Intervention de Cathy Apourceau-Poly

Réunion du 12 juillet 2023 à 15h00
Protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap — Article 4

Photo de Cathy Apourceau-PolyCathy Apourceau-Poly :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 4 juillet dernier, le Sénat a adopté à l'unanimité en première lecture la proposition de loi visant à renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité.

À l'occasion des débats, notre Haute Assemblée avait étendu la protection contre le licenciement du salarié en congé de présence parentale aux périodes de reprise du contrat de travail en cas de congé fractionné.

Nous avions également introduit la possibilité de percevoir une avance sur le versement de l'allocation journalière du proche aidant et ajusté la durée prévue en cas de décès d'un enfant en l'allongeant de cinq à douze jours.

Nous sommes heureux de constater que la commission mixte paritaire réunie le 6 juillet dernier a maintenu ces dispositions dans le texte définitif.

Comme j'avais eu l'occasion de souligner dans la discussion générale, la démultiplication des textes consensuels pour améliorer, tantôt l'accompagnement des familles avec un membre en situation de handicap, tantôt l'accompagnement des parents d'enfants atteints de pathologies graves, vient compenser le renoncement à proposer une véritable loi en faveur de la perte d'autonomie.

Surtout, ces textes viennent compenser la mise à mal des protections collectives grignotées par les réformes du code du travail successives, en particulier la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, dite loi El Khomri, l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail et la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dite loi Pénicaud.

Ces trois textes ont entraîné des reculs suffisamment graves pour contraindre le Gouvernement à rétablir des protections individuelles pour les salariés les plus en difficulté, notamment ceux qui sont confrontés à des événements familiaux et personnels graves.

Cette logique d'individualisation des droits et la casse des protections collectives contribuent à la fragmentation du salariat et au développement des logiques individuelles.

Il faut sortir de ces textes parcellaires qui apportent des protections a minima aux salariés les plus fragiles tandis que les droits collectifs de l'ensemble des travailleurs continuent d'être remis en cause.

Nous avons besoin d'inverser la tendance en faisant du droit du travail un socle de droits tirés vers le haut pour l'ensemble des salariés afin de rétablir une protection collective la plus forte possible.

En 2017, le groupe de recherche pour un autre code du travail (GR-Pact) proposait, notamment, de refondre le droit des congés spéciaux afin d'égaliser les congés maternité et paternité. Actuellement, les grossesses entraînent d'importants effets discriminants indirects à l'encontre des femmes.

La crainte d'un départ en congé maternité constitue un frein important à l'embauche des femmes, particulièrement pour celles qui occupent un niveau de responsabilité élevé, car une certaine continuité et l'ancienneté sont valorisées.

La proposition d'un congé paternité identique au congé maternité visait à mieux répartir les tâches de soins et d'éducation des enfants entre les parents, à effacer les sources de discrimination pour les femmes et à garantir le maintien du salaire pour les deux parents.

L'égalité salariale est par ailleurs indispensable pour ne pas pénaliser les femmes, qui occupent majoritairement le rôle d'aidant familial, par rapport aux hommes.

Enfin, l'enjeu d'une meilleure conciliation entre la vie personnelle et la vie professionnelle pose en creux la question du temps disponible dans notre société.

À ce titre, nous défendons la réduction du temps de travail à trente-deux heures comme une mesure visant non seulement à améliorer les conditions de travail des salariés et à mieux répartir le travail disponible, mais également à libérer du temps pour accompagner ses proches.

Pour l'ensemble de ces raisons, les propositions de lois ciblées sur des situations particulières n'apporteront pas de véritables progrès tant que la question de l'amélioration des règles d'ordre public du code du travail ne sera pas remise sur le métier.

Nous ne sommes pas dupes de la stratégie de l'exécutif de faire adopter des lois consensuelles pour démontrer le bienfait des mesures proposées après avoir agi seul contre tous dans le cadre de la réforme des retraites.

En conclusion, les sénatrices et les sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste voteront en faveur des conclusions de la commission mixte paritaire sur cette proposition de loi, sans complaisance ni aveuglement.

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