Intervention de Michel Moreigne

Réunion du 28 novembre 2006 à 16h00
Loi de finances pour 2007 — Débat sur les recettes des collectivités territoriales

Photo de Michel MoreigneMichel Moreigne :

Les gouvernements successifs ont, en quelque sorte, autorisé la réduction de la solidarité nationale comme peau de chagrin. La péréquation n'existe plus qu'en paroles, n'étant pas traduite réellement dans les faits.

Dans ce contexte, les élus locaux ont pris, quant à eux, leurs responsabilités : ils assument les politiques dont l'État se désengage.

Ainsi, les collectivités locales sont aujourd'hui des acteurs majeurs du développement économique et de la croissance. En 2006, elles devraient contribuer à hauteur de 11 % au produit intérieur brut de la France et assumer à elles seules 70 % de l'investissement public. Elles constituent un levier essentiel de la croissance.

Investies de telles responsabilités, les collectivités locales doivent légitimement pouvoir disposer, s'agissant de leurs ressources, des leviers nécessaires en matière de fiscalité et de concours de l'État pour mettre en oeuvre leurs prérogatives dans les meilleures conditions possibles. Or, la politique du Gouvernement à leur encontre contraint toujours davantage leurs marges de manoeuvres financières.

Rappelons que la réforme de la taxe professionnelle, qui consiste pour l'essentiel à un plafonnement de la taxe versée par les entreprises en fonction de leur valeur ajoutée, aura un coût croissant pour les collectivités locales en raison du mode de compensation choisi. Dès 2007, ne seraient pas compensées des pertes de recettes qui, selon des évaluations divergentes de Dexia et du Gouvernement, seraient comprises entre 466 millions d'euros et 600 millions d'euros.

Les intercommunalités, dont la taxe professionnelle constitue l'essentiel des ressources fiscales, sortiront très affaiblies de cette réforme. Une étude de la DGCL, dont les références sont sans doute bien connues de M. le rapporteur général, souligne d'ailleurs que de nombreux groupements vont faire jouer ou ont déjà fait jouer leur possibilité de mettre en place une fiscalité mixte. Le produit de fiscalité sur les ménages au sein des groupements devrait ainsi augmenter mécaniquement de plus de 15 %.

Les premières réactions des intercommunalités en témoignent. Inéluctablement, cette réforme a des effets inflationnistes sur la fiscalité locale, loin de l'objectif initialement affiché. Les collectivités devront sans nul doute financer cet énorme manque à gagner par une augmentation de leurs taux d'impôts sur les ménages et de taxe professionnelle, car toutes les entreprises ne sont heureusement pas plafonnées. Le passage à la fiscalité mixte sera souvent la règle.

De surcroît, des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour démontrer les effets pervers de la réforme de la taxe professionnelle sur le niveau des recettes fiscales, d'une part, et sur l'emploi, d'autre part. Les sénateurs socialistes, notamment notre ami François Marc, avaient dénoncé l'an dernier ces risques ; le président de la commission des finances en a parlé également tout à l'heure.

L'évasion fiscale est facilitée par le décalage de deux ans ; par ailleurs, pour réduire leur impôt, les entreprises auront intérêt à recourir massivement à l'intérim au lieu de recruter du personnel en contrats à durée indéterminée.

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