le département de la Creuse que je représente.
En dépit des effets d'annonce des gouvernements successifs sur le développement supposé de la péréquation, force est de constater aujourd'hui que la fracture territoriale ne s'est pas améliorée ; elle s'est même aggravée depuis 2002. C'est le partenariat constructif et équilibré entre l'État et les acteurs de terrain, au premier rang desquels se situent les collectivités locales, qui est menacé.
Depuis 2002, les gouvernements ont réduit la régulation nationale des besoins exprimés dans les territoires à la portion congrue, encore que chacun ne s'accorde pas sur la définition de la portion congrue en matière de sacerdoce...
M. Michel Moreigne. C'est très bien, nous avons une exégèse au moins commune sur un point !
Sourires
Les gouvernements successifs ont, en quelque sorte, autorisé la réduction de la solidarité nationale comme peau de chagrin. La péréquation n'existe plus qu'en paroles, n'étant pas traduite réellement dans les faits.
Dans ce contexte, les élus locaux ont pris, quant à eux, leurs responsabilités : ils assument les politiques dont l'État se désengage.
Ainsi, les collectivités locales sont aujourd'hui des acteurs majeurs du développement économique et de la croissance. En 2006, elles devraient contribuer à hauteur de 11 % au produit intérieur brut de la France et assumer à elles seules 70 % de l'investissement public. Elles constituent un levier essentiel de la croissance.
Investies de telles responsabilités, les collectivités locales doivent légitimement pouvoir disposer, s'agissant de leurs ressources, des leviers nécessaires en matière de fiscalité et de concours de l'État pour mettre en oeuvre leurs prérogatives dans les meilleures conditions possibles. Or, la politique du Gouvernement à leur encontre contraint toujours davantage leurs marges de manoeuvres financières.
Rappelons que la réforme de la taxe professionnelle, qui consiste pour l'essentiel à un plafonnement de la taxe versée par les entreprises en fonction de leur valeur ajoutée, aura un coût croissant pour les collectivités locales en raison du mode de compensation choisi. Dès 2007, ne seraient pas compensées des pertes de recettes qui, selon des évaluations divergentes de Dexia et du Gouvernement, seraient comprises entre 466 millions d'euros et 600 millions d'euros.
Les intercommunalités, dont la taxe professionnelle constitue l'essentiel des ressources fiscales, sortiront très affaiblies de cette réforme. Une étude de la DGCL, dont les références sont sans doute bien connues de M. le rapporteur général, souligne d'ailleurs que de nombreux groupements vont faire jouer ou ont déjà fait jouer leur possibilité de mettre en place une fiscalité mixte. Le produit de fiscalité sur les ménages au sein des groupements devrait ainsi augmenter mécaniquement de plus de 15 %.
Les premières réactions des intercommunalités en témoignent. Inéluctablement, cette réforme a des effets inflationnistes sur la fiscalité locale, loin de l'objectif initialement affiché. Les collectivités devront sans nul doute financer cet énorme manque à gagner par une augmentation de leurs taux d'impôts sur les ménages et de taxe professionnelle, car toutes les entreprises ne sont heureusement pas plafonnées. Le passage à la fiscalité mixte sera souvent la règle.
De surcroît, des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour démontrer les effets pervers de la réforme de la taxe professionnelle sur le niveau des recettes fiscales, d'une part, et sur l'emploi, d'autre part. Les sénateurs socialistes, notamment notre ami François Marc, avaient dénoncé l'an dernier ces risques ; le président de la commission des finances en a parlé également tout à l'heure.
L'évasion fiscale est facilitée par le décalage de deux ans ; par ailleurs, pour réduire leur impôt, les entreprises auront intérêt à recourir massivement à l'intérim au lieu de recruter du personnel en contrats à durée indéterminée.
Tout cela est bien connu ! Il s'agit d'un risque d'autant plus important que les collectivités seront les plus faibles, là encore.
M. Michel Moreigne. Que la thérapeutique soit bonne, et que le malade ne meurt pas guéri !
Sourires
Cette réforme représente tout de même un coût considérable pour l'État. Peut-être aurait-il pu s'en passer et supporter des efforts moins importants, dans le contexte de forte tension sur les finances publiques que nous connaissons, contexte qui contraint les marges de manoeuvre de l'État, déjà relativement étroites auparavant.
Soit dit en passant, j'aurais souhaité qu'un bon Samaritain veuille bien dispenser de cet effort sur la taxe professionnelle certains conseils généraux, tels ceux du Lot ou de la Creuse, dont les bases de taxe professionnelle sont les plus faibles de France. Mais ce n'est venu à l'esprit de personne sous prétexte, sans doute, que la perte n'était pas considérable ! Pourtant, il s'agit d'une question de principe et de solidarité.
J'y viens, monsieur le rapporteur général. Ne vous faites aucun souci ! D'ailleurs, M. Pierre Jarlier s'est si bien exprimé sur ce chapitre...
Nous sommes sur un sujet local, me semble-t-il !
Oui, monsieur le ministre.
Laissez-moi tout de même vous dire que les transferts de personnels qui vont être opérés sur le dos des départements en 2007 ne se dérouleront pas aussi facilement que tout le monde l'aurait souhaité. Le président du conseil général du Lot vous l'a rappelé tout à l'heure, et je ne m'y arrêterai pas davantage.
Toutefois, je me permettrai d'insister quelque peu sur le coût des dépenses sociales.
J'évoquerai très brièvement le serpent de mer de la compensation du RMI. La création en 2006 du fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, qui est le fruit d'une initiative brillante de notre collègue Mercier, président d'un conseil général qui n'est pas très pauvre, constitue un premier acquis. Ce fonds sera reconduit à hauteur de 500 millions d'euros pour 2007. Cet abondement demeure cependant très insuffisant, car il ne répond pas tout à fait à l'exigence d'une compensation à l'euro près. J'ai bien écouté les propos de M. Louis de Broissia tout à l'heure. Il n'empêche que le manque à gagner pour les départements constitue toujours une facture non négligeable ! Il faudra bien trouver une solution pour assurer une compensation équitable de ce transfert pour l'ensemble des départements.
D'autres questions relatives aux compensations financières des transferts de compétences aux départements restent en suspens.
De nombreux orateurs ont souligné que la mise en place de la prestation de compensation du handicap, prévue par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, risque d'entraîner de nouveaux dérapages financiers à la charge des départements.
Cette nouvelle prestation, mise en place au 1er janvier 2006, devrait monter en charge à partir de 2007. Ses modalités de mise en oeuvre restent fort imprécises, voire inconnues, et elles pèseront lourd sur les perspectives financières des départements.
Le coût de cette prestation s'élève à environ 2 milliards d'euros par an, 500 millions d'euros étant pris en charge chaque année par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Qui paiera le milliard et demi d'euros restant ?
On nous a fortement reproché la mise en place de l'APA.
Je le comprends très bien, d'autant que mon département compte parmi ceux qui souffrent le plus en la matière.
Mais soyez sûrs, mes chers collègues de la majorité, que nous ne manquerons pas à notre tour de vous reprocher le coût probablement élevé de la prestation de compensation du handicap !
Néanmoins, on peut toujours espérer un miracle, et peut-être des solutions seront-elles trouvées dans ce projet de loi de finances pour 2007 afin que les finances départementales ne soient pas encore une fois victimes d'un effet de ciseau !
Par ailleurs, s'agissant des contrats d'avenir, les départements n'ont pas été écoutés par le Gouvernement, lequel a refusé, semble-t-il, de prendre en charge leur financement au titre de l'allocation du RMI. Or, pour chaque contrat d'avenir, les départements continuent de verser le RMI à taux plein à l'employeur. L'État refuse de financer, considérant que ces contrats relèvent de la politique de l'emploi et non plus de l'insertion sociale. Pour autant, le surcoût estimé serait de 800 euros par contrat.
Je ne m'étendrai pas sur la question des dotations aux collectivités en 2007, considérant qu'elles sont en sursis puisque le contrat de croissance est maintenu.
Les limites de la réforme des critères de la DGF sont aujourd'hui avérées, et la contribution au renforcement de la péréquation est relativement restreinte.
Je souhaite bien évidemment ne pas perdre de vue la question de l'évolution de la DFM des vingt-quatre départements historiques éligibles à la DFM, d'autant que le président de la commission des finances, dans son propos liminaire, y a attaché quelque prix.
