Enfin, troisièmement, je souhaite évoquer la question de la frontière entre les finances et les finances sociales. Nous pouvons le faire peut-être en élevant le débat, car il ne s'agit pas d'un conflit de compétence entre deux commissions de notre assemblée.
L'ensemble fortement contraint que constituent les finances sociales doit s'intégrer dans une vision d'ensemble des finances publiques. On peut critiquer les critères de Maastricht et les valeurs qui les sous-tendent, mais ils posent la question au bon niveau : unicité des fonds des prélèvements obligatoires, unicité du déficit budgétaire, unicité de la dette publique.
J'ai toujours regretté que la rédaction de l'article 34 de la Constitution ne permette ni d'engager un débat d'ensemble sur les prélèvements obligatoires ni, surtout, d'envisager une décision financière globale sur les prélèvements obligatoires. En 1979, M. Raymond Barre avait organisé le débat de telle façon qu'il y avait des prélèvements en faveur des collectivités locales sur les impositions de toutes natures, un prélèvement en faveur de l'Europe, et, pendant une année, en 1979, donc, un prélèvement en faveur de la sécurité sociale.
Je suis sûr que, si nous pouvions, un jour, inscrire dans la Constitution que, dans le cadre de la loi de finances, on nous présente une vision globale de l'ensemble des impositions de toutes natures avec une répartition entre l'Etat, les collectivités locales et la sécurité sociale, nous aurions sérieusement progressé.
En attendant, je pense qu'il faudra que nous profitions du débat sur les prélèvements obligatoires pour envisager toutes les questions de conflits de compétence qui, aujourd'hui, peuvent se poser.
Mais nous ne pouvons pas cantonner certains impôts dans la loi de financement de la sécurité sociale, et d'autres dans la loi de finances parce que la Constitution est ainsi faite que les impôts peuvent être inscrits dans l'une ou l'autre ou dans toute autre loi. D'ailleurs, si les mesures d'agencement secondaires peuvent être inscrites dans les lois de finances et de financement de la sécurité sociale, il serait bon que, lorsque nous adoptons de grandes réformes du financement de notre système fiscal, nous puissions disposer d'un projet de loi qui nous permette d'examiner à la fois la réforme de l'impôt sur le revenu et la réforme de la CSG ; si, à l'avenir, nous posons le principe d'une TVA sociale ou si nous développons la CSG pour, en contrepartie, réduire les cotisations, il faudra également que cela puisse être fait dans le cadre d'une loi spécifique. Je ne pense pas qu'il soit possible de le faire dans le cadre étriqué du délai qui nous est imparti pour la discussion des lois de financement de la sécurité sociale ou des lois de finances.
Pour conclure, je dirai que, en matière d'exonération et en cela, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, permettez-moi de ne pas être complètement d'accord avec vous, il n'est pas possible que nous prenions des décisions spécifiques pour le système de financement social dans la mesure où il est financé par des impositions de toutes natures.
Nous avons besoin d'une politique d'ensemble des finances publiques. Cela peut parfois exiger que des mesures soient prises à l'encontre aussi bien de l'Etat que des finances sociales ; je suis personnellement persuadé que, si nous adoptions un principe général de compensation pour la sécurité sociale aussi, à l'image de celui qui existe déjà pour les collectivités locales - je n'en étais d'ailleurs pas le plus ferme partisan -, nous transformerions le simple budget de l'Etat en variable d'ajustement de l'ensemble ; cela ne me paraît pas souhaitable.