Je regrette vivement l'absence de M. Philippe Douste-Blazy, car il vient de déclarer, au cours d'une conférence de presse que tout allait bien ! Tout va très bien, madame la marquise ! Il n'y a pas de problème : les Français ne sont pas mécontents !
Je tenterai, avec mes camarades François Autain et Roland Muzeau, de montrer qu'en réalité il n'en est rien.
Donner « plus de lisibilité, de crédibilité et de sens » à la loi de financement de la sécurité sociale votée chaque année par le Parlement depuis la réforme Juppé de 1996 : tel est, prétendument, l'objectif du projet de loi organique que nous examinons aujourd'hui.
En vérité, on est loin du but affiché puisque ce projet de loi organique ne fait que renforcer la logique d'étatisation de la sécurité sociale ; vous le nierez sans doute, monsieur le secrétaire d'Etat, mais M. Van Roekeghem, directeur de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, a des « super pouvoirs », c'est lui qui dirige tout ! Les nouveaux pouvoirs que ce texte met en place ne vont seulement au Parlement, et celui-ci devra témoigner d'une grande volonté pour le faire vivre réellement.
Sous couvert de donner plus de « crédibilité », ce projet de loi renforce les contraintes liées à l'ONDAM. Ainsi, il prévoit que les sous-objectifs de l'ONDAM seront débattus par le Parlement. Or, je vous le rappelle, la loi portant réforme de l'assurance maladie avait prévu une procédure d'alerte susceptible d'être activée en cours d'année s'il s'avérait que les dépenses dépassait l'ONDAM de plus de 0, 75 %. Pour les hôpitaux, nous y sommes !
Et ce n'est même pas le « proconsul » qui demande la mise en route de ce dispositif d'alerte ! Ce sont ceux qui sont au coeur du problème le demandent !
En somme, la loi organique viendra contraindre encore plus l'ONDAM. Mais que faut-il faire une fois que celui-ci est dépassé ? Faut-il arrêter de donner des soins?
De plus, l'ONDAM pourra désormais comporter des dispositions qui ne sont pas strictement financières, par exemple des dispositions relatives à la gestion du risque ou aux règles d'organisation ou de gestion interne des régimes, alors que, jusqu'à présent, de telles dispositions ont systématiquement été censurées par le Conseil constitutionnel.
Le contrôle parlementaire de la sécurité sociale s'en trouve aussi accru du fait de l'abandon du caractère annuel de l'examen par le Parlement des PLFSS, les projets de loi de financement de la sécurité sociale. Certes, il faut satisfaire à des règles européennes. En effet, dans la continuité de la réforme de l'assurance maladie, la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale va autoriser de fait les lois rectificatives, comme pour les finances publiques.
A cela, il faut ajouter que chaque caisse nationale d'assurance maladie devra désormais transmettre au Parlement et au Gouvernement, avant le 30 juin, ses propositions relatives à l'évolution de ses charges et de ses dépenses pour l'année suivante.
Bref, l'objet de cette réforme n'est que de mettre en place des nouveaux systèmes pour contraindre la dépense publique et la dépense sociale. Mais avec quel succès ?
Les lois rectificatives de la loi de financement de la sécurité sociale existaient déjà en théorie, mais n'ont jamais été utilisées, et, depuis 1996, chaque loi de financement, hormis celle de 1997, a montré que l'ONDAM était un dispositif totalement caduc, qui ne pouvait être respecté.
Prenons l'exemple des dernières lois de financement : l'année 2005 commence mal pour les comptes de l'assurance maladie. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous allez certainement vous faire l'écho des propos que M. Douste-Blazy a tenus lors de sa conférence de presse : à ses yeux, nous sommes sur la bonne pente !
Selon les chiffres provisoires de la Caisse nationale d'assurance maladie, les dépenses du régime général auraient progressé, en janvier 2005, de 5, 8 % par rapport à janvier 2004. A ce train, l'objectif de l'ONDAM, qui avait été fixé à 3, 2 % pour 2005, risque d'être de plus en plus difficile à tenir.