Je ne comprends pas le mécanisme créé par l'amendement de Gilles Carrez non plus que le résultat des travaux de notre excellent collègue Pierre Jarlier, qui l'ont inspiré. Messieurs les ministres, quel sera en 2007 le taux d'augmentation de la DFM des départements qui y sont éligibles ? C'est un mystère. Et si ce dernier n'était pas levé, les efforts de notre collègue Pierre Jarlier ne seraient qu'un coup d'épée dans l'eau. Tantôt l'on nous dit que la DFM sera réévaluée de 9 %, tantôt l'on nous dit qu'elle ne le sera que de 3 %. Il faudra bien faire la lumière sur cette affaire.
Messieurs les ministres, mes chers collègues, vous comprendrez que, pour nous, la définition des inégalités soit un enjeu important. La décentralisation n'aura d'effets réellement bénéfiques que si l'on rétablit au préalable une certaine « équité territoriale » - tel n'est pas le cas en ce moment -, qui permettra aux départements d'assurer une même qualité de service aux contribuables.
Au final, tous les départements ne disposent pas du même pouvoir d'achat, et ce avant même toute prise en compte de la qualité de leur gestion.
Cette question fondamentale avait été posée par Jean-François-Poncet et Claude Belot dans leur rapport intitulé La péréquation interrégionale : vers une nouvelle égalité territoriale, rapport de qualité, alors approuvé par la commission de finances et dont je regrette vivement que le Gouvernement n'ait tenu aucun compte jusqu'à présent. Nous attendons toujours les suites qui seront données aux propositions de ses auteurs, lesquels, sans être de mes amis politiques, sont l'un et l'autre d'une parfaite honnêteté et d'une grande clairvoyance.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées de l'UMP et au banc des commissions
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, l'action du Gouvernement à l'égard des collectivités territoriales est positive. En témoigne notamment le projet de loi de finances pour 2007, qui se caractérise par la poursuite de l'effort financier de l'État en faveur des collectivités locales, effort qui ne s'est jamais démenti depuis 2002.
Le contrat de croissance et de solidarité est reconduit. Les dotations comprises dans ce périmètre augmenteront de 2, 22 %, à structure constante, pour atteindre un peu plus de 45 milliards d'euros, essentiellement au bénéfice de la dotation globale de fonctionnement, qui progressera de 2, 5 %.
Les dotations et subventions ne figurant pas dans l'enveloppe normée connaîtront en 2007 une croissance également substantielle - environ 7, 16 milliards d'euros-, et les ressources fiscales attribuées aux collectivités territoriales en compensation des transferts de compétences dépasseront 17 milliards d'euros. En la matière, le Gouvernement va au-delà de ce que prévoyait la loi. Enfin, les dégrèvements d'impôts locaux s'élèveront à 14 milliards d'euros. Au total, les ressources consacrées par l'État aux collectivités territoriales dépasseront 80 milliards d'euros en 2007.
Compte tenu des contraintes qui pèsent sur le budget de l'État, le choix du Gouvernement de maintenir son effort envers les collectivités locales n'avait rien d'évident. Cela démontre ainsi la volonté du Gouvernement de tenir ses engagements.
Personnellement, je souhaiterais saluer les différentes réformes conduites depuis 2004 afin de renforcer les mécanismes de péréquation, mécanismes qui ont permis de réduire les inégalités entre les collectivités territoriales. Entre 2002 et 2006, les dotations de péréquation ont augmenté de 82 %.
Je ne pense pas que mon ami Gérard Miquel puisse soutenir que le RMI est compensé à hauteur de 100 ou 110 % dans certains départements !
M. Gérard Miquel rit.
Dans cet esprit, l'article 12 du projet de loi de finances vise à augmenter les marges de manoeuvre dont dispose déjà le comité des finances locales en matière d'indexation de la dotation forfaitaire des communes, des départements et des régions, afin de dégager un solde plus important en faveur de la péréquation. Je ne peux que me féliciter de toutes ces dispositions visant à améliorer ce protocole.
Cette année encore, la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale sont toutes deux en augmentation. Messieurs les ministres, vous n'en voudrez certainement pas à l'élu de terrain que je suis de rappeler qu'une progression identique pour l'une et pour l'autre serait souhaitable.
Le contrat de croissance et de solidarité a donc été reconduit cette année. Mais nous ne devons pas nous voiler la face. Comme le soulignait notre excellent rapporteur général, s'il faut approuver sa reconduction pour l'année 2007, celle-ci a un coût élevé et ne revêt aucun caractère automatique.
Ainsi, lorsque le Premier ministre a annoncé lors de la Conférence nationale des finances publiques, au début de l'année, que « l'évolution des concours de l'État aux collectivités locales devra être compatible avec les normes de dépenses que s'impose l'État », les élus locaux que nous sommes ont parfaitement mesuré les incidences de cette orientation : l'État s'est engagé à petits pas dans la maîtrise de la dépense publique, et l'on attend des collectivités territoriales qu'elles participent à cet effort tout en maintenant un service public de haut niveau, toujours plus complet, avec toujours plus de dépenses d'investissement et donc toujours plus de dépenses de fonctionnement. Voilà la quadrature du cercle que doivent résoudre les collectivités et leurs élus !
À l'avenir, cette nouvelle donne aura obligatoirement des conséquences sur le contrat de croissance et de solidarité, et donc sur les ressources des collectivités locales.
Ainsi, selon les indications transmises à la commission des finances du Sénat, le Gouvernement prévoit de tendre vers une évolution de l'enveloppe normée selon la règle du « zéro volume » à l'horizon de 2009.
Compte tenu de la situation dégradée des comptes de l'État, nous pouvons comprendre ce passage à une norme de stabilisation en volume des dotations de l'enveloppe normée, que M. le rapporteur général a d'ailleurs qualifié d'« inéluctable à moyen terme ». Mais vous comprendrez tout aussi bien, messieurs les ministres, que cette perspective inquiète les élus et commence à très sérieusement « interpeller » nos concitoyens, qui sont contribuables et néanmoins électeurs. Aussi, il est nécessaire d'accentuer la concertation entre les collectivités et l'État.
Dans son rapport, Michel Pébereau préconisait l'instauration d'un dialogue institutionnalisé entre l'État et les collectivités qui, d'une part, permettrait de fixer les nouveaux objectifs et sans doute un nouveau mode d'appréhension des finances publiques locales et, d'autre part, redonnerait aux maires la capacité de contrôler et de décider ces dépenses, et donc leur fiscalité.
Trop souvent, nous avons le sentiment d'être les gabelous de l'État ainsi que les boucs émissaires de nos concitoyens et, bien sûr, des médias, en attendant les jurys populaires.
Dans cette perspective, les élus attendent beaucoup des travaux du comité des finances locales et de la prochaine Conférence nationale des finances publiques, qui se tiendra en janvier 2007, ainsi que du rapport de la mission confiée à M. Pierre Richard, chargé d'animer une réflexion « sur le pilotage et la maîtrise de la dépense publique locale », qui sera rendu public en fin d'année.
Messieurs les ministres, permettez-moi de revenir quelques instants sur la réforme de la taxe professionnelle.
Si cette réforme, qui a pour vocation de renforcer la compétitivité de nos entreprises, est à cet égard difficilement critiquable, pour autant, les collectivités vont se voir priver d'une autre marge de manoeuvre. Le plafonnement va en effet engendrer une baisse de leurs recettes évaluée à environ 290 millions d'euros pour les régions, à 250 millions d'euros pour les départements et à 70 millions d'euros pour les communes.
Les conséquences inégales de cette réforme, qui affectera en premier lieu les communautés à taxe professionnelle unique, imposent, me semble-t-il, une prise en considération de certaines situations particulières, par exemple les incidences du plafonnement sur l'intercommunalité et les risques d'une fragilisation financière des groupements intercommunaux.
Si cette spécificité a été reconnue à travers une réfaction de 20 % du « ticket modérateur » garanti aux groupements en taxe professionnelle unique, dont les bases sont plafonnées à plus de 50 %, cette disposition risque de ne pas offrir une réponse suffisante. En effet, la taxe professionnelle n'est plus la ressource dynamique qu'elle était auparavant. La situation des communautés qui cumulent un fort niveau de plafonnement de leurs bases fiscales avec une évolution faible voire négative est très préoccupante au moment de préparer les contrats d'objectifs et les plans pluriannuels d'investissement.
Je prendrai l'exemple concret de la communauté d'agglomération de Brive. Cette dernière n'a jamais augmenté ses taux d'imposition et n'a donc pas mis en réserve de provisions liées aux effets de la réforme de la taxe professionnelle. Ses bases sont plafonnées à hauteur de 40 %, selon les dernières simulations fournies en octobre dernier par le ministère des finances. La communauté d'agglomération de Brive est en taxe professionnelle unique et n'a pas adopté le régime de la fiscalité mixte ou additionnelle.
De fait, ce sont les seuls contribuables non plafonnés qui paieront une éventuelle hausse d'imposition. Cela veut dire que là où, avant la réforme, une augmentation d'impôts de 1 % aurait suffi pour couvrir les besoins fiscaux de la communauté d'agglomération de Brive, il faudra prévoir une augmentation de 1, 67 % afin de tenir compte de la rétrocession des produits de l'État. Et vous savez bien que les raisons d'augmenter les taux sont nombreuses et parfois imprévisibles.
La question d'une suraugmentation de la croissance des taux pour faire face aux rétrocessions de l'État pose la question du plafonnement de la hausse des taux de la taxe professionnelle par rapport aux taux de l'impôt sur les ménages. Ce plafonnement limitera la marge de manoeuvre de l'intercommunalité en cas de sinistre industriel, car la mise en réserve de l'augmentation des taux n'est pas souhaitée par nos élus et encore moins par les contribuables.
La question de la diminution des dotations de solidarité communautaire ou du recours à une fiscalité mixte se posera inévitablement du fait de la liaison à la hausse des taux de la taxe professionnelle et des taux communaux. Ce sont bien les ménages qui paieront en grande partie la réforme de la taxe professionnelle.
L'augmentation du taux de l'impôt sur les ménages qui résultera de cette réforme sera probablement mal ressentie, et la question de l'iniquité de cet impôt se posera inévitablement.
Quoi qu'il en soit, et plus généralement, les collectivités ont besoin, me semble-t-il, d'être mieux associées à ces réformes. Les élus manquent d'informations précises sur les effets des nouveaux mécanismes induits sur les budgets locaux par cette réforme de la taxe professionnelle.
Je compte sur vous, messieurs les ministres, pour nous apporter des réponses satisfaisantes.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, dans les quelques minutes qui me sont imparties, je voudrais vous faire part d'une réalité que la présidente du conseil général de la Réunion, Mme Nassimah Dindar, vous a exposée à plusieurs reprises.
La réforme constitutionnelle et les lois de décentralisation qui en découlent étaient fondées sur trois principes.
Le premier, plusieurs orateurs l'ont rappelé, est l'attribution par l'État, en 2004, de ressources équivalentes à celles de l'année 2003, compte tenu des dépenses engagées. Ce principe a été respecté.
Le deuxième principe, celui de la mise en oeuvre dans un délai raisonnable d'une loi de péréquation, n'a pas été appliqué. Cette loi devait garantir l'équité entre les dépenses des collectivités locales résultant des charges transférées et les ressources qu'elles pourraient obtenir en contrepartie de ces transferts.
Aujourd'hui, en lisant les notes très intéressantes du Conseil constitutionnel, on s'aperçoit que le Gouvernement disposait d'un délai raisonnable pour mettre en oeuvre cette loi de péréquation. Mais qu'est-ce qu'un délai raisonnable ? Nous sommes en 2006, presque en 2007, et la loi de décentralisation a été votée en 2002 !
Messieurs les ministres, ce principe constitutionnel qui prévoit la mise en oeuvre dans un délai raisonnable d'une loi de péréquation doit être respecté pour éviter la situation de détresse dans laquelle se trouvent certains départements métropolitains et ultramarins, notamment la Réunion et la Martinique.
Le troisième principe consiste à conserver une part déterminante de ressources propres. Les collectivités locales sont confrontées à un vrai dilemme. Si elles reçoivent des dotations fixes de l'État, leur autonomie fiscale est entamée. Or l'objectif était, lors des premières lois de décentralisation de 1982 à 1984, d'échapper à ce piège du différentiel qui pourrait exister, au détriment des collectivités locales, entre les recettes et les dépenses engagées, ainsi qu'au risque de la perte de l'autonomie financière.
Nous constatons, pour le RMI, que non seulement le compte n'y est pas, mais que, pour que le compte puisse être approché, le Gouvernement a mis en place le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion, le FMDI. Mais ce dernier n'est qu'une dotation, qui n'est pas modulable par la collectivité locale et ne fait pas l'objet d'une péréquation. Dans la situation actuelle, cette ressource porte atteinte aux principes d'équité et d'autonomie fiscale.
Permettez-moi de vous exposer la situation de la Réunion. Chacun sera juge et appréciera si elle peut perdurer, ce que, pour ma part, je ne pense pas. Messieurs les ministres, le 22 novembre, le préfet de la Réunion vous a écrit une lettre dans laquelle il vous explique que, si rien n'est fait, le département de la Réunion va connaître une véritable asphyxie. Pourquoi ? Parce que, aujourd'hui, alors que le nombre d'allocataires du RMI diminue grâce aux effets très positifs de la loi de programme sur l'emploi et le développement économique de l'île, les dépenses liées au RMI augmentent de 2 % par an. Dans le même temps, les ressources procurées par la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, diminuent de 1, 8 % par an, hors inflation. Voilà l'addition !
Dans le département d'Ille-et-Vilaine, qui compte un million d'habitants, les dépenses liées au RMI atteignent 48 millions d'euros, tandis que les ressources visant à les compenser ne sont que de 33 millions d'euros. Il manque donc 15 millions d'euros.
À la Réunion, les dépenses sont de 438 millions d'euros et les dotations de compensation ne dépassent pas 328 millions d'euros. Il manque donc 100 millions d'euros. Ni l'assiette des impôts locaux ni la faible augmentation des droits de mutation n'offrent au conseil général une marge de manoeuvre suffisante pour faire face à une telle situation.
C'est dans ces conditions, messieurs les ministres, que j'interviens pour relayer une demande formulée tant par le préfet de la Réunion que par la présidente du conseil général, à l'occasion d'une réunion organisée à la préfecture, à laquelle participait également le trésorier-payeur général pour attester de l'exactitude et de l'objectivité des renseignements que j'évoque.
Cette demande porte sur deux points.
Tout d'abord, à l'occasion de l'examen de l'article 10 de la loi de finances rectificative pour 2006, il conviendrait d'adopter un mode de calcul de la dotation du FMDI qui soit différent de celui que vous avez proposé : une quote-part de la dotation globale est attribuée aux départements d'outre-mer, et une fraction de cette quote-part est perçue par la Réunion, dont la situation est pourtant plus proche de celle des Bouches-du-Rhône que de celle des autres départements d'outre-mer. Nous sommes donc lésés dans cette affaire.
Par ailleurs, il conviendrait que vous diligentiez une expertise pour vous rendre compte par vous-mêmes de l'exactitude de mon propos et pour envisager des solutions face à cette situation exceptionnelle.
Si ces demandes ne sont pas satisfaites, le conseil général risque d'être asphyxié, et les actions que nous menons aujourd'hui avec succès seront mises en péril.
Cette année, grâce à l'Agence nationale pour l'insertion et la promotion des travailleurs d'outre-mer, l'ANT, et le conseil général, 4 500 jeunes sont venus se former et travailler en métropole. Ceux-là ne seront pas au RMI !
En outre, nous ouvrons une antenne dans l'Ouest australien, dans laquelle 200 jeunes Réunionnais commencent à travailler. Notre objectif n'est pas que les gens perçoivent le RMI, mais au contraire qu'ils sortent du dispositif ! Pour cela, il nous faut disposer d'une marge de manoeuvre budgétaire suffisante. Or cette dernière est actuellement mise en péril dans le cadre des lois de décentralisation, puisque certains principes constitutionnels ne sont pas encore mis en oeuvre. Ce n'est pas de la mauvaise volonté de la part du Gouvernement, que je soutiens. C'est une réalité qu'il faut progressivement améliorer.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, à l'heure où le congrès des maires et des présidents de communautés de communes de France se termine, où le projet de loi de finances pour 2007 est débattu, à quelques jours de la remise du rapport du Conseil économique et social et, enfin, à quelques mois d'une échéance fondamentale pour notre pays, la résolution des élus locaux, eu égard à l'évolution des finances locales, est plus que jamais déterminée.
Cette détermination, mes chers collègues, n'est autre que l'écho d'une crise des finances locales, désormais avérée, une « crise de confiance autant que de chiffres », comme le soulignait M. Philippe Laurent, président de la commission des finances et de la fiscalité locale de l'AMF.
Les équilibres budgétaires des collectivités locales, a fortiori des petites et moyennes communes, sont maintenant clairement menacés. Ils connaissent un effet de ciseau impitoyable entre des dépenses de fonctionnement plus alourdies à chaque exercice budgétaire et des ressources toujours plus difficiles à obtenir. Durement mises à mal, les relations entre l'État et les élus locaux doivent retrouver, à mon sens, la confiance qui leur fait défaut.
Pour ce faire, les maires et présidents de communautés de communes ont exprimé, notamment lors du congrès, deux attentes fortes : ils demandent un réel partenariat financier équilibré avec l'État et ils proposent une profonde réforme de la fiscalité directe locale.
Dans le projet de loi de finances pour 2007, qui se présente comme un budget de transition sans surprise, les maires ne peuvent qu'accueillir avec une réelle satisfaction la reconduction du contrat de croissance et de solidarité, pour la quatrième année consécutive, et pour une année encore sous sa forme actuelle.
Ils déplorent en revanche que le mode d'évolution des dotations de l'État aux collectivités locales soit inchangé, réduisant encore les marges de manoeuvre desdites collectivités. À cet égard, on relève déjà, dans le projet de loi, une baisse importante de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, qui, depuis l'origine du contrat de croissance, sert apparemment de variable d'ajustement et diminuerait, pour 2007, de 11 points, c'est-à-dire de 122 millions d'euros par rapport à 2006.
Je note également que la dotation globale d'équipement, la DGE, et la dotation de développement rural, la DDR, sont quasiment stabilisées. Mais la DGE a diminué d'une manière très sensible l'année dernière, ce qui n'est pas sans poser des problèmes pour les investissements des petites communes.
Si l'on examine par ailleurs l'évolution de la dotation forfaitaire au cours des dernières années, on note que celle-ci est bien inférieure à l'inflation. Sans préjuger le choix que fera le comité des finances locales, l'évolution de la dotation globale de fonctionnement forfaitaire sera encore inférieure à l'inflation. Heureusement, la dotation de solidarité rurale, la DSR, et la dotation de solidarité urbaine, la DSU, progressent, elles, de manière plus sensible. Mais j'ai toujours regretté que la DSR ne progresse pas au même rythme que la DSU et ait pris quelques années de retard en matière de concours financiers.
Les élus locaux ont d'ores et déjà émis une opposition ferme à toute désindexation progressive des concours financiers de l'État aux collectivités locales. Lors du congrès, le président de la commission des finances de l'AMF n'a d'ailleurs pas manqué de rappeler que les dotations de l'État - mais chacun ici le sait, puisque nous avons affaire à des initiés - constituaient non pas des dépenses de l'État, mais un prélèvement sur recettes fiscales, puisqu'il s'agit d'anciens impôts locaux supprimés par décision du pouvoir central au fil du temps. C'est pourquoi les dotations et compensations des collectivités devraient, à notre sens, progresser comme les recettes fiscales de l'État avant tout allégement, et non comme ses dépenses.
En tout état de cause, les élus attendent désormais qu'il soit donné une suite réelle et concrète aux orientations proposées par le Gouvernement consistant à améliorer les relations financières entre l'État et les collectivités locales, notamment à travers le travail de la Conférence nationale des finances publiques et du conseil d'orientation des finances publiques.
Il paraît également utile que l'on s'engage enfin dans une réforme de la fiscalité directe locale. Même si l'on évoque chaque année ce sujet, nous éprouvons quelques difficultés à le faire.
La fiscalité locale, chacun en conviendra, est aujourd'hui à bout de souffle. Elle ne repose que trop sur des bases archaïques, sur une fiscalité cantonnée aux « quatre vieilles » et sur des calculs extrêmement complexes qu'il conviendrait de classer au rang des procédés révolus.
Aussi une réforme profonde de la fiscalité locale devient-elle plus que jamais, après quinze années d'évocation, inéluctable pour la gestion publique locale. Le président de l'AMF, M. Pélissard, en a d'ailleurs fait l'une des revendications principales de l'association nationale, l'élevant au rang d'étape nécessaire à la responsabilisation des gestionnaires publics, et 62 % de maires récemment interrogés l'appellent aussi de leurs voeux. Elle revêt d'ailleurs le caractère de réforme prioritaire dans bien des annonces, déclarations et enquêtes réalisées auprès des élus locaux.
Les principes constitutionnels d'autonomie financière, de péréquation et de libre administration des communes et de leurs groupements, dont il faut obtenir le respect, devront être au coeur des travaux et propositions qu'il convient d'élaborer à cet égard.
Les maires demandent également avec insistance que le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée soit corrigé d'urgence afin d'éviter un transfert fiscal sur les ménages et le développement d'inégalités importantes, mais aussi pour ne pas compromettre durablement la situation financière des collectivités locales. M. le ministre délégué au budget a reçu récemment une délégation d'élus locaux issus des différentes associations nationales et a fait savoir que le moment n'était pas venu d'intervenir sur ce point.
En l'absence de hausse du taux de taxe professionnelle, le seul dynamisme des bases de la taxe pourrait en effet provoquer un dépassement du plafond et pénaliser les communes et leurs groupements, contraints d'acquitter le ticket modérateur.
Il me paraîtrait donc souhaitable que soient adoptés des amendements ayant pour objet d'atténuer le décalage entre le prélèvement sur les recettes fiscales des collectivités l'année N et le remboursement aux entreprises par l'État l'année N+1.
Enfin, les élus locaux aspirent à ce qu'une réforme globale de la fiscalité locale vienne doter les collectivités de ressources pérennes et dynamiques. Une meilleure égalité et une plus grande lisibilité pour nos contribuables sont souhaitables. La réforme devrait contribuer à mieux responsabiliser les élus.
Reste la question des dégrèvements et des exonérations, système mis en place par l'État sans que les collectivités locales l'aient demandé. En aucune façon, il ne doit être accepté de remettre en cause les compensations accordées par l'État. La seule solution qui pourrait d'ailleurs se profiler serait la recherche de bases plus justes pour les collectivités, car, si les dégrèvements bénéficient aux contribuables, ils ont aussi pour effet de diminuer les marges de manoeuvre des collectivités.
C'est pourquoi les élus locaux considèrent que la réforme des finances et de la fiscalité locales devra reposer sur la modernisation de l'assiette des impôts locaux, le partage des impôts nationaux ou une plus grande spécialisation de l'impôt.
Dans ce contexte, beaucoup d'espoirs reposent sur le rapport du Conseil économique et social. Lorsque ce dernier aura été publié et que ses propositions seront connues, sonnera l'heure pour les élus du vrai courage, celui de la mise en oeuvre de la réforme.
Messieurs les ministres, mes chers collègues, quelques pistes concrètes, dont je me plais à me faire l'écho, sont d'ores et déjà avancées et portées par l'Association des maires de France.
Premièrement, les revenus pourraient être introduits, sous une forme ou une autre, dans l'assiette taxable au niveau local : pas nécessairement dans celle des communes, mais dans celle des départements, par exemple.
Deuxièmement, les valeurs locatives foncières devraient faire l'objet d'une nouvelle fixation, qui tienne compte de la valeur réelle des biens et puisse être adaptée aux différents territoires par les élus eux-mêmes.
Troisièmement, le champ des contribuables de la taxe professionnelle pourrait être étendu et simplifié par une relocalisation des bases.
Quatrièmement, enfin, une nouvelle fiscalité automobile, en lien avec les conséquences environnementales de l'utilisation de la voiture individuelle, pourrait être étudiée.
Mes chers collègues, ces pistes méritent à mon avis d'être explorées. Il faut tendre vers une véritable autonomie financière - pour les recettes et les dépenses - des budgets respectifs de l'État, des collectivités locales et de la sécurité sociale. Mettons un terme à tous ces financements croisés qui font perdre de la lisibilité aux budgets respectifs des uns et des autres et ne permettent pas à chacun d'être seul responsable de ses propres turpitudes.
J'appelle de mes voeux cette véritable autonomie. J'ignore si nous y parviendrons, mais je souhaite que ce chantier soit enfin ouvert un jour ou l'autre, pour que chacun puisse assumer ses responsabilités devant nos concitoyens.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et au banc des commissions. - M. Michel Mercier applaudit également.
M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'issue de ce débat tout à fait passionnant sur les collectivités locales
Riressur les travées de l'UMP.
Après toutes vos interventions, à commencer par celle du président de la commission des finances, et alors que nous abordons ensemble depuis plusieurs années ces questions, je pense qu'il y a un profond malentendu entre l'État et les élus locaux, et qu'il faut absolument que nous en sortions.
Je pars du principe que tout le monde est de bonne foi. Néanmoins, le moins que l'on puisse dire, c'est que nous sommes aujourd'hui face à un paradoxe.
En effet, d'un côté, l'État et les collectivités locales ont accompli ensemble des avancées considérables au cours de ces dernières années - la modification de la Constitution, la décentralisation, l'adoption de la loi organique sur l'autonomie financière, la péréquation -, et, de l'autre côté, il s'est instauré entre eux un dialogue de sourds. Tout se passe comme si l'on se parlait sans se comprendre. L'intérêt de ces débats, c'est de se dire les choses telles que nous les voyons et les ressentons.
Voici la meilleure illustration de ce paradoxe : l'État, en toute bonne foi - et je peux en témoigner, tout comme mon collègue et ami Brice Hortefeux -, accomplit des efforts financiers considérables en faveur des collectivités locales. Ainsi, dans le seul projet de loi de finances pour 2007, le Gouvernement prévoit la reconduction du contrat de croissance et de solidarité à l'euro près, soit 1 milliard d'euros supplémentaire, l'augmentation du fonds de compensation pour la TVA et le financement supplémentaire au titre du RMI, qui représentent à nouveau 500 millions d'euros, le dégrèvement des impôts locaux et des compensations d'exonération de fiscalité locale, soit 700 millions d'euros. Au total, l'effort en faveur des collectivités locales est en augmentation de 4, 3 % par rapport à l'année dernière, alors même que l'État réduit ses propres dépenses d'un point par rapport à l'inflation.
Dans le même temps, nombre d'élus locaux expriment un mécontentement, voire des inquiétudes, devant l'augmentation des dépenses, se demandant comment ils pourront les financer. Et lorsqu'elles découlent de normes ou de décisions auxquelles vous n'avez pas été suffisamment associés, vous le vivez mal - Michel Mercier l'a rappelé tout à l'heure -, d'autant que vous considérez à juste titre que la fiscalité locale n'est pas toujours adaptée aux réalités locales de 2006.
Mon sentiment est que la vérité est partagée, et que tout le monde a un peu raison.
D'une part, l'État constate que le poids de ses engagements financiers au titre des concours financiers locaux augmente désormais beaucoup plus vite que ses propres dépenses, sans avoir cependant le sentiment de satisfaire complètement, loin s'en faut, les attentes des élus locaux.
D'autre part, les collectivités locales, qui voudraient se sentir pleinement responsables de l'évolution de leurs dépenses, ont le sentiment que l'État ne joue pas complètement le jeu de la décentralisation.
« Tout ce raisonnement pour en arriver là ! », s'exclameront certains. Il me semble pourtant qu'il fallait en arriver là pour crever l'abcès. Il importe en effet de se dire les choses telles qu'elles sont et de préciser si nous voulons les voir évoluer d'une autre manière.
La décentralisation et tout le travail qui a été accompli ces quatre dernières années ont créé les conditions pour une nouvelle donne.
Concrètement, la réunion dans quelques jours de la Conférence nationale des finances publiques et du conseil d'orientation des finances publiques constituera une excellente occasion pour rassembler tous les acteurs de la dépense publique : l'État, les collectivités locales et - M. Vasselle le sait bien - les organismes sociaux. Chacun y viendra avec ses convictions, voire, ce qui est sympathique, ses certitudes !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Enfin, c'est parfois sympathique !
Sourires
Cette démarche partenariale vise à relever un défi simple : développer la coresponsabilité. C'est une notion qui n'est pas encore tout à fait partagée, car la règle du jeu n'est pas totalement claire. Elle est née de ma conviction personnelle selon laquelle il n'y a pas d'un côté un État vertueux et, de l'autre, des collectivités locales dispendieuses, ce qui serait ridicule.
Ce n'est pas ce que vous disiez l'année dernière, monsieur le ministre !
Je l'ai toujours dit, monsieur Marc, et vous le savez bien !
En revanche, une volonté commune de bien compter et de s'assurer que les comptes sont bien tenus existe des deux côtés. De ce point de vue, nous avons un très gros travail à faire, auquel nous devons nous atteler ensemble.
Monsieur Marini, vous avez fait l'éloge de la réforme de la taxe professionnelle en des termes qui m'ont beaucoup touché, et je vous en remercie. Vous le savez, il est plus facile de critique cette réforme que de la faire !
Il est beaucoup plus aisé de pointer ses difficultés, ses éventuels dysfonctionnements, ses inévitables faiblesses, que d'aller au fond des choses. En effet, il convient de rappeler que cette réforme est d'abord faite pour les entreprises, afin d'empêcher leur délocalisation, chacun devant avoir bien en tête qu'un pays moderne ne peut continuer à taxer 200 000 entreprises jusqu'à 10 % de leur valeur ajoutée en seule taxe professionnelle.
Après avoir mis en place, l'année dernière, des mécanismes correcteurs, grâce au rapporteur général et à vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, il nous faut désormais faire vivre cette réforme et lui donner sa chance, avec le pragmatisme qui s'impose, en nous ménageant la possibilité d'y apporter des corrections, le cas échéant.
S'agissant du risque d'optimisation fiscale, j'ai bien entendu votre appel à la vigilance et je compte bien me montrer, comme vous, très attentif à ce problème. Il importe d'abord de s'assurer que cette optimisation est réelle.
Nos inquiétudes à cet égard peuvent être relativisées, parce qu'une entreprise, si elle est moins taxée - ce qui sera le cas avec cette réforme -, aura moins intérêt à optimiser, mais aussi parce qu'il est plus facile de corriger les abus de droit lorsqu'ils sont identifiés, ce à quoi nous allons nous employer.
Enfin, tout en partageant votre souci de progresser et de réaliser de nouvelles avancées en la matière, je souhaite que nous n'aboutissions pas à des transferts de charges importants entre les secteurs économiques. Nous devrons y veiller.
C'est la raison pour laquelle, à ce stade, je ne suis pas favorable à une modification de la charpente générale du dispositif de taxe professionnelle.
Pour autant, je ne suis pas opposé à une réflexion sur les différents problèmes qui peuvent se poser, notamment ceux qui ont été évoqués par M. Jarlier. Le projet de loi de finances pour 2007 est l'occasion d'en débattre, tout comme, le cas échéant, le collectif budgétaire, pour continuer à en tirer quelques enseignements ; mais il faut le faire de façon marginale, afin de ne pas dénaturer une réforme essentielle que nous avons eu beaucoup de mal à bâtir.
D'ailleurs, si je devais un jour donner un conseil à mon très lointain successeur, ce serait de ne plus toucher à la réforme de la taxe professionnelle !
Monsieur le rapporteur pour avis, je vous remercie d'avoir souligné l'importance de l'effort financier consenti par l'État en faveur des collectivités locales. J'y suis d'autant plus sensible que d'autres que vous, à force de regarder le verre à moitié vide, en oublient parfois tout le travail qui a été accompli !
Je vous confirme que l'État continuera, en 2007, à accompagner les départements dans leur gestion du RMI, comme c'est le cas depuis des années. Indépendamment des mesures prises par le Gouvernement à cet égard, en 2004 et en 2005, un fonds de mobilisation pour l'insertion a été mis en place, doté de 500 millions d'euros en 2006. Il bénéficiera d'une dotation du même montant en 2007, ainsi qu'en 2008, soit 1, 5 milliard d'euros au total. Avec une telle somme en faveur du RMI, qu'on ne me dise pas que le compte n'y est pas ! D'ailleurs, M. Mercier ne le dit plus...
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Et il est pour moi un excellent baromètre !
Sourires
Madame Beaufils, vous dites que l'État se déleste sur les collectivités locales, et ce sans même vous préoccuper des efforts qui sont accomplis précisément pour honorer ses engagements, s'agissant en particulier du financement des dotations, de la reconduction du contrat de croissance, de la compensation des transferts dans le respect des règles.
Pourquoi ne l'avez-vous pas dit à l'époque où le Gouvernement a créé l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, sans prévoir les ressources correspondantes pour son financement ?
Et pourtant, à cette époque-là, il y avait des choses à dire ! Mais vous n'en avez pas parlé !
Il semble que vous soyez parfois tentée de pratiquer le « deux poids, deux mesures », ce qui est très regrettable s'agissant d'une question qui devrait nous rassembler.
Monsieur Marc, vous êtes très dur, vous aussi, avec le Gouvernement !
Et donc, par définition, vous êtes un peu excessif !
Vous aussi, vous avez oublié de dire que le Gouvernement avait décidé la reconduction de l'indexation, élément pourtant majeur, et qu'il avait appliqué la loi sur le RMI à l'euro près, et même au-delà !
Dois-je vous rappeler - pardonnez-moi de vous le dire à vous aussi - les ravages causés par une APA non financée, la suppression par vos amis politiques de près de 14 milliards d'euros de fiscalité locale ? Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il est temps de mettre tout cela sur la table !
Quant à la CSG départementale, il faut certes répondre aux besoins collectifs, mais il est temps d'avoir un débat de fond avec les Français sur le périmètre de la dépense publique et le financement de cette dernière.
Or, je constate que les propositions de la gauche - mais il est vrai que vous n'en faites pas beaucoup...
... et que vous menez plus une campagne d'image qu'une campagne de propositions ; mais à chaque jour suffit sa peine... - visent essentiellement soit une augmentation d'impôt, soit la création d'un nouvel impôt. Or les Français ne veulent plus de cette politique-là !
C'est une politique à l'ancienne, qui commande sans cesse d'opposer les méchants riches aux gentils pauvres. Ces temps sont aujourd'hui révolus !
Excusez-moi, mais je ne vois pas le rapport !
J'aurais aimé vous entendre plutôt dire que les socialistes avaient changé, qu'ils étaient devenus modernes, à l'image de Tony Blair ou de Gerhard Schröder, et qu'ils envisageaient de baisser les impôts !
Nous n'avons rien entendu de tel, et cela prouve que vous restez d'un autre temps !
Monsieur Mercier, je vous ai écouté avec beaucoup d'attention comme toujours, et je partage totalement votre approche : il faut, en effet, comme l'a également indiqué M. Arthuis, sortir du malentendu qui existe dans les relations entre l'État et les collectivités locales.
D'ailleurs, je dois dire que, en vous écoutant, mon collègue Brice Hortefeux m'a fait la remarque suivante : « C'est extraordinaire, Michel Mercier est en train de virer chiraquien ! »
Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Votre virage était d'ailleurs ciblé ! En effet, avec beaucoup de force et de conviction - et plus il y avait de force et de conviction dans vos propos, plus nous étions émus
Riressur les travées de l'UMP.
Or le Président de la République n'a rien dit d'autre au Congrès des maires et des présidents de communautés de France qui s'est tenu récemment, en formant textuellement le voeu que les élus locaux, et plus particulièrement leurs représentants associatifs, soient associés notamment aux négociations salariales dans la fonction publique. C'est là une avancée majeure. Et vous voir vous rejoindre ainsi l'un et l'autre constitue pour nous un moment d'anthologie !
Par ailleurs, grâce tant à vous-même, monsieur Mercier, qu'à M. de Raincourt, nous avons avancé de manière très significative sur la question du RMI, et les conditions devraient être maintenant réunies pour moderniser le système.
Les travaux de M. Pierre Richard, dont le rapport doit nous être remis à la mi-décembre, à la suite de la mission qui lui a été confiée par mon collègue Brice Hortefeux et moi-même, relative au pilotage et à la maîtrise des dépenses publiques locales, nous permettront d'aller plus loin dans ce domaine et d'aborder avec beaucoup de transparence toutes ces questions.
Monsieur de Broissia, je vous remercie de la précision de vos propos. Vous avez en particulier souligné le caractère respectueux et solidaire de ce projet de budget, ce qui correspond effectivement à l'esprit dans lequel nous avons travaillé.
La péréquation a été mise en oeuvre.
Elle est améliorée grâce à la réforme des dotations et à la création de la dotation de solidarité urbaine.
Je vous remercie également d'avoir évoqué les mesures que nous avons prises s'agissant de l'accompagnement des conseils généraux dans la gestion du RMI. Chacun comprend qu'une étape a été franchie.
Les réactions de plusieurs d'entre vous, ces dernières semaines, à mon annonce d'un nouveau chèque de 500 millions d'euros du Gouvernement pour répondre aux attentes, sont éloquentes. Le problème, c'est non plus le RMI, m'a-t-il été dit, mais l'APA !
Cela prouve que le problème a certes été transféré ailleurs, mais qu'une solution a été trouvée pour le RMI. Selon la formule d'un de mes anciens amis, une haie après l'autre !
En ce qui concerne les propos que certains d'entre vous ont évoqués, en particulier M. Biwer, sur l'ouverture d'un grand chantier de la réforme de la fiscalité locale, ma conviction profonde est que cette réflexion ne peut pas être réduite à la recherche de l'assiette idéale ou du contribuable modèle : ce serait vouloir le Grand Soir, qui n'arrive jamais.
Dieu sait si nous nous sommes creusé le cerveau, mais nous ne trouvons pas !
La question doit être globale : quel est le meilleur mode de financement, et pour quelle dépense publique locale ? Or la situation n'est pas la même selon que l'on est maire ou président d'une intercommunalité. Pour financer, par exemple, le service de collecte des ordures ménagères, il vaut mieux choisir parfois la taxe, parfois la redevance - la TOM ou la ROM, pour reprendre les expressions que nous connaissons bien. En réalité, la bonne méthode est plutôt d'élaborer la meilleure solution politique locale par politique locale, projet par projet.
Quelle doit être la place du prélèvement obligatoire ? de la redevance ? de la participation financière de l'usager ? Quelle doit être la place laissée au prix ? Je suis quant à moi pour le plus grand pragmatisme, tant il est vrai que, dans ce domaine, nous ne pourrons pas trouver la martingale compte tenu de la situation générale dans laquelle se trouvent les finances publiques.
Monsieur Delfau, vous mentionnez un « étouffement financier » des collectivités quand nous évoquons une « responsabilité partagée ». Dieu sait si nous mesurons, à travers votre intervention, le chemin qui nous sépare !
Il n'y a certes qu'un seul contribuable, mais notre objectif est de mettre en place des mécanismes vertueux pour que l'État ne crée pas de dépense supplémentaire pour les collectivités locales, qui de leur côté doivent réfléchir à la manière de mieux maîtriser la dépense locale, en partenariat avec l'État. C'est un vaste sujet, mais peut-être nous retrouverons-nous un jour sur ce point.
Monsieur Miquel, quelle cruauté dans votre propos ! Quelle dureté lorsque vous évoquez la parole de l'État qui n'aurait pas été tenue, ...
... alors que nous avons honoré nos engagements à l'euro près ! Nous n'avons pas compensé selon d'autres règles que celles qui prévalaient en 1982, au contraire ! L'instauration de la Commission consultative d'évaluation des charges a considérablement modifié la donne et nous aidera à passer d'une société de méfiance à une société de confiance. J'espère bien que nous continuerons dans cette voie.
Monsieur Jarlier, je vous ai écouté avec une grande d'attention. Vous avez souligné le travail que l'État et les collectivités ont effectué ensemble dans de nombreux domaines, et vous avez notamment rappelé les questions relatives aux communes de montagne.
Sur la réforme de la taxe professionnelle, vous avez repris une disposition, proposée à l'Assemblée nationale par le président de l'AMF, à laquelle je me suis opposé, les députés ayant bien voulu me suivre. Pour des raisons de forme comme pour des raisons de fond - ne le prenez pas en mauvaise part -, j'ai souhaité convaincre son auteur, sans y parvenir complètement, qu'en réalité, si nous décalons d'un an le versement, c'est la réforme elle-même qui sera décalée d'un an, au détriment soit des finances de l'État, soit des entreprises. Dans la situation actuelle de notre pays, nous ne pouvons pas nous le permettre, alors même que nous avons abouti à un compromis de très bonne qualité grâce à l'amendement que le rapporteur général avait présenté l'an dernier.
Monsieur Moreigne, l'État ne se désengage pas ! Quand il consacre 84 milliards d'euros aux collectivités locales, on ne peut pas dire qu'il se désengage ! Il faut tout de même mesurer le travail accompli dans ce domaine.
Vous avez été critique sur la réforme de la taxe professionnelle ; je n'y reviens pas, car j'espère pouvoir achever de vous convaincre à l'occasion de la discussion des amendements : pris de remords, vous reconnaîtrez peut-être alors que, finalement, c'était très bien et qu'il faut persévérer !
Monsieur Murat, merci de votre soutien ! J'ai été très sensible à vos chaleureux propos sur l'action que nous menons et aux encouragements que vous avez bien voulu formuler. Je suis totalement d'accord avec vous : les collectivités doivent être associées aux décisions de l'État qui les concernent, et c'est d'ailleurs tout le combat que nous allons mener avec la Conférence nationale des finances publiques.
Quant à la réforme de la taxe professionnelle, j'ai bien entendu vos inquiétudes, mais je propose que nous lui donnions sa chance. Nous verrons au fil des mois ce qu'il y aura lieu de modifier, d'améliorer. C'est aussi cela, une réforme en cours d'expérimentation !
Monsieur Virapoullé, je vous ai écouté avec attention, me souciant de ce que vous alliez me demander... Eh bien non ! J'ai entendu quelqu'un qui, comme à son habitude, à la fois veille aux intérêts de son département et se montre responsable.
Vous avez bien sûr évoqué la difficile question du RMI à la Réunion, question que nous connaissons bien vous et moi. Je rappelle qu'un effort supplémentaire substantiel a été réalisé pour le financement du RMI, et il va de soi que votre département en profitera.
Enfin, monsieur Vasselle, mon souhait est d'améliorer les relations entre l'État et les collectivités locales. Tous les instruments ont été mis en place à cette fin, ce qui nous donnera de nombreuses occasions de poursuivre la démarche qui est la nôtre : celle du partenariat, de l'écoute, du respect mutuel.
Je sais que, avec le temps qui passe, j'arriverai à vous convaincre, car c'est non pas tant une affaire de certitude qu'une affaire de conviction. Dans ce domaine, croyez-moi, j'ai de l'énergie à revendre !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
M. Brice Hortefeux, ministre délégué aux collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je serai bref après la réponse très précise du ministre délégué au budget, qui a même, dans son enthousiasme, englobé dans la grande famille des chiraquiens MM. Mercier et de Raincourt, élément qui est à porter au procès-verbal.
Sourires
Ce débat sur les recettes des collectivités territoriales est l'occasion d'entendre un certain nombre d'encouragements, qui sont les bienvenus pour le Gouvernement, d'écouter certaines préoccupations appelant des précisions et certaines inquiétudes que je vais m'efforcer de dissiper.
Monsieur le rapporteur général, vous avez évoqué la taxe professionnelle. Comme Jean-François Copé, je vous remercie de votre honnêteté et de votre courage, et je vous sais gré d'avoir posé à ceux qui en refusent encore la réforme - certains orateurs se sont exprimés en ce sens - une question simple : devions-nous laisser cet impôt qui pénalise les investissements et l'emploi continuer de fragiliser nos territoires ?
Ma conviction repose sur trois éléments. D'abord, nous avons effectué en faveur des collectivités les plus défavorisées et les plus fragiles un effort inégalé de péréquation. J'insiste notamment auprès de M. Delfau, qui semble avoir oublié que la péréquation représente aujourd'hui plus de 15 % de la DGF, contre 8 % en 2005.
M. Gérard Delfau fait un signe de dénégation.
Ensuite, les EPCI à taxe professionnelle unique disposent - qui peut le contester ? - d'instruments pour mettre en oeuvre dans leur périmètre une solidarité locale à travers la dotation de solidarité communautaire. Enfin, je rappelle que l'État prendra en charge, globalement, les trois quarts du coût de cette réforme.
Monsieur Arthuis, je vous remercie d'avoir rappelé les éléments qui contribuent à la sérénité : d'abord, la reconduction du contrat de croissance et de solidarité, point sur lequel je ne reviens pas ; ensuite, les gestes que le Gouvernement a consentis en matière de compensation des transferts, puisqu'il a dépassé ses obligations de 157 millions d'euros ; enfin, les avancées qu'il a réalisées dans le dossier du RMI. L'ensemble représente près de 2 milliards d'euros en quatre ans, ainsi que l'a déjà indiqué Jean-François Copé, dont 1 milliard d'euros arrivera dans les caisses des départements dès le tout début de l'année 2007.
Je voudrais, monsieur Arthuis, apporter quelques éléments qui, je l'espère, contribueront à une décrispation. D'abord, sur la réforme de la DGF, en particulier de la dotation de fonctionnement minimale, qui, je le sais, est au coeur de vos préoccupations, il me semble que le dispositif de 2005 est somme toute assez équilibré. C'est en tout cas ce qu'a estimé le groupe de travail du comité des finances locales, qui a procédé à son évaluation au mois de juillet dernier.
Ainsi, je vous rappelle que l'écart entre les 24 départements anciens et les 40 départements nouveaux, qui était effectivement de 1 à 3 au début de la réforme, ne sera plus, à l'horizon de 2009, que de 1 à 2, ce qui répond très précisément à votre préoccupation. Cela n'est pas incompatible avec la garantie de progression minimale que M. Pierre Jarlier souhaite mettre en place au profit des vingt-quatre départements anciens.
Vous savez, monsieur Arthuis, tout comme M. Mercier, que, pour toutes sortes de raisons, je suis extrêmement attentif à ce que les départements soient associés aux décisions qui concernent les SDIS et à ce que les finances des SDIS, et donc des conseils généraux, soient préservées, en particulier s'agissant des questions statutaires et salariales des sapeurs-pompiers professionnels.
Quant au financement des SDIS par l'affectation, prévue à l'article 53 de la loi de finances pour 2005, d'une part de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, la TSCA, une évaluation erronée de l'assiette, c'est vrai, a entraîné pour les départements un manque à gagner que j'avais déjà estimé à cette tribune à 40 millions d'euros environ. Je confirme que cela sera corrigé en loi de finances rectificative.
S'agissant du fonds d'aide à l'investissement des SDIS, vous avez constaté une sous-consommation chronique des autorisations d'engagement entraînant d'importants reports de crédits de paiement. Nous avons donc logiquement fait le choix d'une rationalisation ainsi que d'une concentration du fonds d'aide à l'investissement sur les grands projets, parmi lesquels figure notamment Acropol. J'imagine que nous aurons l'occasion de revenir sur tous ces aspects lors de la discussion de la mission « Sécurité civile ».
Enfin, monsieur le président de la commission, je confirme que le ministère des collectivités territoriales mettra gracieusement à votre disposition les données dont il dispose, préservant ainsi concrètement les finances de la Haute Assemblée.
Je veux vous remercier, monsieur Saugey, de la qualité de votre rapport. La précision de votre intervention démontre que vous avez pris la juste mesure des transferts de compétences et des gestes consentis par le Gouvernement.
Vous avez exprimé des inquiétudes concernant les personnels TOS. La commission consultative d'évaluation des charges a montré lors de la réunion qu'a présidée Jean-Pierre Fourcade le 14 novembre que les corrections qui seront apportées en loi de finances rectificative pour 2006 permettront la prise en compte complète des 45 000 TOS qui rejoindront la fonction publique territoriale dès le 1er janvier. La compensation est donc concrètement assurée, conformément aux obligations du Gouvernement.
Ce transfert vers la fonction publique territoriale rappelle d'ailleurs le rôle qu'a joué M. Alain Vasselle dans la discussion sur la fonction publique territoriale, voilà quelques mois, ici même.
Madame Beaufils, vous avez évoqué la situation de la CNRACL. Je tiens à vous rassurer : rien, à mon avis, ne justifie aujourd'hui des propos inutilement alarmistes. Dans un premier temps, la situation de la Caisse va très logiquement s'améliorer en raison de la hausse du nombre de cotisants. Dans un second temps, tout aussi logiquement, le nombre des retraités augmentera, compte tenu de l'âge moyen des TOS, qui est aujourd'hui de quarante-quatre ans et demi, et des agents de l'équipement. Cependant, d'autres personnels de remplacement seront appelés à cotiser dans le cadre d'un système de retraite qui naturellement, vous le savez, repose sur le principe de la répartition.
Vous avez également évoqué les moyens des communes défavorisées, en particulier dans les zones urbaines sensibles. Dois-je vous rappeler qu'a été prévue dans le plan de cohésion sociale de janvier 2005 une augmentation de la DSU de 120 millions d'euros par an pendant cinq ans ?
Cela signifie donc, très concrètement, que la DSU atteindra près de 1 milliard d'euros.
Je me souviens vous avoir donné l'année dernière l'exemple de Saint-Pierre-des-Corps, commune qui vous est naturellement chère : cette année, la DSU a atteint un peu plus de 412 000 euros, ...
M. Brice Hortefeux, ministre délégué. ...soit tout de même une augmentation de 33 % !
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Mais vous n'avez pas noté la baisse de la DCTP, qui est beaucoup plus forte !
Je souligne, à l'attention de MM. Delfau et Moreigne, que cela ne s'est jamais fait au détriment de la péréquation rurale ; au demeurant, le comité des finances locales y veille très scrupuleusement. D'ailleurs, chacun le sait ici, notamment M. Biwer, j'ai été très attentif à ce que les communes rurales ne soient pas défavorisées par le passage du potentiel fiscal au potentiel financier, en particulier pour ce qui concerne la dotation « élu local ».
Enfin, monsieur Moreigne, je rappelle que votre département est le troisième département bénéficiaire de la péréquation et le deuxième pour la DFM ; j'observe que, à juste titre, personne ne songe à le contester.
À l'instar de Jean-François Copé, ce qui est tout à fait logique, je me demande parfois, monsieur Marc, si nous parlons de la même chose.
Vous affirmez que la reconduction du contrat de croissance n'offre aucune marge aux collectivités.
Ce contrat est pourtant en hausse, du taux de l'inflation augmenté du tiers de la croissance, ce qui fait tout de même 985 millions d'euros supplémentaires : cela me semble être une marge assez nette et assez visible !
Vous nous dites ensuite que les transferts ne sont pas compensés, alors que nous avons précisément inscrit dans la Constitution des garanties qui sont sans précédent.
Vous nous dites, en outre, que la TIPP n'offre pas de recettes satisfaisantes aux régions, alors que la modulation que nous avons obtenue de Bruxelles permet aux régions d'augmenter leurs recettes de 540 ou 550 millions d'euros - c'est une estimation.
Vous nous dites enfin que nous avons démantelé la fiscalité locale. Mais quel gouvernement a conduit la taxe professionnelle dans l'impasse en supprimant la part salaires des bases de la taxe professionnelle ?
Cela a été dit tout à l'heure, mais il est utile de le rappeler !
Monsieur Mercier, comme M. le ministre délégué au budget, vous m'avez convaincu depuis très longtemps - et pas seulement quand vous m'avez invité au conseil général du Rhône -, d'une part, d'effectuer une pause dans les transferts de compétences - j'en suis partisan - et, d'autre part, d'associer les collectivités aux prises de décisions qui les concernent et de leur permettre de mieux maîtriser leurs dépenses.
J'applique ces principes aux textes que je présente, puisque, dans le cadre de la réforme de la fonction publique territoriale que le groupe UC-UDF a d'ailleurs votée, il est prévu de mettre en place, au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, un collège employeurs qui sera consulté sur toutes les négociations salariales au sein de la fonction publique.
De même, dans le cadre de mes « discussions » avec les sapeurs-pompiers professionnels - je sais que vous y êtes attentif -, j'ai veillé à associer à la fois le président de l'Assemblée des départements de France, M. Claudy Lebreton, et le président de la conférence nationale des SDIS, votre collègue Eric Doligé.
Et c'est parce que nous avons précisément estimé que les collectivités ne maîtrisent pas encore suffisamment leurs dépenses que Nicolas Sarkozy et moi-même avons plaidé auprès de Thierry Breton et de Jean-François Copé en faveur de la reconduction de ce contrat de croissance et de solidarité.
Monsieur de Broissia, je vous remercie de vos propos sur la compensation et le transfert de compétences. Cela souligne la démarche constructive dans laquelle vous veillez à toujours vous inscrire, et c'est pour moi l'occasion de la saluer au sein de cet hémicycle.
Je vous remercie également de vos propos sur la péréquation. Chacun se souvient que c'est sous cette législature qu'elle a été inscrite dans la Constitution. Je partage bien sûr cet objectif, et c'est la raison pour laquelle nous nous sommes battus là aussi pour ce contrat de croissance et de solidarité.
Enfin, je partage votre interrogation bien réelle sur les relations entre l'État, les départements et la sécurité sociale dans le domaine social et médicosocial. §
Dans ce domaine en particulier, nous devrons à l'évidence procéder à des évaluations, et si un acte III doit avoir lieu, je crois, comme vous, que cela doit être un acte de simplification et de lisibilité.
En revanche, monsieur Moreigne, il en va tout autrement de la prestation de compensation du handicap, la PCH.
Dès 2006, 503 millions d'euros s'ajoutent aux 710 millions d'euros que les départements consacraient déjà à l'allocation compensatrice tierce personne, l'ACTP. La Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie permettra donc d'augmenter de 70 % les moyens consacrés à la prise en charge du handicap.
J'ajoute que les départements qui détiennent la majorité des droits dans la commission qui attribue la PCH ne seront pas dans la situation du « payeur aveugle », ce qui est une préoccupation très légitime.
Enfin, rien n'autorise à extrapoler une croissance des bénéficiaires aussi forte que celle de l'APA, car les bénéficiaires de la PCH correspondent pour l'essentiel aux 110 000 bénéficiaires de l'ACTP qui devraient s'accroître d'environ 20 %.
À la différence de l'APA, il faut donc que chacun ait le courage de reconnaître qu'il s'agit d'une réforme la fois maîtrisée et financée.
Monsieur Miquel, je suis étonné que vous ayez mis en cause le Gouvernement sur le financement de l'APA ; vous savez en effet sous quel gouvernement elle a été mise en place, et ce sans aucune compensation...
Ce ne sont que les mesures prises en 2003 par le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin qui ont permis d'en assurer la viabilité financière grâce à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
Cela a permis de maintenir le taux de couverture de l'État d'environ un tiers.
Je suis également étonné que vous ayez reproché au Gouvernement de ne pas avoir procédé à la révision des bases locatives : je vous rappelle que ces dernières remontent à 1971.
Ayez donc une vision plus large des responsabilités sur ce sujet !
Au-delà de la polémique qui est honnêtement assez facile, chacun sait qu'une révision de ces bases ne peut être mise en oeuvre que de manière progressive, par exemple à l'occasion des changements de locataires ou de propriétaires, afin d'éviter les ressauts d'imposition qui seraient bien sûr préjudiciables.
Monsieur Murat, je vous remercie d'avoir reconnu à votre tour l'effort de transparence et de loyauté dans lequel s'inscrit le projet de loi de finances.
Vous avez souligné la nécessité d'améliorer l'information dont disposent les élus, en particulier en matière de fiscalité locale. C'est une préoccupation que le Gouvernement partage, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle Jean-François Copé et moi-même avons souhaité disposer d'un audit de modernisation sur l'information des élus en matière de dégrèvement et d'exonération de la fiscalité locale.
Monsieur Virapoullé, je vous apporterai trois précisions après les réflexions de principe de Jean-François Copé. J'imagine d'ailleurs que nous parlerons plus longuement du FMDI lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative.
Premièrement, les départements d'outre-mer bénéficieront d'une quote-part spécifique qui représentera environ 60 millions d'euros sur les 500 millions d'euros du FMDI.
Deuxièmement, la répartition du FMDI intègre dans tous les cas une part liée à la péréquation. Je sais qu'il s'agissait de l'une de vos préoccupations.
Troisièmement, la Réunion bénéficiera d'une part du FMDI qui, d'après les données actuelles que nous vous communiquerons - cela peut toujours évoluer un peu -, devrait couvrir environ 94 % des dépenses de 2005.
Enfin, plus généralement, vous savez toute l'attention que le Gouvernement porte à la Réunion ; ainsi, par exemple, l'académie de la Réunion bénéficiera à la rentrée de 2007 d'une dotation spécifique correspondant à 138 emplois TOS.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques réflexions que suscitent les interventions qui ont été exprimées avec beaucoup de clarté à l'occasion de ce débat.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.
Nous avons achevé le débat sur les recettes des collectivités territoriales.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq, pour l'examen des articles et des amendements relatifs aux recettes des collectivités territoriales.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt-et-une heures cinquante, sous la présidence de M. Guy Fischer